mardi 5 décembre 2017

Parasites fiscaux, déserteurs, vol légal : bien nommer le mal pour mieux le combattre

Les nouvelles révélations sur les pratiques fiscales détestables des multinationales et des plus riches ont soulevé une nouvelle vague d’indignation. Mais quelle déception de constater qu’après toutes ces années, ceux qui dénoncent ces pratiques continuent à mal les nommer, apportant de l’eau au moulin de ceux qui justifient ce qui revient à un vol légal. Encore un effort !


Le choix des mots n’est pas neutre

Cela fait plus de six ans que je me bats pour essayer de populariser les termes de « parasite fiscal » ou de « désertion fiscale ». Mais il faut bien reconnaître que ce combat n’a pas été couronné de succès. Certes, j’ai pu constater que Joseph Stiglitz employait il y a un an le terme de « parasite » et proposait de mettre en « quarantaine » ces trous noirs, mais en France, les termes de « paradis fiscal », « d’évasion fiscale », ou, pire, « d’optimisation fiscale » restent ceux qui sont employés dans la sphère publique, y compris de la part des journalistes d’investiguation qui dénoncent ces pratiques ! Pourtant, ces termes ne sont pas anodins et contribuent à cadrer le débat de la pire des manières.

Au risque de me répéter, parler de « paradis fiscal », c’est implicitement véhiculer l’idée que l’alternative est, par nature, « un enfer fiscal », rejoignant le discours anti-Etat et anti-impôts des ultralibéraux. Ce faisant, ce terme projette l’idée que le mal, ce serait davantage la France, l’Allemagne ou les Etats-Unis que l’Irlande, le Luxembourg ou les îles Caïmans. Le terme « d’évasion fiscale » n’est pas plus neutre quand on considère que l’on s’évade notamment des prisons. A nouveau, ceux qui ont recours à ces pratiques sont présentés comme des personnes qui échapperaient à la prison fiscale que représenteraient des pays comme le nôtre, quand le Luxembourg ou l’île de Man représenteraient la liberté…

Voilà pourquoi je persiste à employer des termes qui me semblent mieux refléter la réalité de ces pratiques. L’Irlande ou le Luxembourg sont des parasites fiscaux, des petits pays qui profitent de leur taille et de leur position pour aspirer une part des recettes fiscales des Etats qui les entourent, comme ces parasites qui se nourrissent du sang de leurs hôtes. Ceux qui les utilisent sont des déserteurs, des entreprises ou des particuliers qui refusent d’honorer leurs devoirs. Et parce que tout ceci est malheureusement souvent légal, je pense que le terme de vol légal en capture bien la réalité, car il s’agit bien d’un vol de la ressource des Etats qui les font riches, aussi légales que soient ces pratiques.

Il est crucial de bien nommer ces procédés car les termes employés aujourd’hui sont à double tranchant. Certes, ils qualifient des pratiques critiquées, mais leur sens implicite est très ambigu, dénonçant de facto la pression fiscale de nos Etats, comparés à des enfers ou des prisons, alors que cette pression est d’autant plus forte que beaucoup ne payent pas véritablement leur dû. Voilà pourquoi il ne faut surtout pas reprendre ce vocabulaire, qui entretient la propagande des ultralibéraux et qualifie bien mollement ces procédés détestables. Et si l’absence de progrès sur ces questions depuis près de dix ans était aussi le signe que quelque chose ne va pas dans le choix des mots pour les dénoncer ?


Aussi, je lance un appel à tous ceux qui sont révoltés par ces pratiques qui appauvrissent les pauvres et enrichissent les plus riches. Il est essentiel d’avoir une discipline féroce pour les dénoncer et refuser d’utiliser les qualificatifs des ultra-libéraux. Voilà pourquoi je vous conjure de lutter contre les parasites fiscaux, la désertion fiscale, et ne pas hésiter à parler de vol légal.

7 commentaires:

  1. Il y a une erreur dans la toute dernière phrase, vous avez écrit " évasion fiscale " au lieu de désertion fiscale je suppose.

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  2. Herblay, l'homme des gadgets sémantiques inutiles...

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  3. @LH,

    Le libéralisme n'est ni le bien ni le mal, juste l'ordre matérialiste incapable de s'élever au-dessus de lui-même (ce qui est bien normal). Le libéralisme est cet ordre de l'instinct paré de vertus qui ne sont pas les siennes ; il est la machine humaine en nous.

    Réformer le libéralisme équivaut à réformer l'instinct et cette part d'animalité en l'homme. C'est absurde, un combat perdu d'avance du fait d'une analyse erronée de ce qu'est l'homme. Encore un effort pour être chrétien ?

    La révolution a eu lieu un lundi de pentecôte il y a deux mille ans. Pour le reste, il s'agit de révoltes de circonstance, de prises de conscience partiales et partielles.

    Un "logion" de l'Evangile apocryphe de Thomas résume ce combat de l'âme et du corps, du message chrétien et de l'injonction matérialiste :

    «Heureux le lion que l'homme mangera, et le lion deviendra homme ; malheureux l'homme que le lion mangera, et le lion deviendra homme.»

    On ne réforme pas le libéralisme, lequel est au fond, une très vieille affaire.

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    1. Errata :

      «Heureux le lion que l'homme mangera, et le lion deviendra homme ; malheureux l'homme que le lion mangera, et l'homme deviendra lion.»

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  4. Atterrée par une interview de P.Moscovici sur RTL, lundi soir, il n'y a pas de paradis fiscaux dans l'UE. Juste des pays qui pratiquent de l'optimisation fiscale. Nuance....
    Désespérant !!!!!

    Bonne journée
    Sylvie

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  5. Qui est l'homme de l'année 2017 ?

    L'homme de l'année 2017, c'est … le réchauffement climatique.

    Jeudi 7 décembre 2017 :

    La Californie de nouveau face à des flammes dévastatrices.

    L'incendie Thomas touche depuis lundi le nord de Los Angeles. Il a fait un mort. Le gouverneur a déclaré l'état d'urgence dans le comté de Ventura, en proie aux flammes

    L'année 2017 a été la plus mortelle en Californie à cause d'incendies. Plus de 40 personnes sont mortes en octobre dans plus d'une dizaine de feux qui ont ravagé une partie du nord viticole et ont rasé plus de 10 000 bâtiments.

    https://www.lexpress.fr/actualite/societe/environnement/en-images-la-californie-de-nouveau-face-a-des-flammes-devastatrices_1966623.html

    Le réchauffement climatique devrait être plus fort que prévu.

    La hausse de la température moyenne de la planète pourrait se situer 15% au-dessus de la projection la plus pessimiste attendue pour 2100.

    Encore une mauvaise nouvelle pour le climat. En tenant compte des dernières mesures sur Terre et dans l'atmosphère, la hausse moyenne de la température de la planète bleue devrait être plus importante que ce qui était attendu jusqu'à présent vers la fin du siècle, prévoit un article publié mercredi soir dans Nature.

    Les auteurs de la publication, deux chercheurs du département d'écologie globale de l'Institution pour la science de Carnegie à Stanford (États-Unis), tablent sur une hausse globale de la température moyenne de 4,8°C vers 2100 par rapport au début de l'ère industrielle soit un relèvement de 0,5°C, par rapport au scénario le plus sombre du Giec (Groupe d'experts intergouvernemental sur le climat) qui projette pourtant une hausse de 4,3°C avec des émissions de gaz à effet de serre augmentant à un rythme élevé et provoquant ainsi un important «forçage radiatif» (une hausse accrue de l'effet de serre).

    De plus, la marge d'erreur serait réduite, toujours par rapport aux scénarios du Giec, car certains modèles mathématiques (qui ne sont pas adaptés aux observations) ont été éliminés. Elle serait de 0,4°C autour de la hausse attendue de la température, au lieu de 0,7°C qui avait été calculé jusqu'à présent.

    En 2100, ou peut-être dès 2081, la hausse moyenne de la température serait donc comprise entre 4,4°C et 5,2°C.

    http://www.lefigaro.fr/sciences/2017/12/06/01008-20171206ARTFIG00282-le-rechauffement-climatique-devrait-etre-plus-fort-que-prevu.php

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  6. @ Anonyme

    Merci.

    @ Sylvie

    Moscovici est un de nos dirigeants les plus désespérés

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