mardi 6 août 2013

Le scandale de la privatisation des autoroutes


Il y a huit ans, son opposition à la privatisation des autoroutes menée par le gouvernement Villepin avait conforté la bonne opinion que j’avais de Nicolas Dupont-Aignan, après sa campagne contre le TCE. Un rapport de la Cour des Comptes confirme qu’il avait largement raison.




Le verdict de la Cour des Comptes

Le jugement est sévère : « la négociation des avenants aux contrats de concession (notamment les contrats de plan) et le suivi par le concédant (assuré par le seul ministère chargé des transports) des obligations des concessionnaires se caractérisent par un déséquilibre au bénéfice des sociétés autoroutières ». La Cour des Comptes dénonce « des augmentations tarifaires supérieures à l’inflation » et recommande même de « mettre en œuvre les dispositions contraignantes » et de « réaliser systématiquement une contre-expertise (…) de tous les coûts prévisionnels des investissements ».



Ce document de Debout la République montre que la hausse annuelle du tarif des péages est, à l’exception de 2007 et 2010, systématiquement supérieure à l’inflation depuis 2004. Pire, une autre analyse démontre l’envolée des profits des sociétés concessionnaires, qui ont progressé de 70% de 2001 à 2010 contre un peu plus de 25% pour l’ensemble des sociétés non financières. Comme le rappelle Marianne, en utilisant toutes les combines permises par les contrats de concession, les sociétés d’autoroutes ne cessent de faire progresser leurs tarifs sensiblement plus vite que l’inflation.


Une privatisation illégitime

Le problème fondamental est que les autoroutes font partie du service public et ne doivent pas être privées. En effet, il s’agit d’un monopole naturel, qui, s’il est privatisé, se transforme en une rente colossale. En effet, il faut rappeler ici qu’en 2010, ASF dégageait un chiffre d’affaires de 3,75 milliards d’euros (en hausse de 10% alors) pour un résultat opérationnel de 1,57 milliards (soit une marge de plus de 40%) et un résultat net de 735 millions d’euros, près de 20% du chiffre d’affaires. Des chiffres qui démontrent bien qu’il s’agit d’une rente, qui plus est, de plus en plus rentable pour les concessionnaires.

En ce sens, Nicolas Dupont-Aignan avait bien raison de demander lors de la campagne présidentielle de 2012 de renationaliser les autoroutes. Si nos autoroutes étaient restées publiques, alors, les sociétés qui les exploitent n’auraient pas besoin de dégager des profits. L’équilibre serait suffisant, ce qui signifie qu’il serait possible de baisser immédiatement les tarifs de 20% tout en maintenant les investissements ! Mais surtout, les monopoles naturels ne doivent absolument pas être cédés à des sociétés privées car ils se transforment en rentes et cela est totalement illégitime et injuste.

Du fait de la crise européenne, de nombreux Etats continuent à céder des pépites du patrimoine national. Naturellement, cela se fait sous la bannière d’un agenda de libéralisation qui se ferait aux bénéfices des usagers. Mais en réalité, il n’y a pas de baisse des prix mais une hausse des profits !

15 commentaires:

  1. Ces privatisations ont permis de voir dans quel camp se situait le "gaulliste" Villepin, exception faite de son glorieux non à la guerre en Irak en 2003 à l'ONU.

    Le Gars Huzac

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    1. Le discours a l'AGNU ? Vous voulez dire l'operation de consultant lobbyiste au profit de Total contre Exon ?

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  2. Un exemple local dénoncé par DLR, le tunnel à péage Prado-Carénage en plein centre-ville de Marseille : 2,70€ pour 2,5 km ! Et un dividende très élevé pour les actionnaires.

    http://www.marsactu.fr/business/le-tunnel-prado-carenage-est-une-mine-dor-pour-ses-actionnaires-30161.html

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  3. Il n'y a pas que les autoroutes !!!Le Système est cautionné et encouragé par le fameux crédo "concurrence! concurrence!" de la sainte communauté européenne , avec lequel on a ont remplace des entreprises d'intérêt général qui fonctionnent correctement (mais que l'on rend volontairement dysfonctionnelle ) par une débrouillardise mafieuse.

    Il faudra bien un jour se souvenir de tous les mensonges et propagandes que nos élites nous distillent.
    « Parce qu'un homme sans mémoire est un homme sans vie, un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir... »
    « Les peuples cessent de vivre quand ils cessent de se souvenir."
    Maréchal Ferdinand FOCH

    Daniel

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  4. On retrouve anonyme????
    Question à Laurent ? Ne faut il pas mettre en évidence le scandale de l'EDF ?????
    Charges publiques ???? pour les uns, privilèges pour les autres : TOUJOURS la même chose !!!!

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  5. Un jour qui d'après moi n'est pas si éloigné, les Français en auront assez. Mais les gouvernements successifs de l'UMPS vivent comme les aristocrates le 13 juillet 1789 : le peuple est méprisable, tout juste bon à travailler à leur place, et il n'y a pas de lendemain.

    Sancelrien

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  6. Au sujet des autoroutes, vous oubliez de parler d’autres types de scandales :
    - Construction d’autoroute d’utilité douteuse (ex : Bordeaux-Pau) avec des garanties financières des régions en cas de non rentabilités. L’éternelle privatisation des profits et socialisation des pertes.
    - Privatisation des routes nationales de grande qualité (ex : Bordeaux-Bayonne – seul investissement à faire : mettre des péages), sans réseau secondaire digne de ce nom.

    Vivement que des têtes tombent.

    Cordialement.

    Eric

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    1. Sur le cas des autoroutes non rentables, avec une garantie financière publique, il ne faut pas se tromper : il ne s'agit pas d'une privatisation des profits, car tout le monde sait qu'il n'y aura pas de profits.
      Mais le fait de présenter les choses de cette manière permet de dire que la région offre une "garantie" qui ne coute virtuellement rien, car en principe c'est rentable. Ce qui permet de ne pas augmenter la dette de la région, tout en prenant des engagements hors bilans non comptabilisés dans les déficits ou les dettes publics.

      C'est bien une arnaque, mais pas celle que vou pensez....

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  7. "De nombreux Etats continuent à céder des pépites du patrimoine national". Cette accaparement des activités profitables est même un des objectifs majeurs des libéraux. Il suffit de voir ce qui se passe en Grèce par exemple. Le seul vrai principe qui vaille pour eux, au-delà des discours mensongers des politiques au pouvoir, c'est la socialisation des pertes et la privatisation des bénéfices.

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  8. Il est tout à fait logique que les bénéfices augmentent puisque les tarifs sont totalement décorrélés des coûts. En effet, depuis une dizaine d'années, le remplacement progressif des péagers par des barrières automatiques se traduit par une diminution très nette des charges qui n'est évidemment pas répercutée sur les tarifs.

    Pour ma part, la privatisation des autoroutes m'a valu mon licenciement économique en 2006 (il y a eu à l'époque plusieurs dizaines de licenciements directement dus à la privatisation).

    Dans ce milieu, la politique tient une place de choix. Il est évident que les concessionnaires d'autoroutes renâclent à construire ou même à entretenir des tronçons à l'utilité douteuse, dont l'existence n'est due qu'à l'égo de politiciens. Mais en échange, les pouvoirs publics acceptent de fermer les yeux sur les marges indécentes générées par les tronçons amortis.

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  9. Même les gouvernants en place n'ont pas intérêt à cette inaction, je ne les comprends pas (a moins qu'il ait conflit d’intérêt).
    Revoir la concession des autoroutes serait une occasion de réduire, au moins symboliquement, ou sensiblement pour les gros usagers, la pression économique sur les citoyens et de retrouver de la popularité sans cout supplémentaire pour le budget. Même quand ils ont une occasion d'aller dans le sens du peuple ils ne la saisissent pas.
    Le P.S avait pourtant su défendre ses administrés contre des grandes sociétés dans le cas de la distribution de l'eau de Paris ou ils ont mis fin au racket des usagers qui avait lieu au profit des actionnaires de Suez et Veolia.
    Est ce parce qu'ils se sentent plus proches des bobos du 75 que des "beaufs" de province qui prennent l'autoroute ?

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    1. Il y a bien des intérêts, comme je l'ai écrit ci-dessus. Toutefois ce ne sont pas les bobos qui tirent les ficelles mais les élus de province (car en gros, les tronçons non rentables sont les tronçons province-province). Il faut bien se mettre dans la tête que l'entêtement d'Ayrault avec son aéroport trouve de nombreux équivalents avec d'autres élus qui réclament des autoroutes. Les tarifs élevés sont donc un cadeau offert aux sociétés d'autoroutes pour qu'elles veuillent bien s'occuper de tronçons non rentables.

      De plus, les contrats sont signés et il serait très coûteux de revenir dessus.

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  10. @ Le Gars Huzac

    Très juste

    @ PaulR

    Merci

    @ Daniel

    Bien d’accord

    @ Gilco56

    Je vais parler d’énergie dans les jours à venir. Mais la libéralisation du secteur est un bien plus gros scandale (15% de hausse de prix en 2 ans).

    @ Sancelrien

    Bien d’accord

    @ Eric

    Merci pour ces précisions.

    @ Démos

    Tristement d’accord

    @ Jyb

    Sans doute vrai

    @ TeoNeo

    Oui, mais personne au PS ou à l’UMP ne croit qu’il serait possible de revenir dessus… En outre, dans l’UE, Vinci et consorts pourraient faire appel à la CJE…

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  11. Nous avons la Democratie que nous meritons. De Droite ou de Gauche, nous citoyens electeurs pourrions degager democratiquement ces technocrates, ces maffieux, et ces incompetents. S'ils sont encore en place, c'est a nous memes qu'il faut s'en prendre...

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  12. D'ailleurs l'inflation n'est pas une référence pertinente pour la hausse des tarifs pratiqués par les sociétés de concessions, car le principe-même d'un concession consiste en un financement par l'emprunt de travaux qui durent eux-mêmes seulement quelques années (pour une concession de plusieurs décennies).

    Une fois l'ouvrage construit, il n'y a plus que des frais d'entretien et de remboursement de la dette.

    L'inflation n'a donc qu'un impact limité sur un ouvrage déjà construit (les frais d'entretien et de personnel, qui doivent être très faibles par rapport aux frais de construction de l'ouvrage). L'essentiel des charges de la société concessionnaire est constitué par des le remboursement de la dette, dont le coût varie selon l'évolution des taux d'intérêt, dans l'éventualité où ces sociétés renégocient leurs crédits. Or les taux n'ont jamais été aussi bas sur une durée aussi longue qu'au cours des dernières années.

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