mardi 17 juin 2014

Michel Sapin avoue que le traité transatlantique favorise les Etats-Unis


Mais qu’est-t-il passé dans la tête du ministre du budget, qui n’est pourtant pas un perdreau de l’année, pour affirmer qu’une sanction injuste de BNP Paribas « pourrait affecter les discussions en cours sur le traité de libre-échange » ? Quelques mots très révélateurs…



Une admission révélatrice

En effet, ces quelques mots sont très riches de sens. En utilisant le traité transatlantique en cours de négociation entre l’Union Européenne et les Etats-Unis pour menacer Washington alors que BNP Paribas pourrait être soumise à une amende délirante, Michel Sapin indique de facto que ce traité va davantage profiter aux Etats-Unis qu’aux pays européens. Car si le traité profitait davantage au vieux continent, ce devrait être les Etats-Unis qui menaceraient d’interrompre la négociation devant l’interférence du gouvernement français et il n’aurait aucun intérêt à évoquer une telle option dans le cadre du dossier BNP Paribas. Là, parce que le gouvernement français menace la négociation, cela signifie de facto que cette négociation représente un bénéfice potentiel pour Washington, et donc globalement que le traité transatlantique favorise les Etats-Unis.

Voilà une admission effarante de la part d’un ministre de la République qui est tout de même sensé défendre les intérêts de la France et des Français. Bien sûr, les plus libéraux affirmeront que tout le monde a à gagner au libre-échange et que ce que gagneraient les USA ne serait pas au détriment de la vieille Europe. Mais un tel raisonnement ne tient pas parce que dans ce cas-là, la France y perdrait aussi, ce qui rendrait la menace non crédible. En outre, personne n’a démontré sérieusement les bénéfices de l’anarchie commerciale et le développement des pays asiatiques montre au contraire l’intérêt du protectionnisme, partie intégrante de leur modèle économique. Bref, soit Michel Sapin est un néolibéral dogmatique de la pire espèce, soit il était prêt à sacrifier les intérêts du pays dont il est le ministre jusqu’à ce que les abus caractérisé de l’Oncle Sam sur le dossier BNP Paribas ne le pousse à un peu moins de docilité à l’égard de Washington.

Un traité révoltant

J’ai déjà consacré plusieurs papiers au traité transatlantique pour rappeler tous les dangers qu’il porte pour la France et l’Europe. Danièle Favari a écrit un bon livre qui synthétise les principaux enjeux de ce traité dont on ne parle pas assez : le dogmatisme de la libéralisation des échanges, le risque d’un abaissement des normes sanitaires pour permettre aux produits venus des Etats-Unis d’être vendus en Europe, malgré des normes plus laxistes, mais aussi la poursuite du développement des RDIE, ces mécanismes qui soustraient à l’autorité publique la capacité de décider du destin collectif, dont l’autorité serait placée sous la coupe d’une poignée d’avocats internationaux pour qui les Etats (et donc la démocratie) ne vaudraient pas davantage que les intérêts des multinationales, qui attaquent aujourd’hui les pays pour des législations anti-tabac trop restrictives !

Ce que révèle Michel Sapin malgré lui, c’est que parce que les Etats-Unis ont beaucoup de multinationales, et des normes souvent moins exigeantes que celles de notre continent, ils ont bien davantage intérêt que nous à signer ce traité (malgré une opposition grandissante outre-Atlantique pour des soucis de normes comme de protections commerciales). Il est effarant que personne n’ait semblé noter les implications pourtant extraordinaires de sa déclaration, qui en disent encore long sur la décomposition idéologique complète du Parti Socialiste, qui, dans ce cas précis, semble céder à la fois à un dogmatisme néolibéral sans nuance mais aussi à un atlantisme tellement servile qu’il les pousse à tout simplement abandonner la défense de la France.

En un sens, merci monsieur le ministre de dévoiler le pot aux roses. Le traité transatlantique est mauvais pour notre pays. Et ce n’est pas uniquement pour protéger BNP Paribas qu’il faut s’y opposer. C’est une question de principe absolument fondamentale.

28 commentaires:

  1. Je suis d'accord avec vous sur le fond : ce traité est défavorable pour l'Europe et la France. Et il est l'heure de faire pression sur les élus, nationaux et européens, pour qu'il soit rejeté dans sa forme actuelle : inégalitaire et ultra-libérale.

    Je me permets quelques commentaires sur des détails :
    - que le traité soit favorable aux Etats Unis soit favorable aux Etats Unis n'est pas choquant : en théorie ce genre de traité doit être gagnant-gagnant. Ici le problème est que seuls les Etats Unis semblent gagnants.
    - Vous parlez des "normes souvent moins exigeantes" aux Etats-unis : c'est en parti vrai mais l'inverse l'est aussi : ils ont des normes très strictes en ce qui concerne par exemple les fromages. Avec ce traité devrons nous dire adieu à nos fromages au lait cru ? et oui aux OGM ? (qui eux ne sont pas réglementés)

    J'ai déjà abordé le sujet sur mon blog : Voulons-nous un monde ultra-libéral et lyophilisé ?

    Et je compte interpeller nos députés, européens en premier lieu, sur ce sujet déterminant pour notre société.

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  2. Merci pour cet article mais je tiens à souligner une chose...On parle souvent d'un traité commercial, mais cela n'est pas complet. Il s'agit d'une remise en cause totale de l'OMC, incluant aussi le travail!!! Pourquoi le MEDEF ne dit rien? Parce qu'il pourra détricoter tout le code du travail... Cela va très et trop loin, au point où même les américains vont y perdre quelque chose. Je vous revoie à la superbe émission de france-culture se référent à ca sujet: http://www.franceculture.fr/player/reecouter?play=4774508

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  3. Raisonnement bancale, Sapin peut très considérer qu'il y a un gain avec le traité mais qu'il serait inférieur aux pertes dans le cas d'une sanction de BNP. Ceci dit, d'autres banques dont des américaines sont aussi sous la menace par la justice américaine de sanctions équivalentes ou supérieures.

    Parler du protectionnisme asiatique quand par exemple un ipod assemblé en Chine comprend 95% de sa valeur ajoutée issus d'autres pays, donc importés, c'est osé.

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    1. C'est osé de sortir un exemple microéconomique, le fameux ipod, pour refuter une simple constatation de la balance commerciale avec la Chine.

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    2. Vous plaisantez ou quoi ? C'est le cas de la plupart des produits complexes. La balance de commerciale chinoise, pas plus que celle allemande ou d'autres pays n'a à voir avec le protectionnisme.

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    3. Le protectionnisme c'est de contrôler ses échanges avec l'extérieur, pas les stopper. L'exemple de l'I-Pod est donc inadapté.

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    4. La "valeur ajoutée", ce serait pas plutôt la possibilité de revendre très chères des pièces détachées achetées au kilo produites en Chine OU importées en Chine une fois assemblées en iPod ou en téléviseur ou en consoles de jeux ?

      Certains s'amusent à embrouiller un peu tout pour mieux nier les concepts qu'ils s'efforcent de nier pour ne pas avoir à reconnaître les faits qui leur donnent tort...

      Et comme le précise Monsieur Halpern, le protectionnisme n'est pas d'empêcher toutes importations/exportations, mais de réguler afin d'équilibrer les échanges.

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    5. Les banques américaines sous la menace de la justice, c'est une blague ? Les banques anglo-saxonnes, qui ont été condamnées jusqu'à présent par la (l'in)justice américaine, l'ont été pour avoir blanchi l'argent de la drogue, effectué des malversations et avec des amendes beaucoup plus faibles. Rien à voir avec les opérations réalisées en dollars par la BNP en dehors des Etats-Unis. Les Etats-Unis font ce qu'ils veulent, quand ils veulent, comme ils veulent, comme quand ils interviennent pour interdire aux Français de vendre des véhicules en Iran pour établir des relations à leur avantage. Leurs dirigeants n'ont aucun scrupule, aucun état d'âme pour évincer leurs rivaux et leur imposer leurs règles. Lamentable de voir les dirigeants de l'UE à quatre pattes devant cette domination tant économique (TAFTA) que politique (Ukraine) !

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  4. J'invite les lecteurs de ce blog à voir comment il est possible, pour l'affaire BNP de raisonner autrement: voir le blog de jc Werrebrouck

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  5. Ce n'est qu'un exemple de plus de la nocivité du PS qui va connaître de nouveaux et graves échecs électoraux en 2015 et 2017 où il pourrait être marginalisé, comme le PC et le PRG, de la scène politique. Un pouvoir déjà aussi discrédité peut-il se maintenir ainsi? Son opposition interne de 40 députés à l'appel des 100 députés peut-elle aller jusqu'à provoquer une crise politique de type dissolution de l'Assemblée?

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  6. La peine de prison n'est pas possible car la prescription de 5 ans est dépassée.

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  7. Cette zone de libre-échange est depuis 1945 le seul but poursuivi par la finance anglo-saxonne. Tous ces soi-disant "pères de l'Europe", les Monnet, Schumann, Spaak, Marjolin et consorts n'étaient que des mercenaires à la solde du Departement d'Etat. Il suffit de relire de Gaulle pour prendre la mesure de cette imposture européenne. Au lendemain de la guerre, les USA étaient la 1ère puissance mondiale. Ils on toujours voulu le rester. La meilleur façon pour cela est de pouvoir imposer an monde entier leur règles et de le gouverner. Les deux moyens dont ils disposent sont le dollar et l'armée américaine. tout le reste est du baratin.

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  8. " L'exemple de l'I-Pod est donc inadapté."

    En quoi est il inadapté ? Par la vertu du Saint Esprit ?

    Non seulement, il est parlant mais aussi représentatif du problème pour la plupart des produits. Les protectionnistes n'ont toujours intégré la complexification des produits et de la chaine de valeur. Ils s'imaginent que l'état va produit par produit définir le % acceptable, taxable... Avec par dessus le marché toutes les influences et connivences entre le gouvernement et certains lobbies de secteurs nationaux plus puissants que d'autres secteurs d'activité. Je vous mets au défi de me signaler pour ne serait ce qu'une centaine de produits quelle est la part du producteur final et la part de producteurs intermédiaires, pays par pays. Vous en êtes bien évidemment incapable.

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    1. Le protectionnisme vise à obliger à produire sur place et non pas très loin et à très bas coûts économiques, sociaux et écologiques. L'I-Pod comme tous les produits de haute technologie ne coute en réalité aux fabricants qu'1/4 du prix réel auxquels ils sont vendus c'est donc dire qu'il y a une marge de manoeuvre pour les fabriquer dans les autres pays. Comme l'impose le Brésil ! Pour fabriquer ces produits dans son pays avec un potentiel d'au moins 100 millions de consommateurs.

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  9. " L'exemple de l'I-Pod est donc inadapté."

    En quoi est il inadapté ? Par la vertu du Saint Esprit ?

    Non seulement, il est parlant mais aussi représentatif du problème pour la plupart des produits. Les protectionnistes n'ont toujours intégré la complexification des produits et de la chaine de valeur. Ils s'imaginent que l'état va produit par produit définir le % acceptable, taxable... Avec par dessus le marché toutes les influences et connivences entre le gouvernement et certains lobbies de secteurs nationaux plus puissants que d'autres secteurs d'activité. Je vous mets au défi de me signaler pour ne serait ce qu'une centaine de produits quelle est la part du producteur final et la part de producteurs intermédiaires, pays par pays. Vous en êtes bien évidemment incapable.

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    1. Ce sont le anti-protectionnistes qui inventent des complexités où y'en a pas.

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    2. Raisonnement absolument pas convaincant ! Que veut dire ce charabia comme "certains lobbies des secteurs nationaux" ? Moi, je te pose une autre question à laquelle tu pourras peut-être apporter une réponse : combien y a-t-il de lobbyistes, payés par des multinationales (pas des secteurs nationaux, l'ami), travaillant à Bruxelles pour proposer et faire adopter des textes "clés en main" par des technocrates de l'UE ? Combien ? Pour quels résultats ? A ton avis ? Pour une concurrence libre et non faussée ? Il faudrait peut-être arrêter de se foutre de la g..... du monde, l'ami !

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  10. Laurent, vous devriez rejoindre ce cercle de reflexion :

    http://www.les-crises.fr/naissance-du-think-tank-les-econoclastes/

    Talisker.

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  11. Abd_Salam

    Vous affirmez mais ne démontrez rien tout en racontant n'importe quoi.

    Les machines outils allemandes vendues chères en Chine ça vous dit quelque chose, vous êtes totalement irresponsable et naïf. Vos billevesées simplistes sont grotesques.

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    1. Hé, Pierrot, arrête un peu, c'est pas sérieux de passer ton temps à tapoter sur ton clavier après tes longues et épuisantes réunions de travail au Medef ! Au final, t'es fatigué et tu écris n'importe quoi en injuriant les citoyens lambda, qui pensent pas comme toi. Enfin, je salue quand même l'utilisation du mot "billevesée", pas facile à placer ici, mais qui démontre une certaine culture classique, même si je préfère personnellement celui de "coquecigrue". Va te reposer un peu Pierrot, les chars russes sont pas encore à ta porte !

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  12. Anonyme17 juin 2014 19:47

    Racontez pas d'âneries, le salaire brésilien minimum est proche de celui chinois, rien à voir avec celui français.

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  13. Anonyme17 juin 2014 19:47

    Ensuite vos iphones seront bientôt fabriqués par des robots, réveillez vous !

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  14. @ Gaël

    Gagnant-gagnant, c’est de la théorie néolibérale non démontrée… Merci pour la précision sur les normes, qui est juste, même si en général, nous sommes encore plus protecteurs.

    @ Anonyme

    Bien d’accord, notamment avec les RDIE auxquels j’ai consacré un papier

    @ Anonyme

    Même The Economist reconnaît que le protectionnisme est à la base du modèle de développement asiatique (Japon, Corée puis Chine).

    @ J Halpern et Abd_Salam

    Merci pour les réponses

    @ JC Werrebrouck

    Je vais aller voir

    @ Cliquet

    Juste

    @ Talisker

    Je n’ai pas forcément envie de rejoindre tout de suite une autre organisation. Mais c’est une idée.

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  15. Vous rêvez, tout a changé, la structure de la production et de l'information, vous êtes à côté de la plaque.

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  16. The Economist raconte beaucoup de conneries, en revanche on sait très bien que les magnétoscopes arrêtés à Poitiers, ou l'Albanie, l'URSS et la Corée du Nord sont des exemples édifiants.

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  17. Démos

    Pfff... Ridicules vos commentaires, aucun intérêt. Vous croyez que les multinationales françaises ne feraient pas de lobbying auprès du gouvernement français, Euro, UE ou pas. Vous êtes d'une naïveté invraisemblable, souveraineté et blablabla, plus de lobbies, plus de MEDEF, abracadabra.

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  18. De toute façon la menace de Sapin est à double tranchant.

    "Si vous m'embêtez avec BNP-PARIBAS je vous embêterai avec le TAFTA" signifie "Si vous me faites des cadeaux sur BNP-PARIBAS je vous en ferai aussi sur le TAFTA"

    Interprétée autrement la menace n'aurait pas de sens. Ou bien Sapin défend l'intérêt général de la France dans les négociations, ou bien il le sacrifie pour servir l'intérêt particulier de cette banque, mais il ne peut pas prétendre faire les deux en même temps.

    Ivan

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  19. Une petite critique du traité; http://www.blogactualite.org/2014/07/traite-transatlantique-de-libre-echange.html

    Il semble évident que ce soit plus arrangeant pour les USA car ceux ci n'ont pas accepté d'y inclure certains secteurs économiques dans lesquels ils ne souhaitent pas être concurrencés. Nous on a fait ça que pour la culture je crois.

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