samedi 28 février 2015

Et si le FN faisait à l’UMP ce que Syriza a fait au PASOK ?




La terre tremble à droite

Le premier facteur évident de ce scénario vient du fait que la contestation des partis dits de gouvernement s’incarne en France plus par l’extrême droite que la gauche radicale. Et s’il est vrai que le FN a recruté les classes populaires, en France, elles n’étaient pas l’apanage exclusif de ce qu’on appelle la gauche. On a longtemps souligné que le parti lepéniste a commencé à recruter dans les classes populaires jadis attirées par le gaullisme, quand les dirigeants de ce parti ont trahi nombre d’idéaux, et notamment la souveraineté nationale. Et les scores aux élections présidentielles de 2007 et de 2012 montrent une forte porosité entre l’UMP et le FN, notamment dans l’Est, qui penche à droite.

Le FN ne pourrait-il pas faire à l’UMP ce que Syriza a fait au PASOK et Podemos pourrait faire au PSOE ? Ne faut-il pas voir dans la revendication d’un discours plus à droite, plus musclé de la part d’une partie de l’UMP une convergence vers un discours plus identitaire et sécuritaire, qui la rapproche du FN ? Bien sûr, la crise explique sans doute en partie la progression actuelle du FN, mais il est tout de même frappant de noter que le virage droitier de Nicolas Sarkozy en 2012 n’a en aucun cas freiné la progression du Front National, mais semble au contraire avoir donné à l’extrême-droite une rampe de lancement efficace pour l’amener à de nouveaux sommets, tout en rapprochant les électorats.

Les barrages tombent

vendredi 27 février 2015

Chômage : une baisse mineure, superficielle et conjoncturelle

Pour une majorité qui promettait de faire baisser le chômage à la fin 2013 et qui proposait, à cette fin, de nouveaux contrats aidés, la montée continue du nombre de chômeurs depuis près de trois ans est un échec cinglant, non remis en question par la baisse affichée de janvier.



L’hirondelle ne fait pas le printemps

Bien sûr, selon les chiffres officiels, le nombre de demandeurs d’emploi sans aucune activité a baissé de 0,5% en janvier, soit 3,48 millions personnes en métropole et 3,74 millions sur l’ensemble du territoire, la plus forte baisse depuis 2007 comme même le Figaro le reconnaît en titre. Evidemment, le gouvernement s’est emparé de cette bonne statistique, Manuel Valls parlant d’un « premier signe positif (…) d’un encouragement à poursuivre ». Même s’il n’est pas illogique de se réjouir de cette baisse de 19 100 du nombre d’inscrits, autant de familles qui commencent à entrevoir le bout du tunnel, ces résultats, outre le fait de ne porter que sur un mois, sont très insuffisants.

Même le ministre du travail, François Rebsamen appelle à « rester prudent (et à) observer dans la durée les évolutions mensuelles ». Il faut dire que si on intègre les personnes qui ont exercé une petite activité, alors le nombre de chômeurs progresse de 0,3% au lieu de diminuer, à 5,23 millions de personnes en métropole et 5,53 millions sur l’ensemble du territoire, un chiffre qui reste considérable et montre l’ampleur de la fracture qui existe sur le marché du travail. Et s’il est vrai que le nombre de chômeurs de moins de 25 ans recule de 1,4%, en revanche, celui des seniors continue de progresser, tout comme celui des chômeurs de longue durée, pas moins de 2,27 millions de personnes !

Causes conjoncturelles et non structurelles

Mythes et mensonges autour des emplois vacants (billet invité)

Billet invité de l’œil de Brutus


C’est une ritournelle dans la logorrhée des éditocrates néolibéraux : la France regorge d’emploi non pourvus ; ce sont les chômeurs – ces assistés – qui ne se donnent pas la peine de les prendre. La solution est évidemment alors toute faite : tailler dans les allocations chômage[i].

On pourra, certes, toujours trouver des sans emploi qui ne se soucient guère d’en trouver. Mais, même en les comptant comme part non négligeable, même en élargissant au maximum la part congrue de ceux qui se satisfont de quelques centaines d’euros par mois (y en a-t-il vraiment ?),  ce « parasitage » est loin, très loin, du vol organisé du bien commun au bénéfice d’une oligarchie (lire Ces parasites qui vivent aux crochets de l’Etat). Ironie de la chose, ces bien-pensants prompts à dégoupiller en direction du faible, fustigeant au passage « l’Etat-mama », savent pourtant très bien et très vite retrouver la tétée nourricière du contribuable (lire Médias & subventions publiques : ces assistés qui s’ignorent).  

jeudi 26 février 2015

Le PS connaîtra-t-il le destin du PASOK ?




Mêmes causes, mêmes effets ?

Même si la situation n’est évidemment pas la même, on peut faire de nombreux parallèles entre la situation de la France et celle de la Grèce et l’Espagne. On retrouve la même évolution de ces partis dits socialistes vers la social-démocratie, avant de virer eurolibéraux et appliquant les mêmes recettes économiques que la droite la plus bête et dogmatique, pour reprendre Paul Krugman, appliquant austérité, privatisations et recul des services publics, ouverture suicidaire du marché à la concurrence, et quête également suicidaire de la compétitivité alors qu’à trois mille kilomètres, il existe des pays où les salaires sont bien plus bas. Enfin, on y retrouve aussi un internationalisme volontiers antinational.

Bref, le PS Français ressemble beaucoup au PASOK, quasiment réduit à néant, et au PSOE, qui semble en prendre le chemin en Espagne avec l’émergence de Podemos. Où il apparaît qu’à trop mener des politiques proches de celle de la droite la plus dogmatique et bête (il existe des libéraux humanistes et pragmatiques), ce qu’on appelle politiquement la gauche, logiquement, finit par perdre ses électeurs, qui ne se retrouvent plus dans ces gouvernements. La troisième place aux élections européennes, ou dans les sondages pour les cantonales et les présidentielles peuvent indiquer que le PS suit un processus d’autodestruction, comme le PASOK et le PSOE, que le dernier passage au pouvoir a achevé.

Comparaison n’est pas raison ?

mercredi 25 février 2015

Syriza a-t-il capitulé face à l’Eurogroupe ?

Il y a exactement un mois, les Grecs votaient pour mettre fin à la tutelle antisociale de leur pays par la troïka. Même si Alexis Tsipras semble encore très populaire et s’il est trop tôt pour émettre un jugement définitif, le nouveau gouvernement semble avoir beaucoup cédé vendredi et hier.



Capitulation en rase campagne ?

C’est la question qui se pose de plus en plus depuis le premier accord de vendredi. L’accord très rapide de l’Eurogroupe aux propositions de Tsipras incite sérieusement à la méfiance. D’ailleurs, le Monde a titré dans un premier temps son papier « la Grèce de Tsipras se plie aux exigences de Bruxelles » et parle des remous que suscite au sein de la majorité tout ce qui a été cédé depuis une semaine. En fin de semaine, pas moins de quatre parlements nationaux, allemand, hollandais, estonien et finlandais, devront se prononcer sur les propositions du nouveau gouvernement grec. En cas de refus, le prolongement du plan grec ne serait pas confirmé. Le contenu de ces propositions est très inquiétant.


Faut-il abandonner tout espoir ?

mardi 24 février 2015

L’effarant amendement communautariste de la loi Macron




Ubu (communautaire) fait des lois…

Et après, on s’étonne que le livre de Houellebecq s’arrache ! Voici qu’un amendement socialiste permettrait aux Départements d’Outre-Mer de remplacer cinq jours fériés catholiques (le lundi de Pâques, le jeudi de l’Ascension, le lundi de Pentecôte, l’Assomption et la Toussaint) par d’autres jours, « tenant compte des spécificités culturelles, religieuses et historiques propres à chaque territoire ». La fin du jeune du ramadan pourrait devenir férié à Mayotte, en remplacement d’un jour férié traditionnel. Cette idée n’est pas nouvelle puisqu’Eva Joly « avait proposé de rendre férié Yom Kippour et l’Aïdel-Kébir, les deux plus grandes fêtes juive et musulmane », ce qu’appuie Dalil Boubakeur.

Cet amendement a été adopté dans un hémicycle « presque vide », en à peine plus de six minutes, ce qui en dit long sur l’inconséquence des présents qui devraient comprendre, surtout après les évènements du début d’année, qu’un tel sujet ne peut être traité à la légère, comme ils l’ont fait. Heureusement, ce texte peut encore être retoqué. Il est probable que le Sénat ne le vote pas et le Conseil Constitutionnel pourrait également s’y opposer. Même le ministre a jugé « le lien avec la croissance de l’emploi très indirect ». Si cette révélation du Parisien crée un véritable scandale et que la grande majorité des Français s’y oppose, alors le gouvernement pourrait reculer et le retirer.

Un couteau dans le dos de la République

Ce texte pose deux problèmes majeurs, chacun suffisant pour s’y opposer avec force. D’abord, il remet en question l’unicité de la République. Ici, on nous propose de changer les jours fériés, mais le principe même de différencier nos lois et notre façon de vivre sur le territoire français en fonction des particularismes de nos territoires revient à déconstruire la République Française, effacée par les particularismes locaux. Si un tel projet était adopté, comment, demain, s’opposer à la demande d’une ville avec une très forte communauté musulmane qui souhaiterait également un réajustement du calendrier ? Et comment ne pas saisir qu’il serait aberrant de ne pas avoir le même calendrier sur notre territoire ?

Difficile de ne pas y voir une forme de haine anti-nationale, consciente ou pas, qui amène à déconstruire petit à petit ce qui fait pourtant notre identité à tous, le cadre de la principale communauté à laquelle nous appartenons tous. Bien sûr, la plupart de nos jours fériés sont d’origine religieuse, mais l’athé parfois laïcard que je suis reconnaît que notre beau pays a été la fille aînée de l’Eglise, que nos villes et villages en portent les traces, qui font partie de notre culture, de ce que nous sommes, et qu’il serait inconscient de vouloir l’effacer de certaines parties du pays. On ne choisit pas ces jours fériés comme une lessive, que l’on pourrait changer à son goût. Nos jours fériés font partie de notre identité.


Voilà pourquoi il est extrêmement important de s’opposer avec force à cet amendement communautariste et inconséquent : ce n’est pas un détail, c’est une attaque directe à ce qui fait la République Française et il faut envoyer le message au gouvernement qu’un tel projet est inacceptable.

lundi 23 février 2015

L’intox du gouvernement sur les travailleurs détachés



La chienlit grandit

Le graphique du Monde est extrêmement parlant : le nombre de travailleurs détachés déclarés augmente de manière constante depuis 2005. Il est passé de trente à deux cent trente mille, une multiplication par sept ! Il est malheureusement évident que l’immense majorité de ces travailleurs détachés ont pris un emploi à des français, qui coûtent bien plus cher que des étrangers. Non seulement ils paient les cotisations sociales de leur pays d’origine, souvent bien moins élevées qu’en France, mais en plus, un SMIC français peut paraître très attrayant pour des personnes venant de pays où le salaire minimum est beaucoup plus bas, créant une distorsion pour les emplois normalement payés davantage.

Pire, le nombre de jours déclarés augmente encore plus vite que le nombre d’employés déclarés, puisqu’il a progressé de 31% en 2014, après une hausse de 30% en 2013, soit une hausse de 70% en deux ans ! Sans surprise, les Polonais sont la première nationalité, avec près de 40 000 personnes, devant les Portugais (34 500) et les Roumains (27 000). Pire, comme l’avait souligné un rapport du Sénat, ces chiffres ne prennent pas en compte les travailleurs détachés non déclarés, ce qui doublerait leur nombre réel, qui approcherait en réalité plutôt un demi-million de personnes ! D’ailleurs, les fraudes augmentent, avec notamment des salaires inférieurs au SMIC et des durées de travail dépassées.

Simulacre de réactions


dimanche 22 février 2015

Le compromis de l’Eurogroupe est-il une compromission pour Syriza ?

Finalement, les semaines de tension ont abouti à un accord rapide puisqu’il n’a fallu que quelques heures aux ministres des finances de la zone euro pour trouver un accord, sans même prolonger les négociations tard dans la nuit. Quel est le sens de cet énième accord européen ?



La zone euro se donne quatre mois

La première chose qui frappe dans l’accord obtenu vendredi, c’est finalement que les européens ont surtout choisi de ne pas totalement choisir puisqu’en réalité, cet accord ne règle la situation que pour quatre mois et que les échéances de cet été imposeront un nouvel accord… et donc de nouvelles négociations. Comme le résume Romaric Godin, « la Grèce a obtenu un financement pour les 4 mois à venir. Elle pourra constituer son propre programme de réformes, mais la surveillance reste étroite ». Dans le détail, « le gouvernement grec va demander une extension de quatre mois du programme de financement issu de l’accord de 2012 ». Mais deux échéances de 6,7 milliards d’euros, dues à la BCE en juillet et en août, imposeront une nouvelle négociation. Les palabres vont continuer pendant quatre mois…

L’extension est fondée sur « la base des conditions de l’accord actuel », même si une certaine flexibilité est laissée à Athènes, qui devra présenter un nouveau plan de réformes dès lundi à ses créanciers. Il semble que la contrainte soit adoucie, d’autant plus que l’objectif d’excédent primaire (à 3% du PIB en 2015) sera « réévalué » en fonction des « circonstances économiques ». En revanche, l’objectif pour 2016 (4,5%) serait inchangé. La question qui se pose maintenant est le maintien des premières mesures votées, notamment le relèvement du salaire minimum et les embauches de fonctionnaires. Point positif pour la Grèce, c’est son gouvernement qui propose désormais les mesures et non la troïka.

Athènes a eu plus peur que Berlin et Bruxelles

samedi 21 février 2015

Zone euro : capitulation ou explosion ?

On sait peut-être depuis cette nuit si la nouvelle réunion de l’Eurogroupe, débutée hier après-midi, a abouti à un accord sur la situation de la Grèce. Mais le bras de fer entre capitales européennes a été tellement tendu qu’il semble aujourd’hui qu’il n’y aura pas de compromis.



Coup de poker de Berlin ?

Comme le dit Romaric Godin, les négociations semblent aller dans le sens de Berlin. Lundi, le gouvernement grec a accepté des points qui semblent contradictoires avec son programme même si Sapir souligne que cela est plus compliqué. Sous conditions, Athènes a accepté de reconnaître les engagements passés et in fine les contrôles de la troïka et renoncer « à toute action unilatérale qui pourrait remettre en cause les objectifs budgétaires, la reprise économique et la stabilité financière ». Tout ceci semble contradictoire avec les premières mesures prises juste après les élections (hausse du SMIC, fin des privatisations et embauche de fonctionnaires). Alexis Tsipras a-t-il capitulé devant Berlin ?

Sur la même longueur d’onde que Jacques Sapir, Romaric Godin, qui couvre les négociations pour la Tribune, émet l’hypothèse que « les Grecs aient cédé pour mieux montré l’intransigeance allemande et pouvoir refuser toute responsabilité en cas d’aggravation de la crise ». D’ailleurs, comme on le pressent depuis quelques temps, c’est Berlin qui semble aux commandes aujourd’hui. Le même journaliste soutient que l’Allemagne est sans doute dans une logique politique, déterminée à faire un exemple pour « vider le programme politique de Syriza ». Ainsi, les pays membres n’auraient d’autres choix que d’accepter les conditions allemandes, ou partir, sans possibilité de compromis.

Trois issues pour une crise

vendredi 20 février 2015

Le rêve américain, enterré par la loi de l’argent

C’est l’un des intérêts de The Economist, la bible des élites globalisées, de montrer les problèmes de notre époque, comme il vient de le faire en dénonçant « la nouvelle aristocratie des Etats-Unis ». Mais s’il pointe justement le rôle du renchérissement de l’éducation, qu’il dénonce, il en oublie d’autres.



La mort du rêve étasunien








Une analyse partielle

jeudi 19 février 2015

La loi Macron, révélateur du quinquennat Hollande ?

Ce soir, l’Assemblée se prononce sur la motion de censure déposée par l’UMP et l’UDI sur le projet de loi portée par le ministre de l’économie. Même si l’issue ne fait guère de doute, il s’agit sans doute d’un des moments les plus révélateurs du mandat du président de la République.



Quand le PS fait de l’UMP

Même si le gouvernement a dû mettre de l’eau dans son vin, dans la plus grande tradition de la syntèse hollandienne, ce projet est important car cette collection d’articles ressemble assez furieusement au rapport Attali, commandé par la présidence précédente, à laquelle avait contribuée… le même Emmanuel Macron ! Pendant sa présidence, qui tenait plus du « one man show » que d’un chef de l’Etat, Nicolas Sarkozy n’avait cessé de critiquer la législation concernant le travail du dimanche en pointant de multiples fois le cas des Champs Elysées, où un côté de l’avenue est ouvert et l’autre pas. Outre ce que cet exemple révélait de la vision de la France du personnage, qu’a-t-il fait en 5 ans ?

Il est tout de même sacrément ironique qu’alors que l’UMP n’a rien changé étant au pouvoir, ce soient les socialistes qui mettent en œuvre les promesses de Nicolas Sarkozy sur le travail dominical. Voici un nouvel exemple de la confusion du débat politique qui voit l’opposition d’hier faire ce que la majorité d’alors n’a pas osé faire, bien qu’en en ayant défendu l’idée pendant tout son mandat ! Pire, le projet de loi Marcon introduit des subtilités qui permettront de réduire le surcoût du travail dominical, qui sera fixé par des accords ad hoc. Et cette loi fourre-tout comporte d’innombrables articles comme la privatisation dogmatique et dérisoire de certains aéroports, dont on a vu les prémices à Toulouse.

Plus politique qu’économique

Les 10 commandements du postmodernisme (5/10) : Le rapport au politique, tu combattras tout gouvernement et tu prôneras la bonne gouvernance (billet invité)

Billet invité de l’œil de Brutus



Suite des recensions sur l’ouvrage de Dany-Robert Dufour, Le Divin Marché (Denoël 2007)

Lire également :

L’un des symptômes les plus marquants de la transformation postmoderne du rapport à la politique est le remplacement du terme « gouvernement » par celui de « gouvernance » (page 169). Il est à noter que cette transformation est conjointe de l’abandon du compromis fordiste, remplacé par l’emprise du capitalisme financier marqué par la cupidité actionnariale à court terme (pages 175-176).

mercredi 18 février 2015

En Grèce, les fondations de la monnaie unique tremblent

La perspective d’une sortie de la Grèce de la monnaie unique européenne semble se rapprocher à dix jours d’une échéance financière importante pour Athènes et alors que les négociations avec les pays européens semblent mal se passer. Une perspective encore ridiculement caricaturée.



Tensions avant un accord

Romaric Godin est sans doute un des meilleurs chroniqueurs des soubresauts de la zone euro. Dans deux papiers « Le dialogue entre l’Eurogroupe et la Grèce est rompu » et « Grèce : Angela Merkel désormais au centre du jeu », ils donnent des clés sur les négociations en cours. La situation semble bloquée, le ministre des finances ayant refusé de signer la déclaration commune qui proposait une extension de six mois des plans pour se donner le temps de la négociation, contre un maintien des politiques de la troïka et le refus de toute mesure unilatérale. Le ministre grec a jugé le projet « absurde et inacceptable ». Un tel projet revenait à demander à Athènes de revenir dans sa prison européenne.

Il conclut que, un reniement de Syriza étant improbable « si Angela Merkel n’a voulu qu’impressionner Athènes pour tenter de faire céder le nouveau gouvernement grec par une attitude de fermeté, alors, plus l’on s’approchera de l’inévitable issue du Grexit, plus les Européens tenteront de ramener la Grèce dans le jeu de la discussion en modérant leur approche ». Il montre qu’aujourd’hui, c’est Berlin qui tient le sort de la monnaie unique dans ses mains dans un second papier. Après, on peut aussi penser que les dirigeants européens ne peuvent pas céder à Athènes sans que les négociations se soient durement tendues. S’agit-il d’une simple comédie destinée à donner le change ?

Caricatures sur le Grexit

L'arbitrage Tapie est bien une affaire d’Etat




Fraude sur l’arbitrage ?

L’enquête a logiquement retenu le grave « manque d’indépendance » d’un des trois arbitres, Pierre Estoup, qui avait des liens non signalés avec l’avocat de Bernard Tapie, maître Maurice Lantourne. Les éléments rassemblés par les Décodeurs du Monde sont accablants. En outre, les circonstances sont tout de même extrêmement troublantes. Bernard Tapie, qui a longtemps milité à gauche, a appuyé la candidature de Nicolas Sarkozy en 2007, puis a été reçu à de multiples reprises à l’Elysée après l’accession de son favori à la présidence de la République, et il est difficile de croire que Nicolas Sarkozy n’a pas validé le choix de la procédure d’arbitrage sur un tel cas. Un donné pour un rendu ?

Affaire d’Etat au carré ?

Qui plus est, je persiste à penser que l’on peut totalement contester le bienfondé de la demande de Bernard Tapie. On peut soupçonner que le Crédit Lyonnais a racheté Adidas au ministre d’alors, quelques semaines avant la défaite des législatives de 1993, pour l’arranger, personne n’ayant souhaité racheter l’entreprise à la valeur qu’il avait demandée, pour faire une simple opération blanche. Mais à cette possible première affaire d’Etat, s’ajoute le soupçon qui sort renforcé par ce jugement sur cette procédure d’arbitrage qui ressemble un peu trop à un arrangement entre amis, aux frais des Français, d’une indécence dont les deux principaux protagonistes sont malheureusement un peu trop coutumiers.

Merci donc à la cour d’appel d’invalider cette procédure ubuesque d’abitrage qui avait abouti au versement de 400 millions d’euros à Bernard Tapie. Reste à espérer que le jugement qui sera donné en septembre sur le fond de l’affaire en éclaircira les différentes zones d’ombre.

mardi 17 février 2015

Comprendre le vote FN, sans complaisance

La victoire de justesse du candidat socialiste dans le Doubs, face à une candidate du Front National a de nouveau provoqué des réactions diverses, certains y voyant une victoire du FN, d’autres, comme moi, un résultat pas si extraordinaire. Mais que penser du choix des électeurs ?


Un vote socialement logique

Cela fait depuis 2002 qu’il est devenu clair que le vote FN est d’abord social. En effet, certains sondages avaient montré que Jean-Marie Le Pen avait obtenu deux fois plus de voix dans les classes populaires que Lionel Jospin, décillant durement une certaine gauche qui se croyait quasiment propriétaire des voix des ouvriers. Dès 2011, avant même la présidentielle, et lors du premier succès électoral du FN de Marine Le Pen, il était déjà clair que le succès du parti lepéniste auprès des classes populaires, premières victimes de la crise, allait se poursuivre, ce qui a été confirmé un an plus tard, avec les 17,9% de la présidente du FN aux présidentielles et le très bon score des élections européennes.


Un vote important mais marginal

lundi 16 février 2015

Swissleak : ni évasion, ni paradis, désertion et parasite !

Les révélations sur les pratiques d’HSBC, qui aurait détourné pas moins de 180 milliards d’euros du fisc ont de nouveau démontré à quel point une partie des élites échappe aux impôts malgré la forte baisse des taux marginaux depuis plusieurs décennies. Mais dans ce débat, les termes sont souvent mal choisis.



Une guerre des mots mal engagée

Il est tout de même frappant que même Hervé Falciani, à l’origine de ces révélations, persiste à employer le terme « paradis fiscal ». Pourtant, comme Eric Hazan l’a si bien démontré dans son livre « LQR », le choix des mots n’est pas neutre dans le débat public. Et ici particulièrement. Quand on parle de « paradis fiscal », on sous-entend quelque part que les autres endroits pourraient être des enfers. Ce faisant, le choix de ce mot déforme le débat, en incriminant les Etats qui ne seraient pas des paradis et en présentant les voyoux fiscaux sous le jour flatteur de « paradis ». Voilà pourquoi, depuis des années, je me bats pour les appeler des « parasites fiscaux » et non des « paradis fiscaux ».

Il en va de même pour le terme d’évasion fiscale, qui pose les mêmes problèmes, de manière à peine moins subtile. Le terme « évasion » est souvent utilisé pour les prisonniers qui s’échappent d’une prison. Bien sûr, cela pourrait donner une connotation négative pour ceux qui s’en rendent coupables. Mais les choses sont plus compliquées que cela car si on s’en tient à ce raisonnement, cela implique qu’ils seraient dans une prison, manière de dire que les personnes qui fraudent leur fisc le feraient pour échapper à ce qui serait alors une « prison fiscale ». Voilà pourquoi, ici aussi, il convient de bannir ce terme de notre vocabulaire. On peut lui préférer le terme de « désertion » et donc de « déserteur ».

Des causes et des conséquences

dimanche 15 février 2015

Stagnation en 2014, légère reprise en 2015 ?




2014 : une année à oublier

On retiendra de cette année une croissance de 0,4%, mais ce chiffre ne représente qu’imparfaitement la situation économique du pays car si l’on compare toujours l’évolution du PIB, on compare moins souvent l’évolution du PIB par habitant, qui mesure sans doute de manière plus proche l’évolution de la richesse. En effet, il ne faut pas oublier qu’en France, la population croit justement d’environ 0,4% par an, ce qui signifie alors que le peu de croissance que nous avons traduit en réalité une stagnation de la richesse par habitant. L’écart avec l’Allemagne, où l’évolution de la population est moins dynamique, est donc encore plus grand qu’annoncé. Ce même type d’analyse relativise la crise du Japon.

Sur le dernier trimestre, la consommation progresse de 0,2%, et grâce à la traditionnelle contribution positive du commerce extérieur au 4ème trimestre, cela permet de compenser la traditionnelle baisse des stocks. En revanche, il est extrêmement inquiétant de constater que pour le 4ème trimestre consécutif, l’investissement recule, de 1,6% sur l’ensemble de l’année (contre -0,8% en 2013) : guère réjouissant pour les prochaines années ! Au global, l’année 2014 est aussi mauvaise que 2013, signant l’échec de la politique de la majorité, qui vantait l’illusoiree plan de croissance européen de 2012. La cherté de l’euro en début d’année a amplifié les effets néfastes des politiques d’austérité à l’échelle du continent.

L’horizon qui se dégage (un peu) en 2015 ?

Les 10 commandements du postmodernisme (4/10) : tu ne fabriqueras pas de Kant-à-soi visant à te soustraire à la mise en troupeau (billet invité)

Billet invité de l’œil de Brutus



Suite des recensions sur l’ouvrage de Dany-Robert Dufour, Le Divin Marché (Denoël 2007)

Lire également

Dans Les Frères Karamazov, Dostoïevski fait dire « Si Dieu n’existe pas, alors tout est permis ! » (page 138). La disparition de Dieu induit la disparition de toutes règles et de toutes normes sociales[i]. Or, Descartes, dans ses Méditations métaphysiques, affirmait que lorsqu’on l’on s’interroge soi-même on ne peut qu’arriver à une conclusion : « je dépends de quelque être différend de moi » (page 142).

Dans les sociétés prémodernes, le sujet était entièrement soumis à une seule figure de l’Autre. Les sociétés modernes ont toléré une mise en concurrence de plusieurs Grand Sujet tandis que dans les sociétés postmodernes, le sujet se croit libre de tout assujettissement (page 145). Le "petit" sujet se prend alors pour le Grand Sujet.