samedi 11 juillet 2020

Le macronisme : un techno-sarkozysme de seconde zone


Comme annoncé depuis trop longtemps, Jupiter a donc décidé de donner une nouvelle impulsion à son action après le déconfinement et les bien piteuses élections municipales. Nouveau Premier ministre, équipe gouvernementale remaniée et nouveau cap qui devrait être dévoilé prochainement. Pas sûr que ce qui en ressorte puisse lui donner le moindre élan, positif, pour 2022…




Toujours plus à droite



En toute honnêteté, il faut tout de même reconnaître que ce remaniement a enfin permis d’exfilter la plupart des grosses erreurs de casting de l’équipe précédente, sans grand état d’âme pour les services rendus. Exit donc Castaner, ni à la hauteur, ni capable d’éviter des bourdes. Exit Sibeth N’Diaye : sa langue de bois trop massif et ses dérapages feront place à un discours probablement bien plus contrôlé. Exit Belloubet, dont un des derniers « faits d’arme » aura été le refus d’Assa Traore de répondre à son effarante invitation… Exit Pénicaud et Guillaume. Tout le monde a noté le virage droitier de cette équipe, parfaitement illustré par le duo Intérieur / Justice, passé de deux anciens socialistes à un duo recentré. Cela était plus que prévisible, Macron ayant souvent su dépasser la droite par la droite


Un (petit) virage à gauche était totalement improbable tant cela aurait pu choquer un électorat macroniste de plus en plus de droite, comme l’ont révélé les élections européennes, sans grand espoir de tenter à nouveau des électeurs de gauche trop échaudé depuis si longtemps… De toutes les façons, le PS est un astre mort. Et l’objectif du président est de faire à LR le sort du PS, ce qui semble possible tant la direction du parti ne parvient pas à faire exister une ligne politique crédible et différente, comme l’ont montré les européennes, ou les possibles candidats de 2022. Pour servir cet objectif, le choix de Jean Castex à Matignon peut être assez habile, nouveau braconnage sur les terres LR, qui plus est estampillé province non métropolitaine afin de cibler le nouveau cœur électoral de la droite en 2020.



Ce remaniement confirme que le macronisme est un sarkozysme, comme je l’écrivais en 2018 : le nouveau Premier ministre a travaillé pour lui, Bachelot a été sa ministre et Dupont-Moretti en serait proche. D’ailleurs, l’arrivée de ce dernier, qui ne se voyait pas les compétences pour un tel poste il y a deux ans, rappelle les coups de l’ancien président. Mais cette nouvelle équipe dessine un sarkozysme avec des nuances. D’abord, cette équipe apparaît encore comme beaucoup trop techno, et pas assez politique. La première interview du nouveau Premier ministre était un robinet d’eau particulièrement tiède, tant le contraire de tout ce qu’il disait n’avait aucun sens. Cette équipe manque cruellement de poids politique et elle n’a pas été renforcée dans ce domaine, les principaux apports étant médiatiques…



Ensuite, le macronisme se distingue tout de même par sa capacité à choisir des seconds couteaux, pour ne pas dire plus, alors que quelques gros calibres (Valls, Royal) semblaient partants pour rejoindre l’aventure, sans que cela ne soit totalement incohérent, notamment dans le cas de Manuel Valls. Beaucoup de ministre n’incarnent que très modérément leur fonction, et il est assez frappant que Macron ait remplacé l’assez terne Philippe, qui avait gagné en popularité, par un inconnu complet, dont l’accent ne cache pas le caractère extrêmement techno. Merci à Marianne d’avoir exécuter sa profession de gaulliste social, totalement ridicule quand on sert un Macron qui n’est ni gaulliste (tenue générale, anglicismes, dilapidage de notre patrimoine industriel : Alstom, Alcatel, Technip), ni social (ISF, « flat tax », APL).



Bref, Macron a surtout fait de la petite politique politicienne et confirme sa propension à l’entourer de personnes de second rang, rarement le signe d’un grand chef… Comme le note David Desgouilles, il est de plus en plus le candidat de la droite pour 2022. Il faut dire que LR est incapable de définir une ligne vraiment distincte, comme l’indique ces possibles présidentiables…

15 commentaires:

  1. Il vaut mieux avoir des seconds couteaux inconnus que des vieux politicards usés jusqu'à la corde. Valls et Royal, quelle horreur !

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  2. « Ce remaniement confirme que le macronisme est un sarkozysme, comme je l’écrivais en 2018 : le nouveau Premier ministre a travaillé pour lui, Bachelot a été sa ministre et Dupont-Moretti en serait proche. »

    Un sarkozisme, oui, mais sans la vulgarité insupportable de Sarkozy.

    Vous aviez bien vu : Macron est en effet bien plus proche de Sarkozy que de Hollande qui fut pourtant son mentor.

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    1. La politique de Macron est la même que celle de Hollande. Entre Sarkozy, Hollande et Macron, il y a une continuité. Les différences sont de pure forme.

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  3. @ Moi

    Bien d’accord sur la continuité. On pourrait même dire qu’il y a à chaque fois une amplification des politiques néolibérales, pour le pire.

    En revanche, je ne suis pas d’accord pour dire qu’il vaut mieux Darmanin plutôt que Valls place Beauvau ? Pour tout le monde :
    - Pour Macron, cela lui aurait permis d’intégrer un ancien PM à sa majorité. Certes, Valls n’apporte pas un gros bagage électoral, mais cela donnait un peu plus de poids à un gouvernement qui en a singulièrement manqué depuis 3 ans
    - Pour nous, cela permet de ne pas créer de nouveaux monstres politiques néolibéraux : Darmanin ne pèse rien à date, ou pas grand chose. Plutôt que de lui permettre de grandir, j’aurais préféré un vieux canasson qui ne présente guère de risque électoral pour nos idées

    @ Marc-Antoine

    « Sans la vulgarité insupportable de Sarkozy » !!! Pas d’accord, Macron m’a semblé encore plus vulgaire que Sarkozy depuis 6 ans, entre ses injonctions ou commentaires déplacés sur les français (gaulois, traverser la rue pour trouver un emploi, ceux qui ne sont rien, les alcooliques et illettrés…), et certains dérapages médiatiques (Saint Martin, fête de la musique…)

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    1. @Laurent Herblay
      Mais Valls est complètement discrédité : il a perdu la primaire, a trahi sa parole en ne soutenant pas Hamon qui l'a battu démocratiquement, et il s'est vautré en Espagne... Sans parler de son bilan de Premier ministre de Hollande qui est tout sauf bon. C'est un repoussoir, un boulet. Pourquoi Macron, qui par surcroît ne l'aime pas et avait de mauvais rapports avec lui, le nommerait dans son gouvernement ?

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    2. Je n'ai pas dit que la nomination de Darmanin était une bonne chose, mais celle de Valls n'aurait pas été meilleure. Concernant Darmanin, je serais étonné qu'il devienne un présidentiable et devienne le rival de Macron en 2022, à cause des accusations qui pèsent sur lui.

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    3. Vous confondez arrogance méprisante et vulgarité. Macron est méprisant envers les "petites gens" qui ne comprennent pas sa politique mais il n'est pas vulgaire. Contrairement à l'ignoble Sarkozy, insurpassable dans la vulgarité et la démagogie "populacière".

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  4. Darmanin suspecté de viol ou au moins de manœuvres pour obtenir des faveurs sexuelles nommé ministre de l'intérieur, la France est une république bananière.

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  5. @ Moi et anonyme

    Bien d’accord, Valls est discrédité, mais faire entrer un ancien PM dans un gouvernement lui donne un peu plus de poids. En outre, Valls est largement sur la ligne de Macron. Ceux qui le détestent doivent souvent détester Macron également, donc peu de pertes pour Macron. Cela aurait simplement donné un peu plus de poids et d’expérience au gouvernement. Darmanin ne sera pas présidentiable en 2 ans : les Français ne voudront pas passer d’un jeune roquet à un roquet encore plus jeune. Mais je suis effaré qu’il ait tant obtenu si vite. Sur les accusations qui pèsent sur lui, lire le point de vue de Régis de Castelnau :
    https://www.vududroit.com/2020/06/affaire-darmanin-saison-2/

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    1. Quelle que soit l'opinion que l'on a sur cette accusation de viol, elle est de nature à nuire à l'ambition politique de Darmanin. A l'époque de #MeToo, c'est le genre de choses qui laisse des traces. Je suis d'ailleurs étonné que Macron l'ai nommé malgré ça.

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    2. Darmanin reconnait lui même qu'il a procédé à un marchandage du fait de sa position d'influence pour obtenir des faveurs sexuelles, ce n'est pas un viol, mais c'est un abus de pouvoir.

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    3. C'est de toute façon une affaire peu reluisante qui n'est pas à mettre à son crédit...

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  6. D'accord avec Marc-Antoine ! E.Macron n'est pas vulgaire. Son vocabulaire est ultra châtié et trop raffiné (comme on raffine du sucre). On n'a toujours l'impression de recevoir un cours de vocabulaire. Car il est méprisant, par moments cela frôle un certain racisme social.

    N. Sarkozy est vulgaire. A côté de E. Macron, il n'a pas la même culture ni même l'excellence de niveau de formation. Sa gestuelle relève du comique. Je me rappelle d'être allée en voyage à Berlin lors de la mandature de N. Sarkozy et de m'être fait expliquer voire traduire certains articles de presse sur lui (je ne parle pas allemand) et des éditoriaux politiques sérieux de droite comme de gauche le comparait à...Louis de Funès.

    Après le résultat des idées, des applications des idées des 2 personnages est le même : ultra-libéralisme, réfomre de l'Etat et de la Fonction publique fondée uniquement sur une logique comptable bruxelloise, aucun sens de l'histoire, des institutions du pays etc...etc...etc...

    Moi je pose toujours la même question : qui en face de E. Macron en 2022 susceptible de...?????

    Bonne Journée
    Sylvie

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    1. @ Sylvie,

      Macron pas vulgaire ? Bien sûr, sur la forme, il ne l’est pas, contrairement à Sarkozy. Mais sur le fond, il le dépasse très largement à mon sens (« ceux qui ne sont rien », « gaulois réfractaires »… ou les évocations des illettrés et alcooliques…)
      Bonne journée

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  7. Et j'apprends donc que, si Berlin a abandonné aux Pays-Bas le rôle du père la rigueur c'est parce que:
    -Berlin pensait ne plus avoir besoin de ses voisins de la zone euro et prospérer uniquement grâce à la Chine. Sauf qu'avec le ralentissement chinois Berlin a de nouveau besoin des "fainéants" du Sud.
    -Les Pays-Bas à l'inverse ne subissent pas trop la récession et leur spectre exportateur est plus varié (modèle dumping fiscal+ouverture échanges internationaux type Hong Kong). D'où la persistance de la posture anti-pays du Sud.

    Toujours à propos de Berlin: le Guardian est certes un pilier de la pensée unique progressiste mais a fait un très bon job en enquêtant sur le rôle politique (néfaste) de Bild en Allemagne de l'après-guerre à nos jours. Son boss actuel est un fan de Franz Josef Strauss qui a choisi la stratégie du poil à gratter droitier d'une Chancelière selon lui trop au centre. Mais qui dit sur elle quelque chose que je ne peux qu'approuver: il voit en elle une femme très douée pour flairer le sens du vent plus qu'un vrai leader. Si la pilote de la zone euro navigue à vue...

    JZ

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