vendredi 9 décembre 2011

De l’exploitation politicienne de l’austérité


Après y avoir renoncé piteusement à la rentrée, Nicolas Sarkozy essaie par tous les moyens d’utiliser l’austérité comme une arme politique contre le PS, comme le rapporte Emmanuel Lévy. Une manœuvre qui serait plus crédible si ses initiateurs l’étaient davantage.

La nouvelle story élyséenne

Nicolas Sarkozy a décidé de jouer sa réélection sur sa crédibilité économique. Il serait un président responsable, qui nous protégerait de la crise et dont l’activisme aurait permis d’échapper plusieurs fois à des crises encore plus graves. En face, le Parti Socialiste serait un repère d’irresponsables prêts à ouvrir le robinet à dépenses, entre le retour de la retraite à soixante ans ou l’embauche de soixante mille professeurs supplémentaires. Bref, la responsabilité contre l’irresponsabilité.

Il faut dire que Nicolas Sarkozy a intérêt à ce qu’on ne regarde pas trop ses promesses de campagne de 2007 s’il veut pouvoir être réélu en 2012. Le pouvoir d’achat n’a jamais été autant en berne, le chômage est au plus haut depuis dix ans, les violences aux personnes ne cessent de progresser. Bref, il vaut mieux déplacer le débat sur un autre sujet où il pourrait mettre en difficulté François Hollande, la dette, via notamment le psycho drame de la camisole budgétaire.

Un piège réellement habile ?

Les stratèges de l’Elysée espèrent piéger les socialistes en les appelant à l’union nationale sur cette question pour les faire passer sous les fourches caudines du gouvernement. Mais pour l’instant, François Hollande semble résister, même s’il est probable qu’il acceptera une telle règle s’il est élu. En effet, accepter de voter le projet du président reviendrait à lui donner une victoire politique d’importance à quelques mois des élections présidentielles.

Du coup, l’idée peut sembler habile. Le PS signe, le président gagne car il lui aura fait voter son texte. Le PS ne signe pas et il prêtera le flanc à une critique de son irresponsabilité budgétaire. Au passage, il est probable que le gouvernement pourra même lui coller la responsabilité de la perte prochaine du AAA si cela arrive avant les élections en expliquant que les agences de notation sanctionne le fait que la France n’ait pas passé cette règle de plomb.

Impostures communicantes

Mais même si en surface, cette opération de communication semble habile, elle comporte des failles. Tout d’abord, il est un peu facile de faire voter un texte fin 2011 pour un président dont le mandat se termine dans quelques mois. Si le texte avait été présenté plus tôt, il aurait semblé plus sincère. Là, il ne s’appliquerait que sur un éventuel second mandat. Il est aussi risible d’entendre le premier ministre dire à la fois qu’il fera tout pour garder le AAA tout en excluant un 3ème plan de rigueur.

Ensuite, le bilan financier du président est très contestable. Un rapport de la Cour des Comptes de début 2010 avait ainsi attribué la moitié de l’augmentation des déficits à l’action du gouvernement et la moitié seulement à la crise. En clair, si Nicolas Sarkozy est plus rigoureux en fin de mandat, il ne l’a vraiment pas été en début, multipliant les coûteuses exonérations fiscales et baisses d’impôt. Bref, avec la règle de plomb, il faudrait faire ce qu’il dit, et pas ce qu’il a fait.

Nicolas Sarkozy essaie de prendre une posture d’homme d’Etat avec sa camisole budgétaire. Mais en réalité, derrière la posture de ses communicants, transparaît comme trop souvent les calculs politiciens de bas étages et un bilan calamiteux. Deux bonnes raisons de lui offrir un congé définitif en 2012.

8 commentaires:

  1. Le congé doit être pour toute la clique umps et leurs associés 1 Français sur 2 ne veut pas de sarkozy ni de hollande cela s'applique a leurs pseudos concurrents , si les Souverainistes voulaient bien tous aller dans le même sens ceux ci auraient tous le loisir d'aller planter leurs choux

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  2. L'accord européen intervenu ce vendredi ne vaut que pour l'avenir mais n'engage pas le présent où les marchés financiers continuent de dicter leur aux politiques et la BCE intervient par tous les moyens pour empêcher un "crédit crunch" ou une pénurie de crédit tant est grande la défiance entre les acteurs financiers entre eux. Une telle situation bousculera les médiocres scénarios électoraux du président sortant ce qui peut contribuer au congé que lui donnera le peuple souverain (pour une fois!) dès le 1er tour de la présidentielle.

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  3. Les articles de Martine Orange sur "Médiapart" sont excellents! je les conseille à tous.

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  4. Vendredi 9 décembre 2011 :

    Le maintien de la Grèce, qui négocie désormais un "hair cut" de 80 % sur sa dette, n'est même pas certain.

    http://www.latribune.fr/opinions/editos/20111209trib000670182/super-mario-priez-pour-nous.html

    1- Au début, ils disaient : "Ne vous inquiétez pas : la Grèce remboursera sa dette."

    2- Ensuite, ils ont dit : "Ne vous inquiétez pas : la Grèce ne remboursera pas la totalité de sa dette, mais la Grèce remboursera presque toute sa dette."

    3- Ensuite, ils ont dit : "Les prêteurs vont perdre 21 % de leur mise."

    4- Ensuite, ils ont dit : "Les prêteurs vont perdre 50 % de leur mise."

    5- Aujourd'hui, ils disent : "Les prêteurs vont perdre 80 % de leur mise."

    6- Et demain ?

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  5. E.Todd ce matin sur bfmtv : http://www.dailymotion.com/embed/video/xmv4sk

    Sur François Hollande, il semble penser que la crise le conduira à se mettre à la hauteur de la situation.

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  6. Il va falloir expliquer à nos chers concitoyens ce qu'un budget à l'équilibre veut dire exactement.
    Il va falloir expliquer que l'argent de la Banque de France va être prêté (transféré) au FMI.

    Et le tout sans la moindre contrepartie. Quel beau cadeau au marché financier et le pire des scénarios pour les français.

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  7. @ Patrice Lamy

    Je suis bien d'accord.

    @ Cording

    Très jusre, mais j'ai peur que la situation ne soit stabilisée pour quelques mois (cf papier du jour).

    @ BA

    Très juste

    @ Marco

    Il faut que j'écoute. Je suis surpris que Todd ne soutienne pas au moins JPC plutôt que Hollande.

    @ Noeuddechaise

    Très juste

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  8. @Laurent Pinsolle

    A partir de 12'00 environ : "un phénomène de repolarisation du système" ... "le PS sera appelé à bien se tenir" ... "FH [qui est] un homme raisonnable".

    Voir également ici vers 9'50 : http://www.dailymotion.com/video/xmq1h4_emmanuel-todd_news

    Une démarche plutôt à la Montebourg (changer le PS de l'intérieur) que à la JPC ?

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