samedi 17 novembre 2012

Nouvelle crise de francophobie à The Economist


La nouvelle couverture du The Economist de la semaine a beaucoup fait parler hier. Pour l’hebdomadaire néolibéral britannique, « la France est la bombe à retardement de l’Europe ». Un nouveau dossier qui ne fait pas honneur au journal, qui tombe dans la caricature totalement outrancière.



L’enfer français

Sur 15 pages, s’étalent des diatribes anti-françaises aussi caricaturales que les interventions de Sophie Pedder sur les plateaux télévisés. Bien sûr, quelques atouts sont évoqués et il faut bien reconnaître que tout ne va pas bien en France, loin de là, mais l’ensemble du dossier est d’un parti-pris absolument incroyable. The Economist pousse le bouchon jusqu’à dire que la France pourrait être demain le point faible de la zone euro, à la place de l’Italie ou l’Espagne. Un simple regard à leurs indicateurs économiques hebdomadaires démontre qu’une telle idée est totalement absurde.

Si une partie du constat est juste, une autre est totalement excessive : « les nouvelles entreprises sont rares », « les entrepreneurs en devenir quittent le pays », « les investisseurs sont indulgents avec la France », nous penserions être « le pic de la civilisation ». The Economist critique le manque de start up alors que notre pays compte trois des plus importantes à l’échelle européenne (Priceminister, Vente privée et Meetic). Paris ne serait plus « ce qu’elle était », dépassée par Londres, Milan ou Barcelone. Marseille est comparé à Rio pour la violence et Marrakech pour la population

Ils citent une femme d’affaire pour qui « aujourd’hui, les riches sont stigmatisés comme les juifs l’étaient il y a 70 ans ». Comment un journal un tant soit peu sérieux peut publier une phrase aussi outrancière ! C’est une véritable insulte à l’intelligence mais aussi aux Français qui ont été déportés. Il est aussi dommage pour la démonstration que les dernières statistiques du PIB démontrent une certaine résistance de notre économie (malgré de vrais problèmes). De même, le dossier semble avoir été écrit avant la publication du rapport Gallois, comme si le gouvernement l’avait presque ignoré.

Pourquoi tant de parti-pris ?

Ce n’est pas la première fois que The Economist attaque notre pays. Pendant la campagne présidentielle, l’hebdomadaire avait parlé du « déni français » avant  de qualifier le bien peu révolutionnaire François Hollande de « dangereux ». Bien sûr, le dossier et sa synthèse sont un peu plus équilibrés que la une outrancière, dont l’objectif est sans doute surtout de vendre du papier, mais au global, The Economist oublie sa rigueur et tombe dans la facilité pour critiquer notre pays.

En fait, ce que The Economist reproche à la France, c’est de ne pas être sur la même ligne politique. Comme il le souligne, notre pays a une méfiance caractéristique vis-à-vis du capitalisme. Nous dépensons trop (ce qui n’est sans doute pas totalement faux) et même nos hommes politiques de droite ne sont pas de vrais libéraux : Bruno Le Maire repart habillé pour l’hiver pour son protectionnisme agricole, ce qui a le don de le rendre sympathique. Il nous conseille même de reconstruire un secteur financier plus important. Sans doute une proposition ironique, après la crise de 2008…

The Economist devrait aussi balayer devant sa porte. La Grande-Bretagne a davantage augmenté ses dépenses publiques que la France depuis 1999. Londres affiche un déficit de 8,4% du PIB cette année (plus que l’Espagne ou la Grèce, contre 4,5% en France) et ne doit qu’à la planche à billets de sa banque centrale (375 milliards de livres de monétisation en à peine 4 ans !) de ne pas être dans la position de la Grèce pour Philippe Béchade. En outre, il est surprenant de vanter le modèle allemand, non réplicable, et que The Economist avait longtemps qualifié de pays malade de l’Europe.

Par-delà les limites des raisonnements néolibéraux (si tout le monde baisse ses salaires, l’économie ne va pas aller mieux), The Economist, mieux inspiré d’habitude, se décrédibilise avec ce dossier, qui est moins une analyse qu’une diatribe politique digne d’un politicien démagogue peu rigoureux.

14 commentaires:

  1. Bonjour à tous

    Le pire c'est que ces gens (la secte des neolibéraux) a entre les mains tous les leviers: finance, politique, médias.
    Ce qui est reproché, ce sont les acquis sociaux des gens obtenus de longue lutte, c'est pour cela que je suis de gauche sans appartenance à un parti, surtout pas le PS.
    Ces gens ont besoin d'une régression sociale pour prospérer. Ce que Naomi Klein écrivait "la stratégie du choc" se réalise au niveau de l'UE.

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  2. Mouais, bof...
    Les gens comprennent mieux pourquoi on surnomme ce pays La Perfide Albion :-)!
    Je ne prends jamais The Economist au sérieux: ils sont au libéralisme ce qu'était la Pravda au marxisme-léninisme avant la Perestroïska. C'est dire à quel point ils sont dogmatiques!
    Toutes les difficultés qu'ils évoquent sont connues, mais leur détestation de la France les égarent. A les lire, on a l'impression d'être revenus deux siècles en arrière, quand les Anglais faisaient de la propagande anti-révolutionnaire puis anti-napoléonienne.

    A vrai dire, j'ai une hypothèse sur ce prurit anti-français: depuis quelques années (deux ou trois ans environ), l'activité financière quitte la City pour émigrer en extrême-orient, vu l'émergence de la Chine. Ca signifie que le coeur même de la politique britannique de ces 50 dernières années est atteint, et ils commencent à paniquer! Or que fait tout bon Anglais quand il doit se rassurer? Il tape sur les Français :-)! Je pense que c'est plutôt du côté de cette exode financier que The Economist devrait enquêter...

    CVT

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  3. Écrire sur ce genre de canard c'est quand même avoir du temps a perdre

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  4. @ Patrice,

    Vu le bruit fait par le dossier, ce n'est pas un mal de répondre.

    @ CVT

    Souvent, ils sont très intéressants et donnent des éléments qui servent à critiquer le néolibéralisme. Bien vu sur la panique !

    @ André

    Très juste. Ils veulent remettre en cause tous les acquis sociaux.

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  5. En parler ou ecrire sur , en bien ou mal , c'est faire de la réclame pour le produit en question

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  6. Il font d'assez bonnes études, même si on peut ne pas être d'accord avec tout. Ceci dit les français sont un peu susceptibles, il y a une part de satyre qui est pourtant acceptée quand il s'agit des religions, donc pourquoi pas vis à vis d'un pays.

    En revanche, il devraient faire de même avec les autres pays, y compris l'Allemagne. C'est une façon de prendre du recul utile
    quand la situation est mauvaise. D'autre part, il parait très
    probable que la France sera la grosse goutte d'eau qui fera calancher l'Euro, car de par la taille de son économie, la BCE ne pourra rien faire. Par ailleurs, d'autres études que devrait citer ce journal disent que ce serait un défaut grec qui aurait des conséquences tsunamiques pour l'économie mondiale.

    Finalement personne ne sait comment ça va se dénouer, par quel bout, c'est le suspens... En tout cas, il va y avoir de la casse, car la zone Euro est un canard sans tête qui court sans savoir ou il va, vers la marre, contre un poteau...?

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    1. Un canard sans tête court vers la mort. Quant à The Economist, il se positionne dans la tradition de la Grande-Bretagne, pays des libéraux et des tabloïds.

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  7. D'un autre côté, la réplique de gouvernement par Najat VB, est assez ridicule, soit elle ne comprend rien, ce qui est assez probable vu qu'elle se prend les pieds dans le tapis sur tous les sujets qu'elle aborde, soit elle prend les gens pour des idiots.

    Cette décervelée veut faire croire que les bas taux obligataires actuels prouvent la bonne santé économique et sociale française. On croit rêver...

    D'ailleurs, je vois pas bien pourquoi une juriste du gouvernement devrait s'exprimer sur des sujets économiques, quelle est son expérience ou diplômes pour s'exprimer officiellement sur ce sujet ? Ce qui montre un certain degré de cacophonie gouvernementale où n'importe qui parle de n'importe quoi.

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  8. Dans le même ordre d'idées sur la compétence de ceux qui font partie du gouvernement, j'ai entendu Ayrault parler allemand, ben pour un prof d'Allemand c'est assez faiblard. C'était prétendument un de ses atouts pour négocier avec l'Allemagne, mais je crois qu'il ferait bien d'embaucher un interprète, sinon les incidents diplomatiques suite à quelques malentendus linguistiques risquent d'arriver.

    Il a du vocabulaire, mais la prononciation est gloubiboulga, avec même des mots anglais par ci par là, du Franco-Dinglish. Ca fait un peu couillon quand même. Il devrait reprendre des cours...

    Durch, il dit douche, par exemple, au lieu de dour, c'est pourtant la base de l'allemand la prononciation du ch selon la voyelle précédente.

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    1. Ca ne m'étonne guère, pour Ayrault. De toute façon, pour trouver quelqu'un qui parle allemand correctement (ou allemand tout court) en France, ça va être de plus en plus difficile...

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  9. "Tout ce qui est excessif ne compte pas" telle une maxime attribuée à Talleyrand. Il faut bien vendre du papier comme leurs confrères français comme "le Point, L'Express et le Nouvel Observateur" qui aiment aussi dénigrer leur pays. En ce qui concerne "The Ecomonist" il faut croire que le "french bashing" rapporte bien ou est une pose bien britannique.

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  10. La Grande-Bretagne a comme les pays en difficulté de la zone euro tournée aujourd’hui sa politique vers l'austérité pour faire face à ses problèmes de déficit. Ça marche mieux pour elle en terme de taux de chômage (7,8%) :

    http://www.lepoint.fr/bourse/gb-repli-du-taux-de-chomage-en-septembre-mais-signes-de-faiblesse-14-11-2012-1528837_81.php

    Qu'en Grèce ou en Espagne car la Grande-Bretagne à la chance de se trouver du bon côté de la barrière, c'est à dire hors de la zone euro. Même si sa situation est peu reluisante, elle limite les dégâts qui auraient été considérables, pour elle, si elle était entrée dans l'Euro. En fait elle serait dans la situation de la Grèce ou de l'Espagne.Les pays en difficulté de la zone euro qui ne peuvent pas accompagner leur politique d'austérité par des « quantitative easing » massifs de leur banque centrale sont, eux, directement concernés par le problème du multiplicateur budgétaire des politiques d'austérité, qui va compliquer la tâche de la France si elle se met comme ses voisins de la zone euro à faire un choc sévère de compétitivité, ce que « The Economist » lui suggère de faire je suppose.

    http://m.lesechos.fr/france/l-impact-recessif-des-plans-antideficit-a-ete-sous-estime-0202320965096.htm

    http://cib.natixis.com/flushdoc.aspx?id=67005

    Saul





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  11. Patrice,

    Oui, mais la publicité est déjà faite et la plupart des médias relaient de manière très peu distanciée ce que The Economist raconte. Il n’est donc pas un mal de démonter leur raisonnement et attaquer les faiblesses de leur raisonnement, ce que pas grand monde a fait. Qui a lu le dossier dans sa totalité ?

    Olaf

    Je suis d’accord. Tout n’est pas à jetter dans The Economist. C’est bien pour cela que je m’astreins à sa lecture hebdomadaire depuis si longtemps. La crise n’atteindra jamais la France car, en atteignant l’Espagne ou l’Italie (qui viendront avant), elle sonnera le glas de cette aventure monétaire hasardeuse et artificielle qu’est l’euro. Sur la restructuration de la dette grecque, il ne me semble pas. Au contraire, ils plaident depuis très longtemps en sa faveur.

    Il y a quelque chose d’assez incroyable à ce que des « socialistes » brandissent le jugement des marchés comme validation de la pertinence de leur politique. Ils devraient plutôt faire attention à l’évolution du chômage, du pouvoir d’achat ou des inégalités. La politique de la France ne se faisait pas à la corbeille du temps du Général.

    Possible qu’il n’enseigne plus depuis assez longtemps. Pouvait-il être maire de Nantes, député et professeur d’allemand en même temps…

    JYB

    Bien d’accord.

    Cording

    Bien d’accord également

    Saul

    Clairement, la Grande-Bretagne bénéficie du fait d’être en dehors de la zone euro, ce qui lui permet à la fois de jouer sur la valeur de sa monnaie et sur le fait que sa banque centrale peut monétiser des sommes importantes.

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  12. Les Anglo-Saxons ont toujours détesté ceux qui sont différents d'eux, en particulier les Français. Ce qui est triste c'est l'admiration que leur portent nos élites qui voudraient que nous parlions anglais et que nous adoptions le mode de vie anglo-saxon. L'urgent serait de "désaméraméricaniser" la France. L'indépendance économique et politique passera d'abord par l'indépendance culturelle.

    Antoine

    http://lebondosage.over-blog.fr/article-reapprendre-a-vivre-sans-l-amerique-109839434.html

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