samedi 31 octobre 2020

Confinement, services publics, impréparation et communication

Mercredi, après avoir longtemps refusé cette option, Emmanuel Macron a choisi de reconfiner le pays, pour mettre un nouveau frein au développement de l’épidémie. Mais si cette présentation peut être relativement consensuelle, elle occulte de nombreux aspects de la gestion de cette pandémie, moins flatteurs pour ce président, entre l’impréparation à la seconde vague, l’inconséquence et l’injustice des choix faits, les trop nombreux mensonges et l’infantilisation effarante des Français.

 


Culpabilisation, irresponsabilité et autoritarisme

 

L’histoire que raconte le président est probablement ce qu’il a le mieux réussi dans cette crise. L’idée d’une deuxième vague plus forte que prévue, touchant toute l’Europe, et imposant des mesures d’exception à des dirigeants qui mettent la vie des plus fragiles avant tout est habile, ce qui explique sans doute que, pour une fois, les sondages sont plutôt favorables à la majorité. Mais cette présentation des choses est un peu trop idéalisée pour être honnête. D’ailleurs, il n’a fallu qu’une minute à Macron pour mentir aux Français en évoquant les 500 morts de la veille. Déjà, il occultait les chiffres du jour, qui n’étaient « que » de 244 morts et illustraient moins sa thèse. Et si 523 morts ont bien été annoncés le 27, il y en avait 288 à l’hôpital sur ce seul jour, et 235 dans les Ehpad, mais sur les 4 derniers jours. Ce mensonge créé un doute sur tout le discours du président. Pire, les 400 000 victimes potentielles évoquées ne sont-elles pas une grossière exagération pour faire accepter la décision de mercredi ?

 


Bien sûr, il ne s’agit pas de nier la réalité de la circulation du virus, ni l’augmentation du nombre de malades, ou l’engorgement des hôpitaux. Mais plusieurs points posent question. D’abord, la situation dans les pays européens est loin d’être uniforme et la France, il faut le reconnaître, est clairement un mauvais élève : nous sommes le 5ème pays d’Europe pour le nombre de cas, le premier parmi les grands pays, avec un niveau 3 à 4 fois supérieur à eux. Ensuite, des statistiques publiées par le Figaro indiquent que la vitesse de montée de cette vague est bien moindre qu’en mars avec des hospitalisations et des réanimations en hausse de 43 et 27% sur 7 jours, contre 143 et 193% il y a 7 mois. Si le premier point peut justement pousser à des décisions radicales comme un confinement, en revanche, on peut penser que le second plaidait plutôt pour attendre quelques jours de plus afin de mesurer l’effet du couvre-feu.

 


Au global, je partage l’avis de Gérard Kierzek dans le FigaroVox : la préparation de la seconde vague a été calamiteuse. S’il était juste de vouloir tester un maximum de personnes, rien ne semble avoir été fait pour s’assurer que l’organisation suivrait. Résultat, les résultats arrivent beaucoup trop tard pour permettre de « tester, tracer, isoler ». Ensuite, comme le pointait le Canard Enchainé, les lits supplémentaires annoncés par Olivier Véran en juillet ne se sont pas matérialisés et les annonces mercredi de Macron n’en paraissent que plus suspectes. Pourquoi ce qui n’a pas été possible de mettre en place lors du reflux le serait aujourd’hui ? Notre pays conserve une capacité d’accueil des malades bien trop faible, et inférieure à beaucoup de pays comparables. En somme, cette seconde vague semble tout aussi mal gérée que la première, comme le souligne le sévère rapport du général Lizurey.

 

Et au global, comme Gérard Kierzek, je me demande si le confinement était vraiment la bonne solution. Il pointe que l’OMS n’en fait qu’une solution de dernier recours, en soulignant « ses effets secondaires majeurs ». Bien sûr, c’est un moyen fort pour réduire la circulation du virus, mais beaucoup de sources de circulation restent : les transports en commun pour tous ceux qui ne travaillant pas à domicile, le travail pour ceux-là, les supermarchés, qui vont être d’autant plus chargés que bien des autres commerces doivent fermer, les collèges et les lycées… Un couvre-feu renforcé n’aurait-il pas été suffisant ? Il faut noter que l’Allemagne a choisi de ne pas fermer ses commerces et ne restreint pas les déplacements individuels, mais qu’en revanche les bars et les restaurants fermeront un mois. La France de Macron va très loin sur certaines restrictions, tout en étant parfois étonnamment souple.

 

Plus globalement, outre son impréparation, qui motive en partie le besoin de mesures contraignantes, la crise sanitaire pose la question du traitement des Français par ce gouvernement. Comme lors de la première vague sur les masques, Macron ment pour faire peur ou se couvrir, et privilégie les interdictions à un dialogue apaisé et mature avec les Français. S’il avait été honnête et prévoyant, alors, les Français lui auraient fait confiance et il aurait probablement pu restreindre grandement les interdictions et compter sur notre civisme. Parce qu’il a beaucoup menti et nous a mal préparé, il ne peut compter que sur des mesures extrêmement iberticides, parmi les plus sévères du monde développé. Si les Français restent globalement plutôt disciplinés, d’autant plus qu’ils approuvent le confinement, cela pose clairement un problème de libertés publiques, trop souvent foulées aux pieds par ce pouvoir.

 


Et dans le détail, bien des mesures sont révoltantes. Comme toujours, Macron annonce mercredi soir que le confinement démarre à peine 24 heures plus tard : c’est profondément irrespectueux des restaurateurs qui n’ont eu qu’un jour pour écouler leur stock. Outre-Rhin, les annonces de mercredi ne seront mises en place que lundi, leur donnant le temps de se retourner. Le différentiel de traitement entre les commerces est effarant, tant les supermarchés, Amazon ou Deliveroo gagnent au confinement. Et si une mesure a enfin été annoncée pour les loyers, ce n’est qu’un accompagnement incitatif, sans contrainte pour les bailleurs, favorisés par rapport à des commerçants extraordinairement mal traités. Enfin, pourquoi traiter de la même manière une population à risque dans une région très touchée et une population jeune dans une région peu touchée. La situation méritait une plus grande différenciation.

 

En somme, l’impréparation du gouvernement et son refus à investir dans les services publics le pousse aux mesures les plus liberticides du continent. Et elles sont aussi très arbitraires, en sacrifiant notamment bien des petits commerçants. La restriction des libertés, si elle doit être envisagée, ne devrait l’être que de la manière la plus ciblée, parcimonieuse et transparente possible. Ici, parce que cela sied à sa communication du moment, il y va au bazooka. Malheureusement, notre pays en paiera les conséquences.

11 commentaires:

  1. Les dégâts économiques sont bien plus graves que les dégâts sanitaires, sauf que pour le moment on ne les voit pas encore.
    Lorsqu'ils seront visibles, peut-être qu'on se rendra enfin compte que l'on a surréagi à la pandémie. Mais le mal sera fait.

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  2. Lorsqu'on compare la situation de la France (qui a confiné deux fois) avec celle de la Suède qui n'a pas confiné du tout ni pris aucune mesure contraignante, on se rend compte que les écarts en termes de nombre de contaminés et de morts sont faibles. On a donc envie de dire : tout ça pour ça...

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    1. La Suède n'est pas la France et elle fait nettement moins bien la Norvège et la Finlande qui ont confiné.

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  3. C'est vraiment curieux. Le gouvernement de la France est en guerre contre un ennemi invisible et, ne l'est pas avec celui qui est visible et qui égorge.

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  4. "D’ailleurs, il n’a fallu qu’une minute à Macron pour mentir aux Français en évoquant les 500 morts de la veille."

    Herblay toujours à ergoter, la pandémie a de nouveau atteint une croissance exponentielle sur tous les indicateurs.

    https://www.liberation.fr/checknews/2020/10/29/y-a-t-il-eu-527-morts-du-covid-en-vingt-quatre-heures-comme-l-a-affirme-macron_1803825

    Y a qu'en France qu'on a des baltringues comme Raoult, Péronne, Toussaint... et toute la bande de complotistes incompétents qui passent leur temps à raconter des âneries et mensonges qui foont que les français ne se savent plus où ils en sont.

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  5. @ Moi

    Difficile de conclure sur la Suède : le site Les Crises vient de publier un papier très détaillé qui relativise grandement ce genre de discours. Le pays a eu beaucoup plus de victimes que les pays nordiques comparables.

    Après, en effet, il faut aussi prendre en compte le surplus de mortalité et pas seulement la mortalité brute, mais aussi les séquelles pour ceux qui en ont, et aussi les dégâts économiques, qui peuvent être extrêmement lourds

    @ Anonyme

    Le mensonge d’un chef de l’Etat ne fait que renforcer le doute pour la parole publique et génère justement cette défiance.

    « Croissance exponentielle sur tous les indicateurs » ? FAUX : le nombre de cas est en recul sur 7 jours vs les 7 jours précédents. Après, les autres indicateurs continuent de progresser, mais le nombre de cas les précède, ce qui pourrait bien annoncer l’accalmie à venir. C’est donc vous qui racontez des âneries et des mensonges.

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    1. https://pbs.twimg.com/media/ElxY2iRXEAMtMC2?format=jpg&name=900x900

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  6. En fait, le problème semble essentiellement être dû à un blocage intellectuel.

    C'est expliqué ici :

    https://tinyurl.com/yyk7c7m3

    à partir de 3mn15 : "la crise politique et sanitaire du Covid 19 a redonné des couleurs, selon vous, au souverainisme ?"

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    1. "intellectuel", pardon. (soyons précis).

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  7. « Parce qu’il a beaucoup menti et nous a mal préparé, il ne peut compter que sur des mesures extrêmement liberticides, parmi les plus sévères du monde développé. ».

    Pour faire le lien avec le billet précédent en considérant que le fanatisme (et particulièrement le fanatisme religieux) est une grave pathologie mentale et sociale. D'un côté Macron proclame que nous ne cèderons rien sur nos valeurs et nos libertés chèrement acquises ; d'un autre côté, il nous demande, pour nous protéger du coronavirus, de renoncer à presque tout ce qui fait l'intérêt et le plaisir de notre mode de vie "à la française" ! Certes, dans son esprit, c'est une mesure temporaire. Mais qui dit qu'on ne devra pas vivre avec le coronavirus pendant des décennies, comme il faudra vivre avec la menace latente du "terrorisme islamiste" (le coranovirus) ?

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