vendredi 11 mars 2016

L’effarant dumping social de Norbert Dentressangle




Délinquance légale et sociale

Théoriquement, la législation européenne permet à des entreprises Françaises d’employer des travailleurs européens, en les payant aux salaires Français, mais avec des cotisations sociales des pays d’origine, ce qui permet déjà un fort dumping par rapport aux entreprises employant des salariés Français aux conditions locales. Dans le transport routier, les entreprises françaises assuraient la moitié des transports à dimension internationale en 1999. Onze ans plus tard, ce n’est plus qu’un sur 6, avec, en prime, le succès du cabotage, les missions en France de transporteurs étrangers. Norbert Dentressangle a fait plus fort en faisant travailler en France pas moins de 1500 employés issus de filiales des pays de l’Est ou du Portugal, aux conditions de leur pays d’origine, sans même passer par les travailleurs détachés.

Ainsi, il pouvait les payer moins que le SMIC, outre le fait de ne pas payer que les cotisations sociales des pays d’origine. Cet exemple, même s’il dépasse le cadre de la loi, courant dans cette jungle économique produite par la suppression de toutes les frontières, démontre les ravages de cette concurrence déloyale. La logique actuelle consiste sans cesse à comprimer les coûts salariaux, alors que ce sont aussi les salaires de citoyens qui perdent leur pouvoir d’achat quand ce n’est pas leur emploi. Ce n’est pas en comprimant sans cesse les revenus que la situation s’améliorera, surtout dans un pays comme le nôtre où nos salaires sont encore supérieurs à la moyenne européenne.

Et l’on voit bien dans toute l’Europe que cette course sans fin au moins-disant social et salarial, non seulement n’apporte rien à nos économies qui restent déprimées, mais de plus provoque une casse humaine insupportable. Jusqu’où faudra-t-il aller avec des pays proches en Afrique du Nord, au Moyen-Orient ou même en Europe de l’Est, où le salaire minimum est parfois jusqu’à dix fois plus bas que chez nous ? Ne devrions pas créer un système poussant à une convergence vers le haut, plutôt que de laisser faire le système actuel dont on peut finir par se demander s’il ne pousse pas à une convergence par le bas, au petit sommet de la pyramide près, comme l’ont bien montré Piketty et Stiglitz ?


Outre le délit qu’a sans doute commis l’entreprise, il faut aussi y voir la folie d’une époque qui ne voit ses salariés que comme des coûts qu’il faut réduire et non des hommes. La seule querelle qui vaille n’est-elle pas la condition humaine plutôt que permettre ce cannibalisme économique ?

6 commentaires:

  1. Je le vois régulièrement avec les routiers qui passe a l'entreprise , ils sont sur les nerfs , et de plus en plus Roumains ...
    Faut il rappeler a notre "chère" gouvernement que plus il y a de libéralisme , plus il y a de concurrence déloyal qui profite seulement au plus gros !?
    Qu'arriveras t'il si la loi du travaille passe moi qui travaille dans une petite imprimerie de 16 salariés, si une grosse entreprise concurrente du coin réalise un "accord" avec ces salariés pour des salaires réduits !? devront nous accepter de nous alignés ou disparaître ?
    Vive le "social libéralisme" ...

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  2. http://krugman.blogs.nytimes.com/2016/03/09/a-protectionist-moment/?module=BlogPost-ReadMore&version=Blog%20Main&action=Click&contentCollection=Opinion&pgtype=Blogs&region=Body#more-39637
    "But it’s also true that much of the elite defense of globalization is basically dishonest: false claims of inevitability, scare tactics (protectionism causes depressions!), vastly exaggerated claims for the benefits of trade liberalization and the costs of protection, hand-waving away the large distributional effects that are what standard models actually predict. I hope, by the way, that I haven’t done any of that; I think I’ve always been clear that the gains from globalization aren’t all that (here’s a back-of-the-envelope on the gains from hyperglobalization — only part of which can be attributed to policy — that is less than 5 percent of world GDP over a generation); and I think I’ve never assumed away the income distribution effects.

    Furthermore, as Mark Kleiman sagely observes, the conventional case for trade liberalization relies on the assertion that the government could redistribute income to ensure that everyone wins — but we now have an ideology utterly opposed to such redistribution in full control of one party, and with blocking power against anything but a minor move in that direction by the other.

    So the elite case for ever-freer trade is largely a scam, which voters probably sense even if they don’t know exactly what form it’s taking."

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  3. Lu sur la page Facebook de David Desgouilles qu'un élu local LR de la mairie d'Angoulême a inscrit dans un contrat de rénovation de l'hôpital l'obligation de parler français pour les employés des sociétés contractantes à moins d'employer des traducteurs. L'effet de cette clause du contrat a été que seuls des travailleurs français ou francophones sont employés donc pas de travailleurs détachés.

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  4. J'ajoute que la journaliste Eugénie Bastié en rend compte dans "Le Figaro" du 1er mars.

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  5. Vous devez savoir que le nom de Denstressangle n'a plus aucun sens, puisque le groupe a été racheté par le groupe américain XPO Logistics, deux fois moins gros que lui, entre parenthèses. C'est bien entendu, dans ce domaine-là, comme dans tous les autres (cf. les directives de l'OMC), la loi de la jungle. Et, dans ce monde merveilleux, respecter les lois, déjà anti-sociales et rétrogrades, est encore trop demander aux voyous qui dirigent les sociétés transnationales et à leurs serviteurs en costume-cravate siégeant dans nos nobles assemblées et commissions.

    La guerre sociale et économique, orchestrée ici par nos ectoplasmes socialistes et leurs clones LR, continue quotidiennement à faire des dégâts et des victimes. Allons-nous continuer à faire semblant, à regarder ailleurs ou à ne pas aller voter pendant que 99,99% des politicards, cyniques et vénaux, nous tiennent des discours aussi creux que soporifiques et que les médias, dans les mêmes proportions, font du story-telling, du people ou du fait divers au lieu d'informer ? Allons-nous leur laisser nous voler nos vies et l'avenir de nos enfants ? De quel droit le font-ils ?

    DemOs

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  6. @ Cgrotex

    Il n’y a rien de social dans ce social-libéralisme

    @ Anonyme 8h21

    Un grand merci pour ce lien. Merci Krugman !

    @ Anonyme 21h37

    J’en avais entendu parler à la radio

    @ Démos

    Oui, c’est mentionné dans le papier source

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