lundi 9 avril 2012

Paul Krugman réclame plus d’inflation


Heureusement que le « prix Nobel » d’économie 2008 a bonne presse. Celui lui permet de remettre en cause toutes les vaches sacrées de l’économiquement correct. Après le libre échange et l’euro, il vient d’affirmer qu’il n’y a pas assez d’inflation sur son blog.

Pas assez d’inflation

Ce qui fait plaisir, c’est que le statut d’homme progressiste de Paul Krugman et l’aura de sérieux de son « prix Nobel » font que même les médias hostiles aux idées alternatives développent malgré tout sa pensée. C’est ainsi que le Monde a fait un papier reprenant les idées avancées par Paul Krugman sur son blog. Quel plaisir de lire un tel papier dans un quotidien, qui, s’il reste encore de référence, est beaucoup trop politiquement correct sur de nombreux sujets.

Le Monde cite Paul Krugman pour qui « nous irions beaucoup mieux si la Réserve Fédérale se préoccupait moins de l’inflation et plus de l’emploi » et « depuis au moins trois ans, les économistes de droite, les experts et les politiciens nous ont avertis que l’inflation pouvait débouler du coin de la rue et ils ont eu tort (…) Finalement, l’inflation se situe une fois de plus un peu en dessous de la cible, choisie par la Fed, des 2% d’inflation ». Pour lui, le pays est loin du plein emploi.

Il affirme que « certains voudraient appuyer à fond sur le frein alors qu’il faudrait au contraire mettre plein gaz ». Provoquant, il reconnaît que cela pourrait faire augmenter l’inflation à 3 ou 4%, « mais, est-ce que ce serait vraiment un drame ? Au contraire, cela aiderait presque certainement l’économie ». Pour lui, cela allègerait les dettes de tous les acteurs économiques, qui en ont besoin, et pousserait les entreprises à investir plutôt que de voir fondre leurs réserves.

Une pensée alternative

Cela fait depuis plus de trois ans que le « prix Nobel » d’économie plaide pour des mesures hétérodoxes de sortie de crise et il a été en bonne partie suivi, que ce soit sur l’énorme déficit budgétaire des Etats-Unis ou la politique de Quantitative Easing de la Fed. Cela a permis à son pays de sortir de la crise (3% de croissance au dernier trimestre 2011) quand la zone euro, qui a eu la bêtise d’appuyer sur les freins n’importe comment est retombée en récession.

Paul Krugman rejoint souvent son collègue Joseph Stiglitz pour dénoncer les politiques absurdes menées dans la zone euro et souligner à quel point nos pays n’auraient sans doute pas du sortir de cette monnaie unique. Depuis deux ans, ils ont adopté une attitude de plus en plus critique allant jusqu’à dire au mois d’octobre, en pleine crise financière que « l’Europe se porterait sans doute mieux si l’euro s’écroulait plutôt aujourd’hui que demain ».

Plus globalement, cette réflexion sur l’inflation est très intéressante. Les objectifs de 2% semblent aujourd’hui néfastes à l’activité et à l’emploi. Même le FMI il y a deux ans, par la voix d’Olivier Blanchard, avait exprimé la possibilité de passer à des objectifs moins drastiques. Il proposait de viser 4% et un autre économiste soulignait que cela valait le coup si cela permettait de réduire le chômage notamment. Le cap des 2% n’a aucune validité scientifique.

Encore une fois, merci à Paul Krugman d’aller contre les idées reçues des néolibéraux et véhiculées par l’UMP, le PS ou le Modem. 2% d’inflation seulement est un objectif contestable, tout comme une monnaie unique pour des pays aussi différents que ceux de la zone euro

5 commentaires:

  1. Arthur Antunes Coimbra9 avril 2012 à 11:12

    @LP,

    La grande erreur politique de ces trente dernières années c'est de disqualifier un économiste en désignant comme vérité les thèses de celui qui s'oppose à ce dernier.

    L'économisme est une des erreurs majeures de nos "élites".

    L'économie est une donnée politique secondaire. Il ne s'agit pas de dire que cela ne compte pas, mais que ce n'est pas l'essence du politique.

    La liberté verra ses conditions de ré-émergence réunies quand la langue politique sera expurgée des concepts et références économiques qui ne font qu'encombrer et déterminer par avance nos solutions dites préférables.

    Ce blanc seing donné à l'économie, à l'économie politique et à ses grands gourous, est un symptôme de la perte du pouvoir politique et de son transfert partiel aux experts.

    Une société d'experts est une société d'adolescents politiques - d'adolescents en général pour cette triste génération bourgeoise de 68 - refusant d'assumer son destin politique. La génération 68 est une génération adolescente qui a la passion des experts et des coachs.

    Les experts économiques - toutes tendances confondues - n'ont fait qu'accumuler les âneries depuis des siècles ; il est sûr que les lois de la statistiques finissent toujours par qualifier un individu en phase avec le déroulement des faits : statistiques, coup de bol, rien d'autre.

    Remettons l'économie à sa place ; remettons l'économie politique à sa place, une place seconde, secondaire, face à la geste politique.

    En envisageant le fait politique d'abord par le filtre économique vous commettez une erreur majeure quant à ce qu'est la politique.

    Pour De Gaulle, politique de premier ordre, l'économie n'est jamais que l'intendance.

    Il faudrait s'en souvenir, c'est cela aussi le Gaullisme, un juste sens des vrais grandeurs et des vraies proportions.

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    1. je suis assez d'accord avec cette analyse sur l’économie qui n'est finalement qu'un outil a prendre quelquefois avec des pincettes comme la mécanique quantique

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  2. Le commentaire qui suis l'article du Monde, celui de "Frateco Tutmonda" est assez intéressant. Un minimum d'inflation pousse a depenser la monnaie. Il y'a plus d'echanges marchands et donc fait travailler plus de monde.
    Une monnaie qui garde éternellement sa valeur est un fantasme de rentier qui n'a rien a faire du fonctionnement réel de l’économie. "Après moi le deluge tant que je me suis bien gavé".

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    1. Principe de la "monnaie fondante" de Gesell.
      Mais justement, le but de la société est-il de toujours dépenser plus et plus vite (surtout dans l'état écologique dans lequel nous nous trouvons ) ?

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  3. pour tous ceux qui ont à rembourser quelque-chose, une vraie inflation à 4-5% (avec suivi des salaires) serait une bénédiction, depuis les états jusqu'aux particuliers.
    la crispation des allemands sur le sujet relève de la psychologie.

    même pour les "rentiers", une inflation ne serait pas un problème du tout: de nos jours toute gestion de patrimoine est un jeu d'investissements et de retours. les retours seront de fait indexés tandis que les emprunts s'estomperont.

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