samedi 11 février 2017

Uber, moitié Attila, moitié sangsue

Dans quelques années, quand Uber aura fait faillite, ou que l’entreprise sera en situation de monopole dans le transport routier dans les pays qui l’ont laissé faire, nous porterons sans doute un dur jugement contre ceux qui ont laissé grandir ce monstre numérico-financier. La France est malheureusement parmi les moins interventionnistes, comme le montre l’issue de la médiation gouvernementale.



Détruire pour asservir et s’enrichir

Cet automne, ce sont les chauffeurs de VTC qui ont manifesté, après l’augmentation de la commission de Uber d’une bagatelle de 40% ! Pour tenter de mettre fin au conflit, le gouvernement a proposé une médiation. Le 20 décembre, devant les revendications grandissantes et publiques de ses chauffeurs, Uber refusait toute remise en cause de l’augmentation de sa commission et proposait un fond de soutien de 2 millions d’euros. En somme, le géant numérique propose de faire la charité auprès de ceux qui font sa fortune, et encore, d’un montant dérisoire par rapport à son activité. Et en un mois et demi, absolument rien n’a changé, comme le montre ce papier récent du Figaro.

Pourtant, la condition des chauffeurs de VTC est peu enviable, certains experts affirmant même que « leurs conditions de travail sont de l’esclavage moderne » : ils peuvent être privés de travail au moindre jugement négatif d’un client, et subissent, sans rien y avoir à dire, les baisses de prix destinées à éliminer les concurrents tout comme les hausses des commissions. Résultat, on peut trouver des chauffeurs qui veulent devenir taxis. Pourtant, la condition des taxis est très difficile, comme le rapporte ces témoignages : ils ont vu leurs revenus s’effondrer avec les VTC, beaucoup gagnant à peine le SMIC, malgré leurs horaires de travail, une situation qui s’est encore dégradée depuis trois ans.

Quand on apprend que Uber a perdu 3 milliards de dollars en 2016, pour un chiffre d’affaires d’environ 5 milliards, la situation semble totalement ubuesque. Malheureusement, il y a bien une logique derrière ces chiffres extravagants. Les marchés financent l’opération Attila d’Uber, qui consiste à éliminer la concurrence pour acquérir une position monopolistique qui doit lui permettre, dans le futur, de monter les prix comme bon lui semble, tout en exigeant des commissions toujours plus juteuses. C’est ce qui explique que les marchés financent les pertes colossales de l’entreprise et qu’Uber se finance sans problème. D’ailleurs, Uber a déjà montré sa capacité à monter prix et commission.



Uber, c’est une concurrence complètement déloyale, dans l’objectif de devenir un monopole ultra-profitable exploitant des chauffeurs privés de tout droit et des clients qui n’auraient plus de choix alternatif, après avoir détruit les taxis. Ce n’est en aucun cas l’économie du partage. C’est le véhicule de marchés cupides et destructeurs qui veulent créer une rente juteuse. Qui pourra l’arrêter ?

7 commentaires:

  1. Situation ubuesque, concurrence déloyale...
    Un journaliste de France 2 démontrait il y a peu qu'il pouvait devenir chauffeur Ubber en 5 minutes avec des scans de papiers falsifiés...

    Qui pourra l'arrêter ?
    Ben les politiques il me semble, en légiférant.
    Je ne comprends pas qu'Ubber ne soit pas tout simplement interdit ?
    Je ne comprends pas pourquoi on octroit à Ubber plus de droits et moins de devoir qu'aux autres, aux taxis dont la profession est plus réglementée et qui doivent payer un droit d'entrée pharamineux...
    Je n'ai toujours pas compris ce laisser-faire du politique, il faudra que l'on m'explique un jour...

    ***Jacko***

    RépondreSupprimer
  2. Uber ouvre la voie à d'autres concurrents car il n'y a aucune barrière qui le protège à part ses équipes d'avocats, technologiquement il n'y a rien de particulier et des coopératives pourraient très bien faire la même chose avec de meilleurs revenus pour ses chauffeurs :

    http://www.paristechreview.com/2017/01/12/uber-taxis-capitalisation/?utm_source=feedburner&utm_medium=feed&utm_campaign=Feed%3A%20paristechreviewfr%20%28ParisTech%20Review%20-%20Latest%20articles%20in%20French%29

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oups, nous avons dit la même chose, je n'avais pas relevé la dernière ligne...

      Supprimer
  3. Pourquoi les chauffeurs d VTC ne se débarrassent pas de cette punaise, pourquoi ne créent-ils pas leur propre plateforme de réservation coopérative et gratuite ?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. La remarque est valable pour des sales sociétés à fric comme Acadomia et Cours legendre : aucun local, aucun service. Ils paient de pauvres étudiants 8 euros à la con de l'heure et en demandent 50 aux parents.
      Avec Internet, on peut liquider ces parasites et assécher leurs revenus mafieux en 3 jours...

      Supprimer
  4. "C’est le véhicule de marchés cupides et destructeurs qui veulent créer une rente juteuse. Qui pourra l’arrêter ?"

    Le consommateur ? Je n'y crois pas trop. Cette demande de low-cost perpétuel, cette illusion de la quasi-gratuité ne font qu'asseoir ce type de système.

    Bon WE
    Sylvie

    RépondreSupprimer
  5. @ Jacko

    Je crois qu’ils ne comprennent rien au business et souffrent d’un dogmatisme ultralibéral, et laissent donc faire

    @ Anonyme et Rodolphe

    Bien sûr, des alternatives peuvent apparaître, mais il faut des moyens techniques et marketing qui ne sont pas si négligeables…

    @ Sylvie

    Le problème, c’est que l’ultralibéralisme, en appauvrissant les hommes, les poussent vers ses solutions, qui les appauvrissent à nouveau, dans un cercle vicieux que nous vivons depuis des décennies avec la globalisation.

    RépondreSupprimer