mercredi 30 septembre 2015

L’étonnant appui de Paul Krugman à Donald Trump

C’est un des rebondissements étonnants de cette surprenante campagne des primaires aux Etats-Unis, qui a vu le milliardaire Donald Trump prendre largement la tête des sondages du côté Républicain, en tenant un discours volontiers outrancier. Mais sur l’économie, Paul Krugman le soutient !



Le soutien limité d’un démocrate

Cela peut paraître étonnant de la part d’un progressiste, qui défendait une assurance maladie universelle dans son livre « L’Amérique que nous voulons », prenant le système Français en exemple. Il dénonce aussi « son racisme implicite et son insistance à arrêter onze millions d’immigrés sans papier et les retirer de notre sol ». Mais, il maintient que « Trump a raison sur l’économie » quand Jeb Bush l’attaque sur « sa volonté d’augmenter les impôts pour les riches, ses commentaires sur la couverture universelle pour la santé ». Pour lui, les attaques de Bush portent « précisément sur les points où M.Trump a raison ». Cruel, il rappelle que les Républicains disaient que la hausse des taxes et l’Obamacare détruiraient des emplois et que Mitt Romney promettait un taux de chômage à 6% en 2016.


Que penser de ces primaires ?

mardi 29 septembre 2015

Nadine Morano, l’arme anti-Le Pen de Sarkozy ?




Dépasser le FN par la droite


Nadine Morano n’a pas fait dans la demi-mesure en évoquant la présence de terroristes parmi les migrants. Puis, elle a affirmé que la France est un « pays de race blanche », « un pays judéo-chrétien » et qu’elle n’a « pas envie que la France devienne musulmane ». Devant la réaction des autres intervenants, elle est restée droite dans ses bottes : « je suis désolée, c’est un mot (race) qui est dans le dictionnaire, je ne vois pas en quoi il est choquant ». Ce faisant, la députée européenne est profondément démagogique en parlant d’envahissement, et flirte avec la xénophobie en parlant de race blanche, oubliant une partie du pays. Bien sûr, ses propos ont déclenché la polémique, mais il n’est pas intéressant de se demander ce que cela aurait été s’ils avaient été tenus par Marine Le Pen et non elle.

La présidentielle dans le viseur

lundi 28 septembre 2015

De l’Arabie Saoudite, la Russie, l’Iran, la Syrie, Cuba et de l’orwellisation du monde

« Ce fut plutôt un choc pour Winston de découvrir, à propos d’une remarque faite par hasard, qu’elle ne se souvenait pas que l’Océania, il y avait quatre ans, était en guerre contre l’Estasia et en paix avec l’Eurasia. Il est vrai qu’elle considérait toute la guerre comme une comédie. Mais elle n’avait apparemment même pas remarqué que le nom de l’ennemi avait changé », 1984, Georges Orwell (merci au blog d’Olivier Berruyer pour la retranscription)



1984 est sans doute le premier livre de politique que j’ai lu. Dans ce roman, le pouvoir réécrit constamment l’histoire et change d’ennemi, l’Océania affrontant tour à tour l’Estasia puis l’Eurasia, en effaçant toute trace du précédent conflit. Un parallèle troublant avec l’actualité internationale récente.

Des méchants et des gentils

Les dernières années ont de quoi donner le tournis. Il y a deux ans, il était entendu que la Russie, l’Iran et Bachar el-Assad étaient sans doute les pires méchants de la planète. Vladimir Poutine était coupable d’avoir envahi l’Ukraine, l’Iran, de préparer une bombe atomique et le régime Syrien, de massacrer son peuple. Et Cuba était toujours dans les limbes du blocus imposé par les Etats-Unis. Mais en quelques mois, la situation a complètement changé. Cuba a été reconnu par les Etats-Unis. Un accord a été trouvé avec l’Iran, offrant de juteuses perspectives d’affaires. Et le développement de Daech, qui contrôle une large partie de l’Irak et de la Syrie semble devoir imposer aux dirigeants de la planète de se rabibocher avec la Russie, et même en partie avec Bachar el-Assad pour faire barrage aux islamistes.


Ces 180° diplomatiques sont quelques peu perturbants. Même si le pragmatisme peut être une vertu dans les relations internationales (après tout, la Russie communiste a joué un rôle majeur pour battre les nazis), les récentes fluctuations amènent tout de même à se poser des questions sur les choix de nos dirigeants. On pourrait aussi questionner notre rapport à certaines monarchies pétrolières, au premier rang desquelles l’Arabie Saoudite. N’est-il pas inconfortable, a minima, pour ne pas dire très choquant moralement, de voir que tant de dirigeants des grandes démocraties de la planète sont allés à l’enterrement de l’ancien roi d’un pays dont les règles permettent de décapiter, puis crucifier pour un simple délit d’opinion. Ne franchissons-nous pas la compromission avec des valeurs fondamentales ?

La guerre, enjeu de communication

dimanche 27 septembre 2015

Michel Platini mérite-t-il d’être soutenu ?




Un mélange des genres malheureux

Bien sûr, il est impossible d’avoir des certitudes sur ces affaires. Même si l’ancien numéro 10 de l’équipe de France, actuel patron de l’UEFA et candidat à la présidence de la FIFA certifie que cette somme n’est que la rémunération d’un travail réalisé de 1999 à 2002 pour mieux synchroniser les calendriers des compétitions de football sur la planète, deux points posent question. D’abord, la somme : un million huit cent mille euros pour une mission de trois ans, cela représente quand même cinquante mille euros par mois, sans que l’on sache s’il s’agissait ou non d’une mission à temps plein ou partiel. C’est tout de même une rémunération colossale. Ensuite, il est quand même étonnant que Michel Platini ait attendu 9 longues années pour toucher la réumération de son travail, fini en 2002, payé en 2011 !

Ensuite, se pose la question de l’intégration de Michel Platini dans le système Blatter, comme l’avait étudié en détail Régis Soubrouillard dans Marianne. Il faut noter ici qu’il a soutenu la très controversée candidature du Qatar à l’organisation de la coupe du monde de football en 2022, une aberration climatique, qui pousse certains à envisager son report plus tard dans l’année, et le théâtre d’une construction de stades à l’utilité discutable à long terme, dans des conditions se rapprochant de l’édification des pyramides … Pire, comme le rapporte Régis Soubrouillard, comment ne pas penser à une forme de mélange des genres assez malsain en sachant que son fils travaille directement pour le Qatar, alors qu’il aurait appuyé la candidature du pays dans la campagne pour la coupe du Monde 2022 ?

Autant symptôme que mauvais exemple

L’Isagogè

Billet invité de Marc Rameaux, qui vient de publier « Portrait de l’homme moderne »



Patriotisme : Amour de son pays et de ce qu’il porte : son histoire, sa culture, ses valeurs, son art de vivre. Puis reconnaissance de ce qu’il nous a apporté dans notre formation d’homme.

Nationalisme : Haine des autres, revendication agressive de son identité et de sa culture pensées comme compétition et relations de domination.

Universalisme : Atteinte de valeurs communes à toute l’humanité.

Relativisme : Pensée que toutes les convictions se valent. Prétend souvent être l’universalisme, du fait de son absence d’attachement à une culture particulière, qui le fait lui ressembler. Il n’en est rien, toute valeur étant pour lui interchangeable, contrairement au véritable universalisme. Masque une stratégie assez grossière de prise de pouvoir, faisant taire tout patriotisme en l’accusant de nationalisme, afin de rester le seul à avoir le droit de discourir. Ressemble en cela au nationalisme, bien qu’il s’en prétende l’ennemi privilégié, dans la mesure où l’un comme l’autre sont des stratégies d’accaparation du pouvoir. Remplace simplement la préservation du pouvoir d’une nation agressive par la préservation d’intérêts de caste.

samedi 26 septembre 2015

Les travaillistes passent de Macron à Mélenchon

Certes, cela ne s’est pas fait d’un seul coup. Après Tony Blair, il y avait eu Gordon Brown, puis Ed Milliband, qui marquaient déjà une inflexion à gauche progressive après le théoricien de la gauche de droite. Mais il y a quinze jours, les adhérents du Labour ont choisi la rupture, avec Jeremy Corbyn.



Cette rupture venue de la gauche

Le résultat de l’élection du leader du parti travailliste a été une véritable surprise. Après la victoire de David Cameron et la défaite d’Ed Milliband, beaucoup pariaient sur un candidat centriste, un retour de flamme des années Blair, où le parti travailliste avait dominé la vie politique britannique, pour affronter des conservateurs qui semblent en partie suivre ce même chemin. Certains attribuaient justement la défaite au positionnement trop à gauche d’Ed Milliband, qui avait battu de peu son très centriste de frère lors de la précédente primaire. Au printemps, la candidature de Jeremy Corbyn, parlementaire depuis trente ans, à la gauche de la gauche du parti travailliste, semblait une anecdote de cette élection. Mais finalement, il a écrasé les autres candidats en réunissant 59% des voix des votants dès le premier tour !



Pourtant, Jeremy Corbyn est l’anti-thèse complète de Tony Blair, « le plus dur des gauchistes les plus durs » pour The Economist. Il propose des nationalisations, une augmentation des dépenses publiques financée par la banque centrale, un « assouplissement quantitatif pour le peuple », un contrôle des loyers, la gratuité des universités. Pour la bible des élites globalisées, il serait coupable d’une admiration coupable pour Hugo Chavez, Vladimir Poutine, Syriza ou le Hamas et serait carrément « anti-américain, anti-Israël, anti-OTAN et même anti-Union Européenne, ‘une conspiration du marché dérégulé’ ». Au final, c’est un peu comme si Jean-Luc Mélenchon revenait au Parti Socialiste et en prenait le contrôle en rassemblant près de 60% des suffrages des adhérents dès le premier tour de la primaire !

Que penser d’un tel choix ?

vendredi 25 septembre 2015

L’affaire Volkswagen, concentré de notre époque

L’immense scandale généré par la révélation du trucage des tests anti-pollution par le constructeur allemand n’est pas seulement un fait divers exceptionnel. On peut également y voir une forme de synthèse de bien des dysfonctionnements de nos sociétés actuelles.



La triche, taille XXL

L’affaire est incroyable. Aujourd’hui, le groupe allemand, propriétaire d’une pléiade de marques (Audi, Seat, Skoda, Porsche, Bentley, Lamborghini ou Bugatti), a admis avoir mis en place un logiciel sur les moteurs diesel équipant environ 11 millions de ses voitures dans le monde pour contourner les tests antipollution. Il est fort possible que cette tricherie aille bien au-delà des Etats-Unis, même si c’est là que le pot aux roses a été découvert puisque ces moteurs sont d’abord vendus en Europe. D’ailleurs, le ministre des transports d’outre-Rhin a admis avoir été « informé qu’en Europe également des véhicules équipés de moteurs diesel de 1,6 et 2,0 litres sont touchés par les manipulations dont on parle ». Plusieurs enquêtes ont rapidement été lancées, en Allemagne, en France et au Mexique.



Les conséquences pour le constructeur sont désastreuses. Le groupe risque une amende de plus de 10 milliards de dollars aux Etats-Unis. En outre, cela ne prend pas en compte tous les risques légaux dans un pays qui a la poursuite facile et où les clients pourraient bien porter plainte contre le constructeur afin de monnayer ces fausses promesses. Encore pire, ce scandale pourrait teinter l’excellente image du groupe et de ses marques, facteur clé de leurs succès. Ici, les dégâts sont incalculables. La bourse a réagi vivement, avec un recul du titre de 35% en 2 jours. Son patron a été contraint de démissionner, même s’il faut noter qu’il touchera une retraite de 28,5 millions d’euros et qu’il pourrait doubler ce montant dans le cadre d’un départ négocié, le double de sa rémunération de 2014.

Le voyou qui en vaut 1000 ?

jeudi 24 septembre 2015

Migrants : le problème, c’est l’Europe




Des méchants et des gentils

Depuis quelques semaines, nous avons droit à une critique de tous les Etats européens : la France, pour son inaction, l’Allemagne, pour son revirement spectaculaire, après avoir été portée au pinacle, les peuples, en général, pour leur égoïsme et leur manque d’ouverture, la Hongrie en particulier, parce qu’elle a le culot de mettre des barbelés à ses frontières, qui sont aussi celles de l’espace Schengen, et plus généralement, les pays d’Europe de l’Est qui refusaient les quotas obligatoires d’accueil de migrants. Le Monde fait d’Orban un « mauvais génie » et voit dans la Hongrie un « verrou de l’Europe ». La Grèce est critiquée pour ne pas tenir ses frontières, ou son mauvais accueil, après avoir vu ses budgets coupés à la hache par l’UE ! Enfin, la Commission a épinglé 19 pays pour non-respect du droit d’asile.

L’UE veut se présenter comme le gentil qui souhaite accueillir les réfugiés martyrisés par les jihadistes en Syrie, dont l’Europe aurait besoin du fait de sa démographie. Mais ceci n’est qu’une propagande destinée à habiller une quête de pouvoir. L’UE est la source de nos problèmes. D’abord, il est fou d’avoir une politique migratoire unique pour des pays aux situations démographiques et économiques aussi différentes. Ensuite, il faudrait admettre que la majorité ne sont pas des réfugiés, mais bien des migrants économiques, comme le montrent les statistiques de Frontex. Ensuite, il est bien évident que l’espace Schengen, en supprimant les frontières intérieures, créé une pression disproportionnée sur des pays qui ont du mal à la gérer (Grèce, Hongrie) et créé un formidable appel d’air avec la position de Berlin.

La solution, ce sont les Etats

mercredi 23 septembre 2015

La chute minime et illusoire des inégalités

Alors que l’on parle toujours de l’augmentation des inégalités, thème cher à Stiglitz ou Piketty, l’INSEE a révélé des chiffres qui montrent que les inégalités auraient baissé en 2013, comme en 2012. Mais faut-il vraiment se réjouir de ces chiffres et traduisent-ils un vrai renversement de tendances ?



L’hirondelle ne fait pas le printemps

Dans l’absolu, on ne peut que se réjouir de cette baisse des inégalités et de la progression de 1,1% du pouvoir d’achat des 10% des plus bas revenus (à 10 730 euros après impôts) quand les revenus des 10% des plus hauts revenus ont reculé de 1,8% (à 37 200 euros). L’indice de Gini recule donc de 0,305 à 0,291 de 2012 à 2013, le plus bas niveau depuis 2009. En outre, il faut souligner que la France présente un niveau d’inégalités plus faible que dans la majorité des autres pays. Mieux, le taux de pauvreté est passé de 14,3 à 14% en un an. Les raisons de cette évolution sont l’augmentation des impôts des plus riches, les impôts directs qu’ils paient étant passés de 26 à 27,9% du revenu disponible, quand, au contraire, les plus bas revenus ont bénéficié d’une hausse des prestations sociales.



Mais cette présentation des choses est insuffisante. En effet, même si les inégalités avaient légèrement baissé en 2012, et que cela constitue donc une deuxième baisse consécutive, il faut noter que le revenu médian (séparant les 50% qui gagnent le plus des 50% qui gagnent le moins), affiche une baisse de 0,1%, ce qui indique a contrario que les revenus moyens ont stagné en 2013, à un niveau de 1667 euros que l’on ne peut pas considérer comme suffisamment élevé. En outre, comme le montre le graphique du Figaro, on constate que le revenu médian tend à baisser légèrement depuis 2008, phénomène inquiétant. Enfin, on peut également voir que si les inégalités reculent, elles le font après une hausse constante de plus de 15 ans, ce qui relativise l’inversion de tendance, encore trop récente.

L’arbre qui cache la forêt

mardi 22 septembre 2015

François Fillon : de Séguin à Bush

Dimanche, l’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy, actuellement troisième de la course aux primaires des Républicains, était l’invité d’Europe 1, où il a développé ses propositions. Mais l’ancien séguiniste continue à se tourner de plus en plus vers les idées des néo-conservateurs étasuniens.



Néolibéralisme et interventionnisme

Le nom « Les Républicains » avait plus que jamais un sens dimanche matin, tant le discours de François Fillon se rapproche des Républicains d’outre-Atlantique. Sur l’économie, nous avons eu droit au cocktail ultra-libéral et austéritaire : passage de 35 à 39 heures hebdomadaires, passage de l’âge de la retraite à 65 ans. L’ancien Premier ministre suit le courant néolibéral dominant en cherchant à dépasser Nicolas Sarkozy par sa droite économiquement. Il développe un discours où il place l’ancien Président de la République comme trop conservateur et pas assez réformateur, qui aurait bridé les volontés réformatrices de Matignon pendant son mandat. Là où Nicolas Sarkozy semble parier sur les questions de société et l’immigration pour battre Alain Juppé, François Fillon parie sur l’économie.

Mais l’ancien Premier ministre a également longuement développé les questions internationales, sans doute le moyen de se donner une crédibilité sur une question où il apparaît en retrait par rapport à ses concurrents qui sont davantage capés sur la question. Pour lui, « la priorité, c’est d’éliminer le totalitarisme islamique ». Il a aussi estimé qu’il « fallait s’appuyer sur la Russie mais aussi reprendre le dialogue avec le régime syrien ». Même s’il a souligné avec raison que les interventions occidentales peuvent sans doute finir par être contre-productives, et qu’il faudrait que les pays de la région soient en première ligne, comment ne pas voir qu’une alliance avec la Russie et les chiites pour faire tomber les extrémistes sunnites est un pari sans filet ? Car le précédent Libyen démontre les limites de ces raisonnements.

Des moutons au bord d’un précipice

lundi 21 septembre 2015

Tsipras : la victoire du Hollande Grec ?

Les Grecs se sont prononcés pour une troisième fois en huit mois, après les législatives de janvier, puis le référendum de juillet. Pour la troisième fois consécutive, Tsipras sort gagnant des urnes. Mais dimanche, il a gagné sur l’agenda inverse de celui qui lui avait donné la victoire en janvier.



Renversement de situation

Qu’elles semblent loin les élections législatives de janvier, où Syriza et Alexis Tsipras promettaient au peuple Grec la fin de l’austérité et de la tutelle humiliante de ses créanciers ! Le Premier ministre est resté sur cette ligne pendant plus de cinq mois, jusqu’au référendum surprise, qui rattrapait quelque part celui du Premier ministre Papandréou, que les dirigeants européens avaient refusé, avant d’imposer une nouvelle équipe au pouvoir. Début juillet, il réunissait plus de 60% des Grecs dans l’opposition à l’humiliant plan proposé par les créanciers, restant cohérent avec le mandat que les citoyens lui avaient donné cinq mois auparavant. Mais, dans la dernière ligne droite, Alexis Tsipras a fini par accepter un accord qui ressemblait grandement à ceux qu’il dénonçait quand il était alors dans l’opposition

Mais, ce faisant, il a perdu le soutien d’une partie de sa majorité et de son parti, même s’il a pu faire voter les trois lois exigées par ses créanciers avec le soutien des partis qu’il avait remplacés. Ne pouvant pas quand même gouverner avec Nouvelle Démocratie et le PASOK, Alexis Tsipras a tenté un nouveau coup de poker il y a un mois, à savoir démissionner pour imposer une nouvelle élection. La minorité de Syriza, restée fidèle au programme des législatives de janvier a quitté le parti pour en fonder un nouveau. Après une campagne de moins d’un mois, près de la moitié des Grecs a choisi de ne pas voter. Mais plus d’un tiers de ceux qui se sont déplacés ont voté pour Alexis Tsipras, qui devance à nouveau le parti de droite Nouvelle Démocratie, les dissidents de Syriza peinant pour atteindre 3%.

Un politicien comme les autres

dimanche 20 septembre 2015

Derrière Patrick Drahi et AB-Inbev, la parabole des inégalités




Des opérations extravagantes

Les chiffres donnent le vertige quand on les met bout à bout. Le groupe de Patrick Drahi, ne réalisait encore que 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2013, notamment autour de Numéricable. L’homme d’affaire conserve une majorité de l’entreprise, dont le siège social est en Hollande, via une holding domiciliée dans un paradis fiscal. Tout s’accélère début 2014, avec le rachat pour 13,5 milliards d’euros de SFR, deuxième opérateur téléphonique Français. Déjà, il est pour le moins surprenant qu’une entreprise puisse emprunter l’équivalent de 4 fois son chiffre d’affaires pour acheter un rival plus gros que lui. En décembre 2014, Altice poursuit ses acquisitions en rachetant pour 7,4 milliards d’euros Portugal Telecom, puis 70% du cablo-opérateur étasunien Suddenlink en mai 2015 pour 9 milliards.

Et après avoir échouer à racheter Bouygues Telecom pour 10 milliards d’euros en juin de cette année, le groupe tourne son attention à nouveau outre-Atlantique. Cette semaine, il a annoncé le rachat d’un nouvel cablo-opérateur étasunien, Cablevision, pour 17,7 milliards de dollars. Le groupe devrait réaliser plus de 20 milliards d’euros de chiffre d’affaire cette année, pour un endettement cumulé de plus de 40 milliards ! Altice finance l’essentiel de ses acquisitions par des dettes, complétant le tour de table par des participations minoritaires de deux fonds aux Etats-Unis. Parallèlement, le groupe AB InBev, leader mondial et déjà acteur d’opérations capitalistiques d’envergure, semble vouloir racheter le deuxième brasseur, SAB-Miller, déjà bien placé en Afrique, le nouvel eldorado du secteur.

Exubérant et surtout injuste

samedi 19 septembre 2015

Nouvelle économie, même vieille recherche de la rente ?

Sociale, collaborative, et bien sûr moderne : la nouvelle économie, issue des révolutions technologiques autour d’Internet nous a tellement apportés (dans mon cas, un moyen de m’exprimer politiquement et de débattre) que l’on oublie un peu vite que tous ses ressorts ne sont pas si nobles.



Barbares à la recherche de rentes ?

La plupart des géants d’Internet proclament souvent avoir des objectifs qui dépassent largement le simple profit. Google veut organiser l’information de la planète et rendre nos routes plus sûres, Facebook faciliter nos échanges. Pourtant, quand on étudie les comptes d’exploitation de ces entreprises (sans même parler de la fortune ou des salaires de leurs dirigeants), on constate qu’ils ne sont pas insensibles à la quête d’un maximum de profits… En outre, il faut bien constater que les errements de cette nouvelle économie, et la spéculation qui l’a entourée au tournant du siècle, a provoqué un cataclysme boursier, créant des millions de chômeurs. Et naturellement, l’émergence de ces nouvelles entreprises a aussi un coût pour des entreprises de l’ancienne économie (on peut penser à Virgin par exemple).




L’accentuation des rapports de force

vendredi 18 septembre 2015

La nouvelle attaque effarante contre les notes




Quand c’est flou, il y a un loup

Bien sûr, nous avons eu droit à toute la traditionnelle complainte sur la dureté des notes de 0 à 20, leur caractère stigmatisant pour les élèves les moins bien notés… Même s’il ne faut pas ignorer une éventuelle souffrance des enfants, il faut bien reconnaître que le grand relâchement de la notation depuis plus de 20 ans (illustré par la grande braderie du baccalauréat, où la proportion de mentions très bien a été multipliée par 10 en 25 ans, au point d’en trouver plus aujourd’hui qu’on ne trouvait de mentions bien il y 25 ans), ne semble pas avoir amélioré le bien être des élèves, et encore moins le niveau, qui semble évoluer en sens inverse de la dureté de la notation. Il est tout de même effarant de continuer à tenir un tel discours après un tel assouplissement des notes, qui n’a pourtant rien produit de bon.

En outre, on ne voit pas en quoi cette nouvelle échelle serait moins stigmatisante, au contraire même. Ceux qui seront en bas de l’échelle ne seront pas mieux parce qu’ils auront 1 ou 2 sur 5 plutôt que 7 ou 8 sur 20 ! Au contraire même, le manque de nuance d’une notation avec une échelle bien plus restreinte pourrait bien rendre les notes encore plus dures. Alors que des progrès ou des reculs minimes sont perceptibles avec une échelle sur 20, encourageant et alertant rapidement un élève, une notation sur 5 risque soit de camoufler les évolutions limitées ou alors de leur donner une importance bien supérieure à celle qu’elles ont en réalité. En fait, loin d’être moins traumatisante, en divisant par 4 la nuance, on rend le jugement encore plus tranchant. C’est comme si les élèves pouvaient seulement avoir 4, 8, 12, 16 ou 20.

Une société schizophrène

jeudi 17 septembre 2015

Smart essaie de miniaturiser les droits sociaux

La déconstruction des droits sociaux ne passe pas seulement par le futur projet de loi qu’a annoncé Manuel Valls il y a une semaine. Car cette déconstruction a déjà commencé par les accords de compétitivité, déjà passés par nos constructeurs nationaux, et qui se négocient chez Smart.


Résignation des salariés, résistance des syndicats

François Lenglet a bien eu raison de souligner le caractère exceptionnel du référendum organisé par Smart. La direction de la marque, qui appartient à Mercedes, a demandé à ses salariés s’ils soutenaient son pacte 2020, qui prévoit un passage du temps de travail de 35 à 39 heures, payées 37, une diminution du nombre de RTT pour les cadres l’embauche de 50 CDI d’ici à fin 2017, une prime exceptionnelle et une garantie de l’emploi jusqu’en 2020. Pour passer outre l’opposition des syndicats, le constructeur automobile a donc fait un référendum, approuvé par 56% des salariés qui ont donc accepté ses propositions. Il faut noter que les cadres les ont acceptées à 74% quand les ouvriers s’y sont opposés à 61%. Le référendum n’ayant pas de valeur légale, il faut aussi l’accord d’une partie des syndicats.

Curieusement, il suffit de l’accord de syndicats ne représentant que 30% du personnel pour que l’accord soit mis en place. En clair, le cadre légal actuel permet à Smart de mettre en place son plan avec le seul soutien d’un syndicat représentant 30,1% des salariés, même si des syndicats représentant 69,9% des salariés s’y opposaient ! Mais malgré le résultat du référendum, la CGT et la CFDT, qui représentent 54% des voix des salariés, ont été rejointes par la CFTC hier, ne permettant pas à la direction de pouvoir signer un accord car elle avait besoin du soutien conjoint de la CFTC et de la CGC pour réunir des syndicats représentant plus de 30% des salariés. La CFTC a déclaré vouloir « laisser le choix à tous les coéquipiers d’accepter ou non une modification de leur contrat de travail » et mis fin aux négociations.

Rapports de force et chantage à l’emploi

mercredi 16 septembre 2015

Migrants : ce que dit la fermeture des frontières



Des règles et de leur relativité

Il y a quelques jours, on applaudissait la générosité de l’Allemagne, en oubliant sans doute un peu les intérêts bien compris d’un pays au faible taux de chômage, à la population déclinante, et qui peut trouver dans ces migrants une main d’œuvre bon marché pour soutenir sa compétitivité. Mais devant l’afflux des migrants, dépassant le cap des 10 000 sur une seule journée, Berlin a fini par rétablir des contrôles aux frontières pour juguler un flux devenu trop important. L’initiative allemande a été rapidement suivie par l’Autriche, puis d’autres pays d’Europe centrale. Pour l’instant, cela se passe encore dans le cadre des accords de Schengen, qui permettent une interruption temporaire. La Hongrie a annoncé qu’elle allait étendre sa clôture anti-migrant à la frontière de la Roumanie.

Mais ce faisant, la situation devient de plus en plus arbitraire. N’y-a-t-il pas un paradoxe à ce que Berlin s’exonère des règles de l’espace Schengen (même si cela n’enfreint pas les traités), tout en menaçant de sanctions financières ceux qui refuseraient d’accepter des quotas obligatoires de migrants ? Cette Europe consacre la loi du plus fort, qui ose même s’affranchir des règles tout en ne cessant de vouloir en imposer à ses partenaires (que ce soit l’austérité, avec les « plans d’aide » ou le TSCG, et les quotas obligatoires de migrants). Cela est d’autant plus choquant que l’Allemagne avait été la première à ne pas respecter le pacte de stabilité de l’euro qu’elle avait pourtant demandé de mettre en place après Maastricht. Bref, en Europe, les règles allemandes s’appliquent surtout à ses partenaires.

Egoïsme ou simple réalisme ?

mardi 15 septembre 2015

L’usine Airbus aux Etats-Unis : victoire ou défaite de l’Europe ?

Hier, l’avionneur européen a ouvert une usine d’assemblage aux Etats-Unis sous les applaudissements de la quasi-totalité des commentateurs. En 2018, 50 A320 y seront assemblés par an. Mais cette expansion géographique d’un des fleurons de notre industrie est-elle une bonne ou une mauvaise nouvelle ?



Deux poids, deux mesures

Pourtant, quand on prend du recul, quelque chose cloche. En effet, d’une part, Boeing, qui vend presque autant d’avions qu’Airbus, continue à assembler l’intégralité de ses avions aux Etats-Unis, sans avoir besoin de construire des usines en dehors de son pré carré. En revanche, Airbus s’est astreint à ouvrir une usine d’assemblage en Chine pour s’ouvrir plus largement les portes du pays. Et, après avoir déjà promis d’ouvrir une usine pour assembler l’A400M s’il était retenu, l’avionneur européen ouvre aujourd’hui une usine en Alabama, qui a imposé un investissement de 600 millions d’euros. Voici donc de l’argent qui a dynamisé l’économie étasunienne et non l’économie européenne.

On peut aussi voir dans ce choix une volonté de se protéger contre l’euro cher, qui a largement pénalisé l’avionneur européen dans les dernières années, comme le dénonçait Louis Gallois juste avant la grande crise financière. Ainsi, Airbus se protège d’un probable renchérissement de l’euro à terme. Ce n’est pas pour rien que le site avait été retenu dès 2009… L’ironie est que le site est ouvert alors que la monnaie unique européenne est au plus bas depuis des années, ce qui en limitera le bénéfice, d’autant plus qu’il faut faire venir certaines pièces d’Hambourg, ce qui sera compensé (!!!) par des charges inférieures de 30% à celles pratiquées en France ou en Allemagne, sans compter les aides.

L’Europe, dindon de la farce

Sur les « fronts » de libération contre l’euro austérité (4/4) (billet invité)

Billet invité de l’œil de Brutus, suite du 1er papier, du second et du troisième



Les conditions d’un rassemblement

« Notre peuple porte de graves blessures, mais il suffit d’écouter battre son cœur malheureux pour connaître qu’il entend vivre, guérir, grandir. Le jour va venir où, rejetant les jeux stériles et réformant le cadre mal bâti où s’égare la nation et se disqualifie l’Etat, la masse immense des français se rassemblera sur la France. »
Charles de Gaulle

Le « contenant » de ce front (les forces politiques susceptibles de le constituer) étant défini, demeure le plus important et ce qui lui est inéluctablement lié : son contenu (son programme politique). Que l’on s’entende bien sur une choses : la sortie de l’euro ne sera pas une partie plaisir, ni pour ceux qui la mettront en œuvre, ni pour le peuple français qui devra en accommoder son quotidien, et ce dès l’instant même où la décision sera prise … et probablement même avant : 40 ans de renoncements face au monde de la finance ont doté celle-ci d’un sérieux coup d’avance et les jeux d’anticipation des marchés, alliés aux décisions unilatérales des institutions européennes (en particulier de la BCE comme on a pu le constater en Grèce) initieront très certainement les tourbillons spéculatifs dès que l’arrivée au pouvoir d’une équipe souverainiste ne sera pas seulement actée mais simplement une possibilité hautement envisageable.