mercredi 21 août 2013

Œuf, ail, lait, viandes : le grand abandon de la filière agricole


Il ne s’agit malheureusement pas d’une nouveauté. Après les éleveurs et les laitiers, c’est au tour des producteurs d’ail et d’œufs de subir une nouvelle crise, qui montre que nos gouvernements, de droite comme de gauche, ont complètement abandonné notre agriculture et nos agriculteurs.



Toujours plus de secteurs en crise

Les producteurs d’œufs protestent contre la baisse des cours à 4,95 euros la centaine (soit 30 centimes pour six œufs, ce qui laisse songeur sur les marges réalisés des intermédaires) alors que leurs coûts augmentent du fait de la hausse du prix des céréales. Depuis, le ministre les a vu, a promis d’exporter en urgence quelques millions d’œufs, et organise le recul de la production en France. Même phénomène pour les producteurs d’ail, touchés par les aléas climatiques et qui ont vu les prix tombés entre 1,2 et 1,5 euros le kilo du fait de la concurrence étrangère contre 2,3 euros en 2012 et plus avant

Le sort des producteurs de lait est connu depuis longtemps. Le prix est coincé à 300 euros les 1000 litres (on était à 310 euros en 2001) et ils n’arrivent pas à obtenir la hausse de prix de 30 à 40 euros les 1000 litres qu’ils demandent. Par-delà le fait que les prix n’ont pas progressé depuis 12 ans, ils soulignent la montée du prix des céréales et donc de leurs coûts de production : le prix du soja s’est envolé de 280 à 420 euros la tonne et celui du maïs de 180 à 220. Ils pointent également la concurrence de l’Allemagne, de plus en plus agressive, et craignent la suppression des quotas en 2015.

L’agriculture n’est pas une activité comme les autres

Ces crises sont la conséquence de la libéralisation d’un secteur qui ne devrait pas l’être et de la mise en concurrence déloyale avec nos voisins allemands. En effet, dans ce dossier très complet, l’ORES Pays de la Loire donne plusieurs explications : l’absence de SMIC qui permet d’embaucher des travailleurs saisonniers d’Europe de l’Est à un coût 2 à 3 fois inférieur à celui de la France. En outre, les agriculteurs allemands bénéficient d’aides massives pour investir et ils bénéficient d’un tarif de rachat du biogaz bien supérieur à celui de la France (0,21 euro / kWh contre 0,075 à 0,09).

Nos agriculteurs ont bien du mérite de continuer à travailler dans de telles conditions, où ils peuvent perdre de l’argent du fait des variations des prix mondiaux soumis aux aléas de la concurrence internationale, sans avoir de visibilité sur ce qu’ils vont gagner. Si nous continuons dans cette direction, il est bien évident que nous perdrons toute activité dans les secteurs où les prix sont bataillés. Il existe pourtant des solutions : rétablir un prix plancher permettant aux agriculteurs de vivre de leur travail, viser l’indépendance alimentaire et permettre un meilleur partage de la valeur ajoutée dans la filière.

Comme toujours, nos ministres vont s’agiter, promettre des aides ponctuelles (que Bruxelles pourra annuler ensuite…), mais ils ne règlent rien sur le fond et laisse défaire un des plus beaux succès de l’après-guerre, le développement d’un secteur agricole puissant. Jusqu’à quand ?

18 commentaires:

  1. @Laurent Pinsolle,
    "Il existe pourtant des solutions : rétablir un prix plancher permettant aux agriculteurs de vivre de leur travail, viser l’indépendance alimentaire et permettre un meilleur partage de la valeur ajoutée dans la filière."

    En gros, rétablir notre indépendance agricole...Autant sortir de l'UE, alors! Car si l'agriculture a longtemps été l'un porte-drapeau de la politique européenne, il en est désormais le parent pauvre: grâce à l'UE et à son principe de concurrence libre et faussée, l'Allemagne est devenu le pays le plus agricole d'Europe, devant la France!
    Faute d'avoir défendu nos intérêts, les dirigeants français sont les premiers responsables de la situation, car par leur préférence européenne, ils manifestent une indifférence au sort de nos agriculteurs, et pire, à notre autonomie alimentaire, qui devrait être la première de leur préoccupation. Le plus farce, ce sont les européistes écolos incohérents comme José Bové, qui milite pour la souveraineté alimentaire des pays du tiers-monde, mais qui ne sont absolument pas dérangés par l'aliénation de notre indépendance agricole à l'UE...
    C'est toute une génération de dirigeants qu'il va falloir changer pour sauver l'agriculture, alors que les Français, devenus citadins depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, demeurent souvent originaires de régions agricoles, et sont inconsciemment attachés à l'idéal paysan, bien plus qu'à l'industrie...


    CVT

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  2. Je suis decu par cet article qui ne prend aucun recul sur les modes de production dominants dirigés
    par l'agro industrie qui nous empoisonnent et nous rendent carencés (vitamines, nutriments divers etc;) puis malades, ainsi que les terres cultivées
    appauvries. La souveraineté alimentaire est en effet essentielle comme la qualité de la nourriture. L'agriculture bio et locale se révèle être un modele economique performant, il faut la développer, ainsi que les modes culturales respectueuses de l'environnement, reconstruire les filières courtes.

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    1. Est ce seulement possible dans un contexte de concurrence internationale exacerbée ou le prix est la première donnée ?
      On en revient, encore et toujours, au protectionnisme.

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  3. En matière agricole comme en d'autre,il est necessaire de partir d'une vue réaliste de la situation.
    Vous parlez de " l'agro industrie qui nous empoisonnent et nous rendent carencés (vitamines, nutriments divers etc;) puis malades". La France bénéficie pourtant d'une espérance de vie sans précédent et parmi les plus élevées de la planète. Les carences alimentaires n'ont jamais été aussi rares dans la population. l'alimentation industrielle a formidablement réduit le coût relatif de notre alimentation.
    Bien sûr, tout n'est pas parfait. L'opacité du circuit industriel, l'approvisionnement dans des pays où les normes sanitaires sont hors de contrôle, créent des risques nouveaux qui justifient votre vigilance.
    Mais il ne faut pas perdre de vue que l'amélioration de la qualité, et la relocalisation de la production alimentaire, auront un coût considérable, particulièrement lourd pour les plus pauvres.
    Je ne dis pas qu'il ne faut pas le faire... mais que c'est beaucoup plus compliqué que certains semblent le croire.
    Prenons le cas des pesticides, qui représentent un risque avéré pour la biodiversité et la santé humaine. Comment s'en passer ? Imposer des normes sanitaires drastiques aux importations, accepter le prix prohibitif de cultures 100% bio, explorer prudemment la piste des OGM ?

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    1. Je m'inscrit en faux pour le cout considérable pour les plus pauvres c'est plutôt un problème d’éducation voir les caddies des plus pauvres a la sortie des supermarchés plein de pizza surgelée et de plats cuisinés de merde qui coutent effectivement très cher en rapport qualité prix .
      Selon la définition de l’Insee, l’espérance de vie à la naissance est la «durée de vie moyenne d’une génération fictive qui aurait tout au long de son existence les conditions de mortalité par âge de l’année considérée.» En d’autres termes, ce calcul ne prend pas en compte l’évolution des facteurs extérieurs comme la dégradation de l’environnement et n’évalue en aucun cas la qualité de vie probable, ni la durée de vie réelle des individus.

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    2. La situation sanitaire n'est pas aussi bonne que vous croyez. L'espérance de vie a cessé de croitre en France depuis 2 ou 3 ans, comme aux USA, et l'espérance de vie en bonne santé en nette régression. Nous assistons à une explosion de maladies dites de civilisation terrible, que sont les cancers, les diabetes, l'obesite, les maladies cardio-vasculaires, auto-immunes comme les scleroses en plaque, alzheimer, etc

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    3. @ Patrice Lamy
      Vous avez raison.mais cela ne contredit pas mon point. Avec une agriculture bio et relocalisée, les prix des pizzas surgelées augmenteraient fortement. Il faut distinguer la question du coût de la nouvelle agriculture de celle des habitudes alimentaires, que nous ne pourrons malheureusement pas changer d'un coup de baguette magique.

      @ Patrice Albert
      En fait il n'y a qu'en 2012 quel'espérance de vie a plafonné (http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATnon02229). Pour l'espérance de vie en bonne santé, elle stagne (mais ne diminue pas) en France et en général elle augmente (http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=98&ref_id=CMPECF02228).
      Au niveau des maladies, c'est vrai mais cela ne provient pas exclusivement de l'alimentation, ni n'empêche l'amélioration de l'état de santé général.

      Comme je le disais plus haut, pour agir efficacement, il faut au préalable une vue réaliste de la situation, ne pas se laisser emporter par des idées reçues.

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    4. "Prenons le cas des pesticides, qui représentent un risque avéré pour la biodiversité et la santé humaine."

      Est-ce bien sûr ?
      Dans les deux articles suivants, de deux chercheurs en sciences du vivant, on parle d'un facteur de risque pour les agriculteurs, pas pour le public.
      Pour les agriculteurs, cela relève de la prévention professionnelle.

      http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1004

      http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1734

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    5. Le site de M. Corpet :

      http://fcorpet.free.fr/Denis/index.html

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  4. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  5. il me semble important de compléter cet article par quelques points: par exemple puisque l'on parle d'ail,il faut savoir que dans de nombreux pays étrangers on trouve de l'ail qui ne vient pas de France bien sur mais qui est simplement une variété d'oignon....L'apparence n'a rien à voir avec notre ail,et je ne parle pas du gout et des propriétés intrinsèques à l'ail....Et cela n'intéresse personne....(sauf les producteurs français....)
    on peut continuer sur le miel et les fraudes orchestrées par l'Allemagne - on importe du miel de chine, on colle une étiquette "miel de France" et en avant!!! Évidemment, vous vous retrouvez avec du miel fait en partie à partir des fleurs de théiers - le thé - qui n'existent pas en France.....et cela n'intéresse personne.....(sauf les apiculteurs Français ......ou encore sur.....mais j'arrête sinon je vais y passer la journée....

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  6. Il y a tout de même un vrai problème en France de pesticides et de pollutions en Bretagne par les nitrates. La France où les agriculteurs ont la main lourde est championne d'Europe.

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    1. voyez sur le blog 'nitrates et santé'fait par un médecin tous les bienfaits des nitrates et nitrites amenés entr'autres massivement par les légumes voir aussi les positions des pr TUBIANA ou Cabrol sur ce sujet mais chut ce n'est pas politiquement correct

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  7. Il est également extrêmement inquiétant de voir de nombreuses terres agricoles transformées de construction. J'en vois en Seine-et-Marne et je trouve cela grave. La France était l'une des premières puissances agricoles mondiales. Que cherche t-on ? A nous rendre dépendant alimentairement des Etats-Unis ?...

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  8. Rectificatif :
    Il est également extrêmement inquiétant de voir de nombreuses terres agricoles transformées en zones de construction. J'en vois en Seine-et-Marne et je trouve cela grave. La France était l'une des premières puissances agricoles mondiales. Que cherche t-on ? A nous rendre dépendant alimentairement des Etats-Unis ?...

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  9. Ça commence à remuer en Allemagne :

    Der Euro ist nicht Europa. Europa sollten wir retten, nicht den Euro!

    Deutschland kann die Euro-Zone nicht retten. Wer das glaubt, verweigert sich der Realität.

    L'Euro n'est pas l'Europe. Nous devons sauver l'Europe, pas l'Euro ! L'Allemagne

    L'Allemagne ne peut pas sauver l'Euro-Zone. Qui le croit, se refuse à la réalité.

    http://www.welt.de/politik/deutschland/article119104708/Deutschland-kann-die-Euro-Zone-nicht-retten.html

    http://fortune.fdesouche.com/318061-kai-a-konrad-lallemagne-ne-peut-pas-sauver-la-zone-euro

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  10. @ CVT

    On ne va pas reprendre sans cesse le même débat, comme si nous n’en avions pas parlé 100 fois, non ? ;-)

    @ Patrice Albert

    Ce n’est pas du tout l’angle du papier. Ici, je dénonce une libéralisation qui aboutit à des prix trop bas pour les agriculteurs. Cela n’empêche pas du tout que je suis d’accord pour dire qu’il faut assurer une meilleure qualité. D’ailleurs, c’est tout le paradoxe actuel : on impose aux agriculteurs de notre pays des normes de qualité supérieures à celles que nous imposons aux produits que nous importons… L’essentiel, comme vous le dites, c’est la souveraineté, favoriser les filières courtes et respecteuses de l’environnement, ce qui passe par un plus grand cloisonnement de notre marché.

    @ J Halpern

    En même temps, une réorganisation des filières pourrait réduire les coûts quand on voit la différence entre le prix que touche les agriculteurs et le prix de vente pour les consommateurs. Bien d’accord sur les pesticides : il faut réduire leur utilisation (et la supprimer pour tous ceux qui pourraient être dangereux) mais sans laisser les importations rentrer.

    @ Patrice Lamy

    Pas si sûr sur le rapport apport calorique / prix malheureusement.

    @ Anonymes

    Il y a tout de même des pesticides que l’on a fini par supprimer du fait de leur danger il me semble.

    Merci pour les précisions sur l’ail et le miel.

    @ Olaf

    Il faut travailler avec les agriculteurs pour améliorer les choses (en les protégeant aussi de la concurrence déloyale qui les pousse à une telle utilisation).

    Merci pour l’info sur le débat en Allemagne.

    @ JJS

    Très juste. On a l’impression que l’on oublie complètement l’agriculture.

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  11. Commençons par supprimer la PAC.

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