mercredi 30 août 2017

Travailleurs détachés : Macron entre Hollande et Sarkozy

Curieux spectacle pour cette rentrée politique que de voir le président traverser l’Europe et s’agiter pour dénoncer cette « trahison de l’esprit européen » que représente la fameuse directive sur les travailleurs détachés et réclamer sa réforme. Après le refus, temporaire, du rachat de STX par Fincantieri, on pourrait croire à une évolution souverainiste. Sauf qu’il ne s’agit que de communication.



Postures et compromis dérisoires

Sur STX, même s’il faut pour l’instant se réjouir de la décision prise de mettre son veto au rachat par des Italiens très liés à des Chinois, il convient de rester prudent. S’agit-il d’une commedia del’arte, comme nous avons eu le cas sur Alstom, où ceux qui nous gouvernent cherchent surtout à montrer qu’ils défendraient les intérêts de la France, tout en laissant faire en réalité grâce à des pseudo-compromis bancals. Il faut attendre quelques semaines pour juger pleinement ce que le gouvernement décidera de faire sur ce sujet. Comme nous l’avons bien vu avec Alstom et GE, le compromis était totalement déséquilibré, et rarement en faveur de nos intérêts, dont la défense semble tétaniser nos dirigeants.

Voilà qui amène à remettre en perspective le cinéma diplomatique de Macron. Bien sûr, entre des discours calibrés, et un tour d’Europe alimentant les média, le président semble prendre à bras le corps ce problème. Ici, on peut y voir l’enfant politique de Sarkozy : beaucoup d’agitation, de coups de mentons, pour pas grand chose au final (comme pour la délinquance et la finance alors). Car ce qui est frappant pour qui accorde la moindre attention aux propositions de l’Elysée, c’est leur très grande timidité. Ce n’est pas en limitant à un an des contrats, qui sont de toutes les façons bien plus courts en général, que cela limitera cette pratique, d’autant plus qu’il serait sans doute possible de les enchaîner.

Si cela était si choquant, il faudrait faire comme pour Schengen après les attentats : une suspension de cette pratique scandaleuse, qui introduit une concurrence totalement déloyale pour tous les travailleurs français qui, avec pourtant 15% de la population qui cherche un emploi, affrontent la concurrence de personnes qui viennent de pays où les cotisations sociales sont bien plus faibles et où les salaires sont bien plus bas. Mais, merci à Emmanuel Macron de montrer qu’il est si compliqué de changer quoique ce soit dans l’UE, montrant bien que la seule véritable solution est une sortie de ce monstre. Car nul doute que le compromis à venir ne changera pas plus les choses que celui obtenu par Hollande

Bref, ici, Macron ne fait que de la communication, une forme de triangulation, où il reprend un argument du camp adverse pour essayer d’affaiblir son opposition. Mais, à juger par une courbe de sondage qui descend plus vite que pour tous les autres présidents, les manœuvres grossières du président ne parviennent pas à convaincre. Le maquillage est bien trop grossier. Et ce faisant, il est possible qu’il parvienne à la fois à décevoir ses soutiens sincères, déçus par les gouttes d’eau d’apparence souverainiste qu’il met dans son vin, sans pour autant convaincre ceux qui s’opposaient à lui, pas dupes de la réalité des mesures qu’il prend ou encore de l’agenda plus global qu’il a choisi de mettre en place.


Ce faisant, Macron montre qu’il n’est que l’enfant politique de Sarkozy et Hollande. Du premier, il reprend les postures aussi jupitériennes que désordonnées et superficielles, qui ne changeront pas grand-chose au final. Et du second, il reprend le goût des compromis et de la moraline venue de gauche. Et au final, il poursuit dans la même direction qui nous mène à l’échec depuis plus de 30 ans.

14 commentaires:

  1. Macron n'est qu'un illusionniste de faire croire qu'il fera quoique ce soit de vraiment différent de ses prédécesseurs. Il est aussi le petit fils politique de Giscard sociologiquement. La différence est qu'il arrive à une toute autre époque où le parti socialiste a fini par épuiser son crédit politique en faisant la même politique que la droite, UE oblige. Ce qui est vrai depuis 1992 mais produit tous les effets délétères annoncés par Philippe Seguin par son discours politique prémonitoire contre Maastricht en septembre 1992 sans qu'il en tire toutes les conséquences politiques.
    Macron n'est donc que le fondé de pouvoir de l'oligarchie ultralibérale au service de l'UE sous tutelle allemande.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Remarquez, vous avez NDA aussi, qui est quand même d'une bêtise ou/et ignorance hallucinante :

      "Depuis le traité de 1963, signé par le Gal de Gaulle, quelqu'un que tu aimes bien je crois, il y a des sommets franco-allemands réguliers."

      https://twitter.com/Maitre_Eolas/status/902271749861072897

      Supprimer
  2. STX est actuellement très liée à une société coréenne, mais vous préférez quelle pas liée à une société italienne, comprenne qui pourra...

    Si vous ne voulez plus de travailleurs détachés, il faut directement sortir de l'OMC. Résultat les travailleurs français ne pourront plus être détachés à l'étranger, donc perte de rentrée de devises étrangères.

    RépondreSupprimer
  3. On va en prendre pour au moins 5 ans de cinéma Macronien, voire plus... soupirs...
    Ce mec est d'une mauvaise foi hallucinante. Il sait très bien qu'il ne changera rien de rien en UE, mais il fait semblant et fait le malin, un peu comme Mélenchon quoi, styles différents mais de grands comédiens dans le fond.
    Après VGE, Mitterrand, Chirac, Sarko et Hollande, je sens qu'il va nous battre tout un tas de records le gars : soumission, mauvaise foi, trahison, manipulation, cynisme...

    "Les français détestent les réformes, il faut, il faut, il faut...".

    Il a tout compris le gars, du haut de ses 39 ans, dont 24 sous l'aile protectrice de tatie Brigitte...

    Et les franzouses se rendent compte que à bah non, finalement ils n'aiment pas trop Macron. Ils ont été prévenus pourtant.
    Fallait vous réveiller plus tôt les mecs.

    ***Jacko***

    RépondreSupprimer
  4. Vous passez votre temps à taper sur l'UE, qui est pourtant le bébé de de Gaulle. Pourquoi ne changez-vous pas de nom ?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. « Vous passez votre temps à taper sur l'UE, qui est pourtant le bébé de de Gaulle. Pourquoi ne changez-vous pas de nom ? »

      Parce que ce n'est pas le bébé du général de Gaulle. Vouloir la construction d'un ensemble d'États-nations souverains unis par des liens de solidarité puissants, c'est autre chose que de subir ce que nous voyons aujourd'hui. Voir : http://www.gaullisme.fr/2010/01/27/les-vues-du-general-de-gaulle-sur-l’europe/

      YPB

      Supprimer
    2. Vous devez être bien aveugle pour ne pas voir que l'UE actuelle n'a rien à voir avec celle du général de Gaulle.

      Supprimer
  5. @ Anonyme 9h47

    La seule solution que je recommande est une solution franco-française pour STX.

    Pour les travailleurs détachés, c’est une sortie de l’UE qui est nécessaire (ce à quoi je suis favorable), pas de l’OMC

    @ Jacko

    Oui, mais les autres choix n’étaient guère attirants, malheureusement

    @ Michèle

    Non. Le Général avait accepté la CEE (signée un an avant son retour), à ses conditions, après avoir mené la politique de la chaise vide, lui donnant un droit de veto. L’UE n’a plus grand chose à voir avec la CEE des années 1960…

    RépondreSupprimer
  6. "La seule solution que je recommande est une solution franco-française pour STX.

    Pour les travailleurs détachés, c’est une sortie de l’UE qui est nécessaire (ce à quoi je suis favorable), pas de l’OMC"

    Vous voyez des solutions franco-françaises partout, mais le monde ne fonctionne pas comme ça.

    Si, il faudra une sortie de l'OMC concernant les travailleurs détachés et appliquer vos "solutions" de magicien franco-français...

    " Interdire le détachement impliquerait non seulement de sortir de l’Union (la libre prestation de services est un principe fondamental du traité de Rome), mais aussi de l’OMC, puisqu’il faudrait fermer les frontières aux services. L’effet sur l’activité serait terrible, puisque les services, qui représentent environ 80 % du PIB européen et de l’emploi, sont le principal moteur de croissance : « c’est l’une des pierres angulaires de nos économies », rappelle Élisabeth Morin-Chartier, eurodéputée LR. La question n’est donc pas d’actualité."

    http://bruxelles.blogs.liberation.fr/2017/08/25/emmanuel-macron-veut-betonner-le-detachement-des-travailleurs/

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. L'eurodéputée citée par Quatremer, Madame Morin-Chartier, fait aussi partie de ceux qui ont appelé à barrer la route au dumping social lié au travail détaché : http://www.la-croix.com/Economie/Monde/Travailleurs-detaches-Ne-laisser-sinstaller-concurrence-deloyale-2017-04-28-1200843264

      Il ne s'agit donc pas de l'intervention de quelqu'un qui défend le statu quo. Sauf que tout ce qu'elle propose revient à aménager un peu la directive actuelle, tout en réclamant l'Europe sociale, pour plus tard, évidemment :

      "Il faut aujourd’hui ouvrir la page de l’Europe sociale. Nous ne pouvons pas construire un grand marché unique européen, défendre les quatre libertés fondamentales ou négocier le Brexit sans être au clair sur la convergence sociale entre les États membres. […] La directive révisée fixera la période au bout de laquelle le travailleur détaché ne pourra plus être considéré comme tel (la durée de détachement comme la rémunération des travailleurs sont parmi les points centraux de la révision, NDLR). Le texte agira donc comme un triple bouclier, en établissant un cadre nouveau et protecteur à la fois des États, des salariés et des entreprises.

      Cela est extrêmement important pour barrer la route au dumping social. Une durée de deux ans de détachement semble être raisonnable et cohérente avec le règlement sur la sécurité sociale, aussi bien pour les travailleurs détachés en France que pour les travailleurs français à l’étranger." (http://www.la-croix.com/Economie/Monde/Travailleurs-detaches-Ne-laisser-sinstaller-concurrence-deloyale-2017-04-28-1200843264).

      En résumé, on réforme de manière cosmétique en espérant que peut-être, un jour, la miraculeuse Europe sociale se mettra en place. On sent que Madame l'inspectrice générale de l'Éducation nationale et de la Recherche (c'est de là qu'elle vient) n'a pas une idée très claire de ce qu'est être chômeur et de vivre dans l'angoisse du lendemain. Elle ne semble pas se rendre compte non plus de l'ampleur de l'écart à réduire pour créer la convergence sociale qu'elle appelle de ses vœux. Les gens qui vivent aujourd'hui se moquent bien qu'on leur promette de résoudre « peut-être » ou « plus tard » leurs problèmes, c'est-à-dire après qu'ils se seront retrouvés à la rue ou dans un cercueil.

      Ils ne s'agit pas de ne préconiser que des solutions franco-françaises : il s'agit de reconnaître que, dans certains cas, les solutions que l'on veut à tout prix européennes ne sont pas des solutions mais des problèmes. L'Europe sociale n'aura pas lieu, comme l'ont montré François Denord et Antoine Schwartz dans leur ouvrage éponyme. Et la remise à plat complète des traités qu'ils préconisent est encore moins envisageable. La réaction des européistes face à une difficulté est : « Ne faisons rien seuls ». Fort logiquement, comme il est très difficile d’agir à 28, on ne fait rien ; ou on agit de manière unilatérale et l'on se met les autres à dos ; ou le plus souvent on fait quelque chose, qui est l’équivalent de rien, juste pour donner l’illusion de l’action, en promettant que plus tard, bien sûr, on agira de manière décisive…

      YPB

      Supprimer
  7. Qui parle d'interdire le détachement ?

    Obliger l'employeur à payer les mêmes cotisations sociales et les mêmes salaires pour tout son personnel, détaché ou non, cela reviendrait à interdire le détachement ? Pas du tout, c'est juste mettre un terme à un modèle économique qui ne repose pas sur la liberté du commerce, mais sur la concurrence déloyale.

    Inutile de quitter l'OMC. La répression du braconnage ne cause aucun tort au chasseur respectueux de la loi, au contraire.

    Ivan

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Donc des entreprises françaises vont envoyer des ingénieurs français détachés en Roumanie payés au tarif roumain et charges sociales roumaines.

      Réfléchissez 2 secondes...

      Supprimer
  8. A propos de l'entreprise du luxe Chanel :

    Les deux propriétaires de Chanel sont deux frères, Alain et Gérard Wertheimer. Ce sont deux hommes d'affaires de nationalité française.

    Derniers chiffres connus : tous les chiffres du groupe sont en très nette baisse. Le chiffre d'affaires, d'abord, qui recule de 9% à 5,67 milliards de dollars, mais aussi le résultat opérationnel, qui baisse de 20%, à 1,278 milliard et le bénéfice net, qui recule, lui, de 35%, à 874 millions de dollars.

    Les deux propriétaires de Chanel ont donc décidé …

    … de doubler leur dividende !

    Le bénéfice net de Chanel s'effondre, il est tombé à 874 millions de dollars … et donc ses deux propriétaires vont gagner 3,4 milliards de dollars cette année !

    Lisez cet article :

    Ils se sont voté 3,4 milliards de dollars en dividendes au titre de 2016. Une somme énorme. Presque disproportionnée… C'est deux fois plus que les 1,6 milliard qu'ils s'étaient attribués l'an dernier. C'est presque deux tiers du chiffre d'affaires du groupe, et c'est surtout quatre fois ce que l'entreprise a déclaré en bénéfice net ! La ponction a été si forte, nous apprend encore ce document de 92 pages que Challenges et le magazine suisse Bilan se sont procurés, que la trésorerie de l'entreprise est tombée, pour la première fois depuis longtemps, sous le milliard de dollars!

    https://www.challenges.fr/luxe/chanel-l-incroyable-dividende-des-freres-wertheimer_494435

    Bien entendu, Alain et Gérard Wertheimer ne veulent pas payer d'impôts en France. Les impôts, c'est bon pour les gueux.

    Les deux frères sont donc partis en Suisse pour ne plus payer d'impôts : ils habitent aujourd'hui à Genève.

    http://www.latribune.fr/vos-finances/impots/fiscalite/20111201trib000668201/decouvrez-la-liste-des-44-plus-grandes-fortunes-francaises-exilees-en-suisse.html

    Conclusion :

    Depuis des dizaines d'années, la grande bourgeoisie dirige la France.

    La grande bourgeoisie a complètement verrouillé le système financier, le système politique et le système médiatique.

    Aujourd'hui, il faut une révolution pour détruire le système.

    RépondreSupprimer
  9. @ Anonyme 23h19

    C’est la recette du succès des pays asiatiques (Japon, Corée du Sud et Chine), qui se protègent beaucoup plus que certains ne le pensent. Bien des pays de l’OMC mettent des barrières bien plus hautes que cela.

    Votre raisonnement est ridicule. SI 80% du PIB est fait dans les services, le refus des travailleurs détachés n’aura pas de conséquences, puisque cela imposera des recrutements de Français, soit plus d’emplois pour les nationaux et une meilleure balance des paiements (en évitant le paiement de cotisations sociales à l’étranger et le rapatriement des salaires…)

    @ YPB

    Merci

    @ BA

    Information intéressante

    RépondreSupprimer