samedi 12 octobre 2019

Recomposition – Le populisme comme nouvelle force politique (2/4) (billet invité)


Billet invité de Marc Rameaux, qui a publié « Portrait de l’homme moderne », suite de la 1ère partie

Le populisme de gauche : entre le Charybde de la trahison et le Scylla de l’indigénisme :
Alexandre Devecchio consacre un chapitre au populisme de gauche : si la plupart des populistes sont placés à droite de l’échiquier politique, la thématique d’un retour aux réalités du peuple contre des élites déconnectées et ignorantes, la redécouverte du patriotisme, la protection contre des influences supra-nationales, se retrouvent dans les discours de Podemos en Espagne, Syriza en Grèce, Jean-Luc Mélenchon en France, ainsi que dans plusieurs pays d’Amérique latine.
Le responsable du Figaro Vox traite de ce sujet sur le ton de l’humour et de l’ironie, saillies qui se révèlent amplement méritées.
Le populisme de gauche a pour l’instant toujours échoué, fracassé sur deux écueils opposés, véritables Charybde et Scylla empêchant son émergence.
Soit il trahit son objectif d’origine, comme le firent Podemos et surtout Syriza, et se rallient dans ce cas au discours mondialiste d’autant plus violemment qu’ils s’y sont opposés, allant jusqu’à l’excès de zèle caractérisé.
Soit il s’enferre dans une autre impasse, celle du discours indigéniste et communautariste, abusant d’une victimisation de certaines minorités qui dégénère en racisme inversé, tout ce qui est blanc, occidental et traditionnel devenant l’ennemi à abattre. C’est la mésaventure que vit aujourd’hui la France Insoumise, déchirée entre son aile républicaine maintenant minoritaire et des activistes indigénistes qui ont préempté le mouvement.
Une telle récupération fait des populismes de gauche l’allié des islamistes, tenant un discours plaintif en superficie, menant une stratégie d’infiltration et de noyautage de toutes les institutions républicaines avec une très inquiétante efficacité.
Alexandre Devecchio est d’autant plus à l’aise pour dénoncer cette supercherie que son précédent livre démonte très bien les mécanismes pervers des institutions censées représenter les musulmans de France, presque toutes récupérées par la mouvance Frériste.
Ceux qui dénoncent de tels agissements avec le plus de lucidité sont souvent d’ardents républicains issus de l’immigration nord-africaine, ayant vu les dégâts commis par le FIS en Algérie et leur extrême habileté à s’emparer de tous les leviers gouvernementaux. Boulem Sansal ou Fatiha Boudjahlat sont deux personnalités emblématiques de cette réaction républicaine, pointant avec beaucoup de justesse notre naïveté et notre manque de fermeté vis-à-vis d’une évidente stratégie de conquête du pouvoir par les Frères Musulmans en France.
Faute d’écouter ces alertes, beaucoup de populistes de gauche laissent leur mouvement se faire phagocyter par les indigénistes, mélangeant allégrement les défenses antinomiques de toutes les minorités, par exemple l’activisme féministe et gay avec le communautarisme musulman. Impossible de leur faire remarquer que l’espérance de vie d’une féministe ou d’un homosexuel dans un pays dominé par des indigénistes musulmans serait de quelques jours, la gauche communautariste n’en est pas à une contradiction près.
Cette double impasse semble d’autant plus étonnante qu’une aile gauche du populisme pourrait très bien se frayer un large espace politique, si elle se montrait intraitable sur la défense des principes républicains. La tentative de Jean-Pierre Chevènement avec le Mouvement des Citoyens ou sa continuation spirituelle par un Arnaud Montebourg indique un chemin beaucoup plus prometteur, souverainiste et républicain, mais demeure curieusement en déshérence.
Alexandre Devecchio dresse un constat sévère des tentatives de populisme de gauche, volée de bois vert méritée pour ceux qui n’ont rien su produire d’autre qu’un reniement au carré ou une démagogie communautariste faite d’un mélange de lâcheté et de clientélisme.

De la Tea-Party à l’indépendance Américaine : un pied-de-nez aux mondialistes quant au fer de lance de la société ouverte
Dans le chapitre suivant, l’anecdote déjà mentionnée concernant Steve Bannon et l’histoire de son père s’inscrit dans un mouvement politique américain de grande ampleur : le phénomène du « Tea Party », avant-garde d’une droite populaire aux Etats-Unis qui préparait l’avènement de Trump.
Alexandre Devecchio rappelle l’origine historique du mouvement, inscrite dans son nom lui-même. La « Boston Tea Party » était une révolte menée par des négociants en thé Bostoniens en 1773 contre le Parlement Britannique, soit trois ans avant la déclaration d’indépendance des Etats-Unis d’Amérique.
La protestation est née des taxations abusives sur le thé décidées par l’Angleterre contre ce qui n’était pour elle qu’un agglomérat de 13 colonies. Tandis que le thé américain était lourdement imposé, celui de la compagnie des Indes ne subissait aucun impôt. Les négociants bostoniens menèrent une révolte consistant à jeter par-dessus bord la cargaison de trois navires anglais de la compagnie des Indes.
Affirmation d’une indépendance naissante, colère populaire allant jusqu’à l’action musclée, protestation contre un pouvoir lointain et ignorant de leur vie locale, déclenchement par un impôt abusif : la Boston Tea Party a plus d’un point commun avec la révolte des gilets jaunes.
Certains crurent d’ailleurs que le mouvement français pouvait être le démarrage d’un mouvement à la fois libéral, populiste et conservateur, car provenant d’un abus fiscal évident. Mais nous sommes en France, et les gilets jaunes furent rapidement récupérés par des mouvances très à gauche, réclamant des subventions plus qu’une baisse généralisée des taxes.
Aux Etats-Unis, cette aile droite du parti Républicain gagna en influence et en résultats électoraux, culminant avec des personnalités telles que Sarah Palin, dont le style simple et gouailleur aurait dû alerter sur la possibilité d’une victoire de Trump quelques années plus tard.
Si l’actuel président des Etats-Unis n’est pas entièrement l’héritier du Tea Party - ce dernier incluant un fort puritanisme religieux cadrant mal avec les frasques extra-conjugales de Trump - la demande d’un retour aux valeurs profondes de l’Amérique et la proximité avec les classes modestes préfiguraient déjà l’impensable victoire.
Tous ceux qui veulent prendre la peine de comprendre le mouvement populiste dans tous les points du globe doivent se rappeler que sa matrice historique est la révolte d’hommes réclamant leur indépendance et l’affranchissement d’un pouvoir perçu comme éloigné et arbitraire.
Il faut se souvenir que ce mouvement est la mèche qui allumera trois ans plus tard la naissance des Etats-Unis d’Amérique, considérés longtemps comme le fer de lance de la société ouverte par les mondialistes : un joli pied-de-nez historique rappelé par Alexandre Devecchio, montrant que la défense des libertés doit se garder de tout manichéisme.

Populisme 2.0 : comment les modernes se sont retrouvés archaïques
Le populisme s’appuie également sur la désintermédiation, note Devecchio. Tous ont pu vaincre électoralement en rompant avec les relais politiques traditionnels et avec les corps intermédiaires : syndicats, pouvoirs politiques locaux, media officiels. Ils sont devenus pour cette raison maîtres de la digitalisation, de l’emploi massif des réseaux sociaux et de leur forme de démocratie directe.
Là encore, l’histoire réelle se venge de ceux qui ont cru forcer sa direction : les outils considérés comme emblématiques de la mondialisation et du progressisme sont devenus le meilleur terrain de ceux qui les contestent. Au point que les réseaux sociaux qui faisaient partie au départ du tableau lénifiant et kitsch de la mondialisation heureuse sont maintenant inclus dans la diabolisation du populisme.
Les réseaux sociaux ont à ce titre joué le rôle de révélateur des véritables intentions des mondialistes : ces derniers sont visiblement beaucoup plus attachés à établir un monopole absolu de droit à penser et à publier qu’à défendre une véritable pluralité d’opinions.
La désintermédiation se révèle être une tendance lourde du monde politique futur, que cela nous plaise ou non. Devecchio fait remarquer qu’Emmanuel Macron comme Barack Obama y ont tout autant fait appel que les populistes, captant la popularité d’un affranchissement des circuits politiques officiels. LREM a beaucoup insisté lors de sa campagne sur sa nature « anti-système », revendiquée tout autant que le font les populistes.
L’émergence des réseaux sociaux dans le débat politique est riche d’enseignement sur la nature du mondialisme. La « modernité » du mondialisme peut être comparée à celle que les hyper-marchés présentaient dans les années 1970 : à cette époque, les immenses surfaces commerciales donnant dans le gigantisme représentaient le parangon de la modernité, les petits commerces étant l’archaïsme voué à disparaître. Les hyper-marchés étaient une sorte de concrétisation du rêve mondialiste : temples du consumérisme, l’on y trouvait de tout, l’accès en était totalement fluide, cumulaient les produits de toutes origines. L’ère de la consommation de masse devait s’imposer invinciblement comme les rêves de Francis Fukuyama.
Mais rapidement, une demande de commerces de proximité, de relations fondées sur la réputation et la connaissance locale, d’échanges incluant un sentiment d’appartenance, revinrent en force. Aujourd’hui, rien de plus ringard que les hyper-surfaces commerciales. L’ancienne culture des commerces cultivant une forte identité locale redevient la tendance future.
La mondialisation ressemble aux hyper-marchés de masse : impeccables dans leur principe de fonctionnement, mais froids, indifférenciés, de taille inhumaine : l’hyper-globalisation mène aussi à la standardisation de masse, à un monde où rien de saillant n’émerge. L’émergence des populismes est comparable à la revanche des commerces locaux de forte identité qui relèguent les hyper-marchés dans l’archaïsme.
La résonnance entre populisme et outils du web s’explique très bien de cette façon. Un contresens fait de l’internet un média de masse, comme le furent la radio, la télé ou les journaux à grands tirages. Or le web est précisément l’inverse d’un média de masse : il est plutôt la réalisation de la culture des fanzines, ces publications locales de la contre-culture des années 1970, qui restaient confidentielles, car de tirage artisanal.
Réalisant le rêve des fanzines, les moyens modernes permettent à un simple particulier de disposer de moyens éditoriaux et de diffusion aussi puissants que ceux de la grande presse. Les blogueurs d’influence peuvent bénéficier d’une audience comparable voire supérieure à celle des journaux nationaux. Le web propose une information totalement individualisée et personnalisée, à la carte, que chacun se compose, c’est-à-dire l’inverse exact d’une information de masse diffusée similairement à des millions de personnes en même temps.
Le succès du populisme sur le Web ne réside que marginalement dans les usages pervertis qui en sont faits, mais beaucoup plus dans une affirmation de fierté et d’indépendance permettant la pluralité, a contrario de la standardisation obligatoire de l’information voulue par le mondialisme.

23 commentaires:

  1. L'UNC a été sollicitée pour rejoindre le CNSJS ou Collectif National pour la Souveraineté et la Justice Sociale où cette organisation notamment pourrait prendre part à l'action publique demandant un Référendum d'Initiative Participative ou RIP contre la privatisation d'ADP.

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  2. "Le populisme de gauche a pour l’instant toujours échoué"
    Et le populisme de droite ? Où a-t-il réussi ?

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    1. Viktor Orbán a gouverné la Hongrie de 1998 à 2002 et de 2010 à nos jours. Il lui a donné une nouvelle constitution et le pays a connu une croissance insolente durant une large part de cette période. Aux dernières élections européennes, son parti a rassemblé 52,3% des suffrages, soit 35 points de plus que l'opposition de centre-gauche. Celle-ci est à ce point affaiblie face à Orban et ses partisans qu'elle en est réduite à s'allier localement à l'extrême-droite (comme à Budapest pour les municipales), pour espérer l'emporter. On peut trouver le personnage et sa politique antipathiques (même un défenseur des populismes européens peut être choqué par son népotisme décomplexé), mais à moins de considérer la réprobation impuissante de certains membres de l'UE comme un échec personnel, cela ressemble fort pour l'heure à un succès.

      YPB

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    2. Jacques Sapir vient d'ailleurs de commenter le livre d’Alexandre Devecchio dans des termes parfois assez critiques : https://www.les-crises.fr/russeurope-en-exil-recomposition-les-ambivalences-dune-lecture-des-mouvements-populistes-dalexandre-devecchio-par-jacques-sapir/

      J. Sapir reproche à À. Devecchio de méconnaître la dimension fondamentalement institutionnelle de la construction du peuple et, de ce fait, de ne reconnaître comme pertinents que les populismes de droite, fondés sur l'illusion d'une construction "naturelle" de la communauté nationale (elle n'apparaît en fait comme telle que du fait de l'étalement historique du processus de construction). Il pose ensuite la question de savoir quelles sont les institutions qui travaillent aujourd'hui à la construction de la notion de peuple :

      "Ce sont, essentiellement, les institutions qui sont liées à la souveraineté et sans lesquelles il ne peut y avoir de démocratie. Devecchio aurait gagné à réfléchir à ce qu’impliquait sa proposition selon laquelle il y a dans ce mouvement populiste une profonde aspiration à la démocratie. Cette proposition, qui est juste, implique en réalité que la question de la souveraineté est aujourd’hui centrale pour qu’un mouvement populiste puisse gagner l’hégémonie nécessaire à sa victoire. De fait, ce que nous vivons n’est qu’en apparence un moment populiste ; en réalité, il s’agit d’un moment souverainiste. Toutes les forces qui veulent se couvrir du manteau du populisme et qui oublient cela sont condamnées à la stagnation et à la régression, qu’il s’agisse de la France Insoumise ou du Rassemblement National".

      YPB

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    3. @YPB

      La croissance de la Hongrie est liée au fait qu’il s’agit d’un pays émergent en phase de rattrapage et qu’elle n’a pas le boulet de l’euro à supporter.

      Lorsque l’on parle de l’échec des populismes de gauche en évoquant Syriza, Podemos ou LFI, il convient de comparer avec des populismes de droite dans des pays de la zone euro. Et là, on ne peut pas dire que le populisme du RN ou celui de la Ligue en Italie, soient des succès.

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    4. @ "Moi" - 13 Octobre - 7:59

      C'est simple, regardez le groupe de Visegrad (Hongrie, Pologne, République Tchèque, Slovaquie) ainsi que l'Autriche de Sebastian Kurz : 5 pays dirigés par des populistes conservateurs collectionnant les succès économiques et électoraux.

      La recette économique est similaire aux 5 : souverainisme compétitif, permettant de se différencier positivement sur le marché, acceptant l'ouverture à la concurrence mais seulement à condition que les fleurons nationaux conservent ce qui leur confère un avantage :

      Main d'oeuvre qualifiée et intégrée à la culture du pays, protection des savoirs et savoir-faire clés, préservation des secteurs stratégiques.

      L'inverse de la Troïka, qui oblige à des ouvertures et dérégulations tous azimuts, nivelant les avantages concurrentiels par le bas et détruisant les filières industrielles et de services.

      Le groupe de Visegrad et l'Autriche forment une puissance d'Europe Centrale actuellement seule capable de contrebalancer le modèle allemand et de lui tenir tête politiquement.

      Bien entendu, on peut avoir des réserves sur Orban ou Morawiecki. Le livre d'Alexandre Devecchio n'est pas un panégyrique des populismes mais une démonstration du fait qu'ils sont une force politique maintenant incontournables, dans ses meilleurs aspects comme dans ses pires.

      Les ostraciser est non seulement irréaliste sur le plan des rapports de force politiques mais anti-démocratique vis-à-vis des problèmes qu'ils soulèvent, que l'on apprécie ou non leurs remèdes.

      @ YPB : Merci pour la référence à Orban. Concernant la critique de Jacques Sapir, j'ai un peu de mal à la comprendre (je suis pourtant souvent en accord avec lui).

      A. Devecchio insiste sur la forte dimension souverainiste de ces mouvements, excepté à gauche parce qu'ils ne peuvent l'assumer jusqu'au bout et échouent précisément pour cela.

      Il n'y a pas de "parti pris de droite" chez A. Devecchio, celui-ci ayant souvent fait l'éloge de mouvement ou personnes étiquetées à gauche à partir du moment où elles soutenaient un souverainisme assumé, à commencer par les héritiers de JP Chevènement tels que Natacha Polony.

      Je ne m'interdis pas non plus une critique de "Recomposition", comme vous le découvrirez dans la quatrième partie.

      Marc.

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    5. @ Marc Rameaux,

      Il n’y a pas de souverainisme possible au sein de l’UE et encore moins au sein de la zone euro.

      L’Autriche n’est pas un pays souverainiste puisqu’il n’est pas maître de sa monnaie, de son commerce, ni même de ses frontières.

      La première chose que ferait un gouvernement souverainiste, ce serait de quitter l’UE comme l’ont décidé les Britanniques.

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    6. "Il n’y a pas de souverainisme possible au sein de l’UE et encore moins au sein de la zone euro." : Je suis bien d'accord !

      Il y a tout de même des degrés d'asservissement, et l'Autriche me semble plus dans la direction de s'en débarrasser que la France.

      Un bloc souverainiste constitué du groupe de Visegrad, de l'Autriche, de la France si elle place un souverainiste à sa tête et enfin de l'Italie lorsqu'elle aura chassé le gouvernement fantoche actuel aurait un poids suffisant pour mettre fin à l'UE en en sortant immédiatement et sans compensation.

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    7. @Moi

      Il est encore un peu tôt pour affirmer que le populisme de la ligue est en échec, me semble-t-il. Et je n'explique pas la croissance hongroise ou polonaise par le seul effet du populisme au pouvoir. Vous avez raison bien sûr de rappeler le rôle de l'euro. Mais persister à demeurer hors de l'euro, en dépit d'appels du pied pressants (discours de septembre 2017 de Juncker par exemple), est aussi un choix politique dont on voit mal pourquoi on devrait refuser d'en créditer les majorités populistes.

      @Marc Rameaux

      Merci de votre réponse. J'attends la suite de votre billet avec impatience. Sapir semble reprocher à Devecchio, peut-être injustement (je n'ai pas lu le livre de Devecchio et n'ai donc pas d'opinion sur ce point particulier), de ne voir d'authentique populisme qu'à droite. Il le fait en termes parfois assez virulents, ce qui est son style polémique habituel. Mais je ne suis pas sûr qu'il s'agisse là du cœur de sa critique, ce qu'il indique assez clairement, si je l'ai compris du moins, par une référence approfondie à l'histoire romaine (les sécessions de la plèbe et leurs conséquences institutionnelles). Ce détour historique lui permet de rappeler que l'imaginaire politique de droite tend à marginaliser le rôle des luttes sociales dans le mode de formation d'institutions qui sont à l'origine de la culture politique commune qui permet de se penser comme peuple. C'est aussi pour lui le moyen de manifester son scepticisme quant à la possibilité de recompositions politiques susceptibles de rétablir la souveraineté du peuple sans établissement de nouveaux rapports de force sociaux, par le simple biais d'un réformisme qui prendrait la forme d'un "accommodement raisonnable" des populistes conservateurs avec les élites.

      YPB

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    8. @Marc Rameaux,

      Non, il n’y a pas de degrés. On est souverain ou pas. Et si l’on compte sur d’autres pays, c’est qu’on ne l’est pas.

      Au sein de la zone euro, il y a des pays qui s’en sortent mieux que d’autres, ça ne veut pas dire qu’ils sont souverains.

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    9. Merci pour la qualité de votre débat et permettez moi de vous poser une question sur la croissance économique des pays de Visegrad plus Autriche. Est ce qu'elle bien répartie en les citoyens et entre les territoires ? Et est ce qu"elle ne risque pas d'avoir un effet boomerang si l'économie se grippe un peu ?

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    10. Ces pays souverainistes s'accommodent plutôt bien des règles dans la mesure où ils n'ont pas adopté le carcan dénommé euro.

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  3. @YPB : Merci, je comprends mieux ce qui semble constituer la critique de Jacques Sapir. Le rôle des luttes sociales et leur capacité à transformer l'exécutif par des institutions qui concrétisent leur légitimité ne me semble pas occulté par A. Devecchio : s'il pointe l'échec des populismes de gauche, il ne s'en réjouit pas. Et plus d'une fois, il souligne que même dans les populismes de droite, une "lutte des classes" est bien à l'oeuvre.

    En revanche "l'accommodement raisonnable" est effectivement sa conclusion - et l'objet de ma critique, ainsi que celle de Sapir - mais ce dernier l'attribue à des intentions qu'à mon avis Alexandre Devecchio n'a pas.

    L'ultime tentative de conciliation me paraît motivée par la volonté compréhensible de ne pas tout casser. Mais je suis plus pessimiste que lui quant au niveau de dégradation de l'"élite" : il n'y a pour moi plus rien à attendre d'eux.

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  4. Merci aux intervenants pour cette discussion de haut niveau, très instructive. Sans troll, c'est quand même mieux!

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  5. @YPB,

    Sans doute est-il prématuré de parler d’échec de la Ligue, mais n’est-il pas prématuré également de parler de l’échec définitif du populisme de gauche ?

    Les raisons de ces échecs sont différentes selon les cas. Syriza a échoué parce que Tsipras n’était pas prêt à une sortie de la Grèce de l’euro, ce qui l’a conduit à capituler face à la Troïka. N’est-ce pas vrai aussi de la Ligue et du RN qui ont supprimé de leur programme une sortie de l’euro ? Sur ce point, je ne vois pas de différences entre le populisme de droite et celui de gauche.

    Dans le cas de LFI, il y a eu un changement de ligne de la part de Mélenchon. En 2017, il avait abandonné le clivage droite/gauche au profit du clivage Oligarchie/peuple. Puis il est revenu aux errements anciens de la gauche. Cette évolution était-elle inéluctable ? Certains, tel Djordje Kuzmanovic, ne le pensent pas et se réclament toujours d’un populisme de gauche authentique.

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    1. Je suis d'accord avec vos remarques. La différence entre le populisme de droite et celui de gauche est cependant que le premier ne souffre pas, sur de nombreux points, des mêmes blocages idéologiques fondamentaux qui surdéterminent le positionnement d'une large frange de la gauche populiste. Pour l'instant, ceux qui n'ont pas ces préventions (Kuzmanovic, Cocq...) y restent encore minoritaires.

      YPB

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    2. @YPB

      Mais le blocage le plus puissant, c’est celui d’assumer une rupture avec l’UE. On voit à quel point c’est difficile même pour le RU qui n’est pourtant que peu intégré à l’UE.

      Après, les différences entre le populisme de gauche et de droite, elles sont plus dans les postures que dans la réalité, puisqu'aucun des deux n’est prêt à aller jusqu’à la rupture avec l’UE.

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    3. "Mais le blocage le plus puissant, c’est celui d’assumer une rupture avec l’UE"

      C'est peut-être moins un blocage qu'une manifestation assez paradoxale et ironique du "pragmatisme" des populistes : si les électeurs restent après tout majoritairement favorables au maintien dans l'UE, pourquoi les contredire ?

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    4. @Anonyme14 octobre 2019 à 19:54
      Dans le cas du Royaume-Uni, on voit bien que ce ne sont pas les électeurs qui veulent le maintien dans l'UE mais la classe politique.

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    5. Certes. Et dans les autres cas ?

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    6. En 2005 les français et les hollandais ont voté non au TCE. Ce sont les classes politiques françaises et hollandaises qui ont signé le traité de Lisbonne contre la volonté des électeurs.

      Ivan

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  6. Si le gouvernement polonais a pu gagner les élections législatives dimanche dernier comme le Hongrois il ya quelques mois, en revanche le parti d'Orban vient de perdre le contrôle de la capitale. Ce sont des souverainistes de type identitaire dans la mesure où ils n'ont pas adopté l'euro et les contraintes y afférentes.

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    1. https://www.lemonde.fr/international/article/2019/10/14/municipales-en-hongrie-la-strategie-d-unite-de-l-opposition-lui-permet-de-ravir-budapest-a-orban_6015363_3210.html

      "La formation Fidesz a perdu dans la capitale face à une coalition rassemblant la gauche et l’extrême droite".

      C'est sûr, dans ces conditions, battre les méchants populistes souverainistes identitaires réacs devient relativement aisé...

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