lundi 19 octobre 2020

Couvre-feu à 21 heures : la restauration à nouveau sacrifiée

La start up nation ne se nourrit-elle que de fast foods et livraisons à domicile ? Malheureusement, le choix des mesures pour contenir la seconde vague épidémique est à nouveau dramatique pour le secteur de la restauration. Pire, les mesures d’accompagnement annoncés par le gouvernement ne sont toujours pas à la hauteur des enjeux de la survie d’un secteur si emblématique pour notre pays.

 


Indifférence totale à patrimoine en danger

 

Bien sûr, la situation sanitaire est très préoccupante. L’envolée du nombre de cas, même si cela est moins vrai pour le nombre de morts et d’hospitalisation, imposait sans doute un nouvel effort collectif pour protéger la santé des plus fragiles. Néanmoins, il faut aussi rappeler que la propagation de l’épidémie aurait sans doute été mieux contenue si ceux qui avaient promu la réalisation d’un million de tests par semaine s’étaient assurés que les résultats pourraient alors être obtenus en temps et en heure, ce qui n’a pas été le cas. Et pour couronner le tout, alors que Véran avait annoncé en juillet le passage de 5 000 à 12 000 lits de réanimation, rien n’est venu, comme tant de choses du Ségur de la santé, contredit par le nouveau budget austéritaire présenté il y a peu, qui réduit les moyens de l’hôpital !

 

En réalité, la dureté des mesures vient des nouveaux ratés de la politique sanitaire du gouvernement. Et le couvre-feu à 21 heures rend quasiment impossible l’ouverture le soir, sans la clientèle étrangère qui mange tôt, et des clients qui doivent rentrer chez eux avant 21 heures. Certes, certains, comme Yves Camdeborde, vont tenter un service du soir et la livraison. Et si la livraison permettra à certains de limiter la casse, cela ne marchera pas pour tous. Les conséquences seront dramatiques pour la grande majorité des restaurateurs, qui travaillent davantage le soir que le midi. Pourtant, un couvre-feu une heure plus tard aurait probablement permis de maintenir le service, d’autant plus que la profession s’est mobilisée fortement pour limiter le risque épidémique, en réorganisant complètement salle et organisation.

 

Macron a évoqué le chômage partiel et des aides pour les professions affectées par le couvre-feu. Elles seront bien sûr les bienvenues, mais restent insuffisantes. En effet, pour beaucoup de restaurateurs, c’est largement plus de la moitié du chiffre d’affaires qui va s’envoler. Même en réduisant les coûts de personnel, comment penser qu’il restera assez pour payer les loyers ou les échéances bancaires, comme le note Yves Camdeborde dans le Figaro ? Les prêts proposés par le gouvernement ne font que repousser le problème. Comment les restaurants pourront éponger demain les dettes supplémentaires qu’ils seraient contraints de contracter aujourd’hui ? Parce que le gouvernement choisit de les fermer, il doit le faire d’une manière qui soit juste et équilibrée, contrairement à l’épisode du confinement.

 

Alors, Bruno Le Maire avait annoncé une concertation avec les bailleurs et émis des recommandations non contraignantes pour les TPI. Mais la médiation entre commerçants et bailleurs avait échoué, sans que le gouvernement juge bon d’agir. Pourtant, les conséquences d’une fermeture doivent être justement partagées par l’ensemble des parties prenantes. Dans le cas des restaurateurs, cela signifie qu’il ne serait pas juste et équilibré qu’ils doivent régler rubis sur ongle les loyers qu’ils doivent à leurs bailleurs, ni qu’ils honorent en temps et en heure leurs échéances bancaires. Ainsi, il reviendrait au pouvoir d’organiser une vraie concertation pour partager l’effort entre tous, et en l’absence éventuelle d’accord, de trancher, ce qui motiverait toutes les parties-prenantes à faire des efforts.

 

Il semble malheureusement que le gouvernement ne change pas de ligne de conduite, au regard des déclarations de Bruno Le Maire, qui n’évoque qu’un délai dans le paiement des prêts, et encore, si Bruxelles le veut bien ! Au mieux, des concertations avec les bailleurs seront engagées et encouragées, mais on peut déjà anticiper que rien de contraignant ne sera décidé. Ainsi, les restaurateurs seront encore abandonnés au bon vouloir de leurs banquiers et bailleurs. Bien sûr, certains seront compréhensifs et accepteront de partager les conséquences financières du couvre-feu, mais, sans cadrage, cela revient à la loi de la jungle et on peut craindre que la loi des plus forts s’impose. Si les grands groupes de restauration auront peut-être les moyens d’obtenir des concessions, l’immense majorité des restaurateurs indépendants sont dans un rapport de force bien trop défavorable face à leurs bailleurs.

 

En somme, non seulement, on peut considérer que les choix du pouvoir frappent, avec une violence inouïe et une utilité contestable, une profession si emblématique de notre pays. Mais, pire, comme nous le constatons depuis mars, le gouvernement ne fournit pas l’accompagnement nécessaire aux restaurateurs pour assurer un juste partage du coût du couvre-feu. C’est scandaleux.

2 commentaires:

  1. Je n'ai plus guère envie d'aller au restaurant s'il faut laisser ses coordonnées et garder le masque à table entre les plats. Beaucoup de restaurants vont baisser le rideau. Il restera les fast-foods.

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  2. Les dirigeants n'en ont rien à faire de l'économie du pays. Ils ne pensent qu'à se garantir un bon avenir judiciaire.

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