samedi 16 février 2013

USA : ce n’est pas l’austérité qui réduit les déficits !


5.3% du PIB : voici ce que devrait être le niveau du déficit public aux Etats-Unis en 2013, soit plus de 6 points de moins que le point haut atteint en 2009. Une baisse plus rapide que dans les pays qui mènent des politiques d’austérité sauvages, ce qui en démontre l’absurdité.

Washington mieux que Madrid

Les statistiques de l’OCDE sont formelles et assez stupéfiantes. En plein cœur de la récession, les Etats-Unis et l’Espagne sont deux des pays qui ont le plus laissé filer leurs déficits pour amortir la crise (après l’Irlande et la Grèce), du fait de l’effondrement de leur marché immobilier. A Washington, le déficit atteignait ainsi 11,9% du PIB et à Madrid 11,2% en 2009. Pour 2012 et 2013, l’OCDE prévoyait en novembre, -8,5% et -6,8% aux Etats-Unis et -8,1% et -6,3% en Espagne.

Mais ces prévisions sont sans doute un peu périmées car l’Espagne fait souvent moins bien que prévu (il y a deux ans, on annonçait un déficit de 6% en 2011 et de 4,5% en 2012 pour Madrid), alors qu’à l’inverse, les Etats-Unis font souvent un peu mieux. The Economist annonce -7,4% pour l’Espagne l’an dernier et -7% pour les Etats-Unis. L’écart se creuserait en 2013 puisque Madrid ne ferait pas mieux que 6,2% alors que Washington parviendrait à baisser son déficit à 5,3%.



Ce qui est incroyable avec ces chiffres, c’est que la vitesse de baisse des déficits est finalement un peu plus rapide outre-Atlantique qu’outre-Pyrénées. Cela semble suprenant étant donné que les autorités espagnoles ont mis en place de redoutables plans d’austérité et ont coupé de manière sauvage dans les dépenses publiques, alors qu’aux Etats-Unis, si les Etats ont fait de gros efforts, l’Etat fédéral s’est contenté de mesures équivalentes à seulement 1,1% du PIB depuis 2011.

L’austérité est une impasse

Le mécanisme à l’œuvre n’est pas très compliqué à comprendre. C’est la base de l’analyse de Keynes : en période de récession, si l’Etat cherche à réduire ses déficits (en réduisant ses dépenses ou en augmentant les impôts), il tend à accentuer la récession et à perdre la majeure partie des efforts qu’il réalise. En effet, quand la demande privée chute, si l’Etat réduit la demande public, alors, la demande globale baisse, ce qui réduit ses rentrées fiscales et augmente certaines dépenses.

Avec Jacques Sapir, Nicolas Dupont-Aignan et d’autres, nous avions dénoncé ces politiques austéritaires suicidaires dès la fin 2009 / début 2010. Malheureusement, l’Europe a pris ce chemin mortifère qui a provoqué une casse sociale monstrueuse avec plus d’un quart de la population au chômage en Grèce et en Espagne. Depuis, Paul Krugman a formalisé dans son dernier livre une critique sans concession de l’austérité et même le FMI a fini par reconnaître ses erreurs.

Car même si tout n’est pas rose (loin de là) aux Etats-Unis, on constate que la décrue des déficits est au moins aussi forte que dans les pays qui mènent des plans d’austérité. La raison est simple : en laissant jouer les stabilisateurs automatiques, le pays est en croissance, ce qui permet d’augmenter les recettes fiscales toute en réduisant certaines dépenses. Voilà une manière bien plus intelligente de gérer le budget de l’Etat que les inepties européennes, qui provoquent tellement de malheur.

Bien sûr, cela n’est pas instinctif. En période de récession, ce n’est pas en réduisant la dépense publique ou en montant les impôts que l’on réduit les déficits. Laisser jouer les stabilisateurs automatiques n’est pas moins efficace, comme le montrent les Etats-Unis, et surtout est beaucoup moins douloureux.

9 commentaires:

  1. 1- Premier épisode : la Grèce s'est déclarée en défaut de paiement.

    2- Deuxième épisode : jeudi 7 février 2013, l'Irlande s'est déclarée en défaut de paiement.

    3- Troisième épisode : dans ce long feuilleton, le prochain épisode concerne Chypre.

    Samedi 16 février 2013 :

    La troïka calcule les conséquences d'une faillite de Chypre.

    http://www.lemonde.fr/economie/article/2013/02/16/la-troika-calcule-les-consequences-d-une-faillite-de-chypre_1833704_3234.html

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  2. "François Hollande « s'inscrit dans la suite de Sarkozy », « Il considère, lui aussi, que le travail est un coût qu'il faut baisser "

    Si vraiment c' est que pense M.Hollande, il n' est pas sorti de l' auberge.C 'est l' idée du Siecle , lors d' une crise , d' appauvrir les salariés.

    Il n' y a pas à chercher loin pour voir pourquoi le monde a mal tourner dans les années 30.

    Qu ' en je pense qu' on fait la morale sur les politiques des années 30 alors qu' on recommence.

    Les élites sont elles prédestinées à finir pendus ou guillotinés ?

    http://www.lejdd.fr/Societe/Social/Actualite/Lepaon-Hollande-s-inscrit-dans-la-suite-de-Sarkozy-interview-590656

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    1. Il y a, à mon avis, plus de chances de voir les citoyens lambas, écoeurés par les politiques menées à leur détriment par Sarkollande et Hollkozy, se jeter dans les bras de MLP que de voir nos pseudo-élites finir pendues ou guillotinées.

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  3. Hors sujet. Préparons nos arguments tels celui du scandale des farines animales, car l'UE va financer des trolls pour aller sur nos blogs pour contredire les eurosceptiques en vue des européennes de 2014.

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    1. Scoop éventé, nous sommes déjà au courant. Montant du budget : 2 M€.

      Si tu veux avoir des informations intéressantes sur la com' préventive sur ce genre de sujet, va sur le site de Fabrice Nicolino : planète sans visa.

      L'intervention de cette task force sera de toute façon à la hauteur de ce que fait l'Union européenne : niveau zéro.

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  4. On peut ne pas être toujours d'accord sur ses prises de position, mais je vous invite à lire sur le site de Gérard Filoche le détail des effets produits par l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 pour le MEDEF au détriment des salariés. Les socialistes sont a priori décidés à le transposer dans la loi au prétexte que les syndicats, dont trois syndicats minoritaires de salariés, l'auraient signé. Après la rupture sarkozyste, la braderie socialiste. Nous avons vraiment de la chance !

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  5. @ Démos

    Merci pour l'information

    @ JJS

    Merci pour ce rappel

    @ Abdel

    Les socialistes ne sont pas mieux que l'UMP. Les Français commencent à le comprendre.

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  6. Bonjour Laurent Pinsolle,
    votre comparaison me semble un peu rapide : sur votre graphique, entre 2009 et 2013, l'Espagne a réduit son déficit de 5 points, les USA de 6.6. Soit une différence de 1.6, au profit d'un pays qui dispose de sa propre monnaie (et d'une monnaie bien spéciale d'ailleurs), d'une économie relativement fermée de par sa taille (je veux bien entendu parler des USA)...alors que l'autre pays est un état de taille moyenne, dont les principaux partenaires (européens) sont en stagnation ou en récession, et qui n'a pas sa monnaie. De plus, ajoutons que les USA ont réduit leurs dépenses publiques de plus de 4 points de PIB depuis 2009, ce qui doit modérer l'opinion que l'on a du caractère "expansif" de la politique budgétaire US.
    En tout cas merci pour vos articles, que je partage fréquemment.

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