samedi 2 août 2025

La capitulation et la débâcle de l’UE face à Trump

Même une partie des défenseurs habituels de l’UE a exprimé sa sidération face à l’accord signé par Ursula von der Leyen avec Donald Trump. Il faut dire que c’est une reddition en rase campagne : l’UE cède à toutes les demandes des USA. L’alliance européenne ne nous a donné aucune prise dans la négociation, affaiblissant notre main, au lieu de nous aider à peser. Voilà qui en dit long sur l’UE.


 

L’échec du plus dénominateur commun

 

Bien sûr, une poignée d’irréductibles défend l’accord, sur l’air « on ne pouvait pas obtenir mieux, et c’est mieux que si c’était pire ». Rexecode a embrayé sur la tribune de Bernard Arnault, qui semble être un recadrage des journalistes des Échos, qui avaient traité l’accord sous un angle parfois peu glorieux. France 2 a fait le service minimum dans ses journaux, y consacrant à peine 2 minutes le 28 juillet à 13 heures, et poussant à 4 minutes le soir, avant de carrément oublier le sujet (pourtant principale actualité économique) le 29 à 13 heures. Mais c’est le traitement sous l’angle de l’impact micro-économique pour des entreprises bien choisies (champagne, cosmétique, Guy Degrenne) qui pose problème. Malgré tout, les trois semblent pouvoir digérer la hausse des droits de douane, et sont satisfaites de sortir de l’incertitude. Ce faisant, France 2 évacue toute considération macroéconomique ou politique… L’UE approuve ce message…

 

Même les macronistes sont bien plus critiques. Bien sûr, leur discours est souvent mensonger, entre un ministre qui évoque un meilleur accord que celui de la Grande Bretagne (qui a pourtant obtenu des droits de 10% au lieu de 15%), et le président osant annoncer que ce n’est pas la fin de l’histoire. Dans la réalité, cet accord est une véritable débâcle. Et même si certains détails qui ne sont pas tranchés le sont dans un bon sens, la conclusion restera la même : une reddition en rase campagne. L’UE accepte une remontée à 15% des droits de douane des USA (contre 4,8% avant) sur de nombreux produits, même s’il y a des exceptions importantes, comme l’aéronautique, comme le souhaitait Boeing, sans remonter ses droits de douane en rétorsion. Ursula von der Leyen évoque 600 milliards de nouveaux investissements européens aux USA et 750 milliards d’achat d’hydrocarbures en 3 ans, 3 fois le rythme actuel…

 

Bref, Donald Trump obtient un succès sur toute la ligne. Toutes ses revendications sont acceptées (même si les détails modèreront sans doute ce succès). Louis Vuitton, soucieux de son image outre-Atlantique, a déjà annoncé un deuxième atelier aux USA (le premier avait été inauguré sous le premier mandat Trump). Et comme le dollar a perdu plus de 10% par rapport à l’euro depuis le début de l’année, outre les recettes fiscales venues des douanes, le choc de prix devrait permettre aux USA de rééquilibrer en partie leur commerce extérieur avec l’UE, très largement déficitaire. Mais la question qui se pose, c’est de savoir si une telle issue était inévitable. Bien sûr, les rares défenseurs de l’UE l’avancent, mais c’est surtout l’argument de ceux qui privilégient leurs affaires, que ce soit le monde des entreprises, ou les pays dont les excédents étaient si élevés qu’ils étaient prêts à tous les compromis pour éviter un conflit.

 

Pourtant, l’UE aurait théoriquement pu aborder cette négociation sur un quasi pied d’égalité avec les USA. Car l’excédent massif sur les biens des pays européens est en grande partie équilibré par l’excédent massif des USA sur les services avec les pays européens. Bref, nous pouvions répliquer œil pour œil dent pour dent et obtenir un accord équilibré. Le problème est que la diversité des situations commerciales des pays européens avec les USA a créé des positions très différentes dans la négociation, l’Allemagne, l’Italie et l’Europe de l’Est étant prêts à un accord à tout prix, même s’ils y perdent, et même si certains (comme la France) voient leurs échanges globaux (biens et services) avec les USA encore plus déséquilibrés. En somme, l’addition des intérêts nationaux créé une position de faiblesse structurelle avec les USA, sans doute d’autant plus quand la présidente de la commission est allemande, nos voisins n’ayant pas de pudeur de gazelle à défendre leurs intérêts nationaux, au contraire des élites françaises.

 

Mais ce faisant, ce nouvel épisode pose à nouveau la question du caractère profondément nocif de l’UE. Incapable de nous protéger de la crise financière venue d’outre-Atlantique en 2008, elle nous en a rendu plus difficile la sortie, avec la crise de la zone euro. Pendant la crise Covid, ses lenteurs ont paralysé notre approvisionnement et la relance économique a été très limitée. Elle nous impose une politique monétaire rigoriste à contre temps. Et aujourd’hui, sur sa compétence clé, elle se révèle incapable de défendre nos intérêts. Bref, il est vraiment temps de sortir de cette construction mortifère.

25 commentaires:

  1. Lorsque Jerome Powell se retirera de la FED, Trump désignera un fidèle, capable de faire chuter le dollar, qui est déjà en train de perdre de sa valeur. Suite aux droits de douane, le prochain enjeu majeur sera d'ordre monétaire. On trouve aussi dans les projets de Trump le plan ayant pour but de contraindre les créanciers des États-Unis à accepter des bons du trésor de 100 ans sans taux d'intérêt. Si l'UE ne se montre pas plus ferme, nous sommes fichus !

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  2. Je crois que le plus gros risque vient de la soumission de nos dirigeants et dans le fond malgré quelques faux semblants de protestations ,l'approbation de toutes les décisions U.S Dans les protectorats le pays dominant a toujours trouvé des complices chez les protégés ,corruption à l"appui...Le risque principal viendra des achats "Européens" d'armes MADE IN USA;;;Armes à utliser contre la Russie jusqu'à effondrement des belligérants et à ce moment-là l'oncle Sam viendra nous sauver...Il faut ajouter que les avions de combat ne seront pas Français!!!!!!!

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  3. Il est très difficile de comprendre la campagne médiatique française qui présente la décision de Washington d'appliquer 15% de droits de douane sur la plupart de l'import en provenance de France comme une débâcle européenne.

    Un petit rappel : un bien importé en France depuis les US subit des droits de douane variables selon le bien, mais souvent entre 12% et 17%
    EN PLUS, il subit 20% de TVA appliquée sur le prix du bien majoré des droits de douane
    Le produit US que le consommateur européen achèterait à 100 sans intervention de l'état français, il va le payer plutôt 134.

    Le consommateur USA qui achète un produit français, paiera avec le nouvel accord tant décrié, 100 + 15% de douane + 6% taux moyen de TVA = 121

    Alors quel est le gouvernement qui se gave le plus sur le dos des consommateurs ?
    En quoi la France serait elle pénalisée ? et surtout qui serait pénalisé en France, mis à part quelques exportateurs qui devra désormais partager avec le gouvernement US les marges astronomiques qu'il a toujours fait grâce au pouvoir d'achat du consommateur US ?

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    1. Ce que vous écrivez est inexact : un bien importé des usa en France est en moyenne soumis à un taux de 4.2 % s'agissant des droits de douane. Quant à la TVA, c'est différent puisqu'elle s'applique à tous les produits et non spécifiquement aux biens importés.

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  4. "Quant à la TVA, c'est différent puisqu'elle s'applique à tous les produits et non spécifiquement aux biens importés."

    Qu'importe à un exportateur américain que la TVA française soit imposée aussi aux producteurs français ?
    C'est même un problème en plus car ce délire de TVA à 20% réduite considérablement la demande solvable des consommateurs français disponible pour acheter le produits et services américains

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    1. "Qu'importe à un exportateur américain que la TVA française soit imposée aussi aux producteurs français ?"
      C'est pourtant essentiel, car si les producteurs européens sont aussi soumis à cette TVA, cela ne crée pas de distorsion de concurrence.

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  5. Les exportateurs américains s'en foutent pas mal de la "distorsion de concurrence".
    Ce qu'ils veulent est de cibler la totalité du pouvoir d'achat des français et non pas ce pouvoir d'achat réduit du 20% de TVA.
    Exactement comme les exportateurs français, qui ne subissent pas, en terre américaine, qu'une TVA beaucoup plus faible si non nulle (cela dépend des états)
    Ce qui fait qu'en fin des comptes, il y a bel et bien distorsion de concurrence.

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  6. Laurent Herblay12 août 2025 à 10:23

    @ Anonyme 10h41

    Son plan est profondément court-termiste. Il peut gagner en réduisant certaines distorsions du laisser-faire, tant elles étaient importantes. Mais à plus long terme, sa violence arbitraire accélère la déconstruction d’un système économique où les USA avaient la place centrale et le pays finira par en payer le prix (si le dollar perd son statut de monnaie de référence mondiale). Ce faisant, il accélère les projets des BRICS.

    @ Anonyme 11h04

    Bien d’accord. Mais l’UE, c’est l’europe états-unienne, pour citer le Général

    @ Anonyme 12h38

    La TVA est payée par tous les produits, donc la prendre en compte n’est pas opérant en matière de concurrence avec les produits européens. En outre, les droits de douane de l’UE sont plutôt de 4% en moyenne. En revanche, cela signifie que les importations venues des US doivent subir un surcoût de 4% pour prendre leur place sur le marché européen, alors que les importations européennes aux US subissent un surcoût de 15% pour prendre leur place sur le marché US, ce qui pénalise l’UE.

    La TVA permet de financer les services publics (très limités aux USA). Libre à eux de laisser au marché la santé, les retraites et une grande partie de l’éducation, à un prix totalement délirant. Libre à nous d’avoir compris qu’il y a des secteurs où les services publics sont plus efficaces, mais cela suppose des prélèvements obligatoires plus importants.

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    1. Je ne vois pas très bien quelle monnaie pourrait remplacer le dollar, qui représente encore près de 60 % des réserves mondiales contre 20 % pour l'euro.

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  7. Laurent Herblay
    Payée par tous les produits ou pas, la TVA soustrait du pouvoir d'achat français qui pourrait autrement être disponible pour acheter des biens et services USA.
    Il est donc tout à fait légitime pour les USA de faire de même avec les droits de douane (qui à 15% sont inférieurs à la TVA française), mais plus intelligemment car cela permet d'exonérer leurs propres producteurs de ces prélèvements.

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    1. L'argument de Trump est que la balance commerciale des USA est déficitaire. Donc, si l'en s'en tient à cet argument, la TVA ne devrait pas être prise en compte, puisqu'elle taxe aussi bien les produits américains que les produits européens, et n'a donc aucune incidence sur la balance commerciale.

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  8. quand le consommateur US achète un produit français il paie un chiffre qui va presque en totalité à l'exportateur français (la TVA n'existe pas et il y a une sales tax de 0% à 8% suivant les états)
    quand le consommateur français achète un produit US il paie un chiffre qui va pour 20% au gouvernement français et pour 80% à l'exportateur US
    Donc même si les échanges étaient parfaitement équilibrés en valeur, la balance commerciale US serait déficitaire à cause de la TVA française.
    Il est tout à fait normal et justifié que Trump essaie de la rééquilibrer par une taxe sur les importations depuis la France.

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    1. Vous faites une erreur de raisonnement : que l'argent aille en totalité à l'exportateur ou bien qu'il aille en partie à l'exportateur et en partie à l'état n'a aucune conséquence sur la balance commerciale.

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    2. Il faudra revoir l'abc de l'économie.
      Balance commerciale = valeur des exportations moins valeur des importations
      Cette valeur des importations est calculée hors TVA (valeur CAF ou FOB).
      Donc si le budget que les français consacrent à l'achat des biens et services USA est de N milliards, la valeur des importations dans le calcul de la balance commerciale sera de N milliards avec une TVA à 0% et de 0.8*N milliards avec une TVA à 20%
      Donc si, la TVA améliore directement la balance commerciale.

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    3. TVA à l’importation : C’est une taxe nationale appliquée aux biens importés. Elle est exclue du calcul car elle ne reflète pas la valeur intrinsèque du bien échangé, mais une politique fiscale interne. Par ailleurs, elle est récupérée par les entreprises et se retrouve donc à la charge du consommateur.

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    4. « Le 1° du I de l'article 267 du code général des impôts (CGI) n'exclut que la seule taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de la base d'imposition. Il s'ensuit que sont à comprendre dans la base d'imposition, quand bien même ils seraient décomptés à part sur la facture, tous les impôts, droits, taxes et prélèvements de toute nature autres que la TVA. » — BOFiP – BOI-TVA-BASE-10-10-20

      https://bofip.impots.gouv.fr/bofip/488-PGP.html/identifiant%3DBOI-TVA-BASE-10-10-30-20220511

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    5. En résumé, les droits de douane et la TVA sont exclus de la balance commerciale, mais alors que les droits de douane ont un effet indirect car ils créent une distorsion de concurrence, la TVA est neutre car elle concerne aussi bien les entreprises locales que les entreprises étrangères, et aussi parce qu'elle est récupérée par les entreprises.

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  9. vous ne répondez pas à mon argument.
    Si les fonds dont le consommateurs français disposent pour acheter des biens et services USA se chiffrent à N milliards, et la TVA est à 20%, il est évident que seulement N-20%*N milliards partiront aux USA et seront comptabilisés dans le calcul de la balance commerciale.
    Le reste, le 20% est encaissé par le gouvernement français.
    Exactement comme pour les droits de douane.

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    1. Il est évident que la TVA réduit le pouvoir d'achat des consommateurs, tout comme l'IR ou toute contribution. A ce titre, si on écoute votre argument, il faudrait mettre tous les prélèvements dans la balance. Mais ce n'est pas le cas, la balance commerciale enregistre les montants avant taxation.

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  10. Mais c'est justement parce que la balance commerciale enregistre les montants avant taxation que la TVA française pénalise les exportateurs américains!
    Exactement de la même façon, les droits de douane ne sont pas compris dans la balance commerciale, et pénalisent les exportateurs français aux USA.
    Ils sont une juste et équitable réponse à l'énorme taux de TVA français

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    1. je vous le répète : la différence entre les droits de douane et la TVA, c'est que la TVA est neutre sur le plan de la concurrence puisque tout le monde la paie et qu'en plus elle est récupérable par les entreprises. Elle n'a donc aucun effet sur la balance commerciale, ni direct ni indirect. Mais si vous ne voulez pas comprendre, tant pis.

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  11. Comment pouvez vous dire que la TVA ne fausse pas la concurrence ?
    Quand vous achetez une Tesla à 40k€, 33k€ vont à Tesla et 6.6k€ vont au fisc.
    Quand un américain achète une BMW de la même valeur, tout le montant va à BMW.
    A cause de la TVA, pour un produit de la même valeur, BMW encaisse 40k€ et Tesla 33k€.
    Et d'après vous il n'y a pas d'effet sur la concurrence !

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    1. Ce n'est pas une question de marques (BMW ou Tesla) mais de lieu de fabrication.
      Si un Américain achète une voiture importée fabriquée en Europe, il va payer une TVA. Mais l'Européen qui achète la même voiture fabriquée en Europe la paiera aussi. Donc, il n'y a pas de distorsion de concurrence.

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  12. "Si un Américain achète une voiture importée fabriquée en Europe, il va payer une TVA"
    FAUX ! (Je comprends mieux vos difficultés à suivre la discussion).
    Quand un bien est exporté hors de l’Union européenne, il est vendu hors taxe (HT).
    Et même si vous aviez raison sur ce point, (ce qui n'est pas du tout le cas), il suffirait à BMW de s'installer aux USA pour y vendre ses voitures sans TVA
    Donc, si! La TVA introduit une forte et inacceptable distorsion de la concurrence, qui justifie pleinement les nouveaux droits de douanes introduit par le président Trump

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    1. si le bien exporté est vendu hors tva, on ne comprend pas bien pourquoi Trump considère la TVA comme des frais de douane déguisés.

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