jeudi 27 août 2015

Macron, Minc et la Chine : le naufrage de la pensée

L’effondrement de la bulle spéculative Chinoise fait la une de l’actualité et pousse tous les commentateurs à se prononcer sur les soubresauts de l’économie de l’Empire du Milieu. De quoi y déceler les charlatans qui racontent n’importe quoi, comme Emmanuel Macron ou Alain Minc.



Des classes moyennes et des krachs

Le ministre de l’économie (sic) a cru bon soutenir que les principales victimes du krach sont « les Chinois de la classe moyenne, ceux qui, pas forcément les mieux informés, ont investi au plus haut et en s’endettant ». Quel concentré de bêtise en une phrase ! Passons sur le mépris de celui pour qui les classes moyennes sont forcément moins bien informées que les classes dirigeantes… Ensuite, il est tout de même assez peu probable que les classes moyennes d’un pays émergent s’endettent pour boursicoter. The Economist avait relativisé l’importance de la bourse pour les ménages en soulignant que seulement 6% de la population y joue et qu’elle ne pèse que 15% des actifs des ménages. Dans la réalité, l’immense majorité des Chinois qui placent en bourse font sans doute partie des 10% les plus aisés.

Puis, comme l’a noté Paul Conge dans Marianne, Alain Minc a osé nous gratifier d’un commentaire digne d’un premier avril : « Les crises boursières, on en sort toujours plutôt en bon état » ! On imagine que cette phrase serait juste s’il disait, « je » au lieu de « on », mais il est tout de même stupéfiant qu’il ose dire cela après l’épisode de 2008, où il avait extraordinairement sous-estimé la situation. Il est tout aussi effarant qu’il dise que « cela n’a rien à voir avec 2008 », alors que la bulle spéculative, avec l’envolée de l’endettement privé ou le développement de la finance de l’ombre ressemble fort aux moteurs du krach de 2008. Mais il faut reconnaître que l’on peut relativiser l’importance ou les conséquences de ce krach. En revanche, le passé impose d’être prudent et relativise tout pronostic définitif.

Des faits et des commentaires


Il faut malheureusement reconnaître que les débats sur la crise économique Chinoise sont trop souvent superficiels, à l’exception notable de François Lenglet, dont les chroniques ont à la fois de la profondeur et de la nuance. Il est tout de même effarant que de doctes économistes pointent les conséquences pour nos exportateurs, sans même avoir regardé les statistiques du commerce extérieur. En 2014, si nous avons importé pour 43 milliards d’euros de produits à la Chine, Pekin ne nous en a acheté que pour 16 milliards. En clair, une baisse de 10 ou 20% de nos ventes à l’Empire du milieu n’aurait pas d’effet majeur sur notre croissance, à moins, bien sûr, de déclencher un krach mondial.



Le faible montant de nos importations limite les risques pour la France, alors, en revanche, que la baisse du prix du pétrole (76 milliards d’importations en 2014) a un impact bien plus important, et positif ici. Bien sûr, on peut dire que cela va peser sur nos ventes aux pays producteurs de pétrole, mais même cela n’est pas forcément exact car certains pays, riches en réserves de devises, compensent par des déficits budgétaires (16% du PIB en Arabie Saoudite !). Et, on peut rappeler à ceux qui font grand cas de la dévaluation du yuan, qu’elle est infime pour qui sait prendre du recul. Enfin, il faut rappeler que le pays avait provoqué un krach fin 2007, pour casser la bulle spéculative. Ce calendrier pourra en inquiéter certains, mais personne n’a identifié de liens de causes à effets avec le krach mondial de 2008.

Aujourd’hui, je persiste à penser que, dans les conditions actuelles, même 7 ans après 2008 et 14 ans après 2001, un krach mondial n’est pas l’issue la plus probable. La situation est très complexe et il est malheureux que les charlatans de la trempe de Macron ou Minc la caricaturent aussi outrageusement. 

18 commentaires:

  1. La dévaluation du Yuan ne fait que commencer et l'économie allemande va être durement touchée par l'affaiblissement chinois, ce qui affectera toute l'économie européenne et mondiale. Analyser la situation chinoise qu'à travers le prisme des relations commerciales France-Chine est totalement réducteur et erroné.

    http://uk.reuters.com/article/2015/08/26/uk-china-economy-germany-analysis-idUKKCN0QV1NS20150826

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  2. La Chine ne parvient tout simplement pas à sortir de son modèle exportateur malgré des investissements colossaux dans son industrie devenue sur-capacitaire et son immobilier. Donc elle va jouer de nouveau sur le seul levier qui a fonctionné, les exportations dopées par la dévaluation du Yuan.

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  3. Naufrage de l'orthographe! On ne met qu'un seul f à naufrage !

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  4. Les charlatans sans t de la trempe de Macron ou Minc la caricatureNT outrageusement.
    Est-il besoin de citer trop souvent Minc ou Macron, ou encore tous ces économistes faussaires ou imposteurs tels qu'ils sont épinglés par le livre du journaliste économique Laurent Mauduit. En effet il est notoire que la plupart des économistes n'ont pas la neutralité requise dans la mesure où ils travaillent directement ou indirectement pour des banques. Ce serait mieux de se contenter de citer, commenter et diffuser les analyses des économistes hétérodoxes comme Lordon et Sapir

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  5. Merci de m'avoir signalé les erreurs. Article fini un peu trop tardivement

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    1. Charlatan ne prend toujours pas de T en fin de mot même au pluriel.

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    2. Bah , si !
      Les gays , des charlatantes !

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  6. Est ce utile de rappeler que ces 2 individus sont, l'un ministre de l'économie, l'autre conseiller des princes ? Ce qui laisse rêveur...
    Cela dit nos amis chinois sont de grands joueurs je crois et pour gagner sans risque dans une économie casino, je suppose que certains ont pu s'endetter pour spéculer sans risque (croyaient ils) De mes années dans une charge d'agent de change à Paris(il y a longtemps) j'ai appris que les arbres ne montent pas au ciel.

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  7. d'accord Mr Herblay, mais je peux vous garantir que j'aimerais aussi pouvoir raconter autant de conneries que minc à son tarif..

    ce mec là a eu à gérer une seule fois une boutique "CERES" qu'il a coulé.

    par extension, ça laisse rêveur sur la qualité de la cooptation des dirigeants de tous poils qui ont recours à ses services..

    Stan

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  8. quant au jeune macron il a bien profité de son réseau de parrains du système bancaire qui a pignon sur rue à l'élysée, de son carnet d'adresse et de la faiblesse de cette génération de politiques qui recherchent avant tout la tranquilité du renvoi de responsabilité aux instances supra nationales..

    la mélange des genres et les passerelles entre privé et publique bat son plein et ce n'est pas prêt de se terminer..

    si j'osais, je dirais même qu'il faudrait vérifier s'il ne faudrait pas déjà pirater le site du fisc français ou non, au cas où il soit pris en main par les petits hommes gris de la troïka, comme un varoufakis en grèce...qui sait si on n'aurait pas des surprises. On peut parier que ce sont eux qui écrivent déjà nos lois fiscales depuis un bon moment..

    faut dire aussi que l'époque s'y prête, les politiques peuvent raconter n'importe quoi, ça passe, et plus c'est gros.....etc...

    Stan

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    1. fatigué l'homme ce soir, la phrase après "si j'osais' n'est pas nette...désolé...si vous pouvez supprimer Mr Herblay

      merci.

      Stan

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  9. Toujours est il que la souveraineté chinoise ne lui sert plus beaucoup :

    "Plus largement, le poids des difficultés de la Chine, en parallèle d’un effondrement de la Russie et d’une inflation de 60 % au Venezuela, vient éroder chez certains la croyance selon laquelle le capitalisme d’État l’emporterait sur l’économie de marché"

    http://www.project-syndicate.org/commentary/china-economic-slowdown-greater-state-control-by-michael-boskin-2015-08/french#MjOxi3xDy5dy68qL.99

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  10. Si la formulation de Minc est volontairement provocatrice ( ce qui est la meilleure façon de se faire entendre), dans l'absolu, il n'a pas tort du point de vue économique: les crises boursières font éclater les bulles, font le ménage, font disparaître tout ce qui était artificiel et purement spéculatif...mais à un coût social souvent très lourd : c'est à ces crises brutales que le capitalisme doit son extraordinaire pouvoir d' adaptation .

    On le voit bien aujourd'hui avec ce qui se passe en Chine : malgré le pouvoir du gouvernement sur l'économie et sa manipulation des statistiques, il n'a pu empêcher le marché de faire apparaître les vrais chiffres.

    Autre exemple, l' Espagne, dont toute la croissance et sa baisse du chômage étaient basées sur une immense bulle immobilière : après la crise de 2008, elle se retrouve avec des milliers de logements vides, et les mêmes 20 % de chômeurs qu'avant sa pseudo-croissance sous Aznar.

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    1. Ce qu'il oublie de dire c'est que les bulles sont directement le résultat de quarante ans de dérégulation commerciale et financière. La multiplication des krachs aux USA n'a toujours pas permis de remettre l'économie américaine sur de bons rails pour reprendre sa vision de libéral attardé. Ce pays a toujours d'énormes déficits commerciaux et prépare tranquillement sa prochaine crise. D'autre part les crises se multiplient sans qu'il y ait de période de rebond maintenant. Le libre-échange n'a pas transmis la croissance à tous, il a multiplié les crises partout. La crise chinoise n'étant que le résultat de l'effondrement de la demande chez ses principaux clients. C'est une démonstration absolue de la véracité des thèses keynésiennes que ce pauvre Minc déteste. Et il n'y a pas de porte de sortie dans leur cadre.

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    2. Mais non : la bulle des tulipes date du XVII ème siècle, celle des assignats de Law de 1720, celle de 1929 de...1929, etc.

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    3. Oui mais ces anciennes bulles sont aussi dues aux marchés lorsqu'ils sont touchés par l'effet moutonnier, l'Etat était encore moins interventionniste à ces époques.
      Je pense qu'il voulait parler de la multiplication des bulles dans le temps.

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  11. @ Anonymes

    La baisse du yuan est infime et il faut se souvenir que l’euro avait perdu plus de 20%... Attendons de voir ce qui se passe en Chine. L’atterrissage brutal n’est pas certain

    Le modèle gagnant, et stable, c’était celui des Trente Glorieuses, pas le néolibéralisme instable et inégalitaire de notre époque

    @ Elie Arié

    Le problème, c’est qu’il n’a que faire des conséquences sociales désastreuses des krachs, qu’il ne mentionne pas, contrairement à vous. Bon cas que le cas espagnol, mais là, l’euro était largement responsable puisqu’il a imposé des taux trop bas, qui ont nourri cette spéculation.

    Mais justement, nous revenons lentement mais sûrement vers le capitalisme d’avant les Trente Glorieuses, moins régulé…

    @ Yann

    Merci

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  12. Au fond, ce n'est pas nouveau. Les "socialistes"-on ne rit pas- ont toujours, ou presque été les défenseurs serviles du grand capital ultra-libéral. Le "tournant" de 1983 suffirait presque à résumer la composition chimique, si j'ose dire du socialisme français. A part la courte mais lumineuse exception du Front Populaire, que nous ont laissé ces gens en 100 ans?
    Pas grand chose, à vrai dire. Des progrès sociaux tangibles, certes, mais c'était leur rôle, et d'ailleurs De Gaulle en fit autant, sinon plus.
    Il est piquant en voyant Macron ou en lisant Minc, Attalie ou d'autres de voir sous nos yeux se dérouler le même processus, mutatis mutandis, que la dérive qui fitglisser nombre de socialistes et de communistes des années 30, vers le fascisme. Pensons à Doriot, évidemment, mais aussi à Laval ,Déat etc...
    Il y aurait donc, structurellement, dans la "pensée" socialiste en France, un attrait vers l'extrême droite? Macron est un produit de la fondamantale insolence des jeunes loups de la finance. Il sue le mépris pour le peuple. Il aurait fait un parfait Girondin. Zt puis quelle vacuité intellectuelle, en effet , quelle nullité ! C'est consternant et cela ouvre une autoroute au FN. Macron et sa bande de chefs de produits incultes nous ramènent non pas avant les 30 Glorieuses, mais avant 1841 et le Rapport Villermé sur les conditions d'existence du monde ouvrier. Merci encore, de la part du MEDEF , qui ne fut jamais aussi bien ni aussi servilement flatté. Le CNPF, du temps de De Gaulle ne parvint jamais à circonvenir le régime pour tordre le cou aux réformes sociales. Il fallut "un Pompidou quelconque" pour commencer le travail de destruction. Puis Tout un ramassis de médiocres , à part Mitterrand et Chirac, pour gouverner ce pays.

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