samedi 18 avril 2015

Après Alstom, le gouvernement abandonne Alcatel



L’abandon de notre industrie

Il y a une vingtaine d’années, Alcatel-Alstom était un des fleurons industriels de notre pays, une des toutes premières capitalisations boursières de France, un groupe qui faisait notre fierté, le General Electric national. Après des erreurs de stratégie, l’ancien conglomérat a été débité en morceaux : Alcatel, Astom et Nexans. Alstom réunissait les activités de production de trains (notamment le TGV) et d’énergie. Mais l’année dernière, le petit poucet français a fait saliver les deux mastodontes Siemens et GE. Après une féroce bataille politique, le géant étasunien l’a emporté, et, contrairement aux belles promesses d’Arnaud Montebourg, a bien croqué Alstom et l’a découpé en morceaux.

Malheureusement, le même scénario se répête avec Alcatel-Lucent. Ici, le groupe français s’était rapproché d’un rival étasunien pour peser dans le marché des équipements de télécommunications. Mais il semble que l’ancien géant du téléphone portable finlandais veut faire subir à Alcatel ce que GE fait à Alstom. Bien sûr ce rachat est présentée comme une fusion et « Nokia s’engage à maintenir les emplois chez Alcatel en France durant deux ans », mais après ? Ces engagements ont toujours une durée de vie limitée, et nous sommes bien placés pour savoir que les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent, que ce soit pour Péchiney (dévoré par Alcan), Arcelor (digéré par Mittal), ou Alstom.

Nos dirigeants aux abonnés absents

Bien sûr, Nicolas Sarkozy avait volé au secours d’Alstom quand il était ministre de l’économie et les rumeurs d’un rachat de Danone par Pepsi avaient provoqué une réaction. Mais il faut aussi voir que la droite a laissé faire la destruction de Pechiney, pourtant un fleuron de notre industrie, tout comme la pseudo-fusion d’Arcelor avec Mittal, qui a abouti à une prise de contrôle du premier par le second. C’est une opération que le simple patriotisme ou le souci d’un minimum de concurrence (les deux entreprises étaient les deux plus grands sidérurgistes) auraient du stopper. Malheureusement, il semble que la majorité actuelle soit encore plus apathique que la précédente, ne s’opposant à presque rien.

Car, outre Alstom, il faut noter que le gouvernement semblait décider à laisser faire la fusion de Publicis et Omnicom, qui a échoué pour d’autres raisons, de même que le rapprochement Holcim/Lafarge, pourtant contestable, et ne semble avoir rien à redire au rachat d’Alcatel par Nokia. Pire encore, le gouvernement a permis une prise de participation à bon prix dans PSA par un groupe chinois. Bref, ici, loin du patriotisme économique d’opérette communicante d’Arnaud Montebourg, le PS semble laisser filer tous nos fleurons industriels qui semblent intéresser des rivaux. Pire, contre quelques engagements dérisoires, nos ministres se transforment en VRP de ce qui ne qu’un démantèlement.


L’accord Nokia-Alcatel doit bien évidemment être combattu, au regard des leçons du rachat d’Alstom par GE. Il est bien évident que la France perdra à un tel rapprochement, qui sacrifiera nos usines et notre savoir-faire, affaiblissant plus encore une base industrielle qui n’en a pas besoin.

13 commentaires:

  1. @LH,

    Sur le sujet de l'économie. Lordon a été remarquable hier chez Taddeï. Il a à mon sens démontré que pour penser la liberté et les dominations - les conditions de l'affranchissement véritable -, il fallait aller au-delà d'un exposé du mécano économique et des théories censées le régir. C'est en s'affranchissant du vocabulaire économique que cet économiste me semble avoir pensé la liberté et les conditions de son avènement. D'ailleurs, tant Lordon que Piketty ont rapidement remis en cause la scientificité de la "science" économique. Toute réappropriation de la liberté, et de ses conditions, passe par un bilan du langage et de la langue parlée dans l'espace public. Pour penser les dominations contemporaines il faut tout d'abord se libérer des chaînes logiques au travers desquels le débat public n'a cessé d'avoir lieu. Voilà pourquoi il faut aujourd'hui et à mon sens revenir à une langue pleinement littéraire et philosophique dans l'espace public, mettant de côté la langue économique et la vision du monde qu'elle porte, dès lors que l'on souhaite sortir de la crise politique actuelle. Les experts ont échoué, ce sont des experts de l'économie qui le disent. Il est temps que l'économie quitte le giron théorique des économistes pour aller vers celui plus pratique et concret des politiques. L'affaire Alcatel rappelle évidemment qu'au centre des débats restent présentes ces mêmes notions qui régissent les enjeux politiques de toujours, et que les vrais sujets s'appellent liberté, domination, indépendance et autonomie. Autant de notions qui n'ont pas attendu la "science" économique pour être posées définies et traitées, et à propos desquelles d'ailleurs je n'ai pas le sentiment que la "science" économique ait ajouté grand chose.

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    1. Effectivement, les interventions de Frédéric Lordon et de Thomas Piketty étaient intéressantes avec un Lordon offensif, précis appelant à dépasser le système dans lequel nous sommes enfermés et un Piketty, à mon avis, plus idéaliste.

      Ceci dit, la désertion du pouvoir politique français que décrit Laurent est une réalité dramatique qui rend les mesures (CICE, ANI ...) et les déclarations socialistes stériles sur l'économie réellement insupportables. D'ailleurs, les quelques groupes industriels français ayant survécu au massacre des années 80-90 disparaissent au fur et à mesure accompagnés par la douce musique des paroles et promesses de nos politiciens.

      L'action politique n'est que du verbe, du vent, sans aucune vision, ni stratégie. La conclusion que nous pouvons en tirer est qu'il faut remettre le système en cause, s'en affranchir, suivant en cela l'approche de Lordon.

      DemOs

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    2. @Demos,

      "La conclusion que nous pouvons en tirer est qu'il faut remettre le système en cause, s'en affranchir, suivant en cela l'approche de Lordon."

      Mon accord en tout point. Alors ne soyons pas trop idéalistes, soyons concrets. Qui peut en 2017 sortir de l'euro ou réorienter l'euro, nous affranchir de la commission européenne et réaffirmer le rôle d'un Etat stratège au sein d'une démocratie rénovée par un plus large champ ouvert au référendum - référendum au surplus respecté, car oui nous en sommes à simplement réclamer que les décisions référendaires soient respectées, oui nous en sommes là. Je ne vois qu'un nom et c'est une femme. Et non il ne s'agit pas d'NKM.

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    3. Lordon n'a jamais travaillé dans une boite, ni dirigé une boite, il se contente de distribuer du haut de sa tour d'ivoire son blabla spinoziste à 2 balles. C'est un fanfaron de cirque, sans plus.

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  2. Tchuruk est issu de nos si fameuses grandes écoles, tout comme Messier et d'autres qui sont du haut de leur prétention vaniteuse à l'origine de ces débâcles à répétition. Il faudrait commencer à se demander pourquoi tant de nullards incompétents sont parachutés à la direction des entreprises français, leur formation et état d'esprit ne sont ils pas à l'origine du problème ? Croyez vous que le gouvernement actuel ou précédent ont une quelconque aptitude à savoir ce qu'il faut pour ces entreprises ?

    Est ce que le contribuable va encore devoir essuyer les plâtres en renflouant une boite qui sera à nouveau coulée par des nuls sortis d'X ou de l'ENA ?

    Regardez le fiasco d'Areva qui s'est faite roulée dans la farine en achetant une mine d'uranium...vide. Ne vaut il pas mieux que ces boites soient reprises par des dirigeants étrangers plus compétents que notre "élite" de dirigeants franchouilles aux bras cassés.

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    1. "Ne vaut il pas mieux que ces boites soient reprises par des dirigeants étrangers plus compétents que notre "élite" de dirigeants franchouilles aux bras cassés."

      Non, tête de con.

      "Tchuruk est issu de nos si fameuses grandes écoles, tout comme Messier et d'autres qui sont du haut de leur prétention vaniteuse à l'origine de ces débâcles à répétition."

      Mais tout l'encadrement scientifique et technique de nos grandes entreprises en est aussi sorti, et c'est comme cela que nous sommes devenus la cinquième économie du monde.
      Les problèmes ont plutôt à voir avec la déréglementation, celle de France telecom en particulier, Alcatel ayant au final fait les frais des erreurs de Michel Bon.

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    2. "
      Mais tout l'encadrement scientifique et technique de nos grandes entreprises en est aussi sorti, et c'est comme cela que nous sommes devenus la cinquième économie du monde."

      Tu racontes des conneries, connard que tu es. Il faudra alors que tu expliques comment si ta version stupide est vraie, pourquoi les boites francaises s'effondrent avec de tels génies ?

      Pourquoi, Microsoft, Apple, Google, Facebook, Amazon, Twitter... c'est aux US que ça se passe et pas en France ?

      Pourquoi les start up francaises des NTIC se barrent rapidos en Californie pour y croitre et restent pas en France ?

      Pourquoi le web a démarré aux US pendant que la France avec ses génies des grandes écoles et Telecom restait bloquée sur le Minitel ?

      La tête de con c'est toi pauvre taré...

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    3. @ Anonyme18 avril 2015 16:52

      Il y a, pour les start-up notamment, un problème de financement, car chez nous, on aime gagner de l'argent, mais sans prendre de risques, façon pépère, quoi ! A l'exemple du MEDEF qui pleurniche sans arrêt pour que le pouvoir lui déroule le tapis rouge et lui file du pognon tout en tapant dessus à bras raccourcis. Le patronat français, quoi !

      DemOs

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  3. On peut signaler que Nokia et Alcatel ont complètement raté les marchés du smartphone qui a été inauguré par Apple puis suivi par des sociétés asiatiques comme Samsung ou Huawei... Ceci montre bien qu'il y a un vrai problème de stratégie dans les entreprises et de recrutement des dirigeants dont le contribuable devrait essuyer les plâtres en permanence et de sa poche.

    Désolé, mais quand des boites sont aussi mal gérées et qu'elles ont loupé le train des évolutions techniques et marchés, l'histoire ne repasse pas 2 fois les plats...

    Areva, en plus de ses erreurs de positionnement, se retrouve avec une cuve, made in France pour le réacteur de Flamanville, probablement inutilisable, et encore des myards d'Euros en fumée.

    Faudra un jour arrêter de se cacher derrière son petit doigt et admettre enfin que ces fiascos à répétition ne sont pas de la faute des méchantes entreprises étrangères qui rachètent les gentilles entreprises françaises qui merdouillent à répétition.

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  4. L'idée que le gouvernement se mêle de cette histoire est très mauvaise car ce gouvernement est nul, regardez la pertinence de la loi de surveillance du net alors qu'ils ne comprennent strictement rien au processus de gestion et traitement des big data tout en ne tenant aucun compte des avis des experts du domaine :

    http://david.monniaux.free.fr/dotclear/index.php/post/2015/04/17/La-science-de-Bernard-Cazeneuve

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  5. Dire que Nokia va croquer Alcatel est un peu ridicule, Nokia est elle même en très mauvaise santé bien loin de sa santé des années 90 quand elle a été un pionnier du mobile. C'est même tout un pan de l'économie finlandaise qui s'affaisse entrainant la Finlande elle même dans une spirale récessionniste.

    Il est tout à fait grotesque de croire que l'état Francais puisse être stratège, ses gouvernements et parlements ne comprennent pratiquement personne ayant travaillé dans le privé et encore moins dans l'industrie, les technologies matures ou nouvelles. Du côté de Bercy c'est pareil, des énarques qui n'ont aucune expérience de l'entreprise. Comment peut on oser prétendre confier à des ignares de ces secteurs l'arbitrage de millions ou milliards d'Euro, c'est tout aussi absurde que d'envoyer réparer sa voiture chez un coiffeur. Ces types n'y connaissant rien se font enfumer par toutes sortes de lobbies ou mettent en place leurs copains, pas la peine de lire du Lordon et ses pignolades métaphysiques pour voir des problèmes bien terre à terre.

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    1. En terme de pignolages, t'en connais un rayon, l'ami.
      Ce qu'a exprimé Lordon hier chez Taddei, ce sont des idées qui n'ont à rien à voir avec l'ENA ou avec le rôle de l'Etat. D'ailleurs, je te signale qu'il y a au moins autant de nullards qui ne sortent, ni des grandes écoles, ni de l'ENA, qui dirigent ou ont dirigé des boîtes privées avec les mêmes résultats catastrophiques que les hauts fonctionnaires. Il faut arrêter avec ce genre d'âneries dans un pays où public et privé vivent en connivence et se renvoient l'ascenseur. Il n'y a visiblement que toi qui n'est pas courant.

      DemOs

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  6. @ Anonymes

    Il faut que j’essaie de revoir cette émission. Ils ont bien raison de remettre en cause la pseudo scientificité derrière laquelle les néolibéraux s’abritent. Sur le langage, je suis bien d’accord, d’où la création du terme « parasite fiscal », pour remplacer « paradis fiscal », le fait que je parle de « désertion fiscale » et non d’évasion

    Et en 2017, je ne crois pas du tout que qui vous pensez ait une chance de gagner comme l’ont démontré les départementales

    Il ne faut pas exagérer. Notre pays compte beaucoup de grandes entreprises qui réussissent, malgré des règles du jeu qui ne leur sont pas forcément favorables

    Il faut que je fasse un papier sur la loi de surveillance, mais avant, il faut que je me documente suffisamment pour en parler

    C’est bien Nokia qui croque Alcatel puisque ses actionnaires auront deux-tiers du nouvel ensemble

    @ Démos

    Le moment venu, ces partis seront remplacés, comme en 1958

    Bien d’accord sur le dernier commentaire. Les généralisations sont souvent abusives

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