Billet invité du blog actualité
A
l’occasion de la sortie du premier sondage concernant les élections européennes
du 25 mai prochain, j’ai jugé utile de faire un petit article pour rappeler
l’éminence de ces élections qui mobilisent trop peu l’électorat français (et
même européen). C’est une erreur et cela en arrange beaucoup trop : ces
élections sont très importantes dans le sens où l’Union Européenne dispose de
beaucoup de pouvoir et d’une influence de plus en plus grande sur la politique
nationale de chaque Etat. La politique menée à l’échelle Européenne conditionne
en bonne partie ce qui se fait à l’échelle nationale. Certes, l’Union
Européenne ne se limite pas au parlement européen (il y a aussi et surtout la
Commission Européenne), mais cette instance est la seule démocratiquement élue
au niveau européen. Il faut donc en profiter pour en faire un véritable espace
de débat sur le projet européen et ne pas la laisser être une simple chambre
d’enregistrement des décisions de la commission.
Dans
quel contexte se déroulent ces élections ? Quels en sont les grands
enjeux ? Qui peut tirer son épingle du jeu ?
Dernier sondage Opinion way
De
ces 14 chiffres, ressortons trois enseignements :
-La
sanction qui pourrait être infligée au Parti Socialiste : le parti de la
majorité ne recueille pour le moment que 17 pour cent des intentions de vote.
Sans doute le fruit d’une défiance ce à l’égard de la politique du gouvernement et du président
actuels. Ainsi, le Parti Socialiste ne serait que troisième, assez loin
derrière l’UMP et le FN, les deux partis leaders de la sanction à l’égard du
PS. La sanction est aussi le fruit d’un manque de mobilisation : seulement
48 pour cent de ceux qui ont voté pour François Hollande en 2012 expriment le
souhait de voter pour le PS à ces élections européennes.
-Le
camp eurosceptique est déjà assez haut alors que la campagne n’a pas encore
commencé. Le Front National est déjà à 21 pour cent, Debout La République est à
4 pour cent. A cela on peut même rajouter une gauche dans les mêmes chiffres
qu’aux dernières élections présidentielles : 9 pour cent pour le Front de
Gauche, 3 pour cent pour le Nouveau Parti Anticapitaliste et 1 pour cent pour
Lutte Ouvrière. Le total s’élève à 38 pour cent.
-Les
verts et les centristes confirment leur fibre européenne. Europe Ecologie-Les
Verts totalise 7 pour cent des intentions de vote : c’est bien mieux que
le résultats d’Eva Joly aux dernières élections présidentielles mais c’est plus
de deux fois moins que leur résultat aux élections européennes de 2009 (plus de
16 pour cent). Les centristes (UDI et Modem) sont à 9 pour cent, soit le même
résultat qu’en 2009 et 2012.
Cependant
il ne faut pas s’arrêter à un tel sondage pour plusieurs raisons :
-Un
sondage ne vaut jamais le suffrage universel qui peut nous réserver des
surprises. Les sondages
peuvent se tromper ou être manipulés.
-La
campagne pour les Européennes n’a pas encore commencé et pour le moment
l’actualité politique se concentre plus sur les élections municipales de mars
2014.
-Seulement
19 pour cent n’expriment pas d’opinion, or le plus souvent l’abstention est
beaucoup plus importante.
Le
contexte : une désaffection pour l’Europe
Depuis
les dernières élections européennes, le contexte a changé. Déjà en 2009, on ne
pouvait pas dire que c’était le grand amour entre les français et l’UE :
seulement 40 pour cent de participation !
Mais
en plus, depuis 2009 s’est ajouté un contexte économique et politique plus
tendu en Europe. En effet, les crises de la dette et de l’Euro se sont
succédées dans divers pays : Grèce, Espagne, Portugal, Italie, Chypre. La
confusion s’est installée et les décisions prises ont favorisé certes une
Europe plus fédéral (avec
notamment le Mécanisme Européen de Stabilité, véritablement technocratique)
mais aussi des tensions importantes entre les peuples et une résurgence des
mouvements nationalistes voir néo-nazis (comme l’Aube Dorée en Grèce). Il est
évident que jamais les tensions entre Grecs et Allemands n’ont été aussi
fortes, les sondages le montrent : plus
de la moitié des Allemands souhaitaient en 2012 que la Grèce sorte de l’Euro,
49 pour cent pensaient que la Grèce ne pourrait pas se réformer. Plus
de 51 pour cent des Allemands souhaiteraient même sortir de l’Euro. En 2013 en
Grèce, 55 pour cent des Grecs auraient une opinion négative de l’UE et 49 pour
cent une opinion négative de l’Euro. D’une
manière plus globale, dans tout le continent, l’euroscepticisme gagne du
terrain, soit par un manque de confiance, soit par une adhésion croissante aux
partis eurosceptiques. Un des principaux leaders de cette montée est Nigel
Farage, président du United Kingdom Independance Party, qui explose au Royaume-Uni.
Celui-ci, par son sens rhétorique, se fait de plus en plus remarquer au
parlement européen.
Bien
sûr, cette forte poussée de l’euroscepticisme n’a pas échappé aux européistes
qui ont ainsi décidé de le combattre en
finançant des « trolls » en vue des élections européennes sur
internet, un des endroits où l’euroscepticisme semble le plus se développer.
De
même, rappelons que l’une des dernières décisions de l’Union Européenne fut de
permettre le prélèvement
des épargnants en cas de difficultés d’une banque. Il s’agit d’une nouvelle
solution prévue pour 2016 pour tenter de sauver l’Euro. Cela constitue un
véritable pari tellement l’Euro
est touché par des problèmes structurels qui se sont révélés et amplifiés
depuis 2008.
Dans
ce contexte difficile pour l’Union Européenne, ce n’est plus uniquement
l’abstention qu’il faut prévoir. Ces élections européennes pourraient être
l’occasion pour les européens d’exprimer leur avis sur l’Euro et la
construction européenne actuelle (comme une sorte de référendum), d’exprimer
dans les urnes leur manque de confiance… C’est
ce que pense Charles Gave, un analyste financier et économiste de plus en plus
en vue sur internet :
« En fait, les élections au Parlement Européen
représentent la première possibilité qui va être donnée aux Peuples
Européens de donner leur avis sur l’Euro, ce Frankenstein financier qui a
détruit leurs vies. Il va donc s’agir d’un referendum, pour ou contre l’Euro et
C’EST TOUT. »
Peut-être
est-on à un nouveau tournant sur le débat européen…
Les
compétences du Parlement Européen
Faisons
un petit tour des compétences du Parlement Européen pour voir plus concrètement
l’utilité du vote de mai prochain.
Sur
les finances
D’abord,
comme tous les parlements, le Parlement Européen participe au vote sur le
budget de l’UE européenne et a le dernier mot sur les dépenses non
obligatoires. Elle a donc un rôle sur les finances mais ce rôle ne semble pas être
le plus important. En effet, le parlement n’a une action que sur la partie
dépense du budget et non pas sur les recettes…
Contrôle
du pouvoir exécutif
Le
parlement élit tous les 5 ans le président de la Commission Européenne mais sur
proposition du Conseil de l’Europe. Cependant, le reste de la Commission
Européenne est nommée sans tenir compte de la composition du Parlement.
Aussi,
le parlement dispose d’un contrôle intéressant sur la Commission Européenne,
qu’il peut démettre de ses fonctions à 2/3 des suffrages exprimés et à la
majorité des parlementaires (et non pas des présents).
Pouvoir
législatif
Le
pouvoir législatif, à l’inverse de la majorité des parlements nationaux, n’est
pas le principal pouvoir du Parlement européen. Il ne dispose pas de
l’initiative en matière de pouvoir législatif (cela appartient à la Commission
Européenne). Cependant, il est censé approuver (ou désapprouver) les lois et
directives proposées par la Commission, ce qui n’est pas négligeable. A défaut
de pouvoir véritablement réorienter la construction européenne par son biais,
on peut au moins exprimer un désaccord sur la construction proposée par la
Commission. Il lui est aussi possible de soumettre des demandes à la Commission
qui s’engage depuis 2003 à donner suites aux demandes.
Conclusion
Même
si l’Union Européenne est de moins en moins populaire, il ne faut surtout pas
négliger son importance et son pouvoir. L’abstention n’est en aucun cas la
solution pour changer l’Europe et même si le Parlement Européen n’est pas
l’institution européenne qui a le plus de pouvoir, elle reste la seule tenant
en compte l’avis des peuples européens. Le contexte ayant changé depuis 2009
(avec les crises successives de l’euro et les nouveautés technocratiques de la
Troïka), il faut plus que jamais exprimer son avis. A défaut d’avoir eu un
référendum en Grèce sur les mesures d’austérité (comme le préconisait
Papandréou), ayons notre référendum en mai prochain !
Vin
DEX
Curieuse conclusion
RépondreSupprimerCe "machin" le Parlement européen, n'a aucun pouvoir décisif, comme vous le précisez si bien: " A défaut de pouvoir véritablement réorienter la construction européenne..." Il faudrait donc malgré cela, malgré cette construction européenne tyrannique, dictatoriale, interdisant toute remise en cause du traité du fait de l'unanimité requise pour ce faire, allez voter car le parlement prend " en compte l’avis des peuples européens." Foutaise que cela.
Effarant, vous proposez donc au différents peuples qui composent l'UE, de rester dans la soumission aux classes dirigeantes financières qui se sont construit LEUR Europe pour leur plus grands profits.
Je n'irai pas voter le 25 mai et j'espère que nous serons des millions ainsi, encore plus nombreux que précédemment pour démontrer l'illégitimité de cette construction économique et politique qui s'oppose à la coopération mutuellement avantageuse entre les nations seule solution pour favoriser le développement d'une Europe pacifique.
L'UMP, le PS, l'UDI et EELV te remercient de ton abstention et de leur permettre d'obtenir la seule chose qui les intéresse : des bonnes places au chaud sans contrôle des citoyens pour continuer la construction de leur bel édifice post-démocratique.
SupprimerPour croire que les 60% d'abstention de la dernière fois les ont empêchés de dormir 5 minutes, faut beaucoup estimer leur volonté d'écouter la population...
A comparer avec la possibilité de donner de la visibilité au message que tu défends par l'intermédiaire de DLR (au hasard ;) ), moi je penche clairement vers ça.
Je considère que pour changer les choses en France, il faut qu'un candidat qui défend la fin de l'euro et de l'UE remporte la présidentielle.
Et pour ça, faut pouvoir expliquer son message. Et ça passe par la télé, radio. Et leur accès passe par un score élevé aux élections...
Mais sinon on est d'accord sur la vision de l'UE.
A Christian :
Supprimer-S'abstenir c'est encore moins peser sur la balance. L'abstention n'a jamais gêné nos politiques... Il n'a toujours occasionné que des concerts de fausses lamentations.
-Le Parlement a peu de pouvoir mais il peut être le baromètre de notre mécontentement : à nous de l'utiliser pour ce faire ! Il est certain que nous pèserons plus si nous sommes plus nombreux au parlement.
-Je n'ai jamais dit qu'il suffisait de voter aux européennes, il est évident qu'il faut aussi prendre le pouvoir à l'intérieur des Etats "souverains" pour faire sauter l'UE.
Le traité de Lisbonne reste une forfaiture, comme l’avait dénoncé courageusement NDA, même s'il confère au PE d'approuver conjointement avec le Conseil (art 289) des actes dans le domaine des accords commerciaux notamment.
RépondreSupprimerL'UE reste antidémocratique par nature, ultralibérale et atlantiste, une construction dont les maîtres d’ouvrage sont les américains…
Participer à l'élection du PE c'est la cautionner et accepter notre servitude volontaire, un mauvais signal pour les peuples!
Peu importe que les opposants soient assez nombreux pour ne pas approuver le « TAFTA », ils ne le seront jamais assez pour modifier le cours de cette construction!
Mieux vaut alors la boycotter de manière militante afin qu'une abstention massive confirme le rejet des peuples, toujours plus fort, de l'UE et leur volonté d'en sortir...
Vous raisonnez comme une casserole.
SupprimerComment voulez-vous avoir la parole dans les médias si vous n'avez pas d'élus, par exemple européens ?
Et comment avoir les moyens de débattre pour convaincre les autres français, qui ont bien d'autres sujets en tête, sans un minimum de moyens ?
S'abstenir plutôt que de voter pour des listes comme dlr, c'est démissionner.
Entièrement d'accord, ces gens ne comprennent pas que l'abstention arrangent bien nos politiques.
SupprimerIl vaut mieux voter pour le peu de chapelles souverainistes qui restent.
@Vin Dex,
Supprimerpour moi, voter revient à légitimer ce parlement Potemkine qu'est le Parlement Européen. Donc je suis pour le boycott: au mieux, ce parlement-croupion sert les intérêts européistes; d'ailleurs, regardez sa composition depuis 1979: tant le PSE, que le PPE ont systématiquement fini par céder sur les lois ultra-libérales mais surtout attentoire à la souveraineté des états et des peuples.
Désolé, mais je refuse de dire que voter dans le cas de l'UE aura une efficacité: l'histoire de cette institution a suffisamment montré qu'elle était au service et à la botte de la Commission Européenne pour qu'elle ait une quelconque utilité pour les peuples des pays de l'UE.
En fait, la politique doit rester au niveau nationale: c'est bien là qu'il faut lutter, et c'est pour cela qu'il faut d'abord sortir de l'UE.
CVT
Les élections européennes sont quand même une des seules occasions de pouvoir accéder aux grands médias afin de faire entendre un autre son de cloche sur la construction européenne.
SupprimerVu comment ce débat a été esquivé lors de la précédente présidentielle et qu'il est peu probable qu'on ait de sitôt un nouveau référendum, c'est important de pouvoir exprimer d'autres idées sur l'Europe et l'euro.
C'est d'ailleurs l'intérêt majeur de ces élections. Convaincre et augmenter la visibilité des autres options dans l'optique des futures échéances nationales.
Et si ça peut permettre d'éviter l'argument "vous êtes à 1% dans les sondages, vous n'avez aucune chance, pourquoi ne pas abandonner"...
"Vous raisonnez comme une casserole" merci et vous comme un tambour!
SupprimerDe l'aveu même de Nigel Farage, celui n'est passé que 2 fois sur la BBC! Toute sa notoriété il la doit au web, mettre en avant la tribune médiatique qu'offre cette élection et tout bonnement naïf!
Surtout dans les circonstances où se déroule ce scrutin : 9 circonscriptions, des dizaines de listes, la mouvance patriote éclatée( DLR, UPR, MRC,...) contribuant à la dé-crédibiliser et un vote sanction-défouloir anti-systéme profitant à MLP...
Après le 25 mai, les forces se réclamant du patriotisme devront se positionner rapidement et ce dans la perspective de l'élection législative de 2017 (là où se trouve le vrai pouvoir): soit l'alliance avec le FN, soit la création d'un Front Patriotique Populaire. Je milite activement pour la 2ème proposition!
Avant toute campagne, il est difficile de trancher pour ou contre l'abstention. Pour: voter revient à légitimer l'organisation de Bruxelles, alors qu'étant illégitime et impossible à réformer, elle doit disparaître. Mais si la campagne tournait au référendum contre l'euro, alors, participer au vote prendrait peut-être un sens. Sauf que, comme ce "parlement" n'a pratiquement pas de pouvoirs, même s'il y avait une majorité de DLR + UKIP +Alternativ für Deutschland, la bataille décisive sera quand même au niveau national.
RépondreSupprimerD'accord que la reprise du pouvoir ne se fera pas sans l'échelon national.
RépondreSupprimerMais les européennes restent des élections. Et un parti c'est fait pour y participer.
Comment peut-on croire que l'idée eurosceptique pourra se répandre sans participer aux élections qui concernent le principal sujet du mouvement ? Cette élection doit servir de tremplin pour faire croître ces idées au niveau national.