dimanche 19 novembre 2023

Auto : une goutte bienvenue de protectionnisme dans le fatras bureaucratique

Je craignais que le gouvernement n’aille pas jusqu’au bout des annonces, comme la plupart du temps. Mais pour une fois, il faut reconnaître que la réforme du bonus écologique, qui exclut, enfin, les voitures asiatiques, se met en place. Un vrai progrès, il faut le reconnaître, mais à relativiser par les autres aspects de la régulation envahissante du secteur, qui laissent à désirer

 


Une France un (tout petit) peu moins naïve

 

Il faut dire que la subvention accordée aux véhicules électriques venus de Chine était particulièrement stupide. Elle revient à subventionner les importations au détriment, notamment, de productions françaises, alors même que la Chine protège massivement et depuis toujours son marché intérieur et que ses constructeurs partent à la conquête des marchés mondiaux, imitant, quelques décennies après, les constructeurs japonais et coréens. Pire, ce sont aussi les constructeurs occidentaux qui gonflent le déficit commercial européen et français à l’égard de la Chine en important des véhicules fabriqués en Chine, de Tesla, à Dacia (la Spring), Stellantis (la DS9, la Citroën C5X), la Mini électrique et même quelques modèles allemands comme la BMW iX3 !

 

La réforme du mode de calcul du bonus écologique mettra enfin fin à la subvention aux importations lointaines. Pour une fois, le gouvernement fait preuve d’un petit peu de protectionnisme, démontrant que protéger son marché est possible, même dans l’UE, même avec les traités commerciaux que nous avons signés. Malheureusement, il faut reconnaître que la portée de cette réforme est assez limitée. D’abord, elle ne touche pas les importations venues d’autres pays européens : on peut craindre que notre solde commercial avec les pays d’Europe de l’Est continue de se dégrader… Tant qu’à pousser l’achat de véhicules électriques, pourquoi ne pas créer un bonus double pour les véhicules fabriqués en France, du moment qu’une part suffisante de la valeur ajoutée en vient…

 

Au final, cette réforme est une forme de minimum vital au moment de l’offensive chinoise. Mais cela ne revient qu’à supprimer une part des aides aux importations chinoises. Malheureusement, dans le fatras bureaucratique des règles qui gouvernent le marché automobile, on peut craindre que cette amélioration, même si elle est bienvenue, soit au final un peu superficielle. L’Europe continue de taxer près de trois fois moins les voitures chinoises que ne le font les Etats-Unis. Et surtout, parce qu’un ensemble très complexe de règles continue à pénaliser les véhicules thermiques, expertise première des constructeurs européens, au détriment des véhicules électriques, où la Chine est leader, l’ensemble des règles et normes continue à pénaliser nos constructeurs et favoriser les constructeurs chinois, comme nous alerte Carlos Tavares depuis maintenant bien trop longtemps.

 

Ce n’est pas parce que la situation devient moins pire qu’elle n’en reste pas moins préoccupante. Le choix d’une transition accélérée vers les véhicules électriques reste un choix très contestable. D’abord, le bilan environnemental d’une telle transition pose question, avec des véhicules beaucoup plus lourds, comportant nombre de matériaux dont l’extraction pose des problèmes écologiques, et dont l’énergie qui permet leur production et leur motorisation peut largement venir de centrales à charbon dans certains pays. Mais en outre, cela va continuer de pénaliser la production en France, alors même que nous sommes passés en 20 ans d’une situation d’excédent commercial de plus de 10 milliards par an à un déficit de plus de 20 milliards en ayant laissé mettre en place des règles fondamentalement défavorables à nos industriels et à la production sur notre territoire.

 

Bien sûr, il faut se réjouir de ce petit pas dans la bonne direction, qui est surtout la fin d’une anomalie extrêmement choquante, qui a contribué à faire décoler les ventes de voitures chinoises dans notre pays. Mais c’est une révision beaucoup plus profonde des règles qui touchent la production et la vente de véhicules qui est nécessaire pour cesser de se tirer des balles dans le pied.

3 commentaires:

  1. Le protectionisme est une excellente solution pour tous ceux qui ne sont compétitifs. Protegeons les nuls!

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    1. Sous couvert de compétitivité, le capitalisme fait la course à l'exploitation des hommes et de la planète. Donnons la prime à celui qui a trouvé le moyen de mieux exploiter que les autres !

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  2. Le protectionnisme est une des pierres angulaires du développement des pays asiatiques depuis au moins 50 ans (Japon, puis Corée du Sud & Co, puis Chine). Même The Economist a reconnu cela...

    Bon résumé Bob. Voilà pourquoi le protectionnisme est important.

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