dimanche 27 avril 2025

Sur la route des vacances, tout est politique

Ces derniers jours, un déplacement vacancier m’a amené à faire un long trajet, comme je le fais régulièrement depuis plus de 20 ans. En plus de 800 kilomètres de trajet, quand on s’intéresse à la vie publique, il est frappant de constater comment bien des travers de notre vie politique prennent vie sur un simple trajet en voiture. Prix de l’essence, trajets recommandés, limitations de vitesse le démontrent bien.


 

Recul des services publics et arbitraire omniprésent

 

C’est juste l’histoire d’un père de famille qui descend dans le Sud pour une semaine de vacances en famille. Mais le simple trajet de vacances est une démonstration éclatante de tout ce que la privatisation de l’espace public apporte d’arbitraire, ou de quête de profits totalement délirante. Avant de partir, j’ai fait le plein de SP95, à 1,52 euro le litre. Naturellement, les prix sur l’autoroute étaient plus élevés, variant de 1,69 à 2,09 euros le litre : de 11 à 37,5% plus cher ! Bien sûr, les tarifs sont en général annoncés assez longtemps en avance, avec un comparatif sur plusieurs stations, mais il faut avoir la capacité d’attention au moment donné, et bien anticiper, pour ne pas se faire avoir par une stations-service qui vend l’essence comme de l’or noir, 23% plus cher que la mieux disant tarifaire. Et hors taxe, la différence est plus forte… Il ne me semble pas que les prix variaient autant il y a vingt ans, et de loin, même s’il y avait des écarts.

 

Bien évidement, la privatisation des autoroutes joue sans doute un rôle. Plus globalement, si les autoroutes étaient restées publiques, l’État aurait pu imposer aux différentes concessions des stations des limites dans le niveau des prix, qui atteignent des niveaux franchement indécents aujourd’hui. Plus globalement, c’est toute la rente des autoroutes qui est révoltante. Il y a déjà 10 ans, je pointais alors la marge opérationnelle délirante des concessions : 39,4% contre 4,2% pour les contrats classiques dans le cas de Vinci. Dix ans plus tard, la marge de Vinci est restée stable dans la construction, à 4,1%, mais en revanche, celle des autoroutes a bondi à 49,6%... Pour un euro de péage, la moitié est du profit. Les dirigeants politiques qui ont décidé de la vente des autoroutes et de leurs modalités d’exploitation devraient porter les stigmates de ces choix de manière beaucoup plus visible : c’est un véritable scandale d’État.

 

Pour couronner le tout, Vinci et compagnie ont automatisé la quasi-totalité des péages, détruisant un nombre colossal d’emplois, alors que des millions de Français cherchent un travail, contribuant à gonfler le nombre de chômeurs, derrière les magouilles statistiques de nos gouvernements. Bref, l’intérêt général est perdant à tous les niveaux avec la privatisation des autoroutes. Il n’est pas inintéressant de noter que les comptes de Vinci révèlent que les concessions aéroportuaires sont tout aussi rentables que les concessions autoroutières, avec un résultat opérationnel qui passe le cap des 50%. La privatisation, c’est vendre (souvent à prix d’ami) une rente juteuse qui ne profite qu’aux actionnaires et dirigeants des entreprises acheteuses, et nuit très largement à l’intérêt général avec des prix prohibitifs et un recul permanent de l’intérêt général alors qu’il s’agit d’activités dites de monopole naturel, qui doivent rester dans le secteur public.

 

Ensuite, ce trajet a été à nouveau l’occasion d’expérimenter les limitations de vitesse aberrantes, comme celle du périphérique, à 50 kilomètres par heure, ce qui est franchement ridicule à cinq heures du matin, avec peu de trafic, sur une quatre voies… La dernière anecdote révélatrice concerne la recommandation de trajet au niveau d’une grande métropole française, tôt un matin, alors qu’il n’y avait pas de trafic. L’application persistait à proposer un trajet sensiblement plus long, en durée et en kilomètres (générant donc plus de consommation), jusqu’à finir par se conformer à notre choix de trajet plus direct, qui nous a fait gagner 15 à 20 kilomètres et au moins 15 minutes. Il est assez incroyable que les usagers se voient recommander des trajets aussi sous-optimaux. Cela vient sans doute d’accords entre les grandes plateformes et des municipalités, dont on aimerait croire qu’ils ne sont pas facturés par les premiers aux secondes…

 

Le bilan du recul du service public sur la route est tout aussi calamiteux que dans l’énergie. Ce qui était une fierté nationale au tournant du siècle n’est devenu qu’une indécente pompe à profits au détriment de l’immense majorité des Français qui subissent des prix excessifs et toutes les conséquences des suppressions d’emplois. Bref, sur la route des vacances, tout est, tristement, politique.

2 commentaires:

  1. Il suffit de gagner suffisamment d'argent et le coût de l'essence et des péages deviennent tout à fait négligeables......
    Moi j'aime bien rouler sur les autoroutes françaises: plus le prix du péage est élevé, moins de gueux l'utilisent ce qui me permet de rouler confortablement et sans stress.

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  2. L'automatisation du péage est quand même la moindre des choses: c'est justement l'intérêt du progrès technique! Vive les voitures autonomes qui vont bientôt remplacer tous les chauffeurs de taxi, camion et de bus!!!!

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