Bien sûr, François Bayrou et le bloc central vont utiliser toutes les grosses ficelles de communication pour tenter de faire accepter une énième cure d’austérité. Edouard Philippe parle de « colère », et le Premier ministre actuel tente de prendre des accents churchilliens. Mais les excès de forme visent principalement à camoufler un vide de réflexion, une incapacité à sortir du cercle étroit de la pensée oligarchiste, qui peut être résumé par une forme de « toujours moins » maladif et auto-destructeur.
L’agenda oligarchiste des austéritaires
Bref, le rabotage des dépenses publiques et la baisse des dépenses sociales n’est pas un horizon unique. C’est un choix politique : nos dirigeants choisissent de favoriser l’oligarchie, à savoir les multinationales et les plus riches (dont ils baissent les impôts) contre le peuple (qui pâtit des baisses des dépenses sociales ou de celles à destination des services pubics, importants pour lui). La paresse intellectuelle des élites du bloc central ne leur permet pas de questionner ce choix qui devrait pourtant l’être. Et tous les relais des intérêts de l’oligarchie véhiculent un narratif résigné et fermé selon lequel ce serait la seule voie possible. Pourtant, le fait que cela fasse des décennies que les tenants de cette ligne soient au pouvoir devrait démonétiser ce discours et ces politiques, mais les grands médias continuent à les défendre et les électeurs ne parviennent pas à trouver une issue démocratique opposée suffisamment solide.
En attendant, l’oligarchie tente de camoufler l’échec de ses politiques en incriminant des groupes sociaux présentés comme les bouc-émissaires de nos difficultés. Les chômeurs ont souvent été les victimes expiatoires de ces élites qui laissent détruire les emplois en France : des chiffres parcellaires et partiaux annoncent que l’on ne gagnerait pas mieux sa vie en travaillant, entretenant le mythe des chômeurs qui ne cherchent pas d’emplois. Ce faisant, cela a légitimé de multiples réductions des droits des chômeurs, orchestrées par un gouvernement socialiste, puis par ses descendants… Les retraités sont devenus la nouvelle cible de l’oligarchie depuis une dizaine d’années et, là encore, Hollande et ses gouvernements ont fait le sale boulot, avec la désindexation des retraites et la réforme Touraine. Les autres bouc-émissaires sont les fonctionnaires, entre blocage du point d’indice, manque criant de moyens et bureaucratisation délirante de leurs tâches, que ce soit dans l’éducation ou la santé…
Pourquoi faudrait-il considérer que parce que le revenu médian a davantage reculé, le recul des pensions devrait être accentué ? Bien sûr, à première vue, cela permet de rééquilibrer le régime des retraites, mais il ne faut pas croire qu’une telle mesure serait sans conséquence. Si les retraités touchent de plus petites pensions (en les ramenant au niveau des pensionnaires allemands), alors, ils consommeront moins, peut-être un peu moins français et l’économie français diminuera (un peu) en taille. Un recul de 10% des pensions, c’est un recul de 1 à 2% du PIB, qui affectera les actifs, avec un peu plus de chômage, et une nouvelle pression additionnelle à la baisse des salaires. Ne s’agit-il pas d’un cercle vicieux où le poids de l’effort passe de l’un à l’autre dans un cercle vicieux austéritaire dont on voit depuis trop longtemps qu’il ne produit rien de bon dans un continent européen où il est la boussole du bloc central…
Et derrière le choix des bouc-émissaires, on peut voir un agenda politique plus large que de simples choix budgétaires, et qui sert plus largement l’agenda de l’oligarchie. Déconstruire le droit des travailleurs (avec le statut d’auto-entrepreneur, et la réduction des droits des chômeurs), c’est continuer à renforcer le patronat dans le rapport de force avec les travailleurs. De même pour les retraités : la déconstruction de la retraite par répartition est le moyen d’ouvrir la voie à la retraite par capitalisation, pourvoyeuse de juteux frais de garde et gestion pour le secteur financier… Enfin, la précarisation et l’affaiblissement de la fonction publique est un prélude utile à la privatisation de pans entiers du secteur public, comme on peut le voir avec le transport ferroviaire actuellement, pour donner de nouvelles rentes au privé.
Cette utilisation de bouc-émissaires a aussi une logique plus globale. Elle créé un climat où chacun tend à chercher à dénoncer les « avantages » d’autres groupes et à vouloir les voir supprimer, dans une quête sans fin à l’avantage résiduel qu’un groupe social aurait sur un autre (fonctionnaires, chômeurs, retraités…). Pendant ce temps, les multinationales et les plus riches, qui sont pourtant les grands vainqueurs des choix politiques des dernières décennies, passent sous le radar…
Tous les français - les actifs comme les retraités - vivent depuis des décennies très loin au dessus de leurs moyens et très loin au-dessus de ce qu’ils méritent. Le moment est venu de passer à la caisse et de payer !
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