mardi 4 février 2014

Valls, rideau de fumée de l’angélisme du PS sur l’immigration et l’insécurité


Atlantico : Qu’est-ce que cela dit du rapport de la gauche actuelle à l’immigration ? Est-elle écartelée par la question ?
Laurent Pinsolle : La gauche est effectivement en difficulté sur cette question et sa position a beaucoup évolué. Elle a un temps, avec Georges Marchais, tenu un discours de limitation de l'immigration en forte de période de chômage avant de passer à une sorte d'angélisme hérité de la pensée mitterrandienne sur la question. Cette dualité se retrouve dans le gouvernement actuel qui malgré tout, tirant les leçons de l'échec de Lionel Jospin, a décidé d'adopter une posture plus ferme. Toutefois, les chiffres publiés cette semaine montrent bien qu'il ne s'agit, de fait, que d'une posture...



Atlantico : La gauche connait-elle ces derniers temps une difficulté particulière à se positionner par rapport à la question de l’immigration ? Joue-t-elle, par le biais de Manuel Valls notamment, un numéro d'équilibriste entre ses courants ?
LP : La gauche reste actuellement en grande partie ancrée dans cet angélisme qu'on lui connait. Il existe également une gauche républicaine, dont se revendique les chevènementistes, qui fait preuve d'une fermeté plus nette à ce propos. Il y a toutefois dans la majorité de gauche une dimension internationaliste, de rejet de la nation qui repose sur une vision de l'immigration qui si elle est très généreuse est absolument irréalisable dans les faits. Cette gauche là oublie que la France ne représente que 1% de la population mondiale ce qui ne lui permet pas d'accueillir "toute la misère du monde".

Je ne crois pas que Manuel Valls représente vraiment une ligne dure de la gauche sur les questions sécuritaires et migratoires. Son bilan législatif ne résiste pas à une simple question : quelles mesures a-t-il vraiment prises pour améliorer les choses ? Peu importe qu'il prenne un ton martial et se mette du côté des policiers, il ne fait rien de concret et l'angélisme de la gauche transparaît là aussi. La gauche n'arrive clairement pas à se positionner sur ces questions, elle hésite. Aujourd'hui, la majorité navigue entre cet angélisme béat caractérisé par Christiane Taubira, Cécile Duflot et consort dont la pensée confine à l'impunité, et quelques socialistes qui se posent vraiment la question de régler ces problèmes. Au milieu, on retrouve Manuel Valls qui fait de la forme sans faire de fond.

Le duo Valls-Taubira est à ces questions de société l'équivalent du duo Moscovici-Montebourg sur les questions économiques. Or, dans un cas comme dans l'autre François Hollande donne l'impression de jouer sur les deux tableaux alors qu'il a en fait déjà tranché. De la même façon qu'il a tranché pour madame Taubira et se couvre sémantiquement avec Manuel Valls, il a tranché pour la ligne euro-libérale de Pierre Moscovici et couvre son flan gauche avec celle d'Arnaud Montebourg.

Atlantico : La gauche cherche-t-elle à dépolitiser ces questions ? Au contraire, la sur-politise-t-elle autour de petites affaires ?
LP : La popularité de Manuel Valls auprès des électeurs de droite me laisse penser qu'au contraire ces questions portent toujours en elles un marqueur politique fort. Qui plus est une dépolitisation ne peut pas fonctionner à terme puisque par ailleurs le logiciel socialiste de la plupart des leaders du PS est encore très largement différent de celui de la droite. L'affaire Leonarda a révélé cela tout en montrant l'existance de voix discordantes au sein du PS. Un bémol tout de même, Nicolas Sarkozy malgré les positions qu'il affichait n'a pas eu de réussites concrètes sur ces questions pendant les dix ans où il s'en est occupé plus ou moins directement.

Atlantico : Faut-il voir derrière ce discours double une vision électorale voire électoraliste ?
LP : Les socialistes veulent avoir le beurre et l'argent du beurre. Ils ne veulent pas se couper d'une base électorale traditionnelle elle-même angéliste mais ont compris qu'ils étaient en train de perdre les classes populaires, ils ont mis en place cette double ligne que j'évoquais pour raccrocher ces dernières au train. Pourtant, depuis longtemps dans les faits, la com' Montebourg/Valls destinée à ces classes populaires n'est pas suivie de faits. Cette solution pourrait néanmoins réussir puisque même si les Français sont très désillusionnés et perçoivent cette stratégie, ils se disent que c'est pareil ailleurs notamment à l'UMP...

13 commentaires:

  1. Je crois M. Pinsolle que vous faites une erreur en reprenant le cliché d’un angélisme spécifique de la gauche. Certes, Valls n’a rien fait de particulier contre l’insécurité ou l’immigration, mais le pouvoir précédent non plus. Pourtant on ne parle jamais de l’angélisme de l’UMP… Il faudrait plutôt considérer que la France n’a plus les moyens, ni budgétaires, ni juridiques, de lutter contre l’insécurité qui est d’ailleurs la conséquence de la crise économique et du chômage.

    Albert

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. "Il faudrait plutôt considérer que la France n’a plus les moyens, ni budgétaires, ni juridiques"

      Ah bon ? La France est si démunie...?

      Elle qui dépensait en 2011 3,1% de ses dépenses publiques pour la sécurité (3,7% dans la zone euro) et 42,6% de ses dépenses publiques pour des dépenses sociales (40,7% en zone euro) ne serait vraiment pas en mesure de réorienter celles-ci, par exemple ?

      Si c'était vraiment le cas il n'y aurait plus qu'à mettre la clef sous la porte.

      Supprimer
    2. "La France n'a plus les moyens..... " c'est d'abord et avant tout parce qu'elle est prisonnière de dogmes économiques européens stupides! Sortez donc de ce cadre de pensée économiquement correct, il y a toujours des alternatives politiques et économiques possibles quand on veut bien y réfléchir. Par exemple lisez le blog "russeurop@hypothèses.org" de Jacques Sapir vous y découvririez une solide et argumentée pensée économique hétérodoxe.

      Supprimer
  2. Plutôt que de délirer sur de bêtises... (Vals est tout sauf angélique)

    Il se passe en se moment des chose importantes sur le front médiatique, j'observe notamment un grand tournant sur l'Euro, ce fut d'abord le Marianne de cette semaine avec sa couverture:"le débat interdit: sortir de l'euro ?" Puis les articles de Sapir, Nikonoff repris en une du site internet. Et ce matin attention poid-lourd, Philippe Villin chez Cohen expliquant tout ce que les économistes alternatifs nous disent depuis des années sur les vices de cette monnaie unique et ce de manière claire et posée, même Cohen avait l'air ébranlé. On assiste peut être enfin à un tournant sur ce sujet fondamental!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Et Stiglitz qui écrit "En Europe, le problème c'est que l'euro était une erreur et que les dirigeants ne savent pas quoi en faire".

      Supprimer
    2. Et Sapir chez.... Morandini!!! A ce rythme là dans 2 jours, on ouvre les JT de 20h sur l'euro. ;)

      "Hausse des Prix, crise économique : et si on se débarrassait de l’euro pour revenir au franc ?" : https://www.youtube.com/watch?v=XnhkngLz3uw&list=UUbVyDBGWbSypbzsjQ4C5WgQ&feature=c4-overview

      Supprimer
  3. La gauche républicaine genre Chevénement ou Valls est handicapée par l'influence de la gauche de la gauche ( PC, FDG, NPA et cie, et toutes les associations "anti-racistes") et la gauche sociétale comme les Verts. De le néolibéralisme et l'Europe qui exigent de limiter la dépense publique sont un obstacle à une politique plus sécuritaire que réclament nos concitoyens.

    RépondreSupprimer
  4. @LP,

    "Valls, rideau de fumée de l’angélisme du PS sur l’immigration et l’insécurité"

    A mon avis, vous n'avez pas besoin de postuler de cette manière pour le RBM. La qualité de votre travail et de celle de votre mouvement plaide pour vous.

    Le lien entre le RBM et DLR est une évidence pour tous les patriotes. Cette alliance entre ces deux forces est infiniment moins hétérogène que le rassemblement gaulliste issu de juin 40.

    Cordialement.

    RépondreSupprimer
  5. Valls angélique ? Cela dépend pourquoi !

    Pour l'automobiliste, c'est tolérance zéro, radars partout et objectifs chiffrés de rendement.

    Pour certaines manifestations, voire pour des "veilleurs" isolés, la fermeté est de rigueur aussi. Le petit Caudillo a d'ailleurs, il y a quelques jours, menacé en avançant le menton comme s'il faisait un Pronunciamiento.

    Le petit apprenti Sarkozy Manouel est depuis longtemps converti au néolibéralisme-répressif, surtout pour les lubies hygiénistes, normatives et pseudo-sécuritaires si caractéristique de notre époque. En revanche, pour la vraie insécurité, il a recopié son modèle : quelques discours tonitruants de temps en temps sur les cages d'escalier pour rassurer les veaux mais une insécurité réelle galopante.

    RépondreSupprimer
  6. Même Pasqua avait fini par admettre, mais trop tard, qu'on ne peut pas lutter efficacement contre la délinquance quand le chômage et la misère galopent. Il avait aussi fini par admettre, trop tard également, qu'on ne pourra pas indéfiniment étouffer tout débat démocratique sur la dépénalisation du cannabis.

    Ah si seulement Valls pouvait éviter de refaire les unes après les autres les mêmes erreurs que ses prédécesseurs pour finir par arriver aux mêmes conclusions ! Mais je cois qu'il est mal parti.

    Sur l'immigration il a les mains liées et ne peut pas s'attaquer au vrai problème : la concurrence déloyale que la main-d'oeuvre de l'Est oppose aux travailleurs français. La plupart du temps les intéressés n'apparaissent même pas dans les statistiques de l'immigration. Les instruments juridiques dont dispose Valls, taillés sur mesure pour persécuter les familles françaises qui souhaiteraient accueillir leurs parents ressortissants de pays extra-communautaires, sont impuissants contre les véritables menaces que la France doit affronter, comme les travailleurs détachés et les camionneurs roumains qui viennent faire du cabotage sur notre marché.

    Alors il s'acharne comme ses prédecesseurs sur l'immigration résiduelle extra-communautaire, motivée essentiellement par des raisons familiales.

    Au moins a-t-il cessé de payer les Roms comme le faisait sarkozy pour gonfler les statistiques de reconduites à la frontière.

    Ivan

    RépondreSupprimer
  7. @ Albert

    Bien d’accord, c’est ce que j’ai noté dans le papier, en mettant un lien. Pas du tout d’accord sur les moyens budgétaires (anonyme le montre et nous avons un déficit bien plus bas que la Grande-Bretagne) et juridiques (nous pourrions mettre en place l’impunité zéro par exemple). Et s’il y a un lien entre l’insécurité et la crise économique, on ne peut pas dire que ce soit la seule raison. Chacun a son libre-arbitre et toutes les personnes au chômage ne sont pas des délinquants.

    @ Anonymes

    Merci et bien d’accord

    @ Red2

    Je ne dis pas que Valls est angélique, je dis que c’est le PS. Sur l’euro, papier aujourd’hui.

    @ Anonyme & Bip

    Merci. C’est le papier du jour

    @ Cording

    Juste

    @ Anaximandre

    Je vous rassure, je ne postule pas. Il ne s’agirait pas d’une alliance, mais d’une satellisation et je vous renvoie à tous mes écrits sur le FN qui expliquent pourquoi je pense que cela est hors de question.

    @ Rodolphe

    Ce n’est pas Valls qui est angélique, c’est le PS. Et c’est sur l’insécurité courante et l’immigration. Après, d’accord sur les remises en cause de certaines libertés, qui sont très critiquables.

    @ Ivan

    Pas d’accord sur la lutte contre la délinquance. On peut faire des choses. Déjà, il faudrait mettre en place l’impunité zéro (pas en mettant tout le monde en prison bien sûr, mais en s’assurant que chaque délit est puni : il y a un sentiment d’impunité chez certains délinquants qui est calamiteux). Il faut agir à l’école sur ce sujet également.

    Sur l’immigration, bien d’accord. Il a les mains liées du fait des traités européens qu’il a accepté.

    RépondreSupprimer
  8. @ LP,

    Dans ce cas, et bien respectueusement, je ne comprends pas la démarche de DLR ; je souhaiterais savoir si NDA est sur la même ligne.

    Un tel rassemblement est bien évidemment à propos, le camp patriote pouvant échouer à 2 % près en l'état du fractionnement électoral actuel. C'est prendre là une grande responsabilité, ce d'autant qu'il n'y a pas d'autres alternative majoritaire crédible.

    Cordialement.

    RépondreSupprimer
  9. Laurent Pinsolle, en refusant par principe toute alliance avec le FN et ses alliés du RBM contribue à ramener les électeurs vers une fausse alternance comme l'UMP qui à très peu de choses fera la même politique en matière d'immigration que le pouvoir actuel d'autant que l'UMP a contribué avec le PS a permettre à l'Union européenne d'intervenir aussi dans les politiques d'immigration dans un sens bien évidement laxiste et qui encourage même les phénomènes migratoires. Je doute fort que l'UMP qui plus est allié à l'UDI et au Modem prenne les dispositions nécessaires pour freiner sensiblement les mouvements migratoires. Quand on voit les" jeunes pousses" qui ont le vent en poupe à l'UMP : Bruno Lemaire, NKM, Benoît Apparu , François Baroin, Valérie Pécresse, ou "les vieilles pousses " réactivées : Alain Juppé, Michel Barnier, Alain Lamasourre, euro-fédéraliste et tête de liste de l'UMP en île de France, croire que ces gens là vont durcir les lois sur l'immigration il faut pas rêver ! Mais apparemment il est tellement plus important pour Laurent Pinsolle de ne pas faire l'alliance des patriotes.

    RépondreSupprimer