vendredi 25 novembre 2016

Ultralibéralisme arrogant ou fataliste ?




Quand la forme l’emporte sur le fond

Bien sûr, il y a des différences entre les deux candidats. François Fillon, tournant complètement le dos à son passé séguiniste, semble vouloir être le Thatcher français en dépassant son rival par la droite, sur le nombre de postes de fonctionnaires à supprimer, sur la libéralisation du marché du travail, ou la déconstruction de notre assurance-maladie. Mais même si Juppé a bien cherché à mettre en avant ce qui le sépare de son adversaire, souvent, les nuances étaient si dérisoires et techniques qu’elles pouvaient un peu perdre les téléspectateurs. Ce faisant, ce débat a surtout montré la très grande proximité des propositions des deux finalistes, qui ne proposent que des nuances d’ultralibéralisme.

Tout le paradoxe, c’est que les deux finalistes des primaires de la droite proposent davantage une rupture avec la politique que leur camp avait menée de 2002 à 2012 qu’avec la politique de l’emploi menée par la majorité sortante, qu’en réalité, il propose d’amplifier sur le coût et le droit du travail. Bien sûr, ils proposent d’amplifier la politique de suppression de postes de fonctionnaires menée de 2007 à 2012. Mais ce faisant, les deux finalistes proposent un mégamix de politiques de l’offre qui ont échoué, alors que même le FMI et la BCE sont revenus des politiques austéritaires que les deux proposent (100 milliards de baisse de dépenses publiques) et que la course à la compétitivité risque de durer longtemps sachant que l’UE abrite des pays dont le SMIC est égal à un dizième du nôtre. Impasse partout !

Sur la forme, Juppé a modéré ses attaques mesquines et de mauvaise foi du début de la semaine, qui avaient animées l’après premier tour, entre demande de clarification de Fillon sur l’avortement, alors qu’il a toujours été clair, Juppé déplaçant le débat sur l’utilisation d’un terme légal pour entretenir le doute, ou osant l’interroger sur des soutiens ne faisant pas partie de son équipe, alors que lui, a recruté le très réactionnaire Hervé Mariton. Tout au long du débat, Juppé est apparu comme très hautain et arrogant, faisant ressortir la plus grande humilité de son adversaire, qui l’a bien remis à sa place quand le premier lui a demandé de dénoncer les attaques de Riposte Laïque en lui faisant remarquer qu’il n’en était – logiquement - pas proche, et qu’il ne lui demandait pas de condamner les attaques qui le visent.


Bien sûr, Fillon va encore plus loin que Juppé dans l’impasse ultralibérale mais il s’agit d’une différence dans la même logique. Du coup, la seule certitude, c’est que le candidat des Républicains proposera la politique que l’UE recommande depuis 2010 : austérité et coupes dans le service public, démantèlement du droit du travail et baisse de son prix. En somme, une amplification de la politique qui échoue depuis 2012.

7 commentaires:

  1. C'est quoi un libéralisme pas ultra à vos yeux ? Dans la panorama actuel, qui l'incarne ce libéralisme tout court ? Est-il souhaitable ou non ?

    Merci

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  2. @LH,

    Juppé est Terra Nova compatible, Fillon non. C'est le point de divergence qui détermine que l'un est qualifié l'autre non. Le point central pour l'électorat est moins l'économie que l'identité. L'identité heureuse est une formule qui n'a convaincu personne.

    L'économie n'est bien évidemment pas le premier critère des électeurs aujourd'hui, ce qui ne veut pas dire que cela ne compte pas. L'économie est un critère qui vient en second lieu par rapport à l'identité dans la France de 2016.

    Voilà ce que révèlent ces primaires, soit ce décalage total entre le monde "journalistico"-politico-"artistique" et la population.

    Un demi-siècle d'idéologie 1968 s'achève et il semble que bien peu sont ceux qui regrettent cela au sein de la population.

    Cordialement.

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  3. Je prévois une victoire de Juppé, sur le fil. Pour les mêmes raisons que celles qui ont porté Fillon en tête du premier tour : vote contre.

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  4. @ Anonyme

    Le libéralisme tout court ? Le PS maintenant. Et encore, souvent sans ses aspects positifs.

    @ 1984

    C’est juste, l’économie compte sans doute beaucoup moins aujourd’hui, comme je le craignais. Le risque, c’est une vague thatchérienne l’an prochain

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    1. @LH,

      C'est à mon sens une bonne chose que nous nous détachions dans l'espace politique des grilles de lecture de l'économie et du discours économique en général pour interroger les pouvoirs au sein de notre société selon des outils moins marqués idéologiquement.

      Ne doit-on pas être d'accord avec Aristote lorsqu'il écrit :

      "Or, puisque cette science est l'objet de nos recherches, nous allons avoir à examiner de quelles causes et de quels principes la philosophie est la science ; question qui s'éclaircira bien mieux si l'on examine les diverses idées que nous nous formons du philosophe. Et d'abord nous concevons le philosophe, surtout comme connaissant l'ensemble des choses, autant que cela est possible, mais sans avoir la science de chaque chose en particulier. Ensuite, celui qui peut arriver à la connaissance de choses ardues, et que l'homme ne connaît qu'avec de grandes difficultés, ne le nommons-nous pas philosophe ? En effet, connaître par les sens est une faculté commune à tous ; cette connaissance, acquise sans effort, n'a donc rien de philosophique."

      "Enfin, celui qui a les notions les plus rigoureuses des causes, et qui enseigne le mieux ces notions, celui-là est plus philosophe que tous les autres sur toute science. Et, parmi les sciences, celle à laquelle on s'applique pour elle-même, et dans le seul but de savoir, est plus philosophie que celle qu'on étudie à cause de ses résultats ; et celle qui domine les autres est plus philosophie que celle qui est subordonnée à quelque autre. Il ne faut pas que le philosophe reçoive des lois, mais qu'il donne des lois ; il ne faut pas qu'il obéisse à un autre, c'est à celui qui est moins philosophe à lui obéir."

      "Telles sont en somme nos diverses manières de concevoir la philosophie et les philosophes : or, le philosophe qui possède parfaitement la science du général a nécessairement la science de toutes choses, car un tel homme sait en quelque sorte tout ce qui se trouve compris sous le général. Mais on peut dire aussi qu'il est très difficile pour les hommes d'arriver aux connaissances les plus générales ; en effet, leurs objets sont bien plus loin de la portée des sens." (Métaphysique - Livre 1)

      Non ?

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  5. je dirais même plus ultra ultra ultra ultra ultra ultra ultra ultra ultra ultra liberalisme

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