vendredi 25 janvier 2013

Londres, le talon d’Achille de l’UE


Comme il l’avait sous-entendu à l’automne, David Cameron a annoncé publiquement qu’il organisera un référendum sur la sortie de son pays de l’UE s’il conserve le pouvoir en 2015. Une nouvelle faille dans le château de cartes qu’est cette Union Européenne.

La tentation du large

L’annonce de David Cameron est extrêmement intéressante. Tout d’abord, il convient de souligner que le référendum est un moyen de pression autant externe qu’interne. C’est un outil politique interne dans la mesure où cela vise à couper l’herbe sous le pied de UKIP, qui vient d’arriver second lors d’une élection législative partielle, derrière le parti travailliste, mais devant les conservateurs, et dont l’adn politique est justement la critique de cette UE. En musclant son discours, il espère sans doute limiter l’hémorragie, mais aussi reprendre l’avantage sur des travaillistes plus europhiles.

Mais cette annonce a aussi une utilité externe dans la mesure où elle doit contraindre les pays européens à entamer des négociations avec la Grande-Bretagne pour redéfinir sa participation à l’Union Européenne. Car l’objectif affiché de David Cameron n’est pas de quitter l’UE. Pour lui « quand nous aurons négocié un nouvel accord (…) nous offirons aux Britanniques un référendum avec un choix très simple : rester au sein de l’UE sur cette nouvelle base ou en sortir complètement ».

Ce faisant, les conservateurs rentrent dans une discussion plus virile avec les autres pays européens. En clair, soit ils obtiennent un aménagement de leur participation et ils soutiendront le maintien de leur pays dans l’UE, soit, s’ils n’obtiennent pas grand chose, il est probable que les britanniques choisiront alors de faire le chemin inverse à celui de 1973. Et étant donnée l’opinion publique du pays, la convaincre d’y rester ne sera pas une mince affaire : un récent sondage indiquait que 49% des britanniques étaient favorables à une sortie et seulement 28% pour un maintien.

Une Europe qui doute

Il n’est pas pas inintéressant de constater que cette annonce a été mal reçue à Paris, où Laurent Fabius a indiqué qu’il n’y aurait pas d’Europe à la carte alors qu’Angela Merkel a accueilli sereinement le discours très critique à l’égard de l’Europe de premier ministre britannique. La chancelière a ainsi déclaré que « nous sommes naturellement prêts à discuter des souhaits britanniques (…) mais nous ne devons pas perdre de vue que d’autres pays ont aussi des souhaits et que nous devons in fine trouver un compromis équilibré ». On est loin des sirènes anglophobes de certains éditorialistes.

L’issue de cet épisode reste néanmoins incertaine. Tout d’abord, il y a une chance importante que les britanniques disent au revoir à la technocratie bruxelloise et ce premier départ d’un pays de l’UE donnerait un signal extrêmement négatif. Ensuite, l’ouverture de la boîte de Pandore des traités et plus encore, le fait de quitter des politiques communes serait à la fois un mauvais signe et un encouragement pour certains pays à défaire ce qui a été fait. Bref, l’UE a beaucoup à perdre et il y a fort à parier que David Cameron parviendra à obtenir beaucoup de ce qu’il souhaite.

Soit dit en passant, le fait que cela vienne de Londres et d’un gouvernement conservateur démontre bien que l’UE n’est pas un projet étasunien, même si les Etats-Unis lui apportent son soutien. En effet, Londres, premier allié de Washington, menace d’affaiblir fortement l’UE, avec l’aide d’une presse qui ne semble pourtant pas vraiment hostile aux Etats-Unis. Et contrairement à ce qu’avance le Figaro, il est bien évident que Londres ne passerait pas par l’article 50 pour sortir de l’UE.

Le point extrêmement positif de la démarche de David Cameron est le recours au référendum. Dans cette Europe qui se méfie des peuples, qu’elle torture, il est temps de redonner la parole à la démocratie, y compris en France, comme le soutient Nicolas Dupont-Aignan.

23 commentaires:

  1. de gaule ne voulait pas des british dans l'europe
    normal que le dernier gaulliste les pousse vers la sortie

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  2. Les anglais veulent juste obtenir des avantages supplémentaires ; ils savent dans leur petite tète de boutiquier que l'ue est un grand marché s'ils voulaient partir il suffirait de faire un referendum maintenant dont ce garde bien cameron il n'est même pas sur d’être réélu en 2015
    c'est quoi cette plaisanterie et en quoi les départ des rossebiffe affaiblirait il l'ue

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  3. La classe dirigeante britannique est plus patriote et démocratique que la notre! Alors Messieurs, les Anglais tirez les premiers! Contre cette europe apatride et anti-nations!

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  4. @Laurent Pinsolle,
    habituellement, je suis un féroce contempteur des Britanniques, et en particulier des Tories. Par dessus le marché, je déteste franchement David Cameron, mais pour le coup, je le féliciterais presque :-)!
    Il va proposer un référendum à son peuple, arme atomique pour les partisans de l'UE depuis le double échec franco-néerlandais de la ratification du TCE en 2005. Seulement une question me brûle les lèvres: POURQUOI ATTENDRE????? Pourquoi mettre en balance ce référendum contre sa réélection? Je pense que Cameron n'est pas sincère dans son discours car il sait que les travaillistes peuvent très bien remporter les élections de 2015, étant donnée l'impopularité des conservateurs, et ce malgré la promesse faite de quitter l'UE. On risque d'assister alors à une démonstration d'ingérence de l'UE dans la politique britannique, où tout sera fait pour favoriser l'élection d'une alliance européiste LibDem-Labour...

    CVT

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  5. Cameron ne tiendra pas sa promesse d'un référendum, comme vous le dites, c'est juste pour "couper l’herbe sous le pied de UKIP"...

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  6. La sortie de la GB irait plutôt dans le sens d'un renforcement de l'UE, car la GB a toujours été l'épine dans le pied de l'UE, le cancre de la classe.

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  7. @Laurent Pinsolle,
    pas d'accord avec vous sur le fait que l'Europe ne soit pas un projet américain: je le dis et le redis, le vrai cheval de Troie des USA sur le continent européen est l'Allemagne! L'UE est un projet à l'origine AMERICAIN, issu de la guerre froide, fruit de la lutte contre le bloc communiste.
    A cette époque, les Anglais n'en faisaient pas partie car ils étaient rivaux avec les Américains: les Britanniques avaient encore leur empire colonial, et se durement opposés aux USA lors de la décolonisation (cf conflit du Canal de Suez).
    Contrairement à une idée reçue, la Grand-Bretagne ne s'est rapprochée des USA que relativement récemment, à l'arrivée M.Thatcher! C'est à partir de ce moment-là que, par idéologie ultra-libérale, les Britanniques ont ouvertement défendus les intérêts américains en Europe.

    Par ailleurs, le seul fait que l'OTAN soit la pierre angulaire des institutions UE prouve à lui seul que c'est une entité qui sert les intérêts américains...

    CVT

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    1. Sur l'OTAN l'argument est intéressant et c'est Sarkozy l’américain qui nous y a réintégré totalement

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  8. Je souhaite que les Peuples Européens puissent, à ce stade, être consultés. On n'a jamais rien à perdre lorsqu'on pose une question simple aux électeurs : Etes-vous, oui ou non, favorable à la participation de votre pays à l'UE ? Pour ma part, sans aucun chantage, sans aucune combinaison politicienne, je répondrai NON à cette question si elle m'était posée. L'Europe actuelle n'ayant plus rien à voir avec celle du Général de Gaulle. Combien me coûte cette Europe ? Je crois 19 milliards d'euros de contributions brutes et 7 milliards d'euros de contributions nettes (si Laurent Pinsolle peut nous confirmer ce chiffre, je pense que cela doit intéresser beaucoup de lecteurs). Que m'apporte l'Europe actuelle ? Rien. Nous avions des échanges commerciaux bien avant la mise en place de cette institution coûteuse. Certains parlent de Paix. J'ai tendance à penser que la bombe nucléaire a instauré la Paix dans une partie de l'Europe. Dans l'autre, lorsqu'il y a eu un conflit, nous avons fait appel aux américains pour le régler. Pourquoi ? Parce que nous n'avons pas une communauté de destin, ni même d'intérêts, nous n'avons pas la même culture, nous avons même des histoires très différentes. L'Europe des technocrates-oligarques ressemble à un mirage pour faire croire aux peuples qu'il existe une solution à notre déclin (qui date de 1914, pas de Mitterrand, pas de Sarkozy, il faut arrêter de faire de la politique politicienne et savoir regarder le courant de l'histoire) sans faire d'efforts, ni même de réformes pragmatiques et courageuses. Pour l'instant, l'Europe profite aux puissants, les plus faibles sont de plus en plus écrasés. Les multinationales vont là où ça les arrange, les pauvres n'ont pas les moyens de déménager et de bénéficier des quelques avantages qui peuvent exister. Cette Europe n'est même pas démocratique, qui peut citer le nom de plus de cinq commissaires européens ? Sur le plan monétaire, la BCE asphyxie nos économies. Au niveau diplomatique et militaire, il y a de quoi rire ou pleurer selon les moments. Je comprends les britanniques, nous devrions, nous aussi, changer cette Europe ou la quitter le plus rapidement possible. Je peux paraître "radical" aux yeux de certains, mais selon moi, si l'Europe a été absente des débats lors de la dernière présidentielle, ce n'est pas un hasard : nous n'en voulons plus, nous n'y croyons plus et les "élites" le savent mais font semblant de ne rien voir, de ne rien entendre, de ne rien savoir, nous allons dans le mur avec un puissant klaxon. Laurent GUIBERT.

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    1. @Laurent Guibert,
      vous ne me choquez pas, bien au contraire, puisque je suis de votre avis :-)!
      J'irais même plus loin que vous: je me fiche du destin de l'UE comme de ma première chemise! Réformer l'UE n'est qu'une perte de temps: d'abord pour quoi faire?
      Toute l'énergie consacrée à sauver cette institution baroque doit être utilisée pour donner un avenir meilleur à la France, et enfin surmonter le traumatisme de 1940! Car comme l'a diagnostiqué JP Chevenèment, notre pays ne l'a toujours pas surmonté, malgré tous les efforts de Mongénéral. Ce n'est pas en 1914 que la France a commencé à décliner, mais bien à partir de l'entre-deux-guerres, avec cet esprit de renoncement qui a présidé à la défaite de 1940. D'ailleurs, ce sont les mêmes arguments du défaitisme, de la résignation au déclin et surtout de la haine de soi qui sont à l'oeuvre en ce moment pour justifier la construction européenne...

      CVT

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    2. Surtout la haine de soi a l’œuvre dans une majorité de "grand" média , Internet a desserré ce carcan ce qui n'avait sans doute pas été prévu par le monde médiatique qui commence a perdre pieds

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    3. Chaque jour qui passe, nous apporte la preuve que nos soi-disant élites politiques et économiques sont à la manoeuvre et ce depuis quelques dizaines d'années, qu'elles collaborent efficacement et qu'elles réussissent à diriger notre économie et à décider à notre place jusqu'à nous imposer des traités, que nous avons rejetés démocratiquement.

      Ce n'est ni de la paranoïa, ni une obsession du complot. Si vous en doutez, jetez donc un oeil sur la liste des gens, qui participent régulièrement aux réunions du groupe de Bilderberg, de la Trilatérale, du Forum de Davos, du Siècle ..., qui tiennent l'OMC, le FMI, la BCE ... pour promouvoir leurs propres intérêts ou ceux des gens qui les rémunèrent. Il y a là des dirigeants de multinationales, de banques et d'institutions internationales, des politiques de droite, comme de "gauche" socialiste .... De plus, certains, comme les dirigeants de Goldman Sachs passent allègrement de l'une à l'autre, quand il ne cumulent pas plusieurs postes. Comment s'étonner après cela, quand on y ajoute une concentration des médias entre les mains de quelques-uns que le rouleau compresseur de la propagande écrase tout ou presque. Difficile d'espérer un changement dans de telles conditions.

      Enfin, pour revenir à Londres et à Cameron, même si nous ne sommes pas dupes de la manoeuvre politique, nous pouvons nous réjouir qu'il secoue ce monde véreux, corrompu, cynique et manipulateur et observer avec intérêt les réactions des uns et des autres.

      Connaissant le pragmatisme des Britanniques, ils seraient d'ailleurs bien capables d'en tirer bénéfice, contrairement à nos dirigeants français, aussi dociles que suffisants.

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  9. @ Patrice & Olaf

    Bien d’accord sur les avantages. Je pense néanmoins que cela affaiblirait l’UE car quel que soit l’issue, soit il sera montré pour la première fois qu’il est possible de sortir de l’UE, soit qu’il est possible de renégocier une participation moins importante. Tant mieux !

    @ Cording

    Bien d’accord.

    @ CVT

    Bien d’accord sur Cameron. Non seulement il défend son pays mais en plus il le fait en proposant un référendum. Le gaulliste que je suis ne peut qu’apprécier. Après, si cela tarde, c’est parce que Cameron veut que cela lui permette de gagner un second mandat…

    Je pense que les USA ont soutenu le projet (tant l’Etat que les élites, cf livre Circus Politicus), mais qu’ils n’ont fait qu’accompagner un processus qui aurait eu lieu de toutes les façons, du fait du contexte historique. Si on a des preuves que les USA ont soutenu le projet, on n’a aucune preuve que sans leur soutien, rien ne se serait fait. Une partie importante des élites européennes voulaient absolument construire l’Europe. Soit dit en passant, le fait que les Tories menacent de quitter l’UE plaide plutoti pour montrer que les USA ne sont pas si liés que cela à la construction européenne.

    L’analyse de Chevènement me semble très intéressante.

    @ Anonyme

    Il me semble qu’il s’est trop avancé pour ne pas le faire…

    @ Laurent

    Bien d’accord sur l’ensemble des points. En l’état acutel, je répondrai également « non ». La contribution nette de la France est bien de 7 milliards.

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  10. @Laurent Pinsolle,
    je ne suis pas sûr qu'à l'issue de la guerre de 39-45, les peuples européens auraient eu l'idée de faire une union politique sans l'aval des Américains. L'UE est par construction pro-américaine, et d'ailleurs, en dehors de l'OTAN, l'autre preuve historique est justement la manière dont le Traité de l'Elysée, dont on célébrait le cinquantenaire il y a peu, a été dénaturé par les Allemands à la demande des Américains! C'est bien la preuve que toute autre construction européenne n'aurait pas été possible sans les USA, et c'est bien cela que De Gaulle avait compris à ses dépens, lui qui pensait subvertir la CEE d'alors. Les Américains n'ont pas accompagné le processus, ils l'ont suscité!!!

    CVT

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  11. Vous vous rappelez toutes les belles promesses au moment du référendum sur le traité de Maastricht en 1992 ?

    Vous vous rappelez toutes les belles promesses en 1992 pour nous inciter à voter « oui » à la monnaie unique, « oui » à l’euro ?

    - « L’Europe est la réponse d’avenir à la question du chômage. En s’appuyant sur un marché de 340 millions de consommateurs, le plus grand du monde ; sur une monnaie unique, la plus forte du monde ; sur un système de sécurité sociale, le plus protecteur du monde, les entreprises pourront se développer et créer des emplois. » (Michel Sapin, 2 août 1992, Le Journal du Dimanche)

    - « Pour la France, l’Union Economique et Monétaire, c’est la voie royale pour lutter contre le chômage. » (Michel Sapin, 11 septembre 1992, France Inter)

    En réalité, nous avons eu exactement le contraire.

    En réalité, la construction européenne aboutit à un désastre économique, un désastre financier, un désastre social, un désastre humain.

    Vendredi 25 janvier 2013 :
    France : chômage concernant les catégories A, B, C, D, E :
    5 560 100 demandeurs d’emploi inscrits en fin de mois à Pôle Emploi.

    http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/PI-Mensuelle-VHP736-2.pdf

    Espagne :
    Les chiffres effarants du chômage de masse en Espagne.
    Le taux de chômage espagnol a terminé l'année 2012 sur un nouveau record historique à plus de 26% de la population active, tandis qu'il monte même à 55% chez les jeunes. Et la situation a toutes les chances de s'aggraver encore en 2013.

    Grèce :
    Avec 26,8%, le chômage en Grèce va de record en record.
    Le taux de chômage grec a atteint un nouveau record en octobre à 26,8%, contre 26,2% le mois précédent (chiffre révisé), a annoncé jeudi l'agence nationale des statistiques Elstat.
    L'économie grecque devrait subir une sixième année consécutive de récession en 2013.

    http://www.lesechos.fr/economie-politique/monde/actu/reuters-00490279-avec-26-8-le-chomage-en-grece-va-de-record-en-record-527279.php

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    1. Rappels utiles au moment où les socialistes souffrent d'amnésie et continuent à se moquer des Français avec un nouveau leitmotiv : il faut être patient et laisser le temps au temps", comme le disait le plus célèbre d'entre eux."

      A lire : le dernier article sur la dévaluation interne sur le blog de Jacques Sapir .

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  12. Bonjour,

    Comme vous le mentionnez, il est tres probable que la GB obtienne comme d'habitude le beurre et l'argent du beurre, et que l'Europe lui donne une bonne partie de ce qu'elle demande.
    En effet, bcp de pays du nord (All.,Pays-Bas,..) et de l'est (?) ont des affinites avec la GB (liberalisme, atlantisme,...) et ne veulent certainement pas perdre un allie face aux pays du sud.
    D'ailleurs, la reaction de Merkel le suggere deja (et c'est toujours commode d'avoir la GB sous le coude pour refuser au besoin les demandes de solidarite ou d'avancees sociales...).

    Enfin, il me semble que depuis des siecles la diplomatie anglaise est tres efficace, bien plus que la francaise (meme dans l'UE ils se debrouillent tres bien !), et il ne faut pas la sous-estimer.

    Donc je crains que cela ne change pas grand-chose au final, en particulier pour les francais (dont les interets continueront a etre brades...).

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  13. Intéressant dossier dans la revue Element no 146 sur la fin de la souveraineté

    "Bruxelles,les marchés les banques , les agences de notation americaines : ces faux nez camouflent la prise de pouvoir politique, a l’échelle mondiale , par les plus riches "
    Emmanuel Tood

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  14. Bien que le RU ne soit pas dans la zone Euro, je ne peux m empecher de faire un parallel avec votre autre billet sur les Francais et l Euro d il y a quelques jours. Dans les deux cas, il y a perte de confiance et l idee de l Europe telle qu elle a ete proposee prend serieusement l eau. Mais dans les deux cas, personne ne compte sortir vraiment.

    Pour l Euro et les Francais, les deux tiers admettent maintenant que ce n etait pas une bonne idee mais seulement un tiers oserait l aventure de revenir au Franc. Le deuxieme tiers, celui qui verrouille l arrivee d une force politique souverainiste, sera dur a convaincre. Je suis d accord avec le fait que cette longue agonie enfonce des societes, qui etaient modernes, dans des conditions tres regressees maintenant et que cela ira de mal en pis. Seulement, cela se fait progressivement, ce qui fait que les gens restent anesthesies. Ils croient aussi que l Euro peut survivre meme si c est dans un malheur croissant (qu ils pensent etre prets a supporter), alors que l Euro explosera, ce n est qu une question d echeance. Mais cela paraît lointain car technique de sorte que les gens ne comprennent pas que le choix c est << sortir ou se faire sortir >> avec, dans le second cas, une situation beaucoup plus delabree puisque les europeistes frisent le fanatisme et suivront une politique jusqu-au-boutiste, et une absence de preparation. A moins que ces derniers acceptent une revision complete de leur vision sociale et economique ce qui permettrait de travailler vraiment sur les defauts congenitaux de l Euro pour le rendre perenne, mais sur ce point aussi, il semble que nous ayons a faire a des fous.

    D ailleurs, il est a penser que passer de l Euro au Franc ne sera pas aussi simple que les exemples ayant deja eu lieu dans l histoire. La structure economique de la France est beaucoup plus specialisee que celle de l Argentine, du Mexique ou des anciennes Republiques Sovietiques. Il y aura derapage de la valeur de la monnaie (qui est d ailleurs en partie recherche pour contribuer a ameliorer la productivite par une composante de politique monetaire). Mais les investisseurs, tres importants pour le developpement des entreprises, voudront sortir le parachute et, anticipant la victoire d une force souverainiste, deserteront les marches francais pour rester dans le cœur de l Euro, qui s appreciera encore, ameliorant mathematiquement les rendements. L economie francaise sera assechee. On peut imaginer une participation de la Banque de France dans le prive pour remplacer les capitaux faisant defaut, mais cela ne fera que mobiliser une masse monetaire equivalente que l Etat aura peut etre besoin d allouer ailleurs, ou bien qui sera excessive, entrainant une devaluation au dela des objectifs.

    Je passe sur les problemes logistiques et les couts afferents pour toute la societe pour s adapter. La France l a faite dans un sens en 2000, mais elle n etait pas exsangue comme maintenant.

    -jb a suivre

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  15. Suite.

    Et puis il y a le probleme de la dette. Que faire de la dette non residente, qui represente environ les deux tiers de toute la dette souveraine. Celle ci sera difficile a monetiser, car je ne crois pas que les creanciers accepteront de la libeller dans la nouvelle monnaie. Il est apparemment faux de croire que c est automatique. Cela depend du contrat, selon le droit commercial, et les preteurs seront bien plus interesses a conserver les termes existants en Euro pour les memes raisons que celles avancees plus haut. Je souhaite etre dementi par un expert en droit commercial sur la question, mais pour l instant c est ma comprehension de l aspect contractuel de la dette non residente. Et monetiser une dette non residente en devise etrangere par une emission de monnaie nationale me paraît etre le tonneau des Danaides car il y a un facteur d instabilite : on ne remplace plus alors un Franc scriptural par un Franc fiduciaire. Il y a eu un Franc scriptural de cree a l epoque ou il s agissait d un Euro. Si on veut le monetiser, cela revient, apres glissement de la monnaie nationale, disons de 50%, a devoir imprimer 1.5 Francs. Sur les marches des changes, cela sera percu comme de la monnaie de singe et la valeur de la devise glissera encore mais la au travers d un mecanisme qui echappe au control. Alors qu il ne faut pas oublier que ce control est necessaire car les changes sont vitaux : la France ne peut pas se soustraire a la necessite de conserver un pouvoir d achat pour importer des matieres premieres. Elle n a rien dans son sous-sol.

    Je crois que ces arguments, en plus d une crainte plus irrationnelle, cantonneront le souverainisme en marge de la politique, si le retour immediat au Franc est systematiquement brandi. C est bien sur la strategie a long terme de retrouver tous les leviers de commande, incluant la politique monetaire, mais l economie et les finances doivent etre nettoyees avant pour que les gens prennent confiance. Et, tout comme on donne de l oxygene a un grand blesse avant de le conduire dans la chambre d operation, sinon il n y survivrait pas, la France doit etre assainie dans le cadre de l Euro, ce qui, selon, moi, se limite a la monetisation de la dette, qui engloutit une fraction enorme du budget (charge de la dette : un cinquieme des recettes), ce qui serait suffisant pour redonnert un ballon d air frais pour faire les reformes et relances necessaires, si employee dans l economie.

    -jb a suivre

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  16. Suite et fin

    Sur ce point, il me semble que l idee de Jacques Genereux, qui propose une << banque sympa >> aupres de laquelle l Etat viendrait consolider sa dette a taux d interet (proche de) zero au fur et a mesure des echeances, me paraît tres ingenieuse. Genereux retourne le systeme a son profit en continuant la creation de la masse monetaire par le credit, maintenant sa stabilite par un remplacement de un pour un. Il semble qu il n y ait effectivement rien dans les textes et statuts de la BCE et de l Europe qui empeche de créer une banque (publique) qui fonctionne comme toute banque commerciale. En limitant les emissions a des echanges purement scripturaux dans sa charte, elle n est plus soumise aux exigences des depots de liquidites, et puisqu elle est la pour payer les creanciers, ses transactions sont purement scripturales effectivement. Dans le pire des cas, il lui faudrait emprunter ces reserves aupres de la BCE mais c est a un taux plus bas que lorsque l Etat emprunte a une banque standard et il ne s agit que d une toute petite fraction du montant, ce qui rend toute l operation d emprunt beaucoup plus abordable.

    Meme si cela ne permet toujours pas la politique monetaire seulement possible avec une monnaie nationale, cela assainirait grandement le budget de la France et permettrait au gouvernement une vraie marge de manœuvre pour relancer des politiques sociales et economiques. La confiance s etablissant et la situation du pays s ameliorant, la phase de desarrimage sera mieux acceptee et moins risquee.

    Ce sont aussi des idees plus terre a terre et faciles a percevoir par le commun des mortels : tout le monde (en tous cas les conseillers financiers et les livres sur les finances personnelles) sait qu en cas d endettement excessif, il faut chercher a consolider ses dettes chez un seul creancier a un taux avantageux. Ca fleure le bon sens et la vie de tous les jours et peut renverser le rapport de force en termes de perception avec les Europeistes qui passent maintenant sans aucune equivoque pour les constructeurs en dilettante d une usine a gaz qui, elle, semble totalement opaque aux yeux des electeurs.

    En bref, la sortie de l Euro fait peur, en partie a juste titre, ce qui ecarte tout espoir pour la solution souverainiste, mais il y a des palliatifs de transition, qui sont en outre, plus facilement communicables.

    -jb

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  17. @ CVT

    Clairement, je ne pense pas que les Etats européens auraient fait quelque chose d’aussi important si les Etats-Unis n’en avaient pas voulu. Mais ce n’est pas parce que les Etats-Unis y étaient favorables qu’ils en sont à l’origine. Ce mouvement rejoignait leurs intérêts donc ils l’ont soutenu. La volonté d’organiser une Europe politique existait déjà dans l’entre-deux guerres, et je pense que beaucoup de dirigeants européens souhaitaient construire cette Europe.

    @ Anonyme

    Clairement, nos dirigeants défendent bien mal nos intérêts.

    @ jb

    Pas du tout d’accord sur la fin de la monnaie unique. Il n’y a aucune raison pour que cela soit plus compliqué que pour la Tchécoslovaquie, l’URSS ou l’Argentine, bien au contraire. Déjà, il s’agit juste de revenir à une situation antérieure, ce qui est plus simple. En outre, notre économie est dans un bien meilleur état. En outre, il suffit de remettre en place un contrôle des changes pour éviter une fuite des capitaux.

    Sur la dette, plus de 80% de notre dette est de droit français donc elle peut être convertie dès le passage à la nouvelle monnaie, comme lors du passage à l’euro. En outre, la valeur du nouveau franc serait stable par rapport à l’euro (scénario confirmé par ING, Nomura, Natixis), donc, même sans conversion, il n’y a pas d’impact.

    Nous devons convaincre le tiers de français qui regrettent le franc mais ne souhaitent pas quitter l’euro que cela est possible, nécessaire et une condition préalable à la croissance (voir vidéo qui va être mise en ligne sur DLRTV et mon prochain papier dans « La France Debout »). La sortie de l’euro fait peur, mais pas à juste titre.

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    1. Je prie pour que vous ayez raison et que ces difficultes ne soient effectivement qu apparentes.

      Bon courage et bonne chance dans vos efforts.

      -jb

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