lundi 6 mai 2013

François Hollande, le spectateur de la République


Il y a un an, François Hollande était élu président de la République. Comme ses prédécesseurs, c’était le but de sa vie, l’accomplissement recherché de sa carrière politique. Mais comme eux, sans véritable boussole politique et enfermé dans la pensée unique, il n’est que le spectateur de sa présidence.



Paroles, paroles, paroles…

Par les mots, notamment ceux d’Henri Guaino, Nicolas Sarkozy a cru donner l’impression aux Français qu’il agissait. Dans sa présidence de papier, il moralisait le capitalisme, fermait les parasites fiscaux, luttait contre les fermetures d’usines à Gandrange… Las, les Français ont rapidement compris que les mots du président n’étaient que des mots, des paroles destinés à occuper le cirque médiatique sans réelle volonté de faire quoique ce soit. L’impression seule était ce qui importait pour ce président de télé-réalité. Le verdict fût sans appel : Nicolas Sarkozy est devenu le second président sortant battu.

François Hollande a construit (intelligemment) sa campagne en promettant en sorte d’être une antithèse du président sortant. Etant donnée son impopularité, il n’avait pas plus d’effort à faire pour atteindre le graal des hommes politiques : l’Elysée. Son ton, plus modeste, son style, plus chaleureux et bien moins égocentrique, correspondaients à ce que les Français voulaient après cinq ans d’une présidence qui ne produisait qu’un vent inutilement clivant et une action politique qui n’était qu’une vaste opération de communication dont les ficelles étaient trop visibles pour ne pas être comprises.

Un an après, la déception est grande, très grande. Là où Nicolas Sarkozy donnait le change par des paroles martiales qui semblaient indiquer qu’il était bien le capitaine du bateau France, son successeur, tiède et mou, semble admettre qu’il n’a guère de prise sur ce qui se passe, que ce soit à Florange, Aulnay, Goodyear ou Pétroplus… Finalement, la présidence normale et modeste s’est transformée en présidence impuissante quand les médias font le parallèle entre les promesses de campagne de maintien de ces usines et l’acceptation quelques mois après de leur fermeture.

Le spectateur de la mondialisation

En fait, ce qui apparaît aujourd’hui, c’est que François Hollande n’est que le spectateur de la mondialisation. Incapable intellectuellement de remettre en cause le moindre de ses ressorts, il assiste, impuissant, à la spéculation folle des marchés, au vampirisme du capitalisme actionnarial, à l’explosion des inégalités, à la valse des délocalisations et des fermetures d’usine ou à l’incroyable rente de situation du système bancaire. Cette année de présidence a démontré qu’il ne remettra pas en cause du tout le cadre économique qui fait tant mal à notre pays depuis plusieurs décennies.

Alors, bien sûr, il y a quelques différences avec l’équipe précédente : plus de hausses d’impôts (mais Nicolas Sarkozy aurait-il pu faire différemment s’il avait été élu ?), la tragicomédie de la tranche à 75%. Le pseudo plan de croissance européen de 2012 destiné à faire avaler le ralliement au TSCG est à juger au regard de la croissance prévue en 2013. Au final, sur biens des sujets, il n’y a pas une feuille à papier de cigarette entre l’équipe au pouvoir et la précédente : austérité, tutelle européenne, plans « d’aide » absurdes européens, libre-échange, banques… C’est blanc bonnet et bonnet blanc.

Car François Hollande a intériosé cette mondialisation sur laquelle il pense que l’on ne peut rien faire. Il se débat donc avec des marges de manœuvres ridicules, d’autant plus qu’il a abandonné l’attribut essentiel de la souveraineté qu’est la monnaie et accepté de mettre des contraintes sévères à la politique budgétaire. Du coup, nous n’avons pas un président décideur, ni même un président acteur mais un simple président spectateur, réduit à commenter plus qu’agir sur ce qui se passe. En fait, il s’occupe de redécorer le pont du bateau, mais il ne se préoccupe pas des voies d’eau.

Parce que leur internationalisme et leur libéralisme culturel leur empêchent toute critique à l’égard de la mondialisation, François Hollande et le PS ne sont que les spectateurs de cette mondialisation qui nous fait tant de mal. Les Français devront donc s’en débarrasser pour reprendre leur destin en mains.

18 commentaires:

  1. "Parce que leur internationalisme et leur libéralisme culturel leur empêchent toute critique à l’égard de la mondialisation, François Hollande et le PS ne sont que les spectateurs de cette mondialisation qui nous fait tant de mal."

    L'UMP aussi, ne l'oublions pas.

    Sancelrien

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  2. Le décès de Vivianne Forrester est passé quasi inaperçu elle nous avait pourtant prévenu "L'horreur economique" succès mondial en 96 et "Une etrange dictature" qui in fine baffe les pantins comme celui ci et le précédent . Bon , quand les Français vont ils se réveiller ?

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  3. Il attend les élections allemandes et une aggravation économique européenne pensant que le gouvernement allemand changera de position et que les pays du sud feront front commun.

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  4. Je trouve l'illustration de votre article (Plantu) pas drôle du tout. De plus, je connaissais déjà cette histoire, donc je suppose qu'elle n'est pas de lui.
    Plantu, c'est celui qui avait comparé JL Mélenchon et Marine Le Pen. Vous pourriez trouver mieux pour illustrer votre blog que ce dessinateur bien pensant.

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    1. J'ajoute que ce dessin, anti-socialiste primaire, illustre bien mal le contenu de votre article qui explique au contraire que le PS est semblable à l'UMP dans son impuissance à résoudre la crise.

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  5. Assez d'accord avec votre texte.

    D'un point de vue global/tactique, il me semble qu'avoir Hollande est nettement preferable a Sarko. En effet, Sarko se contentait d'etre sur la photo avec Merkel (a defaut d'Obama), ce qui arrangeait bien Merkel (qui ne voulait pas se mettre en avant) et servait a enfumer tout le monde avec la complicite de la presse.
    Au moins, Hollande a la decence de ne pas se laisser acheter ainsi, et a cause de sa campagne et de son positionnement la situation est plus claire: on voit bien qui commande en Europe et sur l'economie (Merkel+la finance...). De meme, il n'exploite pas a outrance chaque fait divers pour faire diversion...

    Donc l'impuissance reste mais au moins cela se voit et on en parle. On peut esperer que cela fera progresser les idees alternatives...
    Il ne reste que 4 ans... Si la prochaine fois Cope/Fillon gagne, il y aura de nouveau 5 ans d'enfumage a la remorque de l'Allemagne et de la finance.. :-(

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    1. @Anonyme,
      complètement d'accord avec vous sur l'attitude de Hollande avec l'Allemagne: au moins, Hollande refuse de servir de caution à Merkel pour donner le change sur le leadership en Europe: tout le monde sait désormais que Bruxelles=Allemagne.
      Maintenant, comme diversion, nous avons eu l'épisode du mariage universel :)), qui nous a occupé les six derniers mois. Le vote effectué, les socialistes nous ont promis de s'occuper du chômage :-(((, alors que c'était plutôt la priorité...

      CVT

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  6. @Laurent Pinsolle,
    comment être déçu aujourd'hui alors qu'on n'attendait rien hier? La seule chose que j'avais hâte de voir dès son élection, c'est un Hollande qui établisse un rapport de force avec les Allemands à propos du TSCG, dont il avait dit les pires horreurs lorsque son prédécesseur l'avait signé... En clair, dans mes rêves (et je dis bien rêves...) les plus fous, je voyais Hollande refuser de ratifier le TSCG si l'austérité n'était pas abandonnée. Plus prosaïquement, il avait promis une renégociation (à laquelle, par contre, je n'avais jamais cru...). Et comme de bien entendu, il s'est déballonné...
    Le PS exige désormais de la castagne avec les Allemands, mais il se réveille un an trop tard...


    CVT

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  7. @Laurent Pinsolle,
    "François Hollande et le PS ne sont que les spectateurs de cette mondialisation qui nous fait tant de mal. Les Français devront donc s’en débarrasser pour reprendre leur destin en mains".
    Je suis passé à côté de votre conclusion: est-ce que vous appelleriez à la sédition? Pas très démocrate, tout ça...
    Dans l'ensemble, les Français n'aiment pas l'UE, mais ils ont peur d'en sortir, d'autant plus qu'elle profite à l'élite du pays, mais également à une grande partie de la classe moyenne (le véritable électorat de base de l'UMPS...). Trente années de propagande européiste bouche singulièrement les perspectives...
    D'une façon générale, les électeurs ont les élites qu'ils méritent, et c'est à des partis comme DLR, MRC, UPR (ne vous en déplaise...) ou à la rigueur, l'aile républicaine de partis comme le FdG, voire le PS de trouver une alternative CREDIBLE pour rendre au pays sa pleine souveraineté, comme jadis De Gaulle avait présenté une perspective crédible face à Pétain...


    CVT

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  8. A écouter cette interview de Jean Claude Michéa sur sa vision de la gauche en général (à partir de 4:15 et des socialistes français (entre 15:20 et 31:00) :

    http://www.franceinter.fr/emission-service-public-ou-est-la-vraie-gauche-aujourd-hui

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  9. je prends plaisir à vous lire et tout s'écroule quand je lis ça:"Nicolas Dupont-Aignan, s'il était au pouvoir, ferait "des choses simples, élémentaires". "Je sortirais de l'euro tout de suite, je baisserais les charges des PME, j'enverrais les délinquants en prison au lieu de les libérer" et "je bloquerais les flux migratoires", a-t-il expliqué."

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  10. Concernant la pratique de l'anglais dans la recherche scientifique :

    "Curieusement, tous ceux que j'ai vu intervenir sur ce thème sont des politiciens, des associations de défense de la langue française, des écrivains et des enseignants et enseignants-chercheurs de lettres et sciences humaines ; j'émets quelque doute quant à leur familiarité des contraintes et des pratiques de la recherche scientifique."

    http://david.monniaux.free.fr/dotclear/index.php/post/2013/05/04/Usage-de-l-anglais-dans-l-enseignement-sup%C3%A9rieur%C2%A0%3A-un-trop-modeste-projet-de-loi

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  11. @ Sancelrien,

    Très juste sur l’UMP.

    @ Patrice

    Dommage en effet. J’avais lu son livre avec intérêt.

    @ Olaf

    Le gouvernement allemand ne changera de position que pour quitter la monnaie unique : il suffit de voir les commentaires en Allemagne sur le délai accordé à la France

    @ Anonyme

    Je pense que c’est une vision un peu caricaturale de Plantu… C’est un éditorialiste brillant, qui pointe souvent des problèmes que le Monde ignore, même si je ne suis pas toujours d’accord avec lui.

    @ Anonyme 10:50

    C’est une vision des choses intéressante, au bémol près du TSCG et du plan de croissance…

    @ CVT

    Je ne suis pas déçu. Je n’attendais tellement rien que j’ai voté blanc le 6 mai. L’aile gauche plaide depuis 20 ans pour une réorientation du projet européen mais reste dans un parti qui les a tous voté…

    Je vous rassure, pas de sédition, juste une révolte démocratique en 2014 puis en 2017. J’espère que le brouillard de la propagande va se dissiper.

    @ Anonyme

    Bientôt, une chronique sur son livre sur le blog.

    @ Denis

    Il ne faut pas confondre la réflexion programmatique (qu’il mène, plus que sérieusement) et le temps médiatique…

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  12. Au-delà des grands discours, des analyses tarabiscotées et des disputes sur le sexe des anges, n'oublions que quelques mesures fortes pourraient "changer la donne" de manière significative pour l'économie de notre pays, comme par exemple mettre en place un contrôle des mouvements de capitaux, des protections douanières, voter le non-cumul des mandats, la limitation à un seul mandat électif. Il suffirait d'ajouter quelques autres mesures simples pour prendre une tout autre direction. Au lieu de cela, nous avons quotidiennement sous les yeux le spectacle pitoyable de pantins sourds, arrogants, irresponsables et menteurs. De quoi alimenter frustration et colère en faisant voler en éclats la solidarité nationale.


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  13. Bon anniversaire, M. Hollande!
    http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/2013/05/bon-anniversaire-tonton-hollande-.html

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  14. Et les éléments de langage (nouveau nom de la langue de bois) se multiplient dans la déroute:
    Volontarisme social, sérieux budgétaire, pas d'austérité, cohérence, persévérance, sauver les emplois, sauver le modère social français, sortir de la crise par le haut, plus de droits sociaux, moins de déficits, etc, etc...

    On n'a pas de mal à les repérer car les ministres défilent tous avec le même discours tout fait à la bouche, mais ils sont intéressants car ils révèlent la réalité cachée derrière et elle est presque exactement le contraire...

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  15. En général il parlent surtout d'investissement et de compétitivité. Ces deux mots cachent très mal toutes les saloperies des politiques de l'offre. C'est même explicite car la compétitivité est censée justifier la baisse des salaires et l'investissement sert à justifier la baisse des impôts sur le capital et les riches( en ignorant totalement les bases de la macroéconomie la propension à consommer et toutes ces notions qui dérangent l'ordre établi). Parce que les larbins des riches prétendent que c'est eux qui créent des emplois !

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  16. Cela me fait penser à Mitterand qui avait dit qu' apres lui , il n' y aura que des gestionnaires :

    http://www.dialogus2.org/MIT/dominerlafrance.html

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