mardi 30 juin 2015

Référendum Grec : nouveau moment totalitaire de Sarkozy et Juncker

L’annonce gaullienne d’Alexis Tsipras d’un référendum sur la proposition indécente de ses créanciers a été accueillie par une volée de bois vert de la part des eurobéats, au premier rang desquels Nicolas Sarkozy et Jean-Claude Juncker. Une attitude révélatrice du fond totalitaire des euro-élites.



Apprentis autocrates critiquent méchants Grecs

La ligne de défense des eurobéats est risible. Ils peignent les Grecs comme les méchants de l’affaire alors que la dernière proposition des créanciers était aussi indigne sur le fond que sur la forme. Puis, ils parlent d’une catastrophe pour les Grecs s’ils votent non (Jean-Claude Juncker gagnant le prix du plus ridicule avec « il ne faut pas se suicider parce qu’on a peur de la mort »), alors que l’histoire économique démontre l’exact contraire. Mais surtout, beaucoup d’entre eux dénient aux Grecs le droit de s’exprimer sur les négociations en cours. Le président de la Commission a dénoncé « les égoïsmes, les jeux tacticiens, voir populistes », avant de se dire « trahi »… par le recours à la démocratie.

Mais le comble de l’indécence a sans doute été atteint par Nicolas Sarkozy qui a rappelé que « lors du G20 de Cannes, en 2011, M. Papandreou nous a aussi menacés d’un référendum et nous l’avons dissuadé avec Angela ». Faire du refus de faire voter démocratiquement les citoyens un fait d’arme, tout en se prétendant l’héritier du gaullisme ! Sarkozy ose tout. Il faut dire que toute sa carrière démontre une capacité à défendre tout et son contraire. Pour être républicain, il faut aussi être démocrate, et quelqu’un qui n’a pas respecté le vote de son peuple en 2005, puis qui se vante d’avoir imposé à un premier ministre de ne pas consulter son peuple est tout sauf un républicain, ou un gaulliste.

L’UE est bien un projet autoritaire

La sortie de l’euro, c’est possible, et pas difficile…

Des charlatans cherchent à faire peur en prévoyant une catastrophe pour la Grèce. Mais la catastrophe, c’était le maintien dans la zone euro depuis 5 ans, comme l’a souligné François Lenglet hier matin. Car l’histoire économique révèle que les sorties d’union monétaire sont courantes et profitent largement aux pays qui le font, comme l’a montré Jean-Pierre Robin dans un papier sur le FigaroVox, ou Jonathan Tepper dans une étude fouillée, dont j’avais fait le résumé en février 2012 :


C’est aujourd’hui la dernière ligne de défense des partisans de l’euro : la fin de la tour de Babel monétaire édifiée à Maastricht provoquerait un cataclysme économique. Pourtant, d’innombrables économistes, dont des prix Nobel, affirment le contraire, comme Jonathan Tepper dans une étude passionnante.

La peur, dernier rempart de défense de l’euro

lundi 29 juin 2015

La pseudo interdiction d’UberPOP, cache-sexe de l’inaction du gouvernement



UberPOP, l’arbre qui cache la forêt

Il est assez effarant que le débat se concentre sur UberPOP, oubliant le versant principal de la concurrence déloyale que mènent les VTC aux taxis. Dans un dossier très détaillé, la Tribune explique bien les enjeux du dossier. UberPOP est l’offre à prix encore plus bas du géant californien, officiellement du covoiturage rémunéré, avec des conducteurs qui n’ont ni formation ni assurance spécifique… Les autres offres d’Uber rentrent dans le cadre légal des VTC, qui inclut désormais une formation, mais qui profite toujours d’une fiscalité complètement décalée par rapport aux taxis, même si, passé un certain chiffre, il faut passer en statut d’autoentrepreneur, le tout sans la moindre licence.

Pire encore, comme le souligne le directeur d’Uber France, les textes ne sont pas très clairs puisque même si le gouvernement juge UberPOP illégal, « quatre tribunaux indépendants (…) se sont prononcés, les uns après les autres, refusant l’interdication, disant qu’il n’y avait pas de trouble manifestement illicite » et la légalité de loi Thévenoud (sur les VTC) sera étudiée par le Conseil Constitutionnel. Bref, le cadre juridique qui encadre l’activité des VTC ne semble ni clair, ni suffisant, permettant aux opérateurs de s’engouffrer dans la brèche grande ouverte, rendue à peine moins grande par une loi Thévenoud d’autant plus difficile à mettre en œuvre qu’il n’y a pas d’interprétation claire sur son sens.

Un gouvernement aux abonnés absents


Appel de Cochin : oui à l’Europe des Nations, non à l’Europe des technocrates (billet invité)

Billet invité de l’œil de Brutus.


Le 6 décembre 1978, Jacques Chirac faisait publier le communiqué que je vous propose ci-après et qui restera dans l’histoire comme « l’appel de Cochin ».

En préparation des élections européennes qui se préparaient alors (juin 1979), ce texte a très probablement été écrit par Pierre Juillet et Marie-France Garaud. Dans les fais, une fois élu 20 ans plus tard, Jacques Chirac suivra une politique diamétralement opposée et, sous prétexte de son hospitalisation de l’époque (il avait un accident de voiture début décembre 1978) désavouera ses conseillers qui auraient profité de sa faiblesse du moment …

C’est probablement, entre autres, ce qui fera dire à Marie-France Garraud s’adressant au patron du RPR : « je vous croyais de marbre dont on fait les statues ; vous n’êtes que de la faïence dont on fait les bidets »[i].

A l’aune de ces lignes, ô combien d’actualités en ces temps de crise perpétuelle de l’Union européenne, on mesure combien, hormis quelques très rares fulgurances (le refus de la guerre en Irak), M. Chirac est passé à côté de l’Histoire et comment son gaullisme était finalement de façade et non de fond. Que n’a-t-il suivi cette grande inspiration de décembre 1978 !

dimanche 28 juin 2015

Grèce : la belle révolte démocratique d’Alexis Tsipras




Belle réponse à proposition indécente

Mais qu’a-t-il pu passer dans la tête de la troïka pour pousser aussi loin l’humiliation de la Grèce avec les propositions indécentes signifiées en rouge jeudi ? Comment pouvaient-ils imaginer une seconde que le gouvernement Grec pourrait accepter un tel reniement de son programme de début d’année ? On pourrait penser qu’ils ont agi sciemment pour aller à la rupture, mais je ne crois pas que ce soit le cas. On peut penser qu’ils ont à la fois trop pris l’habitude de pouvoir imposer les politiques qu’ils souhaitent sans que les gouvernements en place refusent et que les concessions du gouvernement Grec depuis cinq mois les ont poussé à coire qu’ils pouvaient obtenir toujours plus.

Bien sûr, les créanciers proposaient 15 milliards d’euros de refinancement pour 5 mois. Mais la proposition était une arnaque. D’abord, la somme proposée provient d’enveloppes existantes, il n’y a rien de nouveau. Et pour l’obtenir, Athènes devait signer une reddition en bonne et due forme sans rien obtenir sur le montant de la dette, tout en ne couvrant son financement que pour cinq mois, restant donc à la merci d’une nouvelle négociation à la fin de cette nouvelle échéance… Samedi, Alexis Tsipras a répondu ainsi : « Après 5 mois de négociations, nos partenaires en sont venus à nous poser un ultimatum (…) Leur but est l’humiliation de tout un peuple, et elles manifestent avant tout l’obsession du FMI pour une politique d’extrême austérité (…) Notre responsabilité dans l’affirmation de la démocratie et de la souveraineté (…) nous oblige à répondre à l’ultimatum en nous fondant sur la volonté du peuple Grec ».

Le vrai visage de cette Europe

samedi 27 juin 2015

Les Etats-Unis : cow boys barbares et aristocratiques




Règne de l’arbitraire et de la barbarie

Dans la mythologie de l’Oncle Sam et de ses valeurs, le respect du droit est fondamental. Mais sa position de superpuissance a souvent fait oublier ses principes à Washington. Il y a les guerres arbitraires, qui foulaient au pied le droit international, en Irak, et qui n’ont laissé qu’un sanglant désordre. On peut aussi voir une chose similaire dans les 190 milliards de dollars d’amendes infligées aux banques depuis quelques années. Avant la crise de 2008, la justice étasunienne s’intéressait si peu à la finance qu’il est difficile de ne pas voir dans ces transactions une forme de racket, comme même The Economist avait fini par le dénoncer au sujet de l’amende contre BNP Paribas il y a un an.

Et le pays semble de plus en plus céder à une forme de barbarie, comme avec l’autorisation du port d’armes dans les universités du Texas. Parce que des fous surarmés, grâce au droit imprescriptible à avoir une arme, font des massacres dans les établissements scolaires, le Texas a jugé bon de permettre aux étudiants et aux professeurs de ses universités de venir armés pour pouvoir répliquer ! Bienvenue dans une société où l’Etat, abandonnant la sécurité de ses citoyens, leur offre comme issue une course à l’armement dont il est pourtant difficile de ne pas conclure qu’elle explique un taux d’homicide digne de la Palestine, 4 fois supérieur à l’Europe et 3 fois supérieur à l’Afrique du Nord.

Bienvenue au Moyen Age

vendredi 26 juin 2015

Lettre ouverte à Syriza : la rupture est possible et nécessaire

Depuis cinq mois, la situation est tendue entre vous et vos créanciers. Votre gouvernement alterne les chauds et froids au point qu’il est difficile de savoir quelle pourrait être l’issue de cette nouvelle crise. A quelques jours de la fin de ce chapitre, j’espère que les intérêts du peuple Grec vont prévaloir.


De l’indécence des créanciers

Sans doute encouragée par ce que vous avez semblé céder dernièrement, l’ex-Troïka a cru bon renvoyer vos propositions corrigées en rouge, façon professeur, comme le révèle Marianne. On peut comprendre des discussions sur les objectifs, le phasage attendu, ou la crédibilité des mesures proposées. Mais ici, non seulement la troïka prétend fixer les objectifs mais aussi la manière dont ils sont atteints. Et cette manière a un sens, entre protection des entreprises (réduction de la hausse de l’impôt sur les sociétés, suppression de la taxe exceptionnelle sur les profits et protection des labos pharmaceutiques), et ménages qui règleront la nouvelle hausse de la TVA et subiront la baisse des retraites.

Bien sûr, certaines réformes ne sont peut-être pas inutiles. Mais la plupart de ceux qui pointent le coût trop élevé des retraites (16% du PIB), oublient que les plans inhumains et inefficaces ont réduit le PIB de votre pays de 25%, augmentant le poids relatif des retraites. Et puis, il est totalement indécent et infantilsant de traiter votre pays comme un il est depuis 5 ans, comme vous l’aviez dit dans votre campagne gagnante en janvier. Le document de la troïka est un nouvel exemple de ce qui doit être refusé, autant pour le fond que pour la forme. La crise de votre pays est le fruit des plans conçus par ces cerveaux malades et inhumains, malgré les avertissements donnés par beaucoup d’entre nous.

Courage d’Achille, ruse d’Ulysse ?

jeudi 25 juin 2015

La critique des inégalités des économistes se radicalise




Anthony Atkinson, mentor de Piketty

L’hebdomadaire des élites globalisées commence le compte-rendu du livre d’Anthony Atkinson en rappelant la place éminente du livre de Thomas Piketty dans le débat sur les inégalités. Il rappelle que cet économiste britannique de 70 ans travaille depuis 4 décennies sur le sujet, et qu’il a travaillé avec le jeune Piketty pour reconstituer les historiques des hauts revenus et qu’il était son « mentor académique ». Il vient d’écrire son livre « Inégalités : que peut-il être fait ? », un livre moins détaillé et moins philosophique que celui de Piketty, mais « qui évite la fadeur grâce à son soutien assumé à une intervention de l’Etat forte ». Et la particularité de l’auteur est de faire quinze propositions hautement politiques.



Il propose une taxation plus forte des hauts revenus, qui s’en sont bien tirés depuis 35 ans, entre envolée des plus hauts salaires, et effondrement des taux marginaux d’impôt sur le revenu, comme le montrent les graphiques. Il défend un contrôle des salaires plus strict, incluant salaire minimum et salaire maximum. Il soutient que l’Etat doit intervenir pour pousser des innovations qui favorisent tous les citoyens, et pas les plus riches seulement (l’automatisation détruisant des emplois peu qualifiés). Il semble proposer une sorte de revenu de base à toute personnes contribuant à la société, dans l’économie ou le service public. Et il défend un droit à l’emploi, dans le service public si nécessaire.

Vers un marxisme 2.0 ?


mercredi 24 juin 2015

Grèce : Tsipras a-t-il capitulé face à la troïka ?

Bien sûr, il est encore un peu tôt pour juger, mais les éléments disponibles à date semblent indiquer que la Grèce a largement cédé aux demandes de ses créanciers. Comme une impression de déjà-vu qui aboutira aux mêmes résultats et ne résoudra pas grand-chose aux problèmes du pays.



La troïka mène (largement) au score

Bien sûr, Syriza peut s’abriter derrière le respect de deux lignes rouges qui n’ont pas été franchies, à savoir la hausse de la TVA sur l’énergie et la baisse des petites retraites. Mais la proposition faite par le premier ministre Grec semble malheureusement confirmer les craintes que l’on pouvait avoir dès le mois de mars. Dans le bras de fer qui l’opposait à la troïka, cette dernière semble l’avoir largement emporté. Bien sûr, quelques aspects de l’accord pourront donner le change, notamment la question des lignes rouges, mais finalement, la Grèce n’a-t-elle pas beaucoup plus cédé que ses créanciers car ces deux points ne sont que des modalités, en partie secondaires et substituables.

Tout le problème est qu’Athènes n’a cessé de céder sur des questions de principe. D’abord, après avoir dit refuser négocier à nouveau avec la troïka, Alexis Tsipras a accepté de continuer, simplement en changeant le nom de ses interlocuteurs… Ce nouvel accord marque deux concessions considérables d’Athènes. La Grèce a présenté un plan qui prévoit un excédent budgétaire primaire de 2% pour 2016 et 3,5% en 2018, cédant au sado-masochisme austéritaire et inhumain des créanciers, même s’il faut reconnaître qu’une partie des hausses d’impôt ont un caractère progressiste et que certaines mesures semblent avoir du sens, comme l’augmentation de la TVA dans l’hôtellerie. Mais, il n’a rien obtenu sur le montant de la dette, alors que cela faisait partie de ses premières demandes.

Tsipras refuse une alternative qui s’imposera

Le « modèle » allemand en quelques chiffres (billet invité)

Billet invité de l’œil de Brutus



Alors que l’Europe s’enfonce dans une crise qui semble sans fin, les thuriféraires du « modèle » allemand semble se faire plus discrets (voir article reproduit ci-après), même si, « gauche de droite » aidant, le gouvernement en place, via la loi Macron (inspirée des réformes Hartz du gouvernement Schröder), vient de faire passer – en force – la loi probablement la plus antisociale de toute la Ve République. Une loi que même la « droite la plus bête du monde » n’aurait sans doute même pas osé imaginer[i].
Rappelons donc quelques éléments simplement factuels de l’état des lieux de notre précieux « modèle » d’Outre-Rhin[ii] :
-        Entre 2007 et 2011, le revenu réel brut des 10% les plus pauvres y a baissé de 6,1% alors que celui des 10% les plus  riches augmentait de 0,7%.
-        En 2012, un quart des Allemands a un patrimoine égal à 0, la moitié d’entre eux un patrimoine inférieur à 17 000€ mais les 1% les plus riches ont un patrimoine supérieur à 817 000€.
-        En 2011, les 10% de ménages les plus aisés disposaient de 59,2% de la richesse nette de l’ensemble des ménages pendant que la moitié de ménages ne dispose que de 2,8%.
-        En 2013, les femmes étaient payées 23% de moins que les hommes[iii].
Entre 2003 (année des réformes Hartz) et 2013, le PIB allemand a cru de 11,9%. Dans le même temps, celui de la France a cru de 12,4%[iv]. Tout ça pour ça … Mais que l’on se rassure : dans la belle Europe que l’on nous construit, les « réformes » tant des sieurs Sarkozy que Hollande n’ont de cesse que de nous mettre au niveau des Allemands !

Je profite de ces quelques éléments factuels pour reprendre le billet ci-dessous qui date d’un peu plus de deux ans mais n’a pas pris une ride.

L'Allemagne, ce modèle bidon

mardi 23 juin 2015

Uber, c’est bien l’invasion des barbares

C’est Franck Dedieu, co-auteur de livres rafraîchissants sur le protectionnisme et l’euro, qui a parfaitement résumé ce que représente l’irruption de certaines entreprises comme Uber, Airbnb ou Blablacar. Derrière le masque riant de l’économie collaborative, se cachent de vrais barbares de nos sociétés.



Ce qu’il y a de barbare en eux

Bien sûr, ces entreprises peuvent faire rêver. Elles fournissent des services intéressants pour les utilisateurs et elles ont révolutionné des pans entiers de l’économie, comme le savent les taxis ou les hôtels, au point qu’Uber compte déjà 5000 chauffeurs en France et Airbnb pas moins de 40 000 logements en Ile de France. Du coup, Uber vaut déjà plus de 40 milliards en bourse et Airbnb 13 ! Cette nouvelle économie bénéficie d’une bonne image, car elle peut sembler écologique, voir même sociale en fournissant à ceux qui offrent leurs services des revenus, et à ceux qui les utilisent des prestations généralement moins cher, sauf pour le Réveillon, comme s’en souviennent les utilisateurs d’Uber.

Mais derrière ce portrait idyllique se cachent de nombreux côtés obscurs. Comme le soulignent justement les chauffeurs de taxi, Uber leur mène une concurrence déloyale, payant moins de taxes, et ne requérant ni formation, ni coûteuse licence. En fait, le succès d’Uber doit moins aux innovations de son modèle d’affaire qu’au fait que l’entreprise a trouvé des failles légales lui permettant de concurrencer les acteurs historiques de manière déloyale, et en contribuant pas ou peu à la collectivité dont elle dépend. Et ces entreprises ne créent que très peu d’emplois, enrichissant principalement actionnaires et dirigeants, et précarisant tous les autres, apportant leur contribution à l’explosion des inégalités.

Barbaries à tous les étages

lundi 22 juin 2015

Pourquoi accepter le nouveau défaut Grec à venir

Le papier de samedi sur les trois scénarii de sortie de la Grèce de la zone euro a déclenché un débat dans les commentaires sur le nouveau défaut que cela impliquerait pour Athènes, et sur le caractère étonnant qu’un souverainiste soutienne une issue qui coûterait cher aux contribuables. Explications.



Retour sur les premiers défauts

D’abord, comme l’a souligné un autre commentateur, un prêt implique deux parties et un créancier porte une part de responsabilité dans la capacité de l’emprunteur de pouvoir rembourser ou pas les sommes qu’il lui a prêtées. Sans nier certains dysfonctionnements, auxquels Alexis Tsipras semble s’attaquer, il ne faut pas oublier plusieurs faits. D’abord, l’entrée d’Athènes dans la zone euro a été obtenue par le maquillage de ses comptes par Goldman Sachs et l’œil complaisant de toute l’Europe. Ensuite, l’entrée dans l’euro a provoqué un effondrement des taux auxquels la Grèce empruntait, générant une manne contre-productive : après tout, si les marchés prêtaient à bas coût, pourquoi changer ?

Ensuite, même si les taux payés par la Grèce avaient beaucoup baissé, ils restaient supérieurs aux taux que rapportait la dette allemande. En absence théorique de risque de change, ce décalage était une forme de prime de risque. Et on ne peut pas avoir le beurre (des taux plus élevés) et l’argent du beurre (aucun risque de défaut). En somme, les pertes qu’ont essuyées les banques privées étaient justifiées. Et on peut penser qu’elles auraient perdu encore plus si les Etats européens et le FMI n’avaient pas pris le relais pour refinancer la dette grecque. Enfin, il faut rappeler que nous étions nombreux à dire que le plan de 2012 n’était en aucun tenable et qu’Athènes ne pourrait pas rembourser.

Un autre défaut inévitable

dimanche 21 juin 2015

Des migrants et du mur de la Hongrie




La logique d’un mur

Sur Europe 1,  l’ambassadeur de Hongrie en France a très bien fait son travail pour défendre la position de son gouvernement, expliquant calmement le pourquoi de sa décision. Les raisons sont assez simples. La position géographique du pays en fait un lieu de passage utilisé par les populations de l’ex-Yougoslavie, mais aussi des pays du Moyen Orient. Depuis le début de l’année, ce pays de dix millions d’habitants a accueilli 54 000 réfugiés, contre seulement 2 000 en 2012 ! Comme le notait l’ambassadeur, cela revient à plus de 300 000 personnes à l’échelle de la France, et même plus de 800 000 en rythme annuel, plus de quatre fois le nombre total d’immigrés qui rentrent aujourd’hui.

Du coup, la position de la Hongrie semble si compréhensible que même Le Monde et Libération n’ont pas dénoncé le facisme de Viktor Orban de manière grandiloquante. Les deux journaux ont évoqué les faits de manière assez neutre, Jean Quatremer soulignant même que Budapest était débordée. Bien sûr, l’avocat journaliste de l’UE pour Libération finit par le couplet habituel : « libre à l’Espagne et aux pays d’Europe de l’Est d’assumer politiquement et diplomatiquement leur égoïsme national, eux qui ont pourtant su profiter de la solidarité européenne pour rattraper leur retard économique », après avoir applaudi le principe d’une répartition obligatoire du traitement des demandes d’asile.

L’échec de deux illusions

samedi 20 juin 2015

Trois scenarii pour la sortie d’Athènes de la zone euro

Nous devrions savoir dans deux semaines si la Grèce reste encore dans la zone euro. Jamais le pays n’a semblé aussi proche de la sortie tant les négociations sont bloquées entre demandes irréconciliables. Mais toute la question qui se pose est de savoir quand et comment cela pourrait avoir lieu.



Le scénario d’une sortie rapide


Dans ce cas, la Grèce pourrait choisir de suivre le chemin de l’Argentine, faire défaut sur sa dette et quitter la monnaie unique européenne. Outre le fait de pouvoir reprendre le contrôle de sa banque centrale pour financer la transition, Athènes pourrait également s’appuyer sur Moscou, qui serait trop heureux de prendre position dans l’Europe occidentale. Bien sûr, les créditeurs subiraient une forte perte, mais, ce ne serait pas la première fois et le montant de pertes serait gérable pour la zone euro. En outre, les banques européennes se sont largement protégées et ne sont quasiment plus exposées à la dette publique grecque. Il faudrait quand même sauver le système bancaire grec.

Deux scénarii pour une sortie retardée

vendredi 19 juin 2015

Loi Macron : combat de postures pour la motion de censure




Je communique donc je suis

Cette loi est l’occasion d’une mascarade de débat. Voici une majorité « de gauche », donc théoriquement moins encline au laisser-faire et au laisser-passer, qui fait ce que la précédente majorité, de droite, n’a pas osé faire, comme sur le travail du dimanche. Des « socialistes », en nom seulement, déconstruisent certains acquis sociaux historiques, comme le repos de fin de semaine ! Mais la loi Macron n’est pas seulement une affaire de fond. C’est aussi une manœuvre destinée à réduire l’espace politique des Républicains en vue de 2017, en les poussant à une surenchère idéologique. Et il est difficile de ne pas voir dans la théâtralisation de l’usage répété de l’article 49-3 un moyen de combattre l’image un peu trop molle et pas assez résolue du président de la République par rapport à son adversaire de 2012.

Mais le bal des hypocrites est généralisé. Ce débat est aussi un révélateur des priorités des frondeurs en carton du PS. S’ils étaient véritablement choqués par ce projet, ils voteraient la motion de censure, comme en 1962, quand la majorité d’alors s’était disloquée sur le projet d’élection du président de la République au suffrage universel. Les rebelles de papier du PS semblent préférer le confort de leurs investitures aux idées qu’ils prétendent défendre. Mais les ex-UMP, néo-Républicains, ont aussi un sacré culot de déposer une motion de censure sur un texte qui prolonge dans une large mesure les réformes de Nicolas Sarkozy. S’y opposer parce qu’il ne va pas assez loin, comme certains osent le dire, est le comble du ridicule sachant qu’il va plus loin que ce qui avait été fait de 2007 à 2012.

Un système à bout de souffle

jeudi 18 juin 2015

Jean-Pierre Chevènement entre en résistance




Des convictions et de savoir dire non

La décision de Jean-Pierre Chevènement est cohérente avec le parcours de celui qui est un des plus grands hommes de la Cinquième République. Il a toujours été un homme qui a su dire non quand l’essentiel était en jeu, quittant par trois fois les ors de la République, portant, avec Philippe Séguin et Philippe de Villiers le non au traité de Maastricht en 1992, puis l’opposition au TCE en 2005, et portant ses propres couleurs en 2002 à l’election présidentielle. Depuis, comme il me l’avait dit aux universités de rentrée du MRC en 2010, sa stratégie consistait à être dans le cockpit de l’avion quand il aurait des difficultés. C’est pour cela qu’il avait soutenu Ségolène Royal en 2007 et François Hollande en 2012.

Mais il faut bien constater aujourd’hui que cette stratégie n’a pas marché. S’il avait trouvé une oreille ouverte à ses idées en 2007, le président actuel n’a que faire des idées que Jean-Pierre Chevènement porte depuis des décennies. Déjà que la campagne présidentielle en était bien éloignée, le cap eurolibéral assumé de plus en plus clairement, notamment avec le pacte de compétitivité et la loi Macron, la réforme du collège, ou même la politique suivie avec la Grèce mettent la majorité actuelle en porte-à-faux complet avec tout ce qu’a défendu le lion de Belfort. Le parti qu’il a inspiré ne souhaitant pas se distancier davantage de la majorité, il a logiquement choisi de ce distancier de son enfant politique.

Esprit de résistance contre esprit de clan

mercredi 17 juin 2015

Les migrants : enjeu de communication et de pouvoir

Depuis les drames de migrants morts suite au nauffrage de leur bateau, ce sujet reste à la une. Mais il faut bien constater que le débat sur les immigrés illégaux est souvent superficiel et caricatural et qu’il est avant tout l’occasion pour certains de communiquer, pour leur intérêt.



Grosses ficelles de communication

Le sujet est revenu à l’ordre du jour avec l’évacuation de migrants africains sur Paris, puis le refus des forces de l’ordre de laisser passer des migrants à la frontière franco-italienne. « Plus de 50 000 personnes ont débarqué depuis le début de l’année sur les côtes de l’Italie. La plupart souhaitent se rendre dans d’autres pays d’accueil, mais se retrouvent face à des frontières de plus en plus infranchissables » note Le Monde. La fermeté affichée du gouvernement semble destinée à tordre le cou à l’imagerie populaire selon laquelle la gauche aurait une attitude trop angélique sur l’immigration, croyance à relativiser par la forte stabilité des chiffres de l’immigration depuis près de vingt ans.

Le gouvernement donne le change de la fermeté, comme Nicolas Sarkozy avant. Mais cela n’est pas sans créer des tensions à gauche. Cécile Duflot, toujours prompte à l’emphase, a dénoncé « la situation faite aux migrants anciennement situés à La Chapelle et désormais régulièrement dispersés par les forces de police, est insupportable (…) Notre politique des migrations est un Waterloo moral (…) Au-delà de la question du droit d’asile, en vérité c’est la question de l’accueil de l’étranger qui est posée ». On serait curieux de savoir les limites qu’elle met aux droits d’étrangers entrés illégalement entrés dans notre pays, ces nouveaux héros d’une certaine gauche, comme le dit Jean-Claude Michéa.

La comédie du pouvoir

mardi 16 juin 2015

La Grèce et la zone euro entre bluff et chantage




Qui a le plus peur de l’autre ?

La situation actuelle est extrêmement complexe. Pour pouvoir faire céder l’autre partie, il faut apparaître plus résolu, et même prêt à assumer une rupture. Mais personne ne sait si l’Union Européenne est véritablement prête à laisser Athènes sortir de la zone euro et faire défaut plutôt que céder à ses demandes : après tout, la sortie pourrait enclencher le processus de démantèlement de cette construction européenne. Mais de l’autre côté, Tsipras est-il véritablement prêt à quitter la zone euro plutôt que de céder aux diktats de la troïka ? Du coup, difficile de savoir si les fuites concernant une préparation d’un défaut grec représentent une véritable préparation ou une posture destinée à faire peur à Athènes.

Le ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis, a affirmé que l’UE bluffe en affirmant « ne pas croire que les partenaires européens de la Grèce laisseront son pays sortir de la zone euro ». Et si les dirigeants européens ne étaient pas prêts à laisser tomber une carte de leur château ? Il a affirmé qu’il ne « pense pas qu’il y ait un seul responsable européen sensé qui souhaite prendre ce risque » et a dit espérer que l’UE et le FMI bluffaient dans les négociations. Mais, les discussions démarrées samedi dernier n’ont pas abouti puisque les négociateurs des deux parties se sont séparés dimanche. Elles doivent reprendre jeudi, lors de la réunion des ministres des Finances de la zone euro.

Le chantage de la zone euro

lundi 15 juin 2015

Les limites de l’impôt à la source

C’est le gadget de la fin de mandat de François Hollande, qui ne serait mis en place qu’en 2018 pour éviter toute perturbation du scrutin de 2017. Mais même si on peut y voir une forme de modernité ou son aspect plus pratique, le prélèvement de l’impôt sur le revenu à la source pose bien des problèmes.



Impôt et citoyenneté

Au premier regard, une telle réforme peut sembler être de bon sens. Ainsi, les contribuables pourraient payer au fur et à mesure leur impôt, théoriquement sans mauvaise surprise. Le paiement progressif éviterait d’avoir à gérer sa trésorerie dans l’année. Les employeurs, qui collectent déjà les cotisations sociales, ne devraient pas avoir de problème à gérer en plus la collecte de l’impôt sur le revenu, qui pèse moins que les premières. Enfin, on pourrait même imaginer que la collecte de l’impôt en serait fiabilisée et améliorée. Au final, c’est une réforme qui porte peu à controverse, même si beaucoup soulignent sa complexité. Mais l’on peut s’étonner d’une mise en place seulement programmée en 2018.

Pourtant, le prélèvement à la source pose des problèmes. D’abord, sera-t-il une obligation qui s’imposera à tous les citoyens ou une option qui s’offrira aux contribuables ? Ensuite, plus fondamentalement, cette façon de prélever l’impôt revient à le faire de manière relativement invisible et indolore, sans que le contribuable ne s’en rende compte. Un moyen commode pour calmer la révolte fiscale, même si cela est plus du camouflage qu’autre chose. Mais même si l’on considère que l’Etat ne dépense pas tant que cela en France, ne s’agit-il pas d’une nouvelle déresponsabilisation de nos gouvernants et des citoyens ? Ne peut-on pas penser que le paiement direct de l’impôt peut tous nous responsabiliser ?

Réflexion ou communication ?

dimanche 14 juin 2015

Trois raisons pour s’opposer à la fusion Aviron Bayonnais / Biarritz Olympique

Cette semaine, la fusion entre les deux clubs rivaux de la Côte Basque semble avoir fait un grand pas en avant, au désespoir de ceux qui soutiennent ces clubs historiques et ne veulent pas les voir mourir et qui ont à nouveau manifesté hier dans Bayonne. Un projet auquel il faut s’opposer tant sur le principe, que sur la façon de faire, mais aussi sur le fond, bien moins évident qu’il n’y paraît.



Un projet malhonnête, pas crédible et intéressé

Oui, ce projet est malhonnête, pour qui saisit toutes les manœuvres qu’il y a derrière. D’abord, Alain Afflelou, dont la gestion de l’Aviron Bayonnais a été très critiquée, a revendu ses parts à une société, AB Lagunak. Utilisant le principe des poupées russes cher à certains financiers comme Bernard Arnault, cela permet de démultiplier son pouvoir puisqu’il suffit d’une majorité de cette société pour en choisir le vote. En clair, avec seulement 51% des parts de cette société (mais seulement 34% du capital en réalité), il est possible de choisir le destin du club. Autre procédé plus que contestable, étant donné que les amateurs peuvent bloquer toute fusion dans le cadre réglementaire actuel, la FFR a déjà indiqué qu’elle allait mettre en place le cadre réglementaire permettant la création de cette entité.



Cette réactivité laisse songeur. Puisque les règles actuelles ne permettent pas aux promoteurs du projet de le mener à bien, ils changent les règles. Difficile de ne pas y voir l’influence de Serge Blanco… Entre la prise de contrôle de l’Aviron par une société poupée russe et le changement des règles nationales pour permettre la fusion, le projet est condamnable. En outre, des actionnaires de l’Aviron soulignent le manque de solidité du projet actuel, trop ambitieux, et qui pourrait se heurter à la désertion en masse d’afficionados qui ne sont pas du bétail que l’on peut transporter d’une enceinte à une autre contre leur volonté. Enfin, la participation de la société immobilière Alday dans AB Lagunak questionne. Des esprits mal placés pourraient lui imaginer un intérêt à récupérer les terrains du stade biarrot...

Ne pas faire table rase du passé