vendredi 21 août 2015

Impôts, travail du dimanche : Hollande parachève son cap libéral




Libéralisme décomplexé

En effet, pour qui prend un peu de recul, les informations des derniers jours ont vraiment de quoi donner le tournis. D’une part, François Hollande annonce une baisse d’impôts pour 2016, sans doute de l’impôt sur le revenu, si on en croit Europe 1, et donc centré sur les classes moyennes supérieures. De l’autre, le projet de décret consécutif à la loi Macron va très loin dans l’extension des zones touristiques internationales à Paris, développant de facto le travail du dimanche. Et parallèlement, des services d’urgence ont été fermés cet été et d’autres ont vu leurs horaires d’ouverture réduits. Enfin, le coût des activités périscolaires prévues dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires, s’envole, jusqu’à 257% à Pézenas, soit 300 euros de plus par an et par enfant, un coût rédibitoire pour certains parents.

En résumé, les cadres devraient payer un peu moins d’impôts l’an prochain et les classes populaires des zones périurbaines déclassées pourraient subir la double peine d’un détricotage du service public par un éloignement des urgences médicales et le renchérissement de l’école publique dont les pratiques tarifaires se rapprochent de plus en plus des entreprises privées, du fait de la baisse des dotations. Et pour couronner le tout, les chômeurs des agglomérations touristiques seront de plus en plus contraints d’abandonner leurs familles le dimanche pour servir les riches touristes étrangers. Sarkozy en rêvait ? Hollande l’a fait ! Il est tout de même effarant que le PS préside à une telle déconstruction du service public et du droit du travail tout en baissant les impôts des entreprises et des classes moyennes.

Quelles conséquences pour 2017 ?

Mais par-delà la stupéfaction que provoque l’addition de ces informations, tout ceci n’est pas surprenant. Il faut se rappeler qu’en 2011, Terra Nova, qui dit tout haut ce que le PS pense tout bas, avait commis un document sur la stratégie électorale de la future majorité, qui dessinait clairement les choix et les discours faits depuis début 2014, à savoir l’abandon complet des classes populaires pour se concentrer sur les classes moyennes et supérieures urbaines, qui seront heureuses de payer un peu moins d’impôts, de pouvoir faire leurs courses le dimanche et pour qui les urgences resteront toujours proches. Ceci complète l’arsenal que le président avait déjà déployé, avec la suppression de la première tranche de l’impôt sur le revenu et les revalorisations du traitement des fonctionnaires.

Bien sûr, certains restent dubitatif sur le conditionnement de cette baisse d’impôts à l’accélération de la croissance, mais le fait que Hollande soit sorti du bois montre bien que les chiffres du second trimestre ne sont pas si mauvais qu’ils le semblent. Plus globalement, il faut veiller à ne pas sous-estimer un homme qui l’a été toute sa vie et qui est arrivé là où il est. Depuis plus d’un an et demi, le président a fait un choix clair et net : celui de se recentrer, autant dans le discours que dans les mesures, ignorant les grognements de son aile gauche, que l’évolution de la situation en Grèce n’aide pas. Ce faisant, il pourrait poser un sacré casse-tête à Sarkozy, puisque Hollande tient même parfois les promesses de son rival, pour le travail du dimanche, ne lui laissant qu’un espace politique bien réduit.

Toutes ces décisions vont dans le mauvais sens. Il serait effarant de baisser l’impôt sur le revenu (au faible rendement et centré sur les classes moyennes supérieures). Il est indigne d’imposer le travail le dimanche (ce à quoi revient la libéralisation en période de chômage de masse) et de poursuivre la déconstruction de notre service public. Pire, cela pourrait servir le candidat Hollande en 2017.

13 commentaires:

  1. @LH

    Je me demande si cette droite hollandienne dont le logiciel de réflexion est l'idéologie du marché total et la validation des instances a-démocratiques de l'UE, ne serait pas la nouvelle ultra-droite du XXIème siècle ?

    Non ?

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  2. En effet. Et de plus Bison futé va se faire charcuter car Google (!!) peut le remplacer.

    De plus, la réforme territoriale voulue par Valls a probablement pour but de rattacher plus de services publics à ces nouvelles régions, c'est à dire à affaiblir le statut de personnels passant de la fonction publique d'Etat à la FPT (et nécessite en tout cas une (nouvelle) refonte de la partie territoriale de la fonction publique d'Etat).

    Le personnel politique a rarement été aussi médiocre que dans ces années 2000...et a rarement fait autant de réformes. Pas étonnant que ce soit de plus en plus le bordel.
    La confrontation d'un système mou (les politiciens français et leur écoeurante démagogie) et d'un système dur (l'UE) ne risque pas de tourner à la faveur des premiers. Plus le temps passe, plus les dégâts seront irréversibles.

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  3. Rassurez moi! Le "programme" se fait bien toujours a Bruxelles et quelque soit l'élu, il est mis en application en catimini! Il n'y a pas de surprise...!

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  4. à lire ce résumé de situation déjà copieux, il me semble qu'on frôle même le délire si on résume un peu et sans tomber dans le piège de l'intox officiel qui ne parle que des dépenses publiques

    1° les recettes sont insuffisantes, parce que trop de chômage, une consommation atone et des prix qui baissent, facteurs de manque de rentrées de TVA (c'est le canard qui le dit, les recettes fiscales ont reculé de 1% au premier semestre)...

    2° des restrictions budgétaires de 50 milliards pour ramener le déficit public dans les critères du marbre de bruxelles mais surtout limiter les dépenses publiques................tout en refilant un supplément de 45 milliards aux groupes privés au titre de la création d'emploi...qui ne se créée pas..)

    3° l'impôt sur le revenu c'est 24 % des recettes publiques, en diminuant les impôts de la frange de population la plus aisée, ça n'apportera absolument rien, puisque cette partie de la population ne consommera pas plus pour autant mais placera le delta des gains de l'impôt en épargne ...

    4° inutile d'évoquer l'emprise du manque à gagner sur le toujours moins d'état, c'est fait sur le billet...

    bref, effectivement on dirait bien que ce gouvernement comme d'autres le ferait d'ailleurs, veuille absolument arriver à ce fameux transfert massif des biens publics dont la grèce fait honteusement l'objet par les privés allemands à prix bradés...
    et veuille continuer à se mettre en position pour que bruxelles continue d'imprimer la dévaluation interne par les salaires et les prestations...pour le plus grand profit des multinationales et des banques

    c'est la forme la plus remarquable de la grande défausse de responsabilité de nos dirigeants, celle qui justifie "le non responsable et non coupable" ou plus clairement "nous n'y sommes pour rien, c'est l'UE qui nous impose ......"


    chacun pense ce qu'il veut de cet énorme foutage de gueule en cours, c'est franchement c'est véritablement une longue série d'insultes à destination de la collectivité et à la démocratie..

    Stan

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  5. Croissance en berne, les entreprises n'investissent donc pas, donc chômage, donc moins d'entrées fiscales et d'impôt sur le revenu, donc plus de dépenses en allocations chômage pour ceux qui y ont encore droit.

    Pépère Floumou va de plus se faire taper sévèrement sur les doigts par pépère tape dur Schäuble et ses potes finlandais, hollandais, espagnols, lettons... Il est pas sorti de l'auberge le gars de l'Elysée.

    Le feuilleton continue, mais je me demande pendant encore combien de temps Hollandou va réussir à passer entre les gouttes d'eau du Panzer-Kärcher haute pression de Berlin ?

    Dallas
    Ton univers impitoyable
    Dallas
    Glorifie la loi du plus fort
    Dallas...

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  6. @ 1984

    Ultra-droite, c’est sans doute un peu exagéré. Hollande n’est pas Thatcher ou Reagan, il agit de manière plus progressive (le CICE, puis le Pacte de compétitivité)

    @ Stan

    Et encore, 24% des recettes du budget national, soit une proportion bien plus faible des recettes publiques (qui prennent en compte la Sécurité sociale, les recettes locales). Le problème, c’est que ces évolutions sont lentes et que l’histoire globale que nous nous racontons créé une forme de fatalité à leur sujet

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  7. Vous devriez aussi vous interroger sur pourquoi les retraites en France sont si alambiquées, malgré la volonté impuissante du CNR de les rendre plus équitables et simples :

    http://www.eric-verhaeghe.fr/retraites-publiques-et-noblesse-detat/

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    1. Il y aurait beaucoup à dire sur cet article. Sans être exhaustif :

      -il n'y a que 2 caisses de retraites publiques, et elles ont toujours été en excédent : la CNRACL et l'IRCANTEC. Chaque année elles sont sauvagement ponctionnées par l’État pour renflouer des caisses privées déficitaires, à tel point qu'une année la CNRACL s'est retrouvée en déficit, et donc obligée d'emprunter et payer des intérêts à cause de cela,

      -le taux de remplacement est globalement identique dans le privé et le public, il n'y a donc plus aucun avantage pour les fonctionnaires, le prétendu privilège a disparu alors qu'il n'en était pas un vu que l’État a utilisé pendant des années l'espoir d'une retraite moins misérable pour attirer les meilleurs candidats aux concours de recrutement, en dépit des salaires misérables, et ensuite les poignarder dans le dos,
      -les principaux paramètres sont maintenant alignés sur le privé (ce que ne dit pas l'article), alors que les traitements sont restés aussi misérables,
      -le niveau élevé des retraites d’État s'explique par le fait que l’État emploie surtout des cadres supérieurs (enseignants) Les retraites CNRACL et IRCANTEC sont beaucoup plus modestes,

      Ivan

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  8. @LH,

    "il agit de manière plus progressive"

    Pensez-vous , malgré cette progressivité, qu'il peut-être raisonnable de voter pour lui en 2017 ?

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  9. Pour la revalorisation des fonctionnaires j'attends de voir mais je ne me fais guère d'illusion, sachant que la valeur du point d'indice est gelée depuis 2010, et qu'elle ne suivait plus l'inflation depuis beaucoup plus longtemps encore.

    Ce n'est pas une revalorisation électorale tardive et incomplète qui empêchera la gauche de perdre les fonctionnaires comme elle a perdu les ouvriers, et pour les mêmes raisons.

    Ivan

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  10. @ Anonyme

    La simplification (du moment que cela ne pénalise pas la justice) sera cruciale

    @ Ivan

    Merci pour la réponse. Pas si sûr s’il parvient à donner un peu après une longue disette

    @ 1984

    Non, sauf s’il y a pire que lui en face

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  11. @LH,

    "Non, sauf s’il y a pire que lui en face"

    Que contient ce pire ? Entre un candidat républicain-souverainiste et Hollande, vous préférez Hollande ?

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  12. @ 1984

    Contre des identitaires nationalistes démagogues, amateurs et aux racines extrémistes, sans doute.

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