lundi 31 mars 2014

Hollande en voie de rater son remaniement


Les résultats du second tour des élections municipales marquent une sévère défaite pour la majorité présidentielle, même si on ne note aucun enthousiasme pour les principales alternatives, comme le démontre le fort taux d’abstention. Et le remaniement est plus mal engagé que jamais.


Gros avertissement pour la majorité

Même s’il ne faut pas oublier que 2008 avait été le meilleur cru municipal pour la gauche, lui permettant peu après de prendre pour la première fois de cette République le contrôle du Sénat, le résultat de ces élections municipales est très mauvais pour la majorité présidentielle. La première sanction, c’est un nouveau record d’abstention. Elle vaut également pour les alternatives électorales (UMP et FN notamment), qui n’ont pas été capables de motiver les Français pour accomplir leur devoir civique. La seconde sanction se lit sur la carte de notre pays, avec d’innombrables pertes pour le parti socialiste.

Après Hénin-Beaumont, Reims, Saint Etienne, Pau, Limoges, Roubaix, Quimper, Angoulème, Caen, Brive, Ajaccio, Montbéliard, Valence ou Toulouse passent à droite. Certaines de ces villes étaient à gauche depuis des décennies mais les édiles socialistes ont été balayés par le profond rejet des Français à l’égard de la majorité. L’UMP n’a eu qu’à se pencher pour en récupérer les bénéfices. Le FN a encore ridiculement affirmé que le pays était passé au tripartisme, au mépris des résultats numériques. Si son compteur final est légèrement supérieur à 1995, municipalement, il reste marginal, et perd dans de nombreuses villes emblématiques : Perpignan, Forbach, Avignon ou Carpentras.

Un remaniement mal engagé

dimanche 30 mars 2014

Loi Florange : le Conseil Consitutionnel défend la loi de la jungle


Après de nombreuses péripéties, et un premier allégement concédé par la majorité lors du processus législatif, le Conseil Constitutionnel vient de censurer des éléments majeurs de la loi visant à protéger les sites industriels de fermeture. Une décision révélatrice d’un état d’esprit.


Interdit d’interdire ?

Depuis quelques années, la multiplication des fermetures de sites industriels a révélé que certaines entreprises ferment des sites pourtant rentables, mais moins que ceux de pays où les coûts du travail sont largement inférieurs. Ce débat s’était imposé lors de la présidentielle, poussant le candidat du PS, pour résister à la montée du FG, à proposer d’interdire « les licenciements boursiers ». Mais les deux dernières années révèlent que cela est beaucoup plus facile à dire qu’à faire. Déjà, lors des échanges parlementaires, le PS avait renoncé à l’idée d’imposer la revente du site pour passer à l’idée d’imposer de rechercher un repreneur. L’obligation de résultat devenait obligation de moyens.


La protection de la jungle

samedi 29 mars 2014

L’Europe : bonnet d’âne de la régulation financière


La dureté de la crise et la concentration du secteur dans des parasites fiscaux devraient pousser nos dirigeants à des réformes radicales. Las, ils se mettent d’accord sur une union banciare chétive et hors sujet et croient bon de relancer la titrisation qui a mené au désastre des subprimes.


Créer une nouvelle bulle de crédit

Michel Barnier, dont l’image avait grandi suite à sa passe d’armes avec Christian Noyer, de la Banque de France, au sujet de la réglementation financière, vient de faire une déclaration hallucinante. En effet, la croissance de la zone euro est encalminée par la diminution du volume de crédits au secteur privé (en baisse de 2,2% sur un an selon la BCE à fin février) quand Londres retrouve des couleurs avec l’envolée du crédit bancaire. Même si nos dirigeants devraient prendre en compte le caractère parfois artificiel et dangereux des bulles de crédit, le commissaire européen a fait son choix.

Il a déclaré que la titrisation « a le potentiel de débloquer des sources de financements supplémentaires pour l’économie réelle », notant que « beaucoup d’actions ont été menées par les autorités pour mieux standardiser et rendre plus transparentes les transactions titrisées ». Si la première partie est juste (en vendant la créance qu’elle a accordé, une banque gagne une nouvelle capacité à prêter), en revanche, la seconde est plus douteuse sachant que nos hiérarques européens osent affirmer que l’union bancaire nous protège d’une nouvelle crise financière alors même qu’il n’y aura création que d’un fonds de 55 milliards d’euros en 2025, somme largement inférieure au coût de la crise.

Un criant manque de régulation

Crimée : retour de la Russie, absence de la France (billet invité)


Billet invité de Roger Franchino

Le référendum du 17 mars sur le rattachement de la Crimée en dépit des vociférations occidentales confirme  donc le  grand retour de la Russie  déjà perceptible de façon croissante dans les affaires de l’Iran et de la Syrie.


L’Occident s’en alarme comme s’il fallait s’attendre à un retour de l’URSS  alors  que  c’est la Russie éternelle qui renait des cendres  où l’avait entrainée pendant 70 ans un régime exécrable.
«  la Russie absorbera le communisme comme le buvard boit l’encre » disait De Gaulle.

La Russie aujourd’hui est la 9ème économie mondiale, avec 145 millions d’habitants sur une superficie égale à 30 fois la France, et, membre du Conseil de Sécurité, elle reste la seconde puissance nucléaire derrière les USA.
Naturellement, compte tenu de cela et de son Histoire millénaire , elle aspire à retrouver la place qui fut la sienne sous l’Empire ou du temps de l’URSS.

Faut- il s’en étonner ? Faut-il s’en inquiéter ?

Sur l’affaire de l’Ukraine d’abord.

vendredi 28 mars 2014

(Scoop) Dimanche, le Front de Gauche était au niveau du FN


Si la nouvelle vous a échappé depuis dimanche soir, ce n’est pas à cause d’un déficit d’attention, mais plus d’un traitement ubuesque des résultats du premier tour des municipales, donnant l’impression que Marine Le Pen et ses troupes étaient sur le point de s’emparer du pouvoir dans le pays.


L’arbre FN masque l’arbre FG

Les chiffres (rapportés par le yetiblog) sont édifiants : le FG a présenté autant de listes que le FN. Il faut aussi rappeler, comme le note Laurent de Boissieu, que sur les villes de plus de 9000 habitants, le parti lepéniste n’a pas présenté plus de candidats qu’en 1995. Plus incroyable, le FG a obtenu quatre fois plus d’élus au premier tour, et peut opposer 67 villes à l’unique Hénin-Beaumont. Enfin, le FG a dépassé 10% dans 308 villes contre 316 pour le FN. Les résultats du FN sont visuellement améliorés par la comparaison avec le désastre de 2008, mais les commentateurs oublient de rappeler qu’il y avait obtenu 88% d’élus de moins qu’en 1989, il y a déjà un quart de siècle…


En fait, le FN ne fait que revenir à ses plus hauts de 1995. On pourrait soutenir que le FG comble en partie son écart de la présidentielle grâce à une meilleure implantation et conclure qu’il le rattrape… Le blog l’Espoir produit une analyse moins optimiste mais intéressante. Bien sûr, l’implantation locale du FG est ancienne, s’appuyant sur l’appareil du PCF et ses militants. Mais cet argument a-t-il du sens par rapport à un Front National qui affiche plus de 40 ans au compteur et dont les résultats ne dépassent pas vraiment ceux d’il y a près de deux décennies, en 1995 ? Ne peut-on pas considérer que le parti de la famille Le Pen a eu plus que le temps nécessaire pour s’implanter localement ?

Résultats et relativité

jeudi 27 mars 2014

De « l’annexion de la Crimée » et du nouvel ordre mondial


Il faut vraiment lire la tribune hallucinante de The Economist sur la Crimée et le nouvel ordre mondial. Si certains tombent dans une russolâtrie excessive, ici, la bible des néolibérales tombe dans une russophobie radicale et un occidentalisme quasiment xénophobe et sans nuance.


Réécriture de l’histoire ukrainienne

Le traitement de l’information concernant l’Ukraine et la Crimée est hallucinant. Le rattachement de la Crimée à la Russie est qualifié d’annexion, terme qui semble bien impropre, étant donné que les habitants de l’ancienne province ukrainienne se sont exprimés de manière très claire en faveur de ce rattachement dans un référendum. Bien sûr, les opposants soulignent que les conditions du référendum n’étaient pas optimales, avec un délai trop court, la présence de milices et pointent des taux de participation extrêmement élevés à Sébastopol, qui démontreraient des fraudes massives.

Mais ils oublient de rappeler que pas une organisation sérieuse n’a remis en cause les conditions globales du scrutin, le fait que 96% des votants (avec 83% de participation, qui plus est) se sont prononcés en faveur du rattachement et que tous les témoignages semblent bien indiquer qu’une large majorité de la population souhaitait ce changement. Du coup, comment ne pas trouver malhonnêtes ceux qui qualifient le rattachement de la Crimée d’annexion, certains osant même comparer Poutine à Hitler, ou ceux qui disent que la population a voté avec un pistolet sur la tempe.

Bien sûr, Vladimir Poutine n’est pas un enfant de chœur. Il n’est pas pour moi un modèle politique du fait de ses pratiques démocratiques (j’ai même reproché à Marine Le Pen d’avoir dit qu’elle l’admirait). Mais si je ne suis pas un russolâtre, je ne suis pas un russophobe non plus. Et Jacques Sapir a bien remis à leur place ceux qui contestent la légalité du référendum, sur son blog, puis sur France 2. J’ai l’impression que dans cette affaire, trop de commentateurs prennent un parti inconsidéré en faveur des ukrainiens russophobes du seul fait qu’ils penchent vers l’Europe, oubliant même que le nouveau gouvernement comporte des personnalités douteuses, ce que rappelle Olivier Berruyer.

Un occidentalisme à courte vue

A quand un vrai débat sur la monnaie ?



Je vous signale la parution d’une vidéo très intéressante sur la monnaie par Gabriel Rabhi, à laquelle André-Jacques Holbecq a collaboré. Je partage l’essentiel de ce qui est dit (à quelques raccourcis près). Les deux hommes continuent de porter un débat essentiel mais malheureusement trop souvent oublié dans nos démocraties, et qui finira un jour par s’imposer.

Pour aller plus loin sur le sujet :
-        papiers sur la réforme du système financier : pourquoi ½, pourquoi 2/2, principes, proposition

mercredi 26 mars 2014

Les Espagnols défllent contre la répression européenne


Dimanche, les Français ont exprimé une profonde insatisfaction contre les principaux partis de notre pays. Samedi, les Espagnols faisaient de même, mais en défilant par centaines de milliers à Madrid contre les politiques d’austérité menées dans leur pays et leurs conséquences monstrueuses.


La colère du pays réel

Comme pour les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne, on a l’impression aujourd’hui qu’il y a deux Espagne. D’une part, il y a le pays qui retrouve de la croissance, est parvenu à rééquilibrer son commerce extérieur en quelques années, et qui réduit drastiquement son déficit budgétaire, au point de pouvoir emprunter à 3,3% à 10 ans. Mais cette image est totalement virtuelle, déconnectée de la réalité de la vie de la population du pays, comme l’ont bien démontré les manifestants de samedi dernier, certains estimant même qu’ils étaient près de deux millions à participer à cette « marche de la dignité ».

La manifestation a eu lieu sous le slogan « non aux coupes budgétaires – du pain, du travail et un toit », dénonçant « l’urgence sociale, le chômage qui touche toujours plus d’un actif sur quatre en Espagne et la politique d’austérité menée par le gouvernement de droite depuis plus de deux ans ». Une partie des manifestants réclamaient carrément le non remboursement de la dette du pays. Car l’amélioration des statistiques économiques espagnoles est totalement virtuelle pour une population confrontée à un chômage toujours monstrueux et à une baisse du pouvoir d’achat, qui explique en grande partie le redressement des comptes extérieurs du pays, au prix d’une grave misère sociale.

L’espoir venu des Pyrénées

A quoi sert le parlement européen ? (billet invité)


Billé invité de Magali Pernin, du très recommandable blog Contre la Cour


Le Parlement européen : une institution récente

Le Parlement européen tel qu'on le connait est né en 1979, année où pour la première fois les membres ont été élus au suffrage universel direct. Avant cela, l'Assemblée européenne était composée de parlementaires nationaux mandatés par leurs paires pour représenter leur pays.
Par conséquent, 1979 est en soit une petite révolution car il marque la naissance d'une assemblée composée d'élus exclusivement choisis pour défendre l'intérêt européen. Seul le Conseil est désormais en charge de la défense des intérêts nationaux.

Avant 1979, plusieurs dates doivent cependant être retenues :
- En septembre 1952, la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA) a établi une Assemblée commune de 78 membres issus des parlements nationaux des six pays constituant la CECA.
- En mars 1957, une Assemblée parlementaire européenne est créée avec la mise en place de la Communauté économique européenne (CEE)
- En 1962, cette Assemblée est renommée Parlement européen.

Depuis 1979, l'effectif du Parlement européen a été augmenté à chaque élargissement, passant de 78 députés en 1952 à 788 en 2004. Depuis le 1er juillet 2013, ce nombre est de 766 (736 élus en 2009, 18 supplémentaires depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, 12 députés croates élus en 2013). Le nombre maximum de parlementaires est désormais plafonné à 751.

Les modalités d'élections

mardi 25 mars 2014

Municipales : l’extraordinaire barouf sur les scores du FN


Incroyable poussée, passage du bipartisme au tripartisme : la principale nouvelle du premier tour des municipales semble être la percée du FN. Surprise, quand on examine les résultats nationaux, le parti de la famille Le Pen dépasse seulement 4% des voix ! Une incroyable déformation de la réalité


Le meilleur ennemi du PS

Il faut sans doute voir dans l’importance incroyable donnée au FN par la majorité le meilleur signe de son désespoir électoral. C’est, semble-t-il, l’argument qui leur semble le plus pertinent pour limiter les pertes lors de ces élections, ce que l’on pouvait déceler dès avant le premier tour dans les déclarations incongrues du premier ministre qui parlait déjà de front républicain pour le second tour. Il y a tout de même quelque chose d’incroyable à voir la majorité faire du vote de moins de 3% des citoyens du pays l’alpha et l’omega de sa stratégie de communication pour essayer de limiter les dégâts.

Mais ce faisant, le PS reprend la stratégie politicienne initiée par François Mitterrand qui consiste à faire du Front National son meilleur ennemi, pour essayer de réduire le choix politique qu’auraient les Français à une alternative entre des facistes et les opposants au facisme. D’où l’injonction assénée ad nauseam à l’UMP de se rallier à une stratégie de front républicain pour éviter que des mairies passent au FN dimanche prochain. Déjà, les résultats de dimanche amènent à relativiser la pertinence de cette stratégie, comme le note Laurent Bouvet sur son blog. N’y-a-t-il pas meilleur moyen pour montrer que la majorité est totalement à cours d’arguments que d’adopter un tel discours ?

Une percée plus que limitée

N'oublions pas les européennes ! (billet invité)


Billet invité du blog actualité

A l’occasion de la sortie du premier sondage concernant les élections européennes du 25 mai prochain, j’ai jugé utile de faire un petit article pour rappeler l’éminence de ces élections qui mobilisent trop peu l’électorat français (et même européen). C’est une erreur et cela en arrange beaucoup trop : ces élections sont très importantes dans le sens où l’Union Européenne dispose de beaucoup de pouvoir et d’une influence de plus en plus grande sur la politique nationale de chaque Etat. La politique menée à l’échelle Européenne conditionne en bonne partie ce qui se fait à l’échelle nationale. Certes, l’Union Européenne ne se limite pas au parlement européen (il y a aussi et surtout la Commission Européenne), mais cette instance est la seule démocratiquement élue au niveau européen. Il faut donc en profiter pour en faire un véritable espace de débat sur le projet européen et ne pas la laisser être une simple chambre d’enregistrement des décisions de la commission.
Dans quel contexte se déroulent ces élections ? Quels en sont les grands enjeux ? Qui peut tirer son épingle du jeu ?

Dernier sondage Opinion way

lundi 24 mars 2014

Français recherchent opposition, désespéremment





Poussée nationale de la droite

Ce qui frappe dans les résultats de ce soir finalement, c’est la progression des scores de la droite et de l’extrême-droite dans la grande majorité des villes, même si la situation pourrait ne pas avoir beaucoup bougé dans une grande partie des plus grandes villes, qui semblent conserver le biais favorable à la gauche qu’elles affichent systématiquement depuis quelques années. Mais la question qu’il faut également poser c’est de savoir si le mouvement de balancier marque un succès de l’UMP ou pas. En effet, il ne faut pas oublier que les scores de référence datent de 2008, une année très largement favorable à la gauche, et que le contexte national était extrêmement favorable à l’opposition.

En effet, jamais un chef d’Etat et un gouvernement n’ont été aussi impopulaires de toute l’histoire de la Cinquième République. Du coup, on pouvait s’attendre à une redite des élections de 1983, qui avaient vu un fort mouvement de balancier en faveur de l’opposition, qui avait alors profité du profond rejet de l’équipe au pouvoir. La modération de l’ampleur du mouvement au premier tour (qui demande à être confirmée lors du second tour de dimanche prochain néanmoins), alors même que la majorité n’a jamais été aussi impopulaire, a forcément un sens. Certains y verront le fait que lors de ces élections locales, les Français ont sans doute principalement voté en fonction des enjeux locaux…

Une poussée faible et par défaut ?

L'illusion de la taxe sur les transactions financières (billet invité)


Billet invité de l'Oeil de Brutus

Même si la proposition de taxe Tobin existe depuis 1972, l’idée de taxe sur les transactions financières est un véritable serpent de mer politique depuis le début de la crise des subprimes. Il n’est pas un politicien de haut vol qui clame haut et fort l’urgence de la mise en place de cette taxe. Sauf que, voilà, cela fait maintenant six ans, et l’on attend encore.


Au niveau français

dimanche 23 mars 2014

Pour Coralie Delaume, l’UE détruit l’Europe


Après sa prestation de vendredi soir aux côtés de Jacques Sapir et Emmanuel Todd, voici la seconde partie de mon compte-rendu du très bon livre de Coralie Delaume « Europe : les états désunis », qui étudie les mécanismes qui ont mené l’UE à devenir un Frankenstein politique et social.



La grande divergence européenne

Comme elle le note, à l’origine, le projet européen devait faire converger ses membres vers le haut. Mais elle constate que « de grandes divergences se font jour désormais entre ceux qui obtenpèrent parce qu’ils croient n’avoir pas le choix, et ceux qui s’accomodent de la situation parce qu’ils considèrent qu’elle leur est utile, ou, du moins, qu’elle le fut longtemps ». La divergence se lit aussi dans l’évolution du chômage ou de la dette depuis 2007. Les pays du sud de l’eurozone sont les « damnés de l’intégration européenne » car les « plans d’aide » sont des exercices de « répression économique » qui ont mené à une « tiermondialisation de la Grèce ». En même temps, elle note le paradoxe qu’il y a eu à prêter de l’argent à l’Irlande tout en lui laissant conserver son statut de parasite fiscal.

L’auteur note également que même la paix continentale se fissure. Une partie de l’Europe dénonce la fainéantise supposée des pays du Sud. Ce constat indigent a mené à des solutions indigentes, ces plans d’appauvrissement, d’humiliation et de ressentiment. Et tandis que le Bild propose à la Grèce de vendre ses îles, les manifestants défilent en grimant Angela Merkel en Hitler... Dans ce contexte, quand l’UE obtient le prix Nobel de la paix, « on hésite, décidemment, entre l’incrédulité muette et le rire jaune ». Il faut de l’« aveuglement » ou de la « démence » pour croire qu’une « Europe saine puisse se construire ainsi ». En outre, l’auteur constate justement que l’UE a choisi d’aider les banques (les créanciers étant les véritables bénéficiaires des plans) contre les peuples, mis à l’eau et au pain sec.

L’Allemagne, hégémon réticent

samedi 22 mars 2014

Les états désunis, ou la mise à nu du projet européen


Le lancement de son blog, « L’arène nue », il y a trois ans environ avait rapidement connu un grand succès. Gageons que son premier livre « Europe : les états désunis », devrait rapidement connaître le même destin, en s’appuyant sur une grande qualité d’écriture, tant sur le fond que la forme.



Un livre très recommandable

Le livre de Coralie Delaume est extrêmenent recommandable, comme l’a longuement expliqué Jacques Sapir sur son blog dans une note spécifique sur le livre, pour de nombreuses raisons. D’un point de vue de la forme, on retrouve sa plume alerte, mordante, drôle et dynamique. L’autre intérêt majeur de ce livre vient de son positionnement politique original. Si on sent une personne plutôt engagée à gauche étant données ses références, Coralie Delaume n’est pas une partisane sectaire qui aurait coupé le monde en bons et méchants. Elle abreuve ses réflexions à toutes les sources, ce qui donne un aspect moins subjectif à sa réflexion. En outre, même ce livre la range parmi ceux que l’on appelle bien improprement les eurosceptiques, il est écrit d’une manière assez neutre et factuelle.

C’est le livre d’une citoyenne qui semble croire à l’idée d’une coopération entre les nations européennes, qui pourrait mener à de belles choses, mais qui constate, en prenant du recul que ce qui aurait pu être un beau projet est devenu un monstre. Ce livre est le moyen de se demander pourquoi nous en sommes arrivés là et de décrire tous les travers de cette Europe, qui a fini par désunir les Etats. Ce livre nous épargne donc les envolées lyriques déconnectées de la réalité et de moins en moins audibles des missionnaires de cette construction européenne. Mais il épargne également la critique un peu rancie, donneuse de leçon ou parfois délirantes de certains critiques du projet européen.

Il s’agit en fait d’un récit des dernières années s’appuyant sur les déclarations des uns et des autres, ainsi que sur de nombreuses études, visant à comparer concrètement les promesses de ce projet européen avec la réalité de ce qui s’est passé depuis des années. Et cette enquête se révèle, assez logiquement, impitoyable pour le projet européen, soulignant ses immenses et répétées carences démocratiques et sociales, dans un constat partagé par de nombreux analystes alternatifs. La qualité de ce livre a valu à l’auteur une invitation dans l’émission de Frédéric Taddéï hier soir.

Regarder la vérité en face

Elections locales, enjeu national... et bien plus encore (billet invité)


Billet invité de l’Oeil de Brutus


C’est une ritournelle traditionnellement initiée par le(s) parti(s) au pouvoir à la veille de chaque élection locale : celle-ci n’est pas le lieu pour sanctionner la politique du gouvernement. Mais là n’est justement pas le propos.

On ne peut aujourd’hui que constater, hors quelques questions sociétales de seconde zone qui servent à amuser la galerie[i],  la convergence idéologique qui réunit la dyarchie PS-UMP au pouvoir depuis plus de trois décennies dans notre pays. A tel point que l’on peut se demander si la France n’est pas gouvernée par un parti unique à l’intérieur duquel deux clans s’écharpent les reliques d’un pouvoir qu’ils se sont eux-mêmes fait un devoir de transférer à d’autres (notre Dieu le « Marché » et ses anges de la finance, la Commission européenne, entre autres), peut-être bien afin de s’exonérer de leurs responsabilités et mettre aux oubliettes toute notion de volonté politique, d’intérêt général et par là-même de démocratie.

vendredi 21 mars 2014

Présidence de la Commission : le cauchemar continue


Comme le rapporte The Economist, le résultat des prochaines élections européennes pourrait influencer le choix du prochain président de la Commission Européenne. Les noms qui sont avancés à date montrent que cela ne devrait améliorer en rien la qualité de la personne choisie…


Le trio infernal

Pour l’instant, cela n’a pas encore vraiment pénétré le débat public, mais a priori, si les membres du Parti Socialiste Européen arrivent en tête, ce devrait être Martin Schulz, un social-démocrate allemand, qui remplacerait Barroso. Si c’est l’alliance de centre-droite du Parti Populaire Européen (dont fait partie l’UMP – mais pas le Parti Conservateur de David Cameron depuis 2009, ce qui pénalise lourdement ce groupe), ce serait Jean-Claude Juncker, l’ancien premier ministre du Luxembourg. Enfin, les libéraux ont pris Guy Verhofstadt, un ancien premier ministre belge, comme tête de gondole pour ces élections. Les partis n’ont pas mieux choisis que les chefs d’Etats dans le passé…

Martin Shulz représenterait en effet un choix très malheureux. Alors que l’Allemagne exerce de facto le rôle principal dans l’Union Européenne, comme le démontrent toutes les négociations, que ce soit sur l’union bancaire ou les différents plans, et qu’elle bénéficie déjà de la présence de la BCE sur son territoire, lui accorder en plus la présidence de la Commission renforcerait encore sa position hégémonique. Le choix alternatif n’est guère plus réjouissant. En effet, alors que l’Union Européenne continue à discuter de réglementations financières, il serait pour le moins paradoxal que le président de la Commission soit issu d’un parasite fiscal notoire et qui, de facto, vole ses voisins….

La démocratie impossible

jeudi 20 mars 2014

Comme une ambiance de fin de régime…


L’hiver 2014 restera sans doute comme une des périodes les plus tristes de notre vie politique. Face à un gouvernement dont la direction semble devenue folle, l’UMP est secouée par des affaires, tandis que les municipales font ressortir des aspects bien troublants du FN.


Une majorité à la dérive

Dimanche, nous sommes près de 45 millions à être appelés aux urnes pour les élections municipales, des élections importantes pour notre vie de tous les jours. Mais une prise de recul sur les trois derniers mois donne le vertige quand on se penche sur l’actualité politique. François Hollande avait sans nul doute élaboré une nouvelle stratégie : une accentuation du virage eurolibéral pour occuper le centre politique, quelques bombes sociétales pour hystériser le débat public et pousser l’UMP aux dérapages. A défaut d’y adhérer, on pouvait reconnaître une certaine logique à cette ligne, d’autant plus que les affaires pénalisent lourdement le parti de l’ancien président avec un flot trop fréquent de nouvelles.

Mais cette stratégie ne fonctionne pas du tout, au point qu’à l’approche des municipales, le gouvernement se fait plus discret, comme s’il voulait limiter l’impact négatif sur ses édiles locaux. La majorité est entre deux feux. D’une part, elle peine à prendre des mesures assez fortes pour changer la donne, notamment en matière d’emploi. Et d’autre part, n’obtenant aucun résultat sur ce front, le fossé, déjà colossal avec les classes populaires, semble se creuser toujours plus, les agitations sociétales n’ayant aucun intérêt pour des personnes en manque d’emplois ou de pouvoir d’achat. Enfin, le manque de professionnalisme et la ligne atlantiste sur l’Ukraine et la Crimée ne rassurent pas…

Une opposition peu ragoutante

mercredi 19 mars 2014

Oxfam dénonce l’explosion des inégalités outre-Manche


Oxfam a publié une enquête qui a fait grand bruit en Grande-Bretagne. Le fait que les 5 familles les plus riches soient aussi fortunées que les 12 millions les moins argentés réunis a capté l’attention, comme l’envolée des inégalités des dernières années, que l’on retrouve ailleurs, notamment aux Etats-Unis.


Un retour au moyen-âge ?

L’étude a attiré l’attention de François Lenglet, qui a consacré sa chronique économique quotidienne d’hier sur RTL à la question. Il en a repris tous les éléments principaux, soulignant, outre le fait que la richesse des 5 familles les plus argentées de Grande-Bretagne est du même niveau que celle, cumulée, des 12 millions de personnes les moins riches du royaume. Il a rappelé que depuis 20 ans, les revenus de 90% de la population ont progressé de 27%, mais que ceux des 0,1% les plus riches, ont doublé, soit un rythme quatre fois plus élevé que celui de la grande majorité des citoyens !

Dans le détail, donné par Atlantico, les 5 fameuses familles ont une richesse cumulée de plus de 28 milliards de livres, soit plus de 5 milliards par famille, quand les 12 millions de moins riches ont un peu moins de 2400 livres. L’association a affirmé que « la Grande Bretagne est en train de devenir une nation profondément divisée, avec une riche élite qui voit ses revenus d’envoler tandis que des millions de familles luttent pour joindre les deux bouts. Ce n’est pas un signe de réussite économique, mais un échec. Loin d’être inévitable, c’est le résultat de choix politiques qui peuvent être modifiés ».

Un problème global


mardi 18 mars 2014

Crimée : les scandaleuses sanctions post-référendaires




Haro sur la démocratie ?

En effet, il faut constater ici que le choix effectué par les habitants de la Crimée, s’il est aussi sans doute le fruit d’un contexte spécifique, est d’une clarté démocratique rarement atteinte. La participation a atteint le chiffre élevé de 83%, malgré les appels au boycott des opposants au rattachement à la Russie, qui ne se sont pas comptés de manière très flatteuse de la sorte. Et plus de 96% des bulletins exprimés soutiennent la sortie de l’Ukraine et l’intégration dans le giron russe. Mieux, il semble que les élections se soient passées d’une manière non critiquable d’un point de vue démocratique.

Devant un choix aussi clairement exprimé par une immense majorité de la population de la Crimée, les critiques deviennent extrêmement suspectes, surtout quand elles viennent de personnes dont le passé n’est pas impeccable d’un point de vue démocratique (élections de 2000 aux Etats-Unis, traité de Lisbonne suivant le « non » des français au TCE en 2005, les irrégularités massives lors des élections pour la tête des deux principaux partis de la vie politique française…etc). Sanctionner un résultat démocratique ne représente-t-il pas implicitement une remise en cause de la démocratie ?

Relents impérialistes…

dimanche 16 mars 2014

Le Japon en voie de sortie de la déflation ?


Depuis 15 mois qu’il est arrivé à la tête du Japon, Shinzo Abe a révolutionné la politique de son pays, pour le sortir de la déflation et de la langueur dans laquelle il est enfermé depuis plus de 20 ans. Les annonces de hausses de salaires dans les grandes entreprises annoncent-elles son succès ?


Un pas dans la bonne direction

Après une année 2013 aux résultats démultipliés par la baisse du yen, qui a considérablement fait progresser leurs profits, les grandes entreprises exportatrices abordaient l’année 2014 avec des marges de manœuvre pour répondre aux demandes du premier ministre d’une augmentation des salaires pour cette année. Toyota a ainsi annoncé une augmentation globale de 7,6% cette année, la plus forte depuis la bagatelle de 21 ans ! L’entreprise n’est pas la seule puisque Nissan, Honda, Panasonic et Hitachi ont déjà annoncé qu’elles allaient suivre la même politique.

Les hausses de salaires sont un élément déterminant dans la politique économique globale du premier ministre pour plusieurs raisons. Tout d’abord, l’idée est de sortir enfin le pays de la logique délétère de déflation ou les prix et les salaires sont orientés à la baisse, un contexte peu favorable à la croissance. Ensuite, cela est essentiel pour compenser la hausse à venir de la TVA, qui doit réduire le déficit public très important du pays et le remettre sur une trajectoire plus soutenable. Bémol néanmoins : les PME ne seraient pas aussi généreuses que les grands groupes exportateurs

Une politique globale cohérente