vendredi 19 mai 2017

Mascarade de l’antifascisme (billet invité)

Billet invité de l’œil de Brutus

La plupart des réflexions ci-après sont issues de la lecture du Crépuscule de la France d’en Haut  de Christophe Guilluy (Flammarion 2016)



Pier Paolo Pasolini soulignait déjà en 1974 (!) qu’en abandonnant la question sociale, la gauche chercherait à instrumentaliser un « antifascisme facile qui a pour objet un fascisme archaïque qui n’existe plus et n’existera plus jamais ». Lionel Jospin reconnaîtra plus tard que cette « lutte antifasciste en France n’a été que du théâtre » et que le « Front national n’est pas un parti fasciste ». Et ce n’est pas un hasard si de BHL à Pierre Bergé, du MEDEF au entreprises du CAC 40, de Hollywood à Canal plus, les plus grands pourfendeurs du « fascisme » sont aussi les meilleurs zélateurs de la mondialisation. On remarque également que bien souvent les groupes « antifa » recrutent leurs membres non parmi les ouvriers mais parmi les jeunes diplômés de la bourgeoisie.

Cette instrumentalisation de l’antifascisme permet à des élites, qui devraient pourtant être totalement délégitimées et décrédibilisées – ne serait-ce que de par leurs résultats et les scandales à répétition –, de se trouver à bon compte une supériorité morale d’une part et en réduisant toute critique de la mondialisation à une dérive fasciste et/ou raciste. Bien évidemment, cette posture nécessite un ennemi et celui-ci est trouvé : le Front national, qu’il faut alors sur-médiatiser. Pour « lutter contre le fascisme », il s’agit alors, ni plus ni moins, que d’en faire la promotion ! et l’on se lance dans un « combat à mort » où l’on évitera à tout prix de détruire son adversaire pour, tout au contraire, en assurer la longévité. Mais en pratique, ce n’est pas vraiment le FN qui est en ligne de mire mais les classes populaires dans leur ensemble, le problème étant que ce n’est pas tant le FN qui influence les classes populaires que l’inverse : « le FN n’est qu’un symptôme d’un refus radical des classes populaires du modèle mondialisé » et les classes supérieures cherchent alors à fasciser les classes populaires pour discréditer et délégitimer leur diagnostic, « un « diagnostic d’en bas » qu’on appelle populisme ».

Il ne s’agit ainsi donc pas tant de cesser de dénoncer le Front National pour ce qu’il est réellement (un parti démagogue, opportuniste, sans réelles convictions ni programme consistant[i], conservant encore et toujours ses relents xénophobes et ses fréquentations plus que douteuses – lire  Ce qu’est le FN ce qu’il n’est pas), mais d’admettre qu’à lui seul il n’est certes pas en mesure de mettre la République en péril (sinon il aurait dû être interdit depuis longtemps !). Par contre, beaucoup plus inquiétante est l’évolution prise par le mouvement « En Marche ! » et son guide charismatique, tout frais moulu président de la République (lire Emmanuel Macron : en marche vers le fascisme ?). D’autant plus que bien peu ont relevé (et se sont inquiété) du fait (entre tant d’autres choses !), qu’avant même l’élection de M. Macron, il était possible pour une grande radio publique de censurer quiconque n’appelait pas à voter pour le camp du Bien au point d’en acculer l’humoriste Emmanuel Barré à démissionner de France Inter[ii].



[i] Et sur ce point la prestation de Mme Le Pen au débat de l’entre-deux-tours fut criante de vérité.

18 commentaires:

  1. Le passage reprochant aux groups "antifa" d'etre issus de la bourgeoisie est franchement déplacé: si les antifa défilent contre lepen, ils ont aussi pris part aux mouvements sociaux (contre la loi travail par exemple) et n'ont jamais appelé à voter macron. D'ailleurs ces groupes sont plus souvent issus de la classe moyenne que du CAC40...

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    1. ce n'est pas moi qui le dit, c'est Christophe Guilluy ... La "bourgeoisie" ne se réduit pas au CAC40 ... et parmi les "antifas", il y en a certes bien peu dont les parents sont issus de milieux précaires, de travailleurs d'usine ou encore d'immigrés. comme les étudiants de Mai-68, la gauche "caviar" et les bobos, il s'agit bien souvent (mais bien sûr pas toujours) d'une révolte bon ton qui permet de s'acheter une bonne conscience à peu de frais. Et puis quand il s'agit de retrouver les "choses sérieuses", c'est à dire son petit confort bourgeois, on retourne sur les bancs de la fac et on demande à papa-maman de se porter caution pour le crédit étudiant et de payer le loyer du studio dans lequel on joue les rebelles de canapé ...

      en supplément : https://www.youtube.com/watch?v=mo516FQ6pxs

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  2. Pierre Laval n'avait rien de fasciste...

    Et Herblay ou vous-mêmes vous faites les petits soldats de ceux qui cherchent à diaboliser le FN, par conformisme social et confort personnel.

    Ce qu'est Herblay, ce qu'il n'est pas : Herblay n'est pas un héros voulant sauver la France et créer un parti gaulliste ; Herblay est un ronchon qui, de son boulot inconnu mais visiblement bien protégé, veut un supplément d'âme lui permettant de se voir plus beau en son miroir les samedis matins, et advienne que pourra pour le reste du monde.

    Vous ne vous débarrasserez pas du FN, vous devez donc faire avec lui si vous voulez changer le cours des choses. Mais comme vous ne voulez en fait pas changer le cours des choses, vous vous permettez de surenchérir sur les calomnies.

    Cette attitude doit être dénoncée pour l'imposture qu'elle est.

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    1. 1/ Laurent n'est pas le rédacteur de cet article ...

      2/ Affirmer que Pierre Laval, l'homme qui a mit en place le régime de Vichy tout en souhaitant la victoire de l'Allemagne nazie, n'était pas fasciste en dit long sur ce que reste et demeure une part non négligeable du FN ! Merci de lever le masque !

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    2. (je suis l'anonyme auteur du premier poste, pas de celui sur Laval)
      Etes-vous sur que Laval était fasciste? Collaborateur cela ne fait pas de doute, mais à ma connaissance le fascisme francais était à l'époque incarné par les collaborationists, à savoir Marcel Deat, Eugene Deloncle et Jacques Doriot.

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    3. Moi je suis l'auteur du message de 9h37. Je ne suis pas au FN, je me contente de critiquer la ligne imbécile herblayo-brutusienne.

      Et je maintiens que Laval n'était pas un fasciste, pas plus que Vichy d'ailleurs. C'est le point de vue de la plupart des historiens français, et même un fouteur de merde antifrançais comme Paxton l'écrit explicitement (pour Vichy).

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    4. Mais je vois que les dindons endimanchés qui regardent leur pays partir à vau-l'eau comme les vaches regardent passer les trains, par refus de bouffer le (puis, maintenant, de s'allier au) FN sont incompétents en histoire.

      Merci de lever le masque...

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    5. Deat, Deloncle et Doriot ont effectivement bien plus incarné le fascisme que Laval.
      Toutefois, si on considère le fascisme comme une idéologie qui, s'appuyant sur une figure tutélaire à laquelle on dédie un culte de la personnalité, veut mettre en place un régime autoritaire dans lequel le parti, l'Etat et la société tendant à fusionner ; alors oui, Vichy était un régime fasciste et Laval en ayant été le chef du gouvernement était fasciste.
      Maintenant, on peut aussi s'amuser avec le mot et considérer que les Italiens ont l'exclusivité du fascisme. Mais tout cela n'a pas beaucoup de sens ...

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  3. Bientôt, Brutus prétendra que les antifas sont des bobos pétés de tunes, car tout un chacun sait bien évidemment que les bobos sont la cause de tous les problèmes et ont plein de pognon.

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    1. Meric par exemple avait pourtant bien montré de quel milieu social viennent ces antifas.

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    2. Comme je l'indique plus haut, je ne vois pas beaucoup d' "antifas" qui viennent des milieux ouvriers, précaires ou encore (et c'est peut-être ce qui est le plus flagrant) des milieux immigrés !

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  4. Pour qu'un tel article soit compréhensible il aurait fallu définir précisément ce qu'on entend par "fascisme". Pour ma part je tiens à toujours donner aux mots un sens très étroit, non extensible. Il ne peut donc pas y avoir de fascisme en dehors de l'Italie.

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    1. Pour la définition du fascisme, prendre le lien donné dans l'article sur ce qu'est le FN et ce qu'il n'est pas (ou sinon ici : http://loeildebrutus.over-blog.com/2015/09/ce-qu-est-le-fn-ce-qu-il-n-est-pas-suite-d-articles-sur-les-fronts-de-liberation-contre-l-euro-austerite.html )

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  5. Mascarade de l'herblayisme :

    "Deux proches de Dupont-Aignan avec le FN pour les législatives
    Deux proches de Nicolas Dupont-Aignan, le porte-parole de Debout la France Laurent Jacobelli et son ex-directeur-adjoint de cabinet Maxime Thiébaut, rejoignent le Front national en étant candidats aux législatives dans les Bouches-du-Rhône et en Saône-et-Loire, d'après le FN.

    Laurent Jacobelli, également secrétaire général adjoint de Debout la France, sera candidat dans la dixième circonscription des Bouches-du-Rhône, celle de Gardanne, actuellement détenu par l'EELV François-Michel Lambert, a indiqué à Stéphane Ravier, patron du FN dans le département.

    Marine Le Pen y a réuni 47,33% des suffrages exprimés au second tour de l'élection présidentielle face à Emmanuel Macron, ce qui place cette circonscription parmi les meilleures du département d'un point de vue frontiste.

    Maxime Thiébaut sera pour sa part candidat dans la 4e circonscription de Saône-et-Loire, actuellement détenue par la PS Cécile Untermaier et qui avait placé Marine Le Pen à 43,65% des suffrages exprimés le 7 mai. Nicolas Bay, patron de la campagne des législatives pour le Front national, a confirmé cette investiture."


    Vous ne voulez pas assumer votre besoin du FN, donc c'est lui qui impose sa ligne. Consternant.

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  6. Les frontistes semblent persuadés que le camp souverainiste n'a aucune chance s'il refuse de s'allier avec le FN. Ils raisonnent comme si le FN était un parti souverainiste, escamotant au passage la démonstration.

    Or le débat de l'entre deux tours n'a rassuré personne sur ce point, au contraire, pas même les frontistes.

    Au lieu de réclamer à cor et à cri le soutien des partis souverainistes les frontistes feraient mieux de poursuivre la mutation du FN en parti souverainiste, qui est loin d'être achevée.

    Pour l'instant on n'a vu que le ralliement raté de NDA à MLP, avec le résultat qu'ils se sont tous deux (mutuellement ?) discrédités comme champions de la cause souverainiste. Ce sont maintenant des tocards.

    Ivan

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    1. Mais oui, mais oui. C'est amusant que vous vous imaginiez que le FN (dont je ne suis pas) va s'aligner sur vos désidérata maintenant, alors que vous êtes incapables de monter un parti et que vous avez fait sciemment capoter l'alliance avec Dupont-Aignan.

      Et pendant ce temps là :

      http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2017/05/19/97001-20170519FILWWW00269-pay-bas-tolle-contre-le-port-du-voile-ou-le-kippa-dans-la-police.php

      "Plus de la moitié (52%) des résidents d'Amsterdam sont d'origine non-néerlandaise, selon M. Aalbersberg, ce qui n'est pas reflété dans la composition de la police de la ville où 18% des agents sont d'origine étrangère."

      L'herblayisme est-il un humanisme ? Plutôt une irresponsabilité "en marche", semble-t-il...

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  7. @ L’œil de Brutus

    Merci d’écrire sur ce livre, que je dois encore lire

    @ Anonyme pro-frontiste

    Il faudrait faire avec le FN pour changer le cours des choses. Les 45 années de vie de ce parti montrent bien que non puisqu’il ne permet aucun changement, stérilisant au contraire beaucoup de voix qui souhaiteraient une véritable alternance. J’ai milité à DLR pendant 7 ans pour essayer de changer les choses, sans succès.

    @ Anonyme 14h34

    En quoi mascarade ?

    Je n’ai en aucun cas besoin du FN, qui rend minoritaire les idées qu’il touche, avec incompétence autant qu’inconstance. J’ai au contraire besoin d’une autre alternative

    @ Ivan

    Très juste

    @ Anonyme 18h13

    Mais qui a fait capoter cette alliance ?

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  8. C'est votre ligne qui a fait capoter cette alliance.

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