vendredi 21 septembre 2012

Et si les OGM étaient dangereux ?


Cela fait bientôt quatre ans et demi que Monsanto essaie d’imposer la commercialisation de ses maïs transgéniques en France. Devant l’opposition des gouvernements, la multinationale utilise toutes les ficelles mises à disposition par l’Europe. Mais une récente étude pourrait bien lui couper les ailes.

Une étude extrêmement inquiétante

Il faut être honnête : il est difficile d’y voir clair parmi les études contradictoires sur la toxicité supposée des OGM Monsanto quand on n’est pas scientifique. Cela est d’autant plus compliqué que celles qui concluent à l’absence de danger sont souvent financées par les entreprises qui commercialisent les semences, ce qui pose un évident problème de confit d’intérêts. Du coup, la publication d’une étude conduite par un biologiste de l’université de Caen a fait l’effet d’une bombe.

Comme le souligne Le Monde, le protocole de cette étude est très ambitieux puisqu’il concerne plus de 200 rats sur deux ans (bien plus que les autres études) avec un budget de 3 millions d’euros, financé par plusieurs organismes (Etat, association de distributeurs, mais aussi une association qui milite contre les biotechnologies). Les rats ont reçus un régime alimentaire composé de trois doses différentes d’un maïs transgénique Monsanto, associé ou non avec l’usage du Round Up.

Alors que « 30% des mâles et 20% des femelles du groupe témoin sont morts spontanément (une fois la période moyenne de survie écoulée), jusqu’à 50% des mâles et 70% des femelles sont morts dans des groupes nourris avec l’OGM ». Il n’y a pas de différence en fonction de la part d’OGM dans le régime alimentaire. En fait, les OGM auraient perturbé le système hormonal des animaux et entrainé la modification d’une enzyme impliquée dans la protection contre le cancer.

L’urgence du principe de précaution

De manière atypique, l’auteur de l’étude s’est engagé à fournir toutes les données brutes de manière à permettre à d’autres scientifiques d’analyser ces résultats. Même si nous manquons un peu de recul sur cette étude, Le Monde souligne qu’elle est « publiée dans une revue importante, ne publiant qu’après une relecture par les pairs, c’est-à-dire une expertise technique sur les résultats présentés ». Bref, l’inocuité des OGM a sérieusement du plomb dans l’aile.

L’auteur de l’étude accordé une interview tonique au Nouvel Observateur où il se demande pourquoi nous laissons faire : « inconscience ? Négligence ? Lâcheté ? Collusion avec le monde industriel ? ». En tout cas, cette étude a le mérite de démontrer qu’il convient sans aucun doute d’être beaucoup plus prudent à l’égard des OGM et d’imposer un vrai principe de précaution, sans quoi on risque d’autoriser la commercialisation de produits dont on découvrira plus tard qu’ils sont toxiques.

A ce titre, il est dommage de ne pas avoir rappeler le rôle de l’Europe, qui essaie en permanence d’imposer la commercialisation des OGM, que ce soit la Commission ou de la Cour Européenne de Justice, contre l’avis des gouvernements et de la population, profitant des règles byzantines et anti-démocratiques de l’Union Européenne. Bref, cette Europe défend bien plus certains intérêts particuliers qu’elle ne semble se soucier de la santé des peuples qui la composent.

Comme je l’écrivais en 2008, il ne s’agit pas de tout interdire car la recherche est porteuse de progrès. Mais cette recherche doit se faire dans de bonnes conditions de sécurité et il est encore plus essentiel de ne pas prendre de décisions hâtives concernant la commercialisation.

26 commentaires:

  1. Restons très prudents. L'étude de Gilles-Éric Séralini fait l'objet d'un accueil réservé au sein de la communauté scientifique, pour des motifs semble-t-il assez sérieux.

    Par exemple :

    http://www.lepoint.fr/science/ogm-une-etude-au-dessus-de-tout-soupcon-20-09-2012-1508433_25.php

    http://www.sciencepresse.qc.ca/actualite/2012/09/20/letude-anti-ogm-syndrome-recherche-unique

    YPB

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    1. mouais les critiques émises dans "le point" sont assez partiales :
      - les sprage dewley sont je pense la souche la plus utilisée en labo,
      - logiquement les doses de nourriture sont relativement calibrées,
      - l'absence d'effet dose est assez facile a expliquer (dose a saturation),
      etc... bref des critiques plutôt classiques...

      là où je ne suis pas du tout d'accord, c'est lorsqu'ils disent "20 rats c'est pas suffisant" (!) alors que la théorie montre que les résultats peuvent commencer a être significatifs a partir de 5, raison pour laquelle la plupart des labos utilisent de 5 a 10 sujets, 20 est une sécurité...
      des statisticiens plancheraient même sur des conditions expérimentales significatives avec n=1 ...

      Age

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  2. Ou encore :

    http://sante.lefigaro.fr/actualite/2012/09/20/19097-letude-sur-ogm-fortement-contestee

    YPB

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  3. Oui, il semble qu'il vaut mieux attendre les réactions des autres scientifiques :
    http://www.atlantico.fr/decryptage/rats-cancers-ogm-terrifiant-pas-concluant-scientifiquement-sylvie-berthier-487579.html

    Plus généralement, le mode de diffusion de l'information scientifique est parfois critiqué dans les médias :

    - on voit par exemple passer des communiqués sur le caractère néfaste du café pour la santé, suivi peu après par d'autres communiqués sur son caractère positif pour la santé...

    - sur un autre sujet, voici un article du journaliste scientifique de Libération, sur un autre sujet :
    http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2012/09/fukushima-la-d%C3%A9sinformation-continue.html

    - et une réflexion plus générale sur le fonctionnement des médias dans la diffusion de l'information scientifique :
    http://www.manicore.com/documentation/serre/journalistes.html

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  4. Cette étude ne semble pas sérieuse. Ce qui surprend, c'est qu'elle ait reçu un tel écho médiatique.

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  5. @ YPB

    Merci pour ces liens. J'avais vu le papier du Figaro, mais le papier du Monde indiquait bien que le niveau de consommation n'était pas très important, donc pré-emptait cette critique. Ensuite, le papier du Figaro parle du financement par une association anti-OGM mais ne précise pas qu'elle n'a contribué qu'à une faible part.

    En outre, on peut toujours se demander si toutes les critiques ne sont pas issues de scientifiques qui travaillent un peu pour Monsanto ou des entreprises proches. Il n'y a aucune indication des liens. Du coup, je trouve que l'étude semble plus transparente que ses critiques.

    Enfin, le Monde indique qu'il s'agit d'une étude sérieuse publiée dans une revue sérieuse avec un mode de relecture sérieux.

    Je vais lire les autres papiers cependant.

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    1. Je pense que cette étude est sérieuse au sens où il ne s'agit pas de grossier charlatanisme. Mais certains biais méthodologiques peuvent invalider les conclusions d'une étude apparemment rigoureuse. Quant aux revues à comité de lecture, elles ne sont pas toutes comparables : le comité de lecture peut parfois être bien restreint, et il suffit parfois de présenter ses données statistiques sous une forme un peu opaque pour dissimuler les faiblesses d'une étude. C'est une des critiques faites ici (avec reproduction d'un extrait de la présentation des procédures statistiques) : http://michaelgrayer.posterous.com/in-which-i-blow-a-gasket-and-get-very-uppity

      Ce n'est pas la première fois que les méthodes d'analyse statistiques de Séralini sont mises en cause : http://www.efsa.europa.eu/en/press/news/gmo070628.htm (à propos d'une étude de 2007).

      Par ailleurs, même si Food and Chemical Toxicology est une revue de bonne réputation, c'est loin d'être une référence de premier plan. Certains observateurs se montrent perplexe devant ce choix, au vu de l'importance de la publication.

      Ces remarques ne m'empêchent pas d'être très méfiant à l'égard des OGM et des grands intérêts industriels qui cherchent coûte que coûte à les imposer. Il faut à l'évidence aller plus loin dans les recherches sur les dangers potentiels des OGM. Attirer l'attention sur l'étude des chercheurs français est donc parfaitement légitime. Il convient simplement le faire avec prudence.

      YPB

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    2. « se montrent perplexes » évidemment…

      YPB

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  6. C'est très louche cette affaire :

    "Même pour la découverte de l’ADN, on n’a pas eu une telle campagne! On donne l’article aux journalistes avant de le donner aux scientifiques, on prépare un film, un livre, une émission à la télévision… C’est du show, pas de la science!"

    http://www.lejdd.fr/Societe/Actualite/Etude-sur-les-OGM-C-est-du-show-pas-de-la-science-558178

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    1. Ben je trouve l'argument spécieux : la découverte de l'ADN n'avait alors pas d'impact direct sur la santé ...

      c'est un peu comme la découverte de l'uranium et l'utilisation de la bombe atomique...

      Age

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  7. il faut aussi connaitre un peu la "communauté" scientifique qui n'a rien d'un monde de chaisières mais plutôt de voyous prêt a tout pour des hochets des gamins ou mieux du pognon, Seralini va en prendre plein la tête avec la puissance financière de monsanto qui permet d'acheter toutes les consciences, cela me fait penser au rapport Auribault de 1905 sur l'amiante produit inoffensif bien connu

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    1. Le rapport Auribault est disponible ici :

      http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/amiante_1905.pdf

      Il décrit, à partir de la page 5, les risques de l'amiante liés à l'irritation des poumons (pneumoconiose ou phtisie), et il propose comme remède la captation des poussières d'amiante.

      ***

      Le rapport du Sénat sur le scandale de l'amiante :

      http://www.senat.fr/rap/r05-037-1/r05-037-1.html

      indique que ce produit peut agir sur la santé de différentes manières : la pneumoconiose (ou asbestose) et le cancer (mésothéliome).

      Il précise que ces divers risques étaient bien connus dés 1965 :
      http://www.senat.fr/rap/r05-037-1/r05-037-18.html
      "Au cours de son audition, le professeur Got rappelait que « la connaissance sur le risque est bonne depuis environ 40 ans, que les moyens à mettre en oeuvre sont décrits, que l'insuffisance d'une sécurité fixée par le taux de fibres dans l'air est reconnue et exprimée dès 1965 ». Il a ainsi souligné la discordance complète entre le risque documenté et l'attitude qui pouvait exister dans les entreprises, dans les pratiques professionnelles, pour essayer de réduire ce risque. Il y avait, selon lui, une acceptation du risque liée à une sous-estimation considérable de son intensité."

      ***

      Le rapport Auribault mentionne donc une partie seulement du danger liés à ce produit (la pneumoconiose/asbestose).

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  8. Je n'arrête pas de voir des billets sur les dangers que représentent les OGM, c'est vraiment inquiétant, comment peut-on fermer les yeux face à un tel poison?
    Manon

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  9. Ce qui me laisse pantois, c'est qu'une étude portant sur 200 rats soit considérée comme ambitieuse. La santé de dizaines de millions d'être humains repose sur quoi, d'habitude ? Sur 50 rats ?

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    1. Non seulement elle repose d'habitude sur 50 rats, mais en plus sur une expérimentation de 3 mois. Dans la présente étude, l'expérimentation a duré 2 ans, soit la durée de vie du rat, ce qui me parait bien la moindre des choses. On se fout de notre gueule, et Monsanto la première (voir http://www.artevod.com/mondeselonmonsanto)

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  10. Les "études" et critiques contre cette étude sont évidemment des contre-attaques de la multinationale, des scientifiques mouillés jusqu'au coup, des journalistes et des politiques complices. Ils vont essayé de descendre en flêche cette étude. Trop tard, le mal est fait ^^ les gens, en tout cas en France, sont à la base anti-OGM alors maintenant... Tant mieux. Personnellement, même si on me garantissait que les OGM ne sont pas dangereux je les interdirais, modifier la nature, donner le monopole des graines à des multinationales, obliger les paysans à en racheter après chaques récoltes... non merci. Ce n'est pas les OGM qui arrêteront la faim dans le monde, c'est le développement.

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  11. @ YPB

    Il me tarde de voir ce que les études européennes qui vont analyser les résultats de cette étude vont dire, et comment les scientifiques vont se prononcer avec un peu de recul. Ce qui est toujours délicat, c'est de savoir si les personnes s'expriment de manière objective ou pas. C'est une chose qui m'a gêné dans le papier du Figaro par rapport à celui du Monde. Le Monde notait les limites de l'étude (financement partiel par une association anti-OGM, pas d'augmentation des maladies en fonction de la quantité) mais semblait conclure qu'elle avait du sens. Cette mesure me donne plus confiance que le papier du Figaro qui ne va que dans un sens et qui pourrait être une commande de Monsanto.

    Du coup, principe de précaution.

    @ Olaf

    C'est juste. Où est la vérité ? Le risque potentiel me semble pousser à la prudence.

    @ Manon

    C'est juste

    @ Flo DLR

    Il est très juste de préciser qu'il y a en plus la privatisation de la nature et que Monsanto gagne des montagnes d'argent avec ses OGM, comme je l'avais souligné dans un papier précédent (en lien).

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    1. Je suis confronté quotidiennement à des gens qui ne comprennent rien à la technique, aux sciences, aux statistiques... Je dois me les coltiner en permanence pour expliquer. Je ne suis ni pour ni contre les ogm, je postule qu'ils doivent être soumis à des tests solides, ni plus, ni moins. Toutes les espèces végétales actuelles ont subit des modifications génétiques de par la sélection naturelle ou humaine, ou cosmique par les rayons gammas que personne ne peut interdire, car ils font partie du cosmos.

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    2. http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2012/09/ogm-seralini-et-le-d%C3%A9bat-public.html

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    3. Je vous recommande cette vidéo d'un universitaire en biologie moléculaire Christian Velot qui nous explique clairement ce qu'est un OGM et pourquoi il est contre leur culture en plein champ :
      http://video.google.com/videoplay?docid=-875413616197118497

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  12. Il faut surtout arrêter de penser que les universitaires sont des purs esprits œuvrant pour le bien commun ils fonctionnent pour le pouvoir le sexe et l'argent comme tout le monde la seule chose qui compte c'est ce que la Nation décide le reste est accessoire

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    1. Tout à fait d'accord, d'ailleurs il donne son opinion et le nom des scientifiques qui pense le contraire de lui. Ce qui est important pour lui c'est que le citoyen puisse comprenne bien ce qu'est un OGM la différence par rapport à un hybride les risques potentiels. Pour lui un citoyen avec un minimum de culture scientifique peut comprendre les enjeux et ce faire une opinion par lui même.

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  13. Le problème n'est pas de savoir si les OGM présentent des risques ! Tout ce que fait l'homme est risqué. la question politique est quel niveau de risque acceptons-nous ?

    D'un côté il y a peut-être un risque accru de cancers, de l'autre il y a en balance une productivité accrue des terres agricoles.

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  14. Un article du journaliste scientifique de Libération :

    http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2012/10/ogm-s%C3%A9ralini-un-appel-%C3%A0-un-d%C3%A9bat-raisonn%C3%A9.html

    donne d'autres liens sur ce sujet.

    Notamment, des remarques généralisables sur l'organisation de l'expertise :

    http://www.agrobiosciences.org/IMG/pdf/OGM_Godard.pdf

    et, sur le cas particulier de l'étude :
    http://www.cnrs.fr/fr/une/actus/2012/20120927-debat-ogm.html
    http://www.math.u-psud.fr/~lavielle/NK603D_lavielle.html

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  15. Un article du journaliste scientifique de Libération donne d'autres liens sur ce sujet.

    Notamment, des remarques généralisables sur l'organisation de l'expertise :

    http://www.agrobiosciences.org/IMG/pdf/OGM_Godard.pdf

    qui est ce qui concerne le plus les hommes politiques, et éventuellement la 'société civile'.

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  16. http://www.marianne2.fr/OGM-l-Allemagne-recale-l-etude-Seralini_a223146.html

    OGM : l’Allemagne recale l’étude Séralini

    http://actu.orange.fr/une/etude-choc-sur-les-ogm-l-autorite-europeenne-demande-davantage-d-informations-afp_1110996.html

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