jeudi 18 décembre 2014

Taxe Tobin : Hollande, l’ami de la finance


Bien sûr, je n’ai jamais cru le président alors candidat, quand il faisait de la finance son adversaire, quelques jours avant de rassurer la City. Malheureusement, sur le dossier de la taxe Tobin européenne, il démontre qu’il est, depuis qu’il est élu, l’un des meilleurs amis de celle qui était censée être son adversaire.



Histoire d’une trahison

Il faut remercier Marianne et Bruno Rieth, qui résume parfaitement l’incroyable histoire d’une trahison. Mais comment François Hollande a-t-il pu dire pendant la campagne électorale que « mon véritable adversaire, c’est le monde de la finance » avant de mener une telle politique ? Il faut dire que quelques jours après, il confiait au Guardian : « la gauche a gouverné pendant 15 ans, pendant lesquels elle a libéralisé l’économie et ouvert les marchés à la finance et à la privatisation. Il n’y a pas de crainte à avoir ». C’est le second texte qui faisait foi, comme le démontre Bruno Rieth dans Marianne. Depuis deux ans et demi, l’Elysée et Bercy ne cessent de défendre l’agenda des banques et de la finance.

Et quelle meilleure illustration que la position de la France sur la taxe Tobin. L’idée a trouvé une seconde jeunesse avec la grande crise, soutenue par Joseph Stiglitz, qui y voit un moyen de réguler la finance mais aussi de davantage la faire contribuer à la collectivité, motivation qui semble d’autant plus juste aujourd’hui que les Etats ont déversé des milliards pour la sauver et qu’ils accumulent les déficits. Même l’UE, pourtant souvent influencée par les intérêts des multinationales, a fini par y céder et pousser un projet, farouchement combattu par le Royaume-Uni et les banques. Si la France fait partie du groupe de onze pays qui avancent, elle semble y être pour ralentir le mouvement et en réduire la portée.

Dépasser la droite par la droite

De manière assez extraordinaire, le PS tempère donc le projet lancé en 2011 par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ! Malheureusement, rien de bien surprenant si on s’en réfère aux propos de Pierre Moscovici à l’été 2013, qui jugeait les projets de la Commission, pourtant guère interventionniste, « excessifs ». Quand mettre un membre du PS à la Commission semble alors la droitiser… Depuis, Michel Sapin vend le projet comme une révolution alors qu’il s’agit d’un pétard mouillé. Le diable étant dans les détails, l’UE avance avec un projet dérisoire qui taxe dix fois fois moins les dérivés que les actions et les obligations (on se demande bien pourquoi ?), puis qui finit par en exonérer plus de 95% de toute taxe !

Et même ce projet croupion déclenche de l’urticaire au monde financier, dont l’opinion est bien relayée par The Economist, vent debout contre cette idée, surtout quand elle semble pouvoir s’appliquer aux échanges faits depuis Londres. Pas de problème : il semble, paradoxalement, suffire de passer par Paris pour porter l’estocade comme ce projet nain pour encore en retarder la portée et la possible application. Il faut noter que les sociaux-démocrates allemands, pourtant guère révolutionnaires jugent « essentiel que tous les dérivés soient inclus car le trading international de dérivés a désormais atteint un volume d’environ douze fois le PIB mondial ». Les enfants de Schröder plus interventionnistes que Hollande !

C’est ainsi que le PS suit l’agenda des multinationales en baissant les cotisations sociales et en flexibilisant le travail, et ne remet pas en cause le laisser-faire financier. Un grand homme aurait dit qu’il « n’aimait pas les socialistes, parce qu’ils ne sont pas socialistes ». 50 ans après, ceci semble encore plus vrai.

9 commentaires:

  1. Maintenant je comprends pourquoi le travail du dimanche.

    Comme les marchés financiers sont fermés le dimanche, on en profite pour travailler. Et comme ça la semaine on peut se servir de notre temps libre pour s'enrichir grâce aux produits dérivés.
    Ce qui permet de réduire les inégalités entre les travailleurs et les rentiers.

    Enfin on permet aux petits de se défendre face aux gros!! Sacré Hollande. Dire qu'il y en a qui commençait à douter... Quels imbéciles!!

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  2. Quand on leur demande de taxer les transactions financières, ou quoi que ce soit d'autre qui déplairait aux ploutocrates, ils disent que ce n'est possible qu'à l'échelon européen et qu'il faut d'abord convaincre nos partenaires de l'UE.

    Mais si jamais les partenaires sont d'accord ils font tout pour saboter le projet et c'est la France qui freine des quatre fers.

    Donc l'Europe est une nuisance pour la France puisqu'elle sert d'alibi aux ennemis du peuple français qui l'oppriment, et la France est une nuisance pour l'Europe puisqu'elle bloque tout progrés pour les autres peuples.

    On comprend pourquoi ils ne veulent absolument pas en sortir. Ils ne veulent ni assumer la responsabilté des souffrances qu'ils infligent au peuple ni les faire cesser.

    Ivan

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  3. Vous parlez comme si vous étiez de gauche ! Comme quelqu'un qui ne supporte la trahison permanente de François Hollande !

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  4. Tout ça est bien joli, mais cette taxe ne prouve en rien qu'elle améliore quoique ce soit. Même Tobin lui même en est revenu pour dire que c'est du pipeau.

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  5. Connaissez-vous le çavapétisme ?

    Et vous-même, êtes-vous çavapétiste ?

    Vendredi 19 décembre 2014 :

    Le déclinisme débouche sur le « çavapétisme ».

    http://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/0204026278458-le-declinisme-debouche-sur-le-cavapetisme-1076628.php

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    1. Je vous demande de vous arrêter avec ces expressions obscènes et décadentes. Respectez notre pays et ses habitants, jeune homme !

      M. Edouard B.
      Ancien Premier ministre

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  6. La crise russe nous rappelle, s'il en était besoin, que l'hypertrophie financière et la libre circulation des capitaux sont une monstrueuse source d'instabilité - alors que leur apport à la prospérité économique n'a jamais été démontré. Tôt ou tard elle frappera la France fragilisée par la faiblesse de sa réglementation et sa fragilité politique.
    Quant au jour ou un changement politique s'amorcerait, il se trouverait face au "mur d'argent" devenus un tsunami d'argent virtuel. Comme Poutine en fait l'expérience, en dépit de l'apparente santé financière de la Russie, entre la souveraineté et la prospérité, d'un côté, et la liberté totale des capitaux, de l'autre, il faudra bien choisir !

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    1. Cet événement démontre bien que les puissants, multinationales et Etats, se servent des leviers que constituent la dérégulation financière, la spéculation et, pour ce qui concerne les Etats-Unis de leur monnaie pour dominer le monde de manière inacceptable. Cela changera un jour ou l'autre et le plus tôt sera le mieux.

      DemOs

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  7. @ Bip

    Bien vu ;-)

    @ Ivan

    Très juste. C’est l’irresponsabilité permanente

    @ Anonyme

    Cela fait des années que je suis favorable à la taxe Tobin. Pour autant, je ne me considère pas de gauche, mais pas de droite non plus

    @ J Halpern

    Très juste.

    @ Démos

    Sans doute pas faux, même si cela est sans doute plus inconscient que conscient

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