lundi 23 décembre 2019

Après le Brexit, les nouvelles illusions écossaises




Caprice, posture et mauvais calcul

Le possible départ de l’Ecosse du Royaume Uni semble être la seule chose « positive » à laquelle peuvent se raccrocher tous les éditorialistes qui étaient opposés au Brexit, comme une forme de vengeance après avoir eu tort sur Boris Johnson sur toute la ligne, que ce soit sa capacité à renégocier un accord, ou à gagner les élections. Pour Nicola Sturgeon, « Boris Johnson a peut-être reçu un mandat pour faire sortir l’Angleterre de l’Union européenne. Il n’a absolument pas le mandat de faire sortir l’Ecosse de l’Union européenne », ce qui pourrait créer l’opportunité d’organiser un nouveau référendum, après celui de 2014, où 55% de la population avait rejeté l’indépendance.

Mais un tel raisonnement pose de nombreux problèmes. D’abord, réclamer un nouveau référendum à peine cinq ans après le précédent est fondamentalement aberrant. Après trois siècles d’union, les écossais ne vont quand même pas se prononcer tous les cinq ans sur leur maintien, ou non, dans le Royaume Uni. Ce genre de question ne se pose pas tous les quatre matins et devrait conclure les débats pour une période assez longue. Revenir dessus semble à la fois un caprice bien moderne et une posture politicienne destinée à nourrir un positionnement électoral. Boris Johnson a bien le mandat pour sortir tout le Royaume Uni de l’UE, et donc également l’Ecosse, contrairement à ce qu’elle dit.

Une minorité doit aussi accepter la règle de la majorité, ce que Nicola Sturgeon semble remettre en question. Bien sûr, l’Ecosse n’a pas voté comme le reste du Royaume Uni, mais une telle situation est courante dans tous les pays. Une grande partie de la France avait voté contre Maastricht en 1992 et personne n’a voulu faire sécession. Même les Etats qui n’avaient pas voté Trump en 2016 ont accepté son arrivée à la Maison Blanche… Bref, de profonds désaccords d’une partie du pays avec sa direction globale ne justifient pas une séparation. On peut voir ici une forme de consumérisme moderne appliqué à tort à la citoyenneté, dans un caprice que l’on peut qualifier d’enfantin.

En outre, s’il y a bien un sujet sur lequel l’Ecosse ne devrait pas s’éloigner du Royaume-Uni, c’est l’UE. En effet, par delà le fait que sa position géographique compliquerait cette intégration, elle est totalement illusoire. D’abord, il est quasi certain que jamais l’Ecosse ne pourrait rejoindre l’UE : jamais l’Espagne, la Belgique et probablement l’Italie n’autoriseraient ne serait-ce que des négociations, pour ne pas donner un encouragement à leurs mouvements séparatistes locaux. Ensuite, la durée de vie de l’UE semble comptée tant les dernières années ont démontré la profondeutr de ses dysfonctionnements et tant les peuples s’en éloignent, comme le montre l’état de l’opinion en Pologne.


En somme, il ne semble pas y avoir une seule bonne raison à l’organisation d’un nouveau référendum en 2020, comme le demande Nicola Sturgeon. Pire, tout laisse penser qu’indépendante, l’Ecosse ne pourrait jamais rejoindre l’UE. Et pour finir, la durée de vie de l’Union Européenne sera probablement beaucoup plus courte que celle du Royaume Uni. Bref, un mauvais calcul dans tous les cas.

11 commentaires:

  1. Je suis globalement d'accord avec vous, mais à deux nuances près :
    1-vous ne pouvez pas affirmer que l'existence à court terme de l'UE est menacée, car même si le RU quitte l'UE et que la Pologne le suit (ce qui m'étonnerait vu que ce pays profite des subsides des pays contributeurs comme la France...), l'UE pourrait y survivre, voire même accueillir d'autres nouveaux pays qui sont candidats.
    2-le RU une fois sorti de l'UE ne pourrait plus s'opposer à l'entrée de l'Ecosse si elle devenait indépendante. C'est différent dans le cas de la Catalogne puisque l'Espagne mettrait son veto, idem pour l'Italie. Car s'il y a la tentation de « punir » les velléités d'indépendance, il y a aussi la volonté des dirigeants européens de « punir » le RU de sa sortie, et l'adhésion de l'Ecosse pourrait être l'arme de leur vengeance, en tout cas ils pourraient utiliser cette menace à des fins politiques.

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    1. Entre "punir" le RU pour sa sortie de l'UE et créer un précédent dont la Catalogne se servirait, je pense que l'Espagne n(hésitera pas 1/10ème de seconde : ce sera NIET pour l'Écosse. Même en ajoutant la querelle sur Gibraltar.

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    2. @ Moi

      Merci pour le commentaire. Mes réponses :
      1- je ne dis pas à court terme, mais pense plutôt à moyen / long terme. L'UE ne parvient plus à avancer, se contentant d'essayer de corriger certains de ses nombreux dysfonctionnements, sans pouvoir avancer (cf débat sur le prochain budget, que les pays du Nord pousse à la baisse). Parallèlement, l'idée d'une sortie gagne du terrain ailleurs et se développe, ce que la sortie de la GB va amplifier...
      2- L'Espagne, comme la Belgique, et probablement l'Italie, refuseraient catégoriquement l'entrée de l'Ecosse car cela serait un encouragement à leurs séparatistes locaux il me semble

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    3. J'ajouterais surtout que dans le cas du Royaume-Uni quittant l'UE il ne s'agit pas d'un pays mais de plusieurs d'un coup d'un point de vue complètement comptable.
      Le Royaume Uni équivaut à une vingtaine de pays en PIB et l'un des rares contributeurs nets au budget européen.
      Ce n'est pas la Macédoine du nord ni l'Albanie qui vont combler le budget.
      Ajoutons que la Pologne même si elle bénéficie des fonds européens préfère de loin sa souveraineté, les polonais étant extrêmement patriotes leur pays ayant été plusieurs fois découpé/supprimé.
      À ceci s'ajoute l'Espagne qui commence à se réveiller suite à la décision de la CJUE de donner l’immunité parlementaire à l’indépendantiste Oriol Junqueras.
      Je ne parle même pas de Salvini qui va revenir par la grande porte aux prochaines élections et qui s'il suit sa politique de Mini-bots déclenchera à termes un Italexit.
      Bref l'UE vacille et c'est tant mieux.

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    4. "Bref l'UE vacille et c'est tant mieux."

      C'est surtout la GB qui vacille totalement empêtrée dans son Brexit sans fin.

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  2. "il ne semble pas y avoir une seule bonne raison à l’organisation d’un nouveau référendum en 2020, comme le demande Nicola Sturgeon."

    Le Brexit est une très excellente raison et de taille.

    Le pays de Galles était aussi remainer et avec le bazar concernant l'Irlande du Nord, dont vous prenez bien soin de ne pas parler, c'est l'Irlande du Nord qui pourrait aussi faire sécession pour s'unir à l'Irlande du Sud.

    Le système juridique anglais permet à l'Ecosse son indépendance, ce qui n'est pas le cas de l'Italie ou de l'Espagne qui n'ont pas à intervenir dans les affaires internes de la GB, n'est ce pas Monsieur le souverainiste ?

    Et ce n'est pas parce que l'Espagne ou l'Italie s'opposerait à l'entrée de l'Ecosse dans l'UE que ça empêcherait leurs séparatistes de se manifester.

    Quant à la fin de l'UE, ça fait des lustres que vous l'annoncez et elle n'est toujours pas arrivée...

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    1. « Quant à la fin de l'UE, ça fait des lustres que vous l'annoncez et elle n'est toujours pas arrivée... »

      Laurent n'a jamais dit que le processus serait rapide et sans douleur. On nous a dit aussi après tout que le Brexit n'aurait jamais lieu...

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    2. Le Brexit n'a toujours pas eu lieu, malgré 3 ans de tergiversations.

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    3. Cela aura lieu. Et la difficulté à quitter l'UE n'est en rien un argument en sa faveur.

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    4. Tiens ! Un medium ?

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  3. Dites-vous bien que l'on aurait jamais pensé que l'URSS puisse disparaître au début des années 80 et pour le bonheur des peuples, elle est "morte". Puisse l'UE la rejoindre dans les poubelles de l'histoire !

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