mardi 14 février 2012

Bayrou, adepte du régime grec


Le candidat du Modem a révélé le chiffrage de son programme la semaine dernière. Sans surprise, il a creusé le sillon de la rigueur qui est une de ses marques de fabrique. S’il fait plaisir à Jean-Michel Aphatie, sa recette serait une vraie catastrophe pour les Français.

Entre Aphatie et Churchill

François Bayrou ne pouvant pas se distinguer de François Hollande et Nicolas Sarkozy facilement sur les questions économiques, puisqu’il est lui aussi favorable à la monnaie unique, au libre-échange ou à la libre circulation des mouvements de capitaux, il a décidé de se différencier sur la question de l’austérité. En effet, alors que Nicolas Sarkozy promet un retour à l’équilibre budgétaire pour 2016 et François Hollande pour 2017, le candidat du Modem propose carrément 2015 !

Concrètement, cela représente un effort de 100 milliards d’euros entre 2011 et 2015, ou 80 milliards d’euros entre 2012 et 2015. Le président du Modem propose de réaliser cela pour moitié avec des baisses de dépenses et pour moitié avec des hausses d’impôts (nouvelles tranches d’impôt sur le revenu, hausse de la TVA). Bref, après le candidat allemand, voici le candidat churchillien, qui propose de la sueur et des larmes pour remettre de l’ordre dans les finances publiques.

Une austérité suicidaire

Le problème est que ces propositions sont extrêmement dangereuses. Elles représentent un ajustement budgétaire d’environ 1,5 point de PIB par an pendant 3 ans. Le FMI a souligné dans une étude de 2010 que les phases d’austérité pèsent fortement sur la croissance. La potion amère de François Bayrou pourrait se révéler beaucoup trop dure pour tenir les 1,5% de croissance du PIB qu’il annonce dans son projet, rendant caduque l’ensemble de son projet.

L’avis des économistes n’est pas très positif. Même les adeptes de la pensée unique sont sceptiques, comme le rapporte L’Express. Quand aux hétérodoxes, ils dénoncent ces politiques vivement, comme Joseph Stiglitz pour qui « l’austérité mène au désastre » et qui évoque « la pratique de la saignée dans la médecine médiévale ». En outre, comment ne pas y voir une réplique des politiques mortifères menées en Grèce, et qui n’ont absolument rien résolu.

Un grand coup de barre à droite

Dans un papier assez vif, le blogueur Superno, s’est posé la question « Bayrou, encore plus libéral que Sarkozy ? ». Il est vrai que le programme budgétaire du candidat centriste à l’élection présidentielle le déporte sur la droite de l’échiquier politique puisqu’il est celui qui va le plus loin dans les efforts de réduction des déficits budgétaires, poussant jusqu’à l’absurde d’une politique qui achèverait de casser définitivement toute croissance, comme cela se passe en Grèce.

Certes, on peut reconnaître une certaine constance au candidat, qui tenait déjà un discours similaire en 2007. Mais pratiquement, c’est une impasse économique. En fait, elle constitue sans doute un virage à droite. En effet, la seule chance pour François Bayrou n’est-elle pas de convaincre l’électorat de droite de laisser tomber un Nicolas Sarkozy qui sera forcément battu par François Hollande pour le soutenir lui, qui serait capable d’éviter le retour de la gauche au pouvoir ?

Devant la faiblesse du président sortant, le président du Modem semble faire le pari de devenir un candidat de droite de substitution pour faire barrage à François Hollande. Mais ce dernier ne fait pas très peur. Pire, il est pour le moins paradoxal de nous proposer une potion qui échoue partout ailleurs.

11 commentaires:

  1. ceux que nous appelons centristes en France sont les tenants les plus convaincus le l'ultra libéralisme et du libre échange alors ce n'est pas étonnant

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  2. @Laurent

    Quand on sait que c'est Barre qui a introduit le néolibéralisme en France, les analyses de Bayrou ne surprendront personne. Cependant il a au moins le mérite de jouer franc jeu, même s'il est complètement hors sujet. Sa potion amère les socialistes la pratiqueront une fois au pouvoir même s'ils n'en disent mots pour l'instant.

    Le gros problème c'est que ce discours est entendu par les français qui pensent souvent l'économie du pays comme une version en plus grande de leur propre expérience économique. Si le néolibéralisme s'est imposé c'est aussi parce que pour beaucoup de gens équilibrer les comptes est "naturel" à leur échelle. Ils ne comprennent pas que l'état ne fonctionnement pas de la même manière parce qu'il fabrique la masse monétaire à l'échelle collective. La domination néolibérale doit beaucoup aux idées reçues qui trainent dans les têtes de nos compatriotes. Sans une réflexion macroéconomique minimale les gens ne comprennent pas pourquoi une réduction des dépenses de l'état massive en période de récession mondiale produit une contraction du PIB et in fine une hausse plus rapide encore de la dette. La notion de relance est en réalité contre-intuitive pour la majeur partie de nos concitoyens.

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  3. ** Le candidat idéal pour la bancocratie **

    40 à 50 milliards d'euros par an de frais financiers sont payés chaque année et dûs à la dette de l'Etat au système bancaire privé.

    Rien dans le programme de Bayrou n'est indiqué pour briser cette ponction du système bancaire sur les recettes de l'Etat, donc nos impôts. Il est soumis aux impératifs catégoriques du traité de Lisbonne, pas de prise en charge possible de la dette ou du déficit budgétaire par émission monétaire à zéro % par l'institut d'émission pour réduire la pression bancaire, tout l'effort de son programme porte sur le dos des contribuables. C'est le candidat idéal pour la bancocratie.

    Il sera médiatisé si Sarkozy s'écroule, il ne pose aucun problème à l'oligarchie financière. C'est un soumis.


    Inutile et encombrant comme les deux leaders UMPS.

    Olivarus

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  4. Pauvre Keynes ! Plus les faits lui donnent raison et plus les européens veulent l'enterrer pour de bon.
    C'est fou cette régression dans la pensée économique. Même les américains sont moins bornés.

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  5. "Grèce : les plans de rigueur empilés n’ont plus aucun sens"

    http://cib.natixis.com/flushdoc.aspx?id=62462

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  6. Laurent J aimerai avoir votre opinion sur Olivier Delamarche que nous pouvons voir sur BFM TV

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  7. Tout à fait d'accord sur le fond bien sûr, en revanche la comparaison avec Churchill, je ne suis pas certain qu'elle soit très appropriée. C'est une belle publicité pour lui !

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  8. Bonsoir, j’espère un article pour défendre Nicolas:

    http://www.youtube.com/watch?v=zlXzMBJkhSE&feature=player_embedded

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  9. @ Gaulliste Social

    Merci. Naturellement, un papier demain.

    @ Nicolas Gonzales

    Pas faux. Je suis trop gentil...

    @ BA

    Merci pour l'info

    @ Patrice

    C'est juste. Je vais essayer de regarder.

    @ TeoNeo

    C'est complètement fou. PIB -7% au 4ème trimestre en Grèce. On a le pire d'une sortie désordonnée sans les avantages.

    @ Olivarus

    Complètement d'accord.

    @ Yann

    Complètement d'accord. Demain, conférence de presse sur le chiffrage de notre programme. Il me tarde de défendre ces idées devant les journalistes !

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  10. Parmi les grands candidats il n'y a aucun qui met la système elle même en question. Même pas NDA ;-)

    Parmi les soi-disant grand candidats ces sont Bayrou et Villepin et comme petit rebelle Eva Joli qui sont les plus credible pour des différents raisons. Bien sur entierrement subjective!!!

    Ton analyse n'est pas fausse, mais il essaie comme les autres (parmi Bayrou) de "plaire" au systéme. C'est juste une autre façon comme Bayrou, Sarkozy, Hollande, Joli et désolé même NDA, maintenant "le changement".............. sans rien se change.

    Pourquoi? Parce ce que le système est tout puissant et l'homme, même le plus haut est entierrement impuissant.

    A lire avec un clin d'oeil Laurent!!!!!

    Bien à toi!

    Peter

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  11. Le candidat aux élections présidentielles Francois Asselineau, pour le parti UPR: Union Populaire Républicaine, intéressera, je pense, une grande partie des lecteurs de ce blog.

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