Décidément, le projet de loi facilitant l’euthanasie pose des questions qui devraient être davantage abordées par les grands médias, s’ils assuraient une couverture un minimum impartiale du sujet. Les motivations financières, des individus, comme de l’État sont un vrai sujet à prendre en compte, à moins de vouloir prendre le risque d’évoluer vers une forme de société dystopique inhumaine.
Malaise au Canada et en Grande-Bretagne
Dans le cadre du débat sur le projet de loi, une infox a circulé annonçant que « le gouvernement britannique offrait une prime en espèces aux familles qui euthanasient leurs proches ». Mais si cette affirmation est factuellement fausse, et fait abusivement le lien entre deux projets de lois différents, elle a le mérite de faire réfléchir sur les risques qu’il y a pour une société à avancer de manière imprudente sur l’euthanasie. En effet, la Grande-Bretagne étudie un projet de loi comparable au nôtre, qui vient d’être accepté, de très peu, par l’Assemblée le 20 juin, et doit être étudié par la Chambre des Lords dans un second temps, qui semble a priori plus prudent que la loi française. Mais le décryptage pointe aussi qu’il existe une autre loi britannique selon laquelle « les pensions sont héritées en franchise d’impôt sur le revenu si la personne décède avant 75 ans », sans doute à l’origine de l’infox que le papier décrypte.
Mais ce faisant, les britanniques vivent tout de même dans une société où il y a une prime financière pour les décès qui surviennent avant 75 ans, sous la forme d’une exonération d’impôts. Et cette même société permet l’euthanasie. Même s’il semble que la loi britannique soit plus prudente (avec un panel comprenant un juge, un travailleur social et un psychiatre qui doivent accepter la requête) que notre projet de loi, qui a refusé tous les garde-fous proposés en séance et a mis en place, au contraire, un droit d’entrave extrêmement sévère, difficile de ne pas imaginer les problèmes que cela peut poser. Ne pourrait-il pas y avoir des pressions de la part des proches pour des personnes malades de façon à ce qu’elles mettent fin à leur vie avant 75 ans, pour éviter de payer des impôts ? L’État donne de facto une prime aux proches de personnes qui décideraient de mettre fin à leur vie un peu rapidement, si c’est avant 75 ans.
La conjonction de ces deux lois peut poser un gigantesque problème moral et éthique, que le décryptage de l’infox ne devrait pas ignorer. Bien sûr, il y a de gros abus dans la présentation des faits (il n’y a pas de prime, et les deux projets sont indépendants), mais la conjonction des deux lois peut aussi produire un résultat assez proche. De facto, il y a une forme d’incitation fiscale à accélérer la mort de personnes en mauvaise condition de santé avant 75 ans, ce qui est humainement horrible. Les lois britanniques incitent les personnes très mal portantes et éligibles à l’euthanasie qui ont moins de 75 ans à mettre fin à leurs jours pour laisser plus d’argent à leurs proches. Il faut noter qu’au Canada, une faible proportion des demandes d’euthanasie est refusée, et que 40% sont pour des personnes de moins de 75 ans.
Bref, plus on détricote la pelote de laine, plus le projet français semble dangereux et inacceptable, surtout avec des parlementaires du centre et de gauche aussi irresponsables et qui se contentent de postures plus superficielles les unes que les autres, sans sembler se préoccuper du fond d’un sujet éminemment complexe, qui nécessite un sens du détail et de l’éthique qu’ils sembent ne pas avoir.
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