mercredi 31 décembre 2014

Clap de fin pour la France à 22 régions


Après le vote final par l’Assemblée Nationale le 17 décembre, est entériné le fait que l’année 2014 sera la dernière pour nos 22 régions, qui seront transformées en 13 l’an prochain. Un nouvel exemple effarant de la logique néolibérale à laquelle cède nos élus.



La politique par le petit bout de la lorgnette

Cette réorganisation de nos 22 régions avait déjà été envisagée par la Commission Balladur, alors lancée par Nicolas Sarkozy. Comme sur d’autres sujets, de manière assez effarante, François Hollande semble vouloir faire ce que son prédécesseur n’avait pas osé faire… D’abord, il est tout de même incroyable que le gouvernement, qui se dit socialiste, recourt aux mêmes méthodes que les multinationales, qui fusionnent leurs filiales, parfois au-dessus des frontières, pour faire des économies. Déjà, cela disqualifie ce projet qui crache sur notre héritage historique et géographique. Pire encore, il s’agit d’un détail insignifiant puisque les régions représentent moins de 3% de la dépense publique.

En fait c’est un peu comme si un patron qui devait tailler dans les coûts se contentait de réorganiser 3% de son organisation seulement, sans s’occuper du reste. Bref, il s’agit de beaucoup de vent, mal inspiré, pour pas grand chose. Cette réforme ne changera rien, y compris niveau dépenses, car elle en occasionnera de multiples pour les fusions et la communication qui va autour. Encore un attrape-gogo, d’autant plus que le découpage de la nouvelle carte échappe à toute logique. On ne comprend pas bien pourquoi l’Alsace, la Lorraine et la Champagne-Ardennes sont fusionnées alors que la Corse, le Centre ou les Pays de la Loire restent seuls. Et le choix des noms risque d’occuper 2015…

La vraie réforme : passer de 6 à 3 niveaux

mardi 30 décembre 2014

En Grèce, la démocratie reprend ses droits





De l’impasse à l’issue de secours

Alors que certains affirment que le gouvernement essayait d’acheter l’élection de son candidat, le bon sens semble avoir prévalu. L’ancien commissaire européen n’a pas réussi à réunir les 180 suffrages nécessaires pour être élu. Quel beau symbole que celui de l’échec de ce gouvernement aux ordres de la commission de ne pas réussir à faire élire un ancien commissaire à la présidence d’un pays martyrisé par ses dirigeants qui suivent les recommendations de cette maudite commission. Du coup, c’est le peuple grec qui va trancher cette impasse lors d’une élection législative anticipée le 25 janvier. Aujourd’hui, les sondages pronostiquent la victoire de Syriza sur Nouvelle Démocratie, contrairement à 2012.

La campagne bat son plein, avec notamment la question des alliances pour dégager une majorité. Il semble que Syriza puisse d’allier avec le DIMAR, mais on parle aussi d’un rapprochement avec l’ANEL, un petit parti de droite hostile aux plans de la troïka. Les jours de la coalition théoriquement contre-nature entre le PASOK et Nouvelle Démocratie pourraient être comptés et une véritable alternance démocratique pourrait avoir lieu dans quelques semaines. On peut seulement regretter que Syriza n’aille pas plus loin dans sa critique de la monnaie unique et que son président affirme sa volonté d’y rester, même si le reste de son programme va plutôt dans le bon sens. C’est que la situation est complexe.

Les marchés votent contre Syriza

lundi 29 décembre 2014

Avec Podemos et Syriza, l’Europe va-t-elle suivre l’Amérique Latine ?


Aujourd’hui, les parlementaires grecs votent pour le 3ème tour de la présidentielle. Si le candidat du pouvoir ne recueille pas 180 voix, des élections législatives anticipées seront organisées, offrant une nouvelle opportunité à Syriza. Avec Podemos en Espagne, la gauche radicale a le vent en poupe en Europe.



Les dérapages du Monde

La couverture de la montée de la gauche radicale est extrêmement révélatrice du fond idéologique de ceux qui en parlent. Pour Le Monde « les mouvements d’extrême-gauche séduisent aussi des électeurs épuisés par une rigueur imposée ‘d’en haut’ depuis Bruxelles, et nostalgiques d’un Etat-providence généreux ». On ne peut sans doute pas faire plus déformé et donc révélateur dans le traitement de l’information. Le Monde alterne entre « gauche radicale » et extrême gauche, ce qui n’a pas le même sens. Puis, il parle de séduire, sous-entendant qu’il n’y a aucune démarche rationnelle dans le soutien à Syriza et Podemos, qui ne feraient que séduire et ne pourraient bien sûr pas convaincre les citoyens.

Passons également sur cette « nostalgie d’un Etat-providence généreux » si révélatrice d’une capitulation de cette gauche eurolibérale vis-à-vis des conquêtes que ces ancêtres ont défendues il y a des décennies. On y décèle également ce refus borné du débat qui consiste à dire que notre système de protection aurait forcément vécu, qu’il serait trop généreux et qu’in fine, il serait normal de le démanteler et que tous ceux qui le refusent seraient des nostalgiques archaïques. Ceci rejoint les déclarations de Jean-Claude Juncker et la visite de Pierre Moscovici à Athènes. Mais ces leçons suffisantes et superficielles pourraient finalement pousser les peuples européens plus encore dans les bras des alternatifs.

Une légitime révolte démocratique

dimanche 28 décembre 2014

Pierre Moscovici, prix de la carpette anglaise


Il y a quelques jours, l’ancien ministre de l’économie, promu commissaire européen malgré des résultats désastreux, a été honoré d’un prix qui lui va bien, celui de « la carpette anglaise », pour avoir envoyé une lettre anglaise à son successeur, Michel Sapin. Plus qu’une anecdote.



Pourquoi une telle évolution ?

Bien sûr, l’envoi d’une missive en anglais par Pierre Moscovici à Michel Sapin est totalement ridicule. En outre, rien ne le justifie, le français faisant en plus partie des langues de travail de la commission. Rien ne justifiait l’emploi de la langue de Shakespeare entre deux français, à moins qu’il ne soit décrété que l’anglais soit la seule langue de travail de l’UE, ce qui n’est pas le cas. Et cela est d’autant plus absurde que Londres devrait organiser un référendum sur la sortie de l’UE. Il est donc encore plus affligeant que deux français correspondent officiellement dans la langue d’un pays qui pourrait quitter l’UE. Un ami indique souvent que la Banque de France publie de plus en plus en anglais sans même traduire.

Il faut bien reconnaître que l’anglais a fini par s’imposer comme la nouvelle lingua franca du monde, portée par de multiples vents : la place économique des Etats-Unis, le relais de la culture populaire anglo-saxonne mais aussi la mondialisation, qui pousse les multinationales à adopter cette lingua franca pour travailler par-delà les frontières. L’immense majorité de ceux qui cèdent à l’utilisation de l’anglais le font bien plus par commodité que par un quelconque dessein funeste, influencés que nous sommes par les différents facteurs vus plus hauts. Mais comme le note Alain Borer dans une interview passionnante, « nous collaborons à la disparition du français », un asservissement et un appauvrissement.

Une invasion au ralenti, mais à repousser

samedi 27 décembre 2014

La chute de l’euro et du pétrole au secours de la croissance ?


Bien sûr, la politique menée par le gouvernement le mène dans une impasse, illustrée par le nouveau record du chômage en novembre. Néanmoins, la croissance aux Etats-Unis, la hausse du dollar et la forte chute du prix du pétrole pourraient apporter un léger regain de croissance en 2015.



2014 depuis le rétroviseur


Il faut bien reconnaître que nous nous situons dans le bas de la fourchette puisque les dernières prévisions font état d’une croissance de 0,4% pour l’année en cours en France. On peut penser que le ralentissement des pays émergents et un rebond mécanique plus limité peuvent expliquer le léger écart. Mais globalement, j’ai l’impression de ne pas avoir trop à rougir de ces prévisions qui avaient souvent déclenché des débats passionnés. C’est d’ailleurs sur ce rebond mécanique que François Hollande parie pour essayer de sauver son mandat et pouvoir se représenter dans des circonstances plus favorables en 2017 et ne pas être balayé même si depuis quelques mois, cette stratégie semble très aléatoire.

Vents plus favorables ?

vendredi 26 décembre 2014

Jacques Julliard a raison sur le suffrage universel, pas sur la suppression du Premier ministre





En défense de l’idée même de démocratie

Certains n’ont pas digéré le référendum de 1962, lors duquel le général de Gaulle avait transféré le choix du président de la République d’une assemblée d’élus au peuple. Cet élément fondamental de l’architecture institutionnelle de notre pays est parfois critiqué mais l’attachement des Français y est si fort qu’il sera bien difficile de revenir dessus. Il est heureux que Jacques Julliard le soutienne, d’autant plus que le malaise a une autre raison. Les pouvoirs de nos gouvernements ont été considérablement réduits : plus de contrôle de la monnaie, un magma de traités qui fixent un cadre politique pré-déterminé dans lequel les marges de manœuvre sont toujours plus restreintes, oblitérant de facto la démocratie.

Certains disent que le peuple serait perméable à la démagogie, comme si eux ne l’étaient pas… Ils veulent éloigner toute décision importante du suffrage universel, d’où les banques centrales indépendantes, ou les accords qui placent les multinationales sur le même plan que les Etats. Jacques Julliard leur répond en notant que le parlementarisme aboutit à la même personnalisation et que le problème est ailleurs : « ceux qui nous gouvernent sont dans une voiture dans laquelle ni les freins, ni l’accélérateur ne répondent. Et l’on voudrait résoudre le problème en supprimant l’élection présidentielle, c’est-à-dire le lien direct entre les électeurs et le pouvoir ? Cela ne ferait qu’aggraver la situation ».

Pourquoi nous avons besoin de Matignon

jeudi 25 décembre 2014

La grande arnaque de la dette publique : ce graphique qui dit tout (billet invité)


Billet invité de l’œil de Brutus.



Ce graphique (élaboré par André-Jacques Holbecq) s’en passerait presque de commentaires.

Si l’Etat empruntait auprès de sa Banque Centrale, notre endettement public serait simplement de l’ordre de 30% par rapport au PIB. Où est passée la différence ? Ce sont tout simplement de l’ordre de 1400 milliards d’euros d’intérêts versés aux banques (qui elles empruntent à taux quasi nul à la banque centrale européenne) et aux rentiers (pas les petits, bien sûr). Le système actuel de la dette publique est donc un terrible artifice anti-redistributif qui conduit le citoyen, essentiellement classes populaires et moyennes étant donné la structure actuelle de notre fiscalité[i], à subventionner le monde de la finance !

mercredi 24 décembre 2014

Le conte de Noël néolibéral de Jacques Attali


Dès que j’ai entendu la publicité pour son dernier livre, « Devenir Soi », j’avais envie d’en savoir plus sur le dernier opus du conseiller de nos gouvernants, sans vouloir, quand même, perdre le temps pour le lire. Merci donc à Régis Soubrouillard, de Marianne, de l’avoir fait et d’en avoir tiré un papier si amusant.



Le refus de la société

Finalement, c’est ce tout ce qui transparaît de la théorie du conseiller de Sarkozy et Hollande. Comme le rappelle Régis Soubrouillard, quand John Kennedy demandait de s’interroger sur ce que l’on peut faire pour son pays, Jacques Attali répond : « demandez-vous ce que vous pouvez faire pour… vous ». Pour l’homo néolibéralus, tout semble secondaire par rapport à son nombril : famille, concitoyens ou pays ne sont plus que des points de détaill pour ces boules de pulsions et d’ego à dominante marchande. Jacques Attali semble remplir son livre de biographies indigentes et indigestes de personnes, d’Arthur Rimbaud à Bill Gates, qui se seraient accomplies pour démontrer sa thèse.

Mais cette avalanche de cas particuliers n’a pas le moindre intérêt démonstratif et ne montre pas en quoi « l’Etat ne pourrait rien ». Les Etats-Unis ou la Chine démontrent encore largement que la volonté nationale permet de faire beaucoup, tout comme de nombreux autres pays souvent bien moins puissants que ne le sont les pays européens dont la France, que ce soit en Amérique Latine ou en Asie. Régis Soubrouillard rappelle justement que la réussite de la Silicon Valley doit beaucoup aux investissements publics massifs de l’Etat, contredisant la bluette néolibérale individualisto-marchande que tente de raconter l’apprenti-sorcier Jacques Attali dont le rejet pathologique de l’Etat laisse perplexe.

Le refus de l’humanité

mardi 23 décembre 2014

Et si la Grèce ne sortait toujours pas de l’impasse ?


Aujourd’hui a lieu le second tour de l’élection présidentielle grecque, qui devrait donner lieu à un troisième le 29 décembre, étant donné que le gouvernement peine à réunir une majorité qualifiée. 5 ans après le début de la crise, une pleine sortie ne semble malheureusement pas encore à l’ordre du jour.



Vers une impasse présidentielle ?

Il y a une semaine, le gouvernement n’a réuni que 160 voix sur 300 pour Stavros Dimas, un pillier du parti de centre-droit au pouvoir, ancien commissaire européen, et non les 200 nécessaires pour être élu. Déjà, il est proprement effarant que le Premier Ministre propose comme président du pays un ancien membre de cette troïka qui torture le pays depuis près de cinq ans. Le second tour ne devrait pas permettre de trancher car la majorité requise est également de 200 voix, le seuil baissant à 180 pour le troisième tour, qui doit être tenu le 29 décembre. Des bruits circulent sur de possibles tentatives d’achat des voix manquantes, auprès des membres d’un petit parti de droite hostile aux potions amères de la troïka.

Néanmoins, il ne faut pas exclure la possibilité que le gouvernement grapille les 20 voix qui lui manquent d’ici une semaine car l’opposition aux mémorandums est très morcelée et le Premier Ministre joue l’intox en annonçant qu’un échec « pourrait s’avérer fatal à l’évolution européenne du pays » et qu’une élection de son poulain « ne serait pas interprétée comme un plébiscite du gouvernement, mais comme le choix de défendre la Constitution et de respecter l’institution présidentielle ». Comme en 2012, Nouvelle Démocratie joue la carte de « moi ou le chaos », carte efficace dans un petit pays en crise où l’Europe représente une forme de garantie face au voisin Turc, avec qui le pays a été en guerre à Chypre.

Partie de poker sur l’Egée

lundi 22 décembre 2014

La grève légitime, mais désespérée, des routiers





La course vers le moins-disant salarial

L’origine du blocage est simple : la CFDT « réclame 20 centimes de plus que le SMIC horaire brut, fixé à 9,53 euros, pour l’ensemble des salariés des transports ». Une demande qui ne semble pas déraisonnable étant donné la dureté du métier, mais qui est refusée par le patronat, pas totalement illogiquement quand on considère la concurrence déloyale des transporteurs venus de pays où les conditions salariales sont bien moins importantes qu’en France (il faut rappeler ici que le SMIC roumain équivaut à environ 10% du SMIC français, le SMIC polonais environ un tiers et le SMIC espagnol environ la moitié). Du coup, les transporteurs routiers français ne sont pas compétitifs sur un marché ouvert.

Du coup, depuis 15 ans, leur part de marché souffre durement. Sur les transports internationaux avec la France, elle est tombée de 46 à 17% de 1999 à 2010. Pire, le cabotage (les camions étrangers qui, après un transport international, en profitent pour faire une mission en France sur le trajet du retour) a déjà pris 3,6% du marché intérieur. Les syndicats de la profession estiment qu’un tiers des 350 000 salariés sont aujourd’hui menacés, comme le montre le triste destin de Mory Ducros et la situation générale de crise de la profession, qui fait face à une concurrence déloyale. Du coup, même si elles sont légitimes, il y a peu d’espoir que les demandes des syndicats aboutissent.

Une logique délétère

Un dirigeant véritable ? La France en compte au moins un (billet invité)

Billet invité de Marc Rameaux



Fabrice Brégier. Ce nom vous rappelle-t-il quelqu’un ? Peu de personnes répondront par l’affirmative. Car le patron d’Airbus depuis le 1er juin 2012 est quelqu’un de discret. S’affirme-t-il donc trop peu ?

Fin 2013, Airbus signait la plus grande année commerciale de son histoire, avec 1619 commandes et 1503 ventes nettes. Se permettant même de décrocher une commande ferme de 31 A350 par Japan Airlines, succès historique auprès d’une compagnie qui avait toujours acheté Boeing.

La réalisation du nouvel A350 fut le contre-exemple de toutes les erreurs commises sur l’A380, erreurs que Fabrice Brégier finit par corriger et résoudre une par une lorsqu’il prit la direction d’Airbus. Il géra finement la transition de l’A320 à l’A320 NEO, et finit l’année 2014 en tenant la livraison de ses A350 au Qatar en temps et en heure. Voilà ce qu’est une bonne façon de s’affirmer.

dimanche 21 décembre 2014

Cannabis : le triste et prévisible renoncement du Monde


C’est l’effarant cadeau de Noël du journal qui se veut la référence du journalisme en France : un éditorial soutenant la légalisation du cannabis, avec tout un dossier pour soutenir cette position. Bizarremment, le Monde fait largement l’impasse sur les études scientifiques qui en démontrent tous les dangers



Une aberration pour la santé publique

Le Monde profite du dossier de Terra Nova pour défendre la légalisation du cannabis. Pourtant, il dit que « la consommation précoce et, plus encore, régulière de cannabis est dangereuse, tout particulièrement pour les jeunes ; selon toutes les études scientifiques récentes, elle provoque un ralentissement du développement intellectuel et accentue les risques de troubles psychiques ». Mais ceci ne pèse pas lourd face à l’argent que l’état pourrait gagner en légalisant ce commerce et face à la forte consommation que la pénalisation n’a pas réussie à réduire. En revanche, il est honteux que les décodeurs n’évoquent pas la question de la santé dans son papier « Pourquoi la répression n’est sans doute plus la solution ».

Pourtant, ce n’est pas comme si le Monde n’en avait pas parlé. En septembre 2012, il titrait « Cannabis chez les adolescents : le QI en fumée », au sujet d’une étude démontrant, sur une durée de 20 ans, que la consommation de cannabis pouvait provoquer une baisse du Quotient Intellectuel de 8 points ! Pire, les troubles de la mémoire et de l’attention perdurent si l’on a commencé à l’adolescence. Outre la dépendance, la liste des effets est effrayante : problème de mémoire (jusqu’à une perte de 50% de la mémoire immédiate pour les gros consommateurs), d’attention, augmentation de 50 à 200% des maladies mentales et troubles comme la schizophrénie ou les psychoses, et réduction du cortex.

La démission habillée en laisser-faire

samedi 20 décembre 2014

6 mois après, le dépeçage d’Alstom s’accomplit





Trois vautours et un cadavre

Le bilan est amer. Le vote de l’Assemblée Générale d’hier a entériné un dépeçage complet de l’entreprise. Pas moins de 70% du chiffre d’affaires de l’entreprise va être cédé à General Electric pour 12,35 milliards. Plus de 60 000 salariés changent d’employeurs. Toute la question est de savoir combient le seront encore dans quelques années. Pire, la fiction des co-entreprises tombe puisque GE détiendra « 50% plus une action en capital et en droits de vote » comme le rapporte le Monde. Et sur le nucléaire, GE disposera de « 80% du capital et 50% plus deux voix en droits de vote ». Bref, dans la réalité, comme je l’annonçais alors malheureusement Alstom est dépecé par GE, le vautour en chef.

Mais le géant étasunien n’est pas le seul vautour en chef. Habile, pour obtenir le soutien des autres partis-prenantes, il partage le cadavre avec les actionnaires et les dirigeants, s’assurant un vote positif lors de l’Assemblée Général. C’est ainsi que « le groupe a nnoncé qu’il compter reverser à ses actionnaires, sous la forme d’une offre publique de rachat d’actions, 3,5 à 4 milliards d’euros ». Cela aide à obtenir 99,2% de vote positif à l’Assemblée. Mais ce n’est pas tout : Patrick Kron, actuel PDG, va recevoir 150 000 actions, qui représentent plus de 4 millions d’euros. Le Figaro cite un délégué syndical CGT-Métallurgie pour qui « 2000 hauts dirigeants vont également se partager 60 millions d’euros ».

La victoire du capitalisme cannibale

vendredi 19 décembre 2014

Les agriculteurs, abandonnés à la loi de la jungle


Il y a trente ans, la PAC garantissait des prix planchers qui garantissaient un minimum de revenus et une visibilité pour l’avenir. Avec la déréglementation et la baisse des aides, les agriculteurs sont abandonnés à la dure loi du marché, avec des revenus qui peuvent baisser de 40% en un an !



Les hommes comme variable d’ajustement

Les chiffres du ministère de l’agriculture font froid dans le dos. Bien sûr, certains diront que les céréaliers ont aussi profité de l’envolée des cours des céréales, mais après une baisse de 30% en 2013, leurs revenus ont chuté de 40% cette année, à 11 500 euros annuels en moyenne, 50% sous le niveau moyen… Les bonnes récoltes, du fait d’une météo favorable, ont fait plongé les prix, et les revenus avec. Les producteurs de fruits et les éleveurs de bœufs ont également les victimes du jeu de massacre du marché, avec des revenus sous la barre des 15 000 euros de revenus annuels. En revanche, pour une fois, les producteurs de lait s’en tirent mieux, avec des revenus en hausse de 30%, à 30 000 euros.

Pire, ces froides statistiques ne rendent compte que d’une partie de la dureté de ces évolutions. D’abord, il ne faut pas oublier qu’aussi basses soient-elles, il s’agit de moyennes, ce qui signifie que pour beaucoup d’agriculteurs, la réalité est encore pire. Et cela ne prend pas en compte non plus le temps de travail, assez souvent très important, et qui ramène les revenus horaires à un niveau totalement indécent. Et que penser des suicides ou des symptômes d’épuisement professionnel, dont on sait malheureusement qu’il touche particulièrement les agriculteurs, ce qui est tristement normal étant données la faiblesse de leurs revenus et leur extrême variabilité. Qui pourrait vivre de la sorte à part eux ?

L’horreur et la folie du laisser-faire

jeudi 18 décembre 2014

Taxe Tobin : Hollande, l’ami de la finance


Bien sûr, je n’ai jamais cru le président alors candidat, quand il faisait de la finance son adversaire, quelques jours avant de rassurer la City. Malheureusement, sur le dossier de la taxe Tobin européenne, il démontre qu’il est, depuis qu’il est élu, l’un des meilleurs amis de celle qui était censée être son adversaire.



Histoire d’une trahison

Il faut remercier Marianne et Bruno Rieth, qui résume parfaitement l’incroyable histoire d’une trahison. Mais comment François Hollande a-t-il pu dire pendant la campagne électorale que « mon véritable adversaire, c’est le monde de la finance » avant de mener une telle politique ? Il faut dire que quelques jours après, il confiait au Guardian : « la gauche a gouverné pendant 15 ans, pendant lesquels elle a libéralisé l’économie et ouvert les marchés à la finance et à la privatisation. Il n’y a pas de crainte à avoir ». C’est le second texte qui faisait foi, comme le démontre Bruno Rieth dans Marianne. Depuis deux ans et demi, l’Elysée et Bercy ne cessent de défendre l’agenda des banques et de la finance.

Et quelle meilleure illustration que la position de la France sur la taxe Tobin. L’idée a trouvé une seconde jeunesse avec la grande crise, soutenue par Joseph Stiglitz, qui y voit un moyen de réguler la finance mais aussi de davantage la faire contribuer à la collectivité, motivation qui semble d’autant plus juste aujourd’hui que les Etats ont déversé des milliards pour la sauver et qu’ils accumulent les déficits. Même l’UE, pourtant souvent influencée par les intérêts des multinationales, a fini par y céder et pousser un projet, farouchement combattu par le Royaume-Uni et les banques. Si la France fait partie du groupe de onze pays qui avancent, elle semble y être pour ralentir le mouvement et en réduire la portée.

Dépasser la droite par la droite

mercredi 17 décembre 2014

L’effarante visite de Moscovici dans la chaudière grecque


Lundi, Pierre Moscovici est venu soutenir le gouvernement de droite, deux jours avant un vote décisif. Une visite révélatrice de ce qui ne va pas dans cette Europe, entre le soutien à des politiques en échec depuis des années, et la récompense de l’incompétence et indistinction politique.



La prime à l’incompétence et l’indistinction ?

On ne dira jamais assez à quel point il est effarant que Pierre Moscovici soit devenu commissaire européen à l’économie cette année. Voici un ministre, qui, en 2012, annonçait que le déficit budgétaire de la France atteindrait 3% du PIB en 2013. Un an après, soldant l’échec de la politique qu’il avait mise en place, qui prolongeait celle du gouvernement précédent, notamment pour les hausses d’impôts, il annonçait que finalement, il faudrait attendre deux ans de plus. Un peu plus d’un an plus tard, son remplaçant, Michel Sapin, a de nouveau repoussé l’échéancier de deux ans. Bref, ce qu’il annonçait pour 2013, le serait en 2017. Et encore, la majorité aura le temps de changer d’ici là…

Quelle légèreté et quelle inconscience de l’avoir nommé à un tel poste ! Lui, qui a échoué en France, doit  maintenant guider l’Europe entière ! Toujours aussi incroyable, le voici qui va soutenir l’équipe au pouvoir en Grèce quelques jours à peine avant des élections présidentielles décisives. Non seulement cela pose un problème de crédibilité quand la Commission demande quoique ce soit au pays, mais le soutien, par un commissaire étiquette à gauche d’un gouvernement largement dominé par la droite, renforce encore l’indistinction grandissante entre ce qu’on appelle la gauche et la droite de gouvernement en Europe. Dans un sens, cela clarifie sans doute le débat politique, mais malheureusement, cela profite aussi assez souvent, mais pas toujours heureusement, à des partis extrémistes.

Athènes au bord de la rupture ?

mardi 16 décembre 2014

Les électeurs japonais plébiscitent les Abenomics





Plébiscite démocratique

Bien sûr, l’opposition ne semblait pas vraiment à même d’affronter les urnes face aux élections anticipées et le taux de participation est très faible, à 52%. Mais l’ampleur du succès du Premier Ministre japonais et de son parti, le PLD, représente un vrai triomphe démocratique. Le PLD ne passe tout simplement pas loin de son record du nombre de députés élus depuis sa création en 1955 ! Avec près de 290 élus sur 475 sièges, il conserve avec son allié la majorité des deux tiers qui lui permet de passer des lois malgré le désaccord du Sénat, qu’il domine de toutes les façons aujourd’hui.

Ce succès montre que les électeurs Japonais approuvent le retour du politique dans leur pays. Ce faisant, Abe fait encore mieux que Koizumi, l’autre Premier Ministre des dernières décennies qui avait montré à son pays qu’il est parfaitement encore possible de faire de la politique et que les dirigeants politiques peuvent ne pas se contenter de simplement faire de la gestion à la petite semaine, en affirmant souvent faussement que l’on ne pourrait pas faire autrement, alors qu’ils ne font que théoriser leur manque de volonté d’agir sur le fond. Merci donc aux électeurs Japonais pour ce message.

Pour une réussite économique

lundi 15 décembre 2014

Salaires : quand le Monde déborde le Medef par la droite


Voici le genre d’article qui symbolise la perdition absolue dans laquelle le débat public se trouve aujourd’hui. Voilà que Le Monde voit dans la hausse de 1,4% des salaires, un signe de nos rigidités ! Pour un peu, ils appelleraient à une baisse du SMIC de 30%, comme The Economist !



L’économie pour les nuls

Il faut croire que depuis la mort de Margaret Thatcher, son esprit hante une partie des élites intellectuelles dites de gauche. J’ai fait des copies écran de cet article au cas où le Monde finirait par se rendre compte de l’énormité de ce papier. Difficile de trouver plus antisocial. Décidemment, ce qu’on appelle la gauche, quand elle est libérale et libertaire, semble avoir une capacité assez étonnante à défendre des idées profondément anti-progressistes. Le Monde rend compte d’une statistique révélant que le salaire moyen de base a progressé de 1,4% sur un an, soit 1,2 point de plus que l’inflation osant affirmer que « malgré la crise, la dynamique des salaires réels ne se dément pas ».



Déjà, passons sur le fait qu’une progression de 1,2% marque une quelconque dynamique. Puis, ces chiffres ne portent que sur les entreprises de plus de 10 salariés et excluent agriculture et emplois publics… Enfin, tout journaliste économique devrait savoir qu’une moyenne peut être trompeuse. Aux Etats-Unis, de 2009 à 2012, les revenus ont progressé en moyenne de 6,1%, mais cette hausse n’a été que de 0,4% si on exclut ceux du 1% le plus riche, et ils ont même baissé pour 90% de la population ! Idem sur l’indice d’inflation qui n’est pas le même pour tout le monde. On aimerait aussi que le Monde rappelle la baisse record du pouvoir d’achat en 2012, ce qui relativise ce maigre gain théorique.

Thatcher, sort de ce journal !

dimanche 14 décembre 2014

Loi Macron : faux semblants et sens cachés





Un outil pour la croissance ?

L’un des premiers arguments pour justifier la libéralisation du travail du dimanche sont les touristes chinois qui pourraient alors rester à Paris le dimanche pour faire des courses. Passons sur le fait que l’organisation de notre société devrait être définie par les besoins des riches touristes chinois… Cela en dit long sur la boussole de ceux qui osent avancer cet argument. Encore plus effarant, ils ne paient généralement pas la TVA, ce qui limite quand même grandement l’intérêt de leurs achats. Soit dit en passant, rien ne justifie cette niche fiscale qui ne profite qu’aux plus riches. Pourquoi les riches voyageurs internationaux ne devraient pas payer les taxes que les citoyens lambda paient tous les jours ?

D’autres disent que la baisse des prix des professions dites protégées créerait du pouvoir d’achat. Passons sur le fait que la baisse du prix des notaires touchera d’abord les plus riches, qui y passent plus souvent que les classes populaires… Ensuite, cette idée est doublement absurde. La baisse des prix est déflationniste en réduisant le pouvoir d’achat de ces professions et pourrait donc pénaliser la croissance. Pire, on voit souvent que la libéralisation ne provoque pas une baisse des prix : la santé, les écoles privées, l’énergie ou les renseignements téléphoniques démontrent l’exact contraire, pour de multiples raisons. Bref, les arguments sur lesquels repose cette loi ne sont vraiment pas solides.

Boucs émissaires et égoïsme

samedi 13 décembre 2014

Affaire Philippot : le comportement indigne et totalitaire de Closer





Indignité politique

Il y a quelques semaines, je dénonçais la une du même torchon sur le président de la République et sa compagne. Malheureusement, il semblerait que la presse de caniveau semble désormais prospérer en faisant les poubelles des hommes et des femmes politiques, exposés comme de vulgaires starlettes de la téléréalité. Quelle déchéance pour le débat public de voir s’étaler en une de ces torchons les clichés volés du président, de ministres ou de députés ! A quoi se réduit la vie publique quand l’événement de la journée est une violation de la vie privée d’une femme ou d’un homme politique ? Difficile de ne pas y avoir encore une manifestation de ce laisser-faire détestable.

Avant même que la presse de caniveau ne s’attaque aux politiques, je pensais que les sanctions financières devaient être alourdies pour ne pas juste représenter une petite part des profits réalisés... Ce n’est pas parce que les stars gagnent beaucoup d’argent qu’elles ne doivent plus avoir de vie privée. Et cela est encore plus vrai pour notre personnel politique ! Et quelle malhonnêteté crasse de la directrice de Closer qui se plaint d’avoir payé jusqu’à 60 000 euros d’amendes, sachant que le dernier numéro sur François Hollande a doublé ses ventes, à 600 000 exemplaires. C’est bien parce que les amendes ne sont qu’un détail financier que ces publications dépotoirs continuent à agir de la sorte.

« Transparence » totalitaire