jeudi 12 janvier 2017

Manuel Valls, entre postures et impostures

On nous a changé Manuel Valls ! Depuis qu’il est candidat, il essaie d’être rassembleur, oubliant ses provocations du passé, certains le comparant même à Hollande. En fait, il y a une constante dans les sinuosités de son parcours : la communication et le seul souci de servir son ambition. Et aujourd’hui, il doit estimer que cela implique un léger virage à gauche, quite à proférer des énormités.



Celui qui rêvait d’être Sarkozy

L’ancien Premier ministre ose. Il a fait fort en proposant de supprimer le 49-3, lui qui l’a utilisé six fois, mais contre son gré… Puis, c’est sa reprise de la défiscalisation des heures supplémentaires de Sarkozy qui a créé la polémique. Mais le reste de son programme est bien plus classique, une compilation de tout ce que le PS a essayé depuis des décennies, et notamment la majorité actuelle, et qui a donc échoué. Nous avons droit à toutes les vieilles lunes du PS, une dénonciation de la méchante purge de la méchante droite, qui ressemble pourtant à celle mise en place en 2012, ainsi que quelques dépenses supplémentaires (défense, justice, éducation) pour prendre le contre-pied de Fillon.

Mais il est tout de même assez incroyable de promettre en même temps des hausses de dépenses et une « poursuite de la baisse des prélèvements obligatoires » sans davantage remettre en cause les règles sur le déficit budgétaire. En matière de vieille lune, le comble est sans doute atteint sur l’Europe, avec sa « grande conférence pour refonder le projet européen », dénonçant des écarts déloyaux au sein de l’UE, proposant de taxer « les produits entrant en violation de nos règles sociales et environnementales ». Pourquoi avoir accepté le traité de Lisbonne en 2008 ou le TSCG en 2012 ?

Comme d’habitude depuis plus de 4 décennies, ainsi que l’avait noté Vincent Coussedière, le PS, par la voix de Manuel Valls ici (ou celle de Vincent Peillon, qui parle d’un plan de relance de 1000 milliards d’euros, dont il sait pertinnement que l’Allemagne le refusera), tient un double langage révoltant sur l’Europe. Euro-critique et euro-réformateur pendant les campagnes, il a défendu tous les traités qui nous ont mené là où nous sommes aujourd’hui. Il est aussi risible de l’entendre critiquer la mondialisation ou les excès du capitalisme, qu’il n’a fait qu’encourager, et même renforcer, pendant toute sa carrière politique. Un tel écart entre le discours de campagne et ce qu’il a fait est stupéfiant.

Ce qui est encore plus frappant depuis quelques semaines, c’est à quel point Valls est le prototype du politicien près à raconter tout et son contraire pour essayer d’être lu, quite à soutenir qu’il a changé, comme l’avait tenté Sarkozy avant. Les ficelles semblent tellement grossières qu’il ne semble pas possible que les Français lui fassent confiance. A moins de profiter d’un contexte favorable ?


5 commentaires:

  1. La campagne vallsienne pique du nez et même les sondages le donnent désormais perdant aux primaires. Elle s'était crashée le premier jour, lors d'un déplacement en terre ouvrière mal préparé (avec remontage de bretelles d'une militante en colère en option). Les électeurs socialistes l'ont déjà échangé contre un Macron plus neuf au rayon social-libéral.

    En revanche, la façon dont la campagne Fillon patauge pour le moment m'étonne. Bien que la question migratoire soit au centre des préoccupations des Français, sa réutilisation sentait bon la grosse ficelle et donc l'aveu implicite d'une campagne poussive. On parlera même pas de l'Etat qui "emmerde les Français"... dont l'autorité doit être néanmoins rétablie. On a aussi du tacle à ciel ouvert, pratique jusqu'alors spécialité socialiste. Frustrés semble-t-il du peu de place qui leur est laissée dans la campagne au détriment des juppéistes, les sarkozystes ont publiquement reproché à Fillon l'abandon des heures supplémentaires détaxées, un projet limité à du sang et des larmes et manquant de social. Quelques places achéteront sans doute leur silence mais cela fait désordre. Quant à Fillon qui se dit "incompris" sur la Sécu: il est candidat en campagne, c'est son rôle "d'expliquer" aux Français...

    Au fond, tout cela dit la forte crise des partis institutionnels. Crise due au refus d'assumer les conséquences de leur positionnement pro-européen. Il aurait été plus honnête pour Valls de dire: "Vous souhaitez rester dans la monnaie unique et les traités de Bruxelles, la loi El Komri n'en est que la conséquence. Qui plus est, nous avons de fortes pressions de la part de Bruxelles/Berlin pour réformer le marché du travail.". Ou à Fillon de dire: "Vous trouvez mon projet antisocial mais vous souhaitez rester dans le cadre de l'Euro et de l'UE. Or ce dernier contient le traité budgétaire signé par Sarkozy et non remis en cause par Hollande. Mon programme en est la conséquence. Il correspond aux attentes de Bruxelles et de Berlin.". Certes, tout cela ressemble à un TINA relooké. Mais après tout c'est ce qu'est l'Europe, non? Face aux contradictions des Français qui aiment Schengen et l'Euro en vacances tout en déplorant une Europe passoire et antisociale, il y aurait sans doute besoin de politiques assumant une forme de clarté, même au service de choses avec lesquelles je suis en désaccord.

    JZ

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  2. La crédibilité de Valls est nulle dans la mesure où il tient, le temps d'une campagne électorale, des propos et des analyses aux antipodes de sa pratique gouvernementale.

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  3. Valls n'a en effet qu'un seul but dans la vie, aller tout en haut, "jusqu'au dernier étage" comme il dit. Et pour ça effectivement il est prêt à tout.
    Mais là, entre lui et Fillon, on assiste quand même à un numéro de l'extrême du grand-guignol des frustrés arrivistes en chef !

    Je suis curieux de voir le score de Valls (monsieur 5% de la primaire de 2011, quand même) à la primaire de 2017. On risque de rigoler.

    Devant tant de médiocrité, tout est possible vraiment pour la présidentielle.

    ***Jacko***

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  4. Excellente présentation du candidat Valls par Laurent Herblay! Les commentaires de JZ, de Jacko et de l'anonyme de 11:18 complètent bien le tableau. Il n'y a en réalité que deux options: rester dans l'UE avec application obligatoire de la politique d'austérité inscrite dans les traités ou sortir de l'UE pour relancer l'économie. Il n'y aura pas plus de différence entre Macron, Valls, Fillon, Peillon, qu'il n'y en a eu entre Sarkozy et Hollande. Ceux qui restent dans l'ambigüité comme Mélanchon, Lepen ou Dupont-Aignan termineront comme Tsipras en Grèce.

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  5. @ JZ & Jacko

    La crise est forte en effet, et nous pouvons avoir des surprises, bonnes comme mauvaises. Plus le temps passe, plus tout me semble possible

    @ Anonyme

    C’est juste

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