vendredi 19 avril 2013

Arnaud Montebourg mendie une politique industrielle auprès de Bruxelles


Le ministre vient, soutenu par Londres et Berlin, de demander à la Commission la « libéralisation des aides d’Etat » en matière industrielle. Par delà l’aspect pathétique qu’il y a à implorer les eurocrates de ne pas respecter les traités, cela montre encore le double jeu de ce gouvernement.



La continuité avec Nicolas Sarkozy

L’ancien président de la République avait beaucoup parlé. Il avait promis de moraliser le capitalisme, de venir à bout des parasites fiscaux ou de sauver Gandrange. Il avait dénoncé l’euro cher, critiqué la politique de la BCE et la concurrence déloyale. Ses belles paroles n’ont jamais dépassé le stade de belles paroles. Alors qu’il avait l’opportunité historique, après le « non » français de 2005, de renégocier les traités européens, il a laissé faire ce qu’il dénonçait dans ses discours.

Le nouveau gouvernement fait exactement la même chose. François Hollande passe son temps à parler de croissance mais non seulement il ne fait rien pour la stimuler mais toute sa politique économique conduit au contraire à la plomber, comme le montre d’ailleurs l’évolution du PIB, qui pourrait reculer en 2013 ! De manière épisodique, le gouvernement supplie l’Europe de faire plus pour la croissance ou dénonce les politiques d’austérité et la concurrence déloyale, mais rien ne vient.

Arnaud Montebourg est le grand spécialiste de cet enfumage médiatique, lui qui a osé dire qu’il avait sauvé soixante mille emplois sur soixante-dix mille qui étaient menacés alors qu’il n’a rien fait pour les plans sociaux de PSA et Renault, qui vont aboutir à la disparition de plus quinze mille emplois en France. Idem pour les sites de Florange, Sanofi ou Pétroplus, qui vont bien fermer. Le ministre parle, les plans sociaux et les licenciements passent, sans le moindre ajustement.

Faux-semblants européens

Mais le plus pathétique est sans doute cette sortie sur la nécessité de « libéraliser les aides d’Etat » en matière industrielle. Par-delà le choix plus que discutable du mot « libéraliser », bien peu approprié à un débat clair, comme souvent, le constat est juste : les autres pays, asiatiques ou américains, n’hésitent pas, eux, à soutenir les projets industriels privés pour inventer les technologies de demain. Sur le fond, on pourrait dire que le ministre n’a pas tort de demander « à monsieur le commissaire Almunia de prendre des dispositions protectionnistes sur la concurrence déloyale ».

Cependant, cette demande pose de nombreux problèmes. Tout d’abord, on peut se demander s’il ne se moque pas un peu du monde puisqu’il demande au commissaire de violer les traités que le PS et l’UMP ont ratifiés. N’aurait-il pas fallu y penser avant ? Ensuite, c’est le moyen un peu trop commode de rejeter la responsabilité de la désindustrialisation sur l’Europe en disant que c’est la faute de la Commission, alors que la responsabilité ultime est celle de ceux qui ont ratifié les traités. En outre, pourquoi vouloir exercer le pouvoir, s’il faut ensuite mendier auprès de la Commission pour agir ?

Enfin, le ministre de l’effondrement productif, qui s’était fait l’apôtre du « fabriqué en France » devrait également veiller à utiliser un vocabulaire « fabriqué en France ». Ce n’est pas parce que les anglo-saxons dominent les nouvelles technologies qu’il faut parler d’update, de leadership et de made in France. Cela fait quand même beaucoup d’anglicisme pour un ministre de la République. Mais cela est-il surprenant de la part d’un gouvernement qui semble plus préoccupé par le niveau en anglais de la population que par son niveau en français, comme le montre le scandaleux projet Fioraso.

Tel Nicolas Sarkozy, Arnaud Montebourg s’agite en se défaussant de la responsabilité de son échec sur l’Europe. Mais derrière les mots qui peuvent plaire, il n’y a que de l’inaction, comme les salariés de Pétroplus l’ont tristement découvert. Pour vraiment changer, il faudra vraiment changer de dirigeants.

8 commentaires:

  1. Si Montebourg croyait ce qu'il dit il y a longtemps qu'il aurait fait comme Chevennement c'est a dire claqué la porte .

    Les nouvelles technologies n'ont de nouvelle que le nom tout cela a été inventé il y a 20 a 30 ans sinon 40 ; ex : WWW inventé au CERN (Berners-Lee et Cailliau) 89/90) ; ecrans Cristaux liquide année 71 labo thomson ACL couleur en 84 etc .....

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    1. Montebourg et Chevènement, deux "faux-durs" qui se couchent devant plus fort qu'eux. Le premier n'en est qu'à son 1er le second l'a fait 3 fois mais sont morts politiquement!

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    2. C'est vrai que Chevènement a mal vieillit , je me souviens de lui haranguant la foule en 68 square Louvois en costume Dutronc

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  2. Entre les inventions d'il y a 20 ou 30 ans et les produits de maintenant, il s'est intercalé beaucoup d'autres inventions pour arriver aux performances actuelles...sinon ça revient à comparer les voitures du début avec celles de maintenant, ce qui démontrerait une incompréhension complète du processus.

    Ca devient de plus en plus difficile de travailler dans la recherche publique en France, beaucoup émigrent ou bifurquent vers la finance. Quant à la recherche privée en France, ça n'a aucun intérêt, mauvais salaires et compléments, aucune récompense financière pour les salariés, même quand des dizaines ou des centaines de millions d'Euros sont générés par leurs idées. Soit il faut monter sa boite, soit trouver un job ailleurs qu'en France ou alors dans la finance-assurance.

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  3. On peut reprocher des choses aux US, mais ils savent attirer l'innovation :

    Ce modèle est donc très spécifique. L'attribution de parts de l'entreprise aux travailleurs de la connaissance a pour principal objectif de les attirer et de les retenir dans le projet de l'entreprise. Ainsi on voit se dessiner une forme nouvelle de copropriété fondée sur les compétences qui est une manière concrète de reconnaître l'apport du capital humain.

    http://www.metiseurope.eu/quand-innovation-rime-avec-stock-options-et-participation_fr_70_art_29416.html

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    1. Exactement ce que déclarait ces jours-ci le Professeur Etienne Beaulieu, Président de l'Académie de médecine qui travaille en France et aux Etats-Unis. Résistant, homme intègre, il expliquait que, non seulement les chercheurs sont mal payés en France, mais que, de plus, les crédits pour la recherche sont bien moins importants de ce côté-ci de l'Atlantique. Il faudrait peut-être rajouter un chapitre au "fameux" rapport Gallois, non ?

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    2. Ben oui, mais en France la recherche c'est considéré comme un sacerdoce, donc mal payé. C'est sûr qu'avec de telles conceptions, la recherche française est mal barrée.

      S'imaginer qu'un chercheur qui a fait des études souvent longues et coûteuses en temps pendant lesquelles il n'a rien gagné et s'est même endetté va se satisfaire d'une poignée de figues comme rémunération, c'est légèrement délirant. Sur ce point, les dirigeants publics et privés français sont complètement à la ramasse.

      En tous cas, je suis parti de France, pour primo ne pas être au chômage et secondo pour être mieux payé. Tertio, je n'ai aucune envie de revenir en France car mes idées n'y seront jamais récompensées au prorata de ce qu'elles rapportent. Edison est passé par la France et est vite parti aux USA, voyant que ses idées n'auraient aucun avenir en France.

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  4. @ Patrice

    Bien d’accord. La principale chose à laquelle il croit, c’est lui.

    @ Cording

    Chevènement, cela n’a rien à voir : 3 démissions du gouvernement, démission du PS, lancement d’un nouveau parti, une candidature à la présidentielle.

    @ Olaf

    C’est juste, aujourd’hui, la finance recrute les meilleurs ingénieurs… Il y a beaucoup de chose à faire pour améliorer les choses en France.

    @ Anonyme

    Très juste

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