jeudi 14 juin 2018

« Pognon de dingue » : le naufrage du fond et de la forme de Macron

Le papier de lundi, où j’expliquais que « le macronisme est avant tout un sarkozysme » pouvait-il trouver une meilleure illustration que la vidéo publiée mardi soir par la présidence de la République où l’on voit le Jupiter de pacotille de l’Elysée faire la leçon à ses conseillers. Les macronistes y verront sans doute un entraineur travailleur et exigeant. Mais, au final, l’impression est désastreuse.


La présidence, façon télé réalité

En effet, on imagine bien que si le Sarkozy de 2007 avait été élu dix ans plus tard, au même stade de sa carrière, il aurait parfaitement pu produire une telle séquence, cette mise en scène de lui-même et des coulisses du pouvoir, ce caractère si jupitérien et inconscient du mauvais effet qu’il peut faire sur les Français. La forme est grossière dans tous les sens du terme. Dans les énormes ficelles communiquantes utilisées : le président travaille tard et est exigeant. Sur la forme : est-il vraiment digne d’un président de faire publier sur son compte une telle séquence ? La mise en scène ressemble un peu trop à des émissions de télévision bas de gamme pour être véritablement crédible.


Et en prenant un peu de recul, on est saisi de vertige devant l’inconscience de la publication d’une telle vidéo. Le président, au pouvoir depuis 6 ans, n’admet-il pas qu’il n’a pas la moindre idée de ce qu’il faut faire pour réduire la pauvreté, et que rien de ce qu’il a fait depuis n’a pas eu le moindre effet, une illustration des plus parlantes du caractère oligarque des politiques qu’il mène ? A minuit, la veille d’un discours majeur, destiné à synthétiser la pensée sociale du président, on découvre qu’elle n’est non seulement pas complexe, mais tout simplement inexistante, Macron en étant encore au stade d’un constat bas de plafond six ans après être arrivé au pouvoir dans les bagages de Hollande...


Cette séquence, c’est le président-nu, nu dans le vide de sa pensée, bien plus superficielle que complexe, incapable d’articuler la moindre réflexion sociale, au-delà de quelques cadeaux éclipsés par son attaque en règle des politiques sociales. La mise en scène du caractère jupitérien du président n’en devient qu’encore plus ridicule, comme un mauvais épisode du loft présidentiel.

22 commentaires:

  1. Le premier ministre Emmanuel Macron arrive déja à bout de souffle au bout d'un an seulement ! Il va devenir tellement impopulaire que le Président de la République devra changer de premier ministre assez vite...

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    1. Vu le peu de consistance donné à son premier ministre... il aura du mal à se servir de lui comme fusible. Il est bel et bien (de lui-même) enfermé dans l'escalade - en premier de cordée. Jusqu'où? Bien difficile de le prévoir - il est déjà hors-sol...

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  2. Les alcoolos, les illettrés et ceux qui ne sont rien finiront un jour par s'énerver grave et casseront la vaisselle.

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  3. Macron n'est pas Sarkozy mais s'il tient des propos que nous jugeons scandaleux. Ceux de Macron sont bien posés et réfléchis mais pas à l'emporte-pièce comme Sarkozy qui s'excusait plus ou moins. Avec Macron nous avons une fois de plus son mépris de classe, celui de la grande bourgeoisie qui l'a financé largement pour faire la politique qu'il fait. Sarkozy était un politicien médiocre, un enfant gâté mais qui avait une revanche à prendre du fait d'études ratées raisons pour lesquelles il était brouillon, agité, grossier, vulgaire et inefficace. Ses saillies choquaient plus, il avait une vraie opposition. Pour Macron cela exprime un vrai mépris de classe.

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  4. J'ajoute que Macron, à mon sens, est pire que Sarkozy. Le premier fait ce que le second n'a pas su ou osé faire : adapter la France à l'UE et la mondialisation néolibérales. La différence est que le monde est en train de changer avec l=le Brexit et l'élection de Trump qui, quoique l'on en pense, change la donne mondiale notamment par la fin du libre-échange intégral, du multilatéralisme et son hostilité envers l'Europe allemande et sa monnaie sous-évaluée trop favorable aux exportations allemandes.

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  5. Sa pensée sociale est peut-être inexistante, mais il est au pouvoir. Lui.

    Alors que vous n'avez pas le début du commencement d'une stratégie réaliste pour y arriver.
    N'est-ce pas là le problème principal ?

    Vous vous limitez à jouer le grand rôle de la diva anti-FN, sans vous demander pourquoi la presse qui veut surtout que rien ne change vous félicite de ces bonnes dispositions.
    Au fait, Marianne reprend-elle encore vos billets ? On soigne souvent la vanité des idiots utiles, et sur site web cela ne coûte rien.

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  6. Comme disait Pasqua...

    https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/06/14/general-electric-ne-tiendra-pas-ses-engagements-en-matiere-d-emploi-en-france_5314859_3234.html

    Ivan

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  7. "Et en prenant un peu de recul, on est saisi de vertige devant l’inconscience de la publication d’une telle vidéo."

    L'inconscience, je n'en suis pas certain du tout.
    Je pense au contraire que cette vidéo publiée est très consciente des propos, du fond, de la forme, et que Macron s'adresse d'abord à ses patrons, puis à un certain électorat.
    Pas nous, bien sûr, puisqu'on ne votera jamais le Mac, on n'est pas dans la cible donc il s'en fout de ce que l'on pense. Il s'adresse à d'autres.
    L'important c'est d'avoir les forces d'argent et les medias avec soi, de maîtriser les remous, et de faire 50%+1 aux élections.

    A ce niveau de politique, les gars maîtrisent leur communication plus qu'on ne peut certainement l'imaginer.

    C'est comme toutes ces belles âmes qui critiquent Trump et qui le prennent pour un âne, elles ont certainement tort. On ne maîtrise pas les forces qu'il y a derrière.

    OK, je vois déjà les trolls qui hurlent au "complotisme". Allez-y les gars, faites-vous plaisir.

    ***Jacko***

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  8. Bien d'accord avec Jacko et bien d'accord aussi avec cet article.Après, je ne savais pas que les gaullistes étaient anticapitalistes, c'est une découverte, pour moi.

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    1. Il me semble distinguer, chez le général de Gaulle, un positionnement critique envers les excès et les limites du capitalisme, plutôt qu'un anticapitalisme à proprement parler. Le capitalisme n'apporte pas une réponse satisfaisante aux problème de l'homme, dit-il dans un entretien avec Michel Droit le 7 juin 1968 (http://fresques.ina.fr/de-gaulle/fiche-media/Gaulle00143/entretien-avec-michel-droit.html).

      Il en s'agit en rien d'une réaction opportuniste aux événements de 1968. Alain Peyrefitte rapporte ces propos du 12 décembre 1962, à la suite d'un Conseil des ministres : « Le marché, Peyrefitte, il a du bon. Il oblige les gens à se dégourdir, il donne une prime aux meilleurs, il encourage à dépasser les autres et à se dépasser soi-même. Mais, en même temps, il fabrique des injustices, il installe des monopoles, il favorise les tricheurs. Alors, ne soyez pas aveugle en face du marché. Il ne faut pas s’imaginer qu’il règlera tout seul tous les problèmes. Le marché n’est pas au-dessus de la nation et de l’État. C’est la nation, c’est l’État qui doivent surplomber le marché. Si le marché régnait en maître, ce sont les Américains qui règneraient en maître sur lui ; ce sont les multinationales, qui ne sont pas plus multinationales que l’OTAN. Tout ça n’est qu’un simple camouflage de l’hégémonie américaine. Si nous suivions le marché les yeux fermés, nous nous ferions coloniser par les Américains. Nous n’existerions plus nous Européens » (Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle, p. 523).

      Les gaullistes de gauche ou sociaux disent souvent que pour eux la doctrine gaullienne leur semble avoir pris la forme d'une tentative pour réconcilier, à travers des dispositifs comme la participation, le capital et le travail. C'est l'idée de la « troisième voie ». On retrouve là les idées du christianisme social auquel le général de Gaulle a été confronté durant sa jeunesse. Il me semble difficile pourtant de ne pas considérer comme un homme de gauche authentique quelqu'un comme Louis Vallon, qui était issu de la SFIO d'avant-guerre. Mais c'est surtout la dérive droitière du gaullisme de gouvernement sous Pompidou qui explique le positionnement de gauche d'une bonne partie du gaullisme social, par réaction. Vallon a écrit en 1969 un ouvrage intitulé L'Anti-de Gaulle qui est une attaque directe contre Pompidou, qu'il accusait d'avoir saboté les efforts pour imposer la participation.

      Mais en définitive, quelqu'aient été les diverses influences qui ont joué dans la construction de la pensée économique et sociale du général, je partage le point de vue de vue de Philippe Levillain selon lequel le gaullisme doit être abordé comme une philosophie politique « sui generis » et non pas comme le produit politique d’idéologies combinées (http://books.openedition.org/irhis/1080).

      YPB

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  9. La vidéo a été postée consciemment. A mon sens, il s'agit d'un geste de communication bien réfléchi. Tout comme les propos tenus dans la vidéo, sans compter la gestuelle...c'est pas mal mis en scène. Et pourquoi ? Car je pense que E. Macron sait qu'une partie de la population va adhérer au discours proposé. En effet, sous couvert d'un discours moderne et plein de bon sens et de jugeote que dit E. Macron à ces Françaises et Français ? Qu'il y a trop de laxisme, d'assistanat qui conduisent à de l'abus et de la fraude qui installent les gens dans la facilité. Or, quand vous touchez le SMIC ou quelques centaines d'euros au-dessus ou le salaire médian (1500/1800 euros) que vous payez des impôts mais que vous êtes jugés bien payés pour accéder à certaines aides qui leur permettraient de respirer et d'être mieux dans leur quotidien. Par ailleurs, que voient ces Françaises et Français que leurs enfants qui devraient être les grands bénéficiaires du système républicain français en deviennent les variables d'ajustement. L'accès à l'université ? Barré par des subterfuges. L'accès à des études en alternance ? Parcours du combattant. L'accès à des bourses ? Jamais. Il en va de même pour certains soins. E. Macron parle des lunettes, des soins dentaires mais il y en a d'autres qui pourraient être cités (l'accès à la psychologie, à certains spécialistes etc...).

    Et quel cheminement produit ce type de discours ? Les pauvres ? C'est bon...ils ne veulent pas se bouger, à part aller pleurer pour toucher des aides et ne pas travailler. Et puis tous ces fonctionnaires payés à rien faire pourquoi ils ne s'occupent pas de la fraude sociale hein ? Ils sont juste là pour défendre leur statut et leurs privilèges etc...etc...etc...

    Et E. Macron a bien compris tous ces ressorts. Son discours en soi est cohérent et on pourrait dire juste et équilibré. Mais il y a le problème de l'idéologie, des non-dits et des vraies visées dont les 2 principales: réduction drastique des dépenses publiques via des coupes dans le modèle social et la privatisation progressif de ce modèle social. Là pour le coup, il est vraiment thacherien et reaganien. Un discours percutant, juste et cohérent pour plus d'ultra-libéralisme. Et hélas....cela marche ! car les ressorts psychologiques, de l'affect sont utilisés.

    D'où la question qui fâche: tout comme pour la fonction publique, la France n'aurait-elle pas intérêt de mettre carte sur table et de discuter en dehors de toute idéologie de son modèle social mais aussi fiscal ? Pas uniquement dire : il y a trop de fonctionnaires, trop d'assistanat etc...mais se demander : où agir comment, quelles ressources engageons-nous ? Et remettre au coeur du débat le sens des obligations des citoyens mais aussi de leurs droits.

    Mais c'est juste mon avis
    Bon WE
    Sylvie

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    1. Pour régner en divisant Macron excite ce qu'il y a de pire dans l'homme : la JALOUSIE.

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    2. Bingo ! Vous visez juste ! En effet, la video du président rappelle foncièrement les discours de Margaret Thatcher de la grande époque. Sous couvert d'une explication de la situation très claire et avec des arguments qui s'entendent très bien. Hélas la mise en oeuvre est une toute autre histoire.

      Maintenant, la fin de votre commentaire est aussi dans le vrai. N'attendons pas que ce jeune président, hors sol, ne s'attaque de façon ULTRA-ULTRA libéral à notre modèle social voire notre modèle total tout court. N'ayons pas pour discuter des thématiques qui fonctionnent bien mais qui effectivement coûtent au système mais que nous devons assumer. Discutons aussi des trappes à pauvreté voire de poches d'assistanat que notre système a créée. Mais surtout ne laissons pas des personnes qui n'ont jamais eu besoin de s'appuyer sur notre modèle nous le confisquer. Soyons citoyens et engagés. Ne cachons rien.

      Je sais c'est du discours aussi, du rêve....tant qu'ils nous en restent...
      L'Anonyme du Jour

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  10. Pas fana de notre nouveau président Emmanuel Macron. Très mal à l'aise face à la video diffusée sur les réseaux sociaux...Pourtant après avoir travaillé 20 ans et quelques mois dans le domaine du social, je suis au regret de dire que oui en France, nous avons un problème important avec nos aides et prestations sociales. Que oui nous avons créé de l'assistanat. Que oui la fraude sociale est bien réelle et beaucoup plus répandue que ce que nous disent les chiffres officiels. Que oui il ne s'agit pas d'une minorité de gens. Que oui pas mal de bénéficiaires font le choix de la facilité de l'aide sociale. Mais chut....ne rien dire et ne rien faire car ce n'est pas bon, ce n'est pas en adéquation avec la pensée française. Quand la gauche arrive au pouvoir, on créé toujours plus d'aides et autres prestations qui coûtent un f...fou sans contrepartie, sans contrôle ou alors on est immédiatement taxé d'anti-pauvre, de richard ou autres caractéristiques de ce type. Quand la droite arrive au pouvoir...on sort tout de suite les grands mots, on ne créé pas plus, on coupe certaines aides mais doucement il ne faudrait pas se taper des poussées de fièvre sociales tous les 4 matins. Finalement qui prend ? Notre modèle social et républicain (pour reprendre la juste expression de certains commentateurs) et la classe sociale qui porte tout le monde dans le pays: la classe moyenne. Résultat: 2002 JM Le Pen au 2ème tour face à J Chirac et 15 ans plus tard sa fille au 2ème tour face à E Macron. ET E. Macron élu porté par un discours qui défrise certains mais contente beaucoup une majorité silencieuse qui a compris depuis fort longtemps que la situation autour du modèle social, de ses ressources, de ses bénéficiaires n'est plus à la hauteur et qu'il sonne faux. Et le nouveau président va pouvoir s'en donner à cœur joie sous couvert d'une meilleure prévention, d'une meilleure répartition etc....tout cela car nous n'avons pas voulu jusqu'à présent appeler un chat un chat.
    Après un peu plus de 20 ans dans le domaine social, j'ai choisi de continuer sous d'autres cieux. Aujourd'hui j'ai 48 ans, je ne regrette pas ces 20 ans dans le domaine social. Jamais je ne regretterai mais j'en ai retenu une grande lucidité face à l'angélisme dont fait preuve aussi L.Herblay dans son article, dont je respecte les avis et les analyses, sur le social en France.
    Ricou

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    1. "Que oui nous avons créé de l'assistanat. Que oui la fraude sociale est bien réelle et beaucoup plus répandue que ce que nous disent les chiffres officiels".

      Personne ne conteste que la fraude existe. Par ailleurs, ce n'était pas le propos du Président, qui posait le problème de l'efficacité des aides. Je trouve très révélateur que vous vous saisissiez de propos à la fois très contestables et d'une portée limitée pour vous épancher sur le thème de la fraude sociale. Par ailleurs, c'est quoi exactement l'assistanat ? Interrogés au printemps 2017, plus de 70 % des Français jugeaient que le système de protection sociale décourageait les efforts ; mais la même proportion estimait qu'il s'agissait d'un bon système, seul un quart des sondés exigeant une réforme en profondeur (https://www.franceinter.fr/economie/lutte-contre-l-assistanat-une-priorite-aussi-a-gauche).

      Vous avez des chiffres sérieux pour affirmer que les montants de la fraude sont très supérieurs aux estimations ? Ou vous vous contentez de rumeurs et d'estimations au doigt mouillé ? Avoir travaillé dans le domaine social vous a donné accès à une expérience limitée. Cela ne fait pas de vous un spécialiste de la fraude sociale, capable de démontrer que les chiffres officiels sont très inférieurs à la réalité. Je veux bien être convaincu de mon angélisme à cet égard, mais par des données fiables. De plus, les gens, très nombreux, qui ne demandent pas des aides auxquelles ils ont droit, par dégoût des démarches administratives ou par ignorance, vous ne risquiez pas de les voir, à l'évidence. Ils restent chez eux et ne vont pas mendier d'assistance, d'où une économie estimée à 10-12 milliards d'euros par an.

      "Selon une estimation de septembre 2016, réalisée pour le compte de l’Assemblée nationale, 36% des personnes qui ont droit au revenu de solidarité active (RSA socle) n’effectuent pas les démarches pour le percevoir. Idem pour 21 à 34% des personnes éligibles à la couverture maladie universelle (CMU). En ce qui concerne l’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS), à laquelle sont éligibles les personnes dont les ressources sont un peu trop importantes pour êtres couvertes par la CMU mais qui restent en situation de fragilité économique, on estime le taux de non-recours à jusqu’à 70%." (http://www.liberation.fr/politiques/2017/01/10/lutte-contre-le-non-recours-aux-aides-sociales-que-proposent-les-candidats_1540139).

      Je suis membre des classes moyennes au nom desquelles vous prétendez parler, je travaille au quotidien depuis plus de vingt ans avec des populations défavorisées et je ne me retrouve pas du tout dans votre discours poujadiste. Inutile de me traiter de gauchiste attardé : jamais syndiqué, je me suis senti gaulliste depuis que je m'intéresse à la politique. Le plus récent sondage sur la question des aides sociales montre qu'une majorité de Français veulent une simplification du système, mais que seuls 38 % des personnes interrogées souhaitent la diminution de ces prestations (http://www.liberation.fr/france/2018/06/14/aides-sociales-les-francais-sondes-d-accord-a-minima-avec-macron_1659179). Ils seraient encore moins enclins à demander leur diminution s'ils étaient correctement informés.

      YPB

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    2. Bonjour YPB,

      Je vous remercie pour votre réponse. Je trouve toujours intéressant la confrontation des points de vue.
      Je suis juste surpris de votre agressivité. Vous me prêtez des pensées que je ne formulerai nullement à votre encontre comme "gauchiste attardé".
      Par ailleurs, vous me prêtez une fonction de porte-parole de la classe moyenne. Absolument pas, je n'exprime qu'une opinion sur l'attaque de cette classe. En aucun cas, je ne cherche à me substituer à vous.

      20 ans dans le domaine social ne fait pas de moi un spécialiste, sûrement mais sans vouloir trop en faire je pense avoir appris quelque peu sur ce secteur. Je pourrai vous retourner la même observation lorsque vous mentionnez votre travail avec des populations défavorisées. Mais je n'en vois pas l'intérêt car votre opinion et votre expérience sont précieux pour alimenter le débat.

      Poujadiste ! Je vous répondrai si vous voulez. Personnellement je ne fais que très peu cas de ce genre d'observations. Après tout, discuter, débattre c'est aussi accepter de s'exposer à la critique. Tant que ce n'est ni de l'insulte, ni de la diffamation ni de la discrimination, rien de grave. D'aucuns prendraient le terme "poujadiste" pour le commencement d'une insulte, moi pas. Il y a des tournures de phrases, des réflexions beaucoup plus pernicieuses et qui pour le coup attaquent votre dignité. Ici ce n'est pas le cas. Et comme la remarque vient d'une personne connaissant le quotidien du secteur social. je prendrai cela plus pour de la conviction et de la croyance dans ce que vous faites. Et c'est tout à votre honneur. Moi aussi, pendant mes 20 ans dans le secteur social j'ai eu cette conviction. Et je crois qu'elle est importante et vous porte quand vous vous confrontez à des situations dramatiques.

      .../...

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    3. .../...

      Je ne fais pas de chiffrage au doigt mouillé et connais une partie des références sérieuses que vous donnez. Merci de les rappeler. Ces chiffres sont effectivement issus de ce que l'administration et les associations analysent et étudient. Mais les chiffres on leur fait dire ce que l'on veut. Le chômage en est un exemple. L'administration est tenue a un devoir de réserve et un sens profond de la confidentialité pour assurer sereinement l'exercice de ses missions. C'est tout à son honneur. Cela créé aussi des zones grises ou de l'information grise. Mais je vous l'accorde tant que rien n'est officiel et que cela reste dans l'information grise, il est contestable de spéculer dessus.

      Vous trouvez révélateur que je saisisse les propos du président pour parler de la fraude sociale. Révélateur de quoi ? De mon poujadisme...Tant que ce n'est que cela.

      Les gens ne touchant pas leurs aides car démarches extrêmement compliquées...Comme certains commentateurs l'ont soulevé dans leurs posts ces personnes incluses dans cette majorité silencieuse qui ne parvient pas ou plus à accéder à notre modèle républicain, est bien un des cœurs de cible de la video de E. Macron. Il ne parle pas de la fraude sociale mais de l'inefficacité de notre modèle (ou si vous avez un mot plus clair et approprié !?). Or, dans les propos de E/ Macron, tout comme dans les discours qu'ont tenu en leur temps M.Thatcher ou R.Reagan ou plus récemment G.Schroder en Allemagne, c'est bien la fraude sociale qu'il insinue de façon perverse. Vous dites de la fraude sociale il y en a toujours eu,tout comme la fraude fiscale. Or, je préfère me faire traiter de poujadiste, d'inexpérimenté du domaine social ( j'y ai travaillé 20 ans et j'y ai passé mon enfance et mon adolescence en tant qu'enfant de la DDASS donc pour le coup je sais ce que je dois au modèle social et républicain français) en parlant ouvertement et frontalement de cette question car comme beaucoup l'ont écrit, E. Macron en flattant le ressenti de la majorité silencieuse ne fait que justifier et préparer les esprits à la privatisation du modèle social français. Alors, je suis poujadiste, je suis inexpérimenté et je fais du chiffrage au doigt mouillé sûrement mais je suis surtout extrêmement inquiet de la stratégie au sommet de l'Etat qui est entrain de prendre au sein de la population. Et ce sont bien mes 20 ans d'expérience dans le milieu social et mon enfance et adolescence défavorisées qui vous parlent.

      Je viens régulièrement sur ce blog et j'apprécie votre sens critique, vos analyses documentées et sérieuses et votre conviction. J'espère continuer à les lire sur de prochaines thématiques.

      En vous souhaitant une excellente journée
      Ricou




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    4. Mon propos n'était évidemment pas de vous injurier en parlant de poujadisme, mais la teneur de vos propos m'évoquait bien cela, au sens où vous sembliez reconnaître une certaine légitimité à l'expression des lieux communs réactionnaires d'une partie des classes moyennes à supérieures (je ne pense bien sûr pas que ces classes soient forcément vouées à être réactionnaires...). Votre réponse est courtoise, ce dont je vous remercie, mais je n'ai pas le sentiment qu'elle apporte beaucoup plus sur le fond.

      Vous semblez vouloir prendre la défense du système social français. Fort bien ! Mais fallait-il le faire en reprenant des éléments de langage de ceux qui ambitionnent de le démanteler dans le cadre d'une révolution thatchérienne à la française et en les légitimant, au nom des attentes d'une « majorité silencieuse » ? Je pense au contraire qu'il faut dénoncer ces éléments de langage et les délégitimer.

      Encore une fois, l'adhésion d'une partie importante de l'opinion à certaines propositions macroniennes ne peut pas être interprétée comme la manifestation du soutien d'une majorité silencieuse, comme le montrent les sondages que j'ai cités. Les Français souhaitent par contre majoritairement une réforme du système de protection sociale, dans le sens d'une plus grande simplicité. Ils souhaitent aussi que l'on lutte contre la fraude. Mais c'est un lieu commun. Noter ce souhait ne peut pas suffire à légitimer la politique actuelle en se persuadant qu'elle va dans le sens des désirs d'une majorité.

      Le propos d'Emmanuel Macron était centré sur l'idée que les aides sociales sont au fond déresponsabilisantes. Il faudrait donc inciter d'abord les gens à se remettre au travail. En gros, ils ne travaillent pas, alors qu'il y a du travail disponible, nous dit-on. C'est un discours typiquement néolibéral. Et fondamentalement faux. Appliqué avec une rigueur toute germanique dans l'Allemagne des lois Hartz, cette idéologie a abouti à un masquage statistique du chômage au prix de l'explosion de la catégorie des travailleurs pauvres.

      YPB

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    5. Cher(e) YPB (je ne sais pas si vous êtes un Messieur ou une Dame donc je fais de l'écriture je ne sais pas quoi),

      Je suis assez d'accord avec Ricou dans le sens où la vidéo postée sur le compte Twitter (du président je crois) certes parle de la déresponsabilisation qu'engendre notre système social. Néanmoins, lorsque j'ai écouté Emmanuel Macron, j'ai vraiment entendu un double langage qui sous-entendait la fraude sociale.Et cela pour un but unique : les catégories sociales qui paient de l'impôt mais se voient de plus en plus déclassées, ponctionnées sans retour ne veulent pas la fin du modèle social et des prestations afférentes elles souhaitent une reprise en main du modèle. Et cette reprise en main passe par le fait qu'il faut responsabiliser de nouveau mais aussi chasser la fraude sociale. Or, si les Français ne veulent pas voir leur système social privatisé comme en Angleterre ou dernièrement en Allemagne ou un système public/privé à 2 vitesses comme au Portugal par exemple car ils savent que ce fameux modèle social français a bien limité la casse lors de crises et surtout pour cette longue phase de mutation économique, politique, sociale, sociétale, sociologique etc...que nous traversons, il n'en demeure pas moins qu'ils sont peut-être pas convaincus mais estiment que la fraude sociale est un si ce n'est le mal le plus corrosif de ce modèle. Emmanuel Macron a très bien compris cette subtilité.Il joue sur cela pour mieux arrivé à une privatisation rampante de notre sécurité sociale, notre hôpital public, notre formation professionnelle, nos allocations chômage, nos allocations familiales etc...L'attitude face à ce système social participe du même principe que sur la réforme de la SNCF. Les Français ne veulent pas voir une SNCF vendue au privé et dont ils perdraient la totalité de leur investissement qu'ils ont donné via l'impôt (comme les autoroutes). En revanche, les Français ne voient plus l'utilité du statut des cheminots (alors que l'on sait que ce n'est pas cela qui plombé la compta' de la SNCF). E. macron connaît parfaitement ces nuances, ces subtilités cela le rend dangereux. Je suis de nouveau d'accord avec Ricou (mais aussi Sylvie de mémoire)E. Macron est dans la même posture que M. Thatcher dans les années 80. Je vous invite à la réécouter. Elle est dans la même dialectique et les Anglais en leur temps ont adhéré. Sauf qu'aujourd'hui c'est un désastre (qui coûte encore plus cher qu'un Etat providence même a minima).

      Enfin j'irai aussi de mon grain de sel. J'ai travaillé dans un service de recouvrement de prestations sociales. Et l'information grise évoquée par Ricou n'est pas de l'ordre du complot ou du phantasme. Sauf que vous vous appelez cela le chiffrage au doigt mouillé.Bah non...Il y a un truc, une info' qui est sortie il y a un mois environ( plus ou moinq) qui a fait tilt chez moi. L'Etat s'est félicité d'un meilleur résultat quant à la lutte contre la fraude sociale. On a débusqué plus de fraudeurs.Pourquoi ? Parce qu'on a demandé aux administrations d'y aller. Vous comme moi nous savons pertinemment que cela ne signifie pas qu'il y a plus de fraudeurs mais une volonté politique de cadrer les choses. Dans une partie de la population, le message transmis a été il y a plus de fraudeurs qu'avant. Et là je me suis dit bien joué Manu ! La prochaine étape cela va être quoi ? La vidéo sur twitter.
      Bonne journée
      Merci à vous, Ricou et les autres pour ces échanges passionnants.
      Don't give up the fight chantait le chanteur ;-)
      Viou

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    6. Je ne comprends pas comment on peut critiquer les procédures kafkaïennes qui dissuadent de nombreux citoyens de faire valoir leurs droits et en même temps regretter qu'il y aurait malgré cela encore trop de fraude.

      Car c'est justement sous prétexte de lutte contre la fraude que toutes ces procédures kafkaïennes ont été créés...

      Ou alors il faut remettre en cause la complexité du système, c'est-à-dire réduire le nombre de conditions draconiennes à remplir pour avoir droit à quelque chose, et donc le nombre de justificatifs à fournir pour prouver qu'on remplit toutes les conditions...

      Mais cela aboutirait automatiquement à augmenter le nombre de bénéficiaires, donc le coût de chaque dispositif et quelque chose me dit que Macron ne voudra pas en entendre parler.

      Ivan

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    7. Je ne suis pas convaincu (mais je ne peux avancer à cet égard que des hypothèses crédibles, non des certitudes) que la démagogie de la dénonciation des fraudeurs aux aides sociales soit le message subliminal essentiel que Macron ait cherché à faire passer.

      Dans l'Allemagne des lois Hartz, comme auparavant en Grande-Bretagne, le moteur des réformes n'a pas été en effet, ou seulement à la marge, la dénonciation des tricheurs. Le discours a été plus idéologique, appuyé sur un pseudo-savoir économique apparemment crédible qui mettait en avant la notion de « chômage volontaire » (voir la vulgate libérale sur ce sujet, résumée sur le blog Contrepoints : https://www.contrepoints.org/2013/05/13/124181-la-strategie-du-chomage-volontaire).

      La raison en est double : la mise en accusation d'une large partie de la population, à laquelle on reprocherait de tricher, est clivante, politiquement risquée ; la lutte contre la fraude sociale ne pourra jamais rapporter que des miettes (voir le rapport Tian de 2011 : http://www.assemblee-nationale.fr/13/rap-info/i3603.asp) et risque in fine d'attirer l'attention sur l'importance autrement significative d'autres fraudes dont les chômeurs, les malades ou les familles modestes ne sont pas responsables, comme celle de l'impôt sur les sociétés. La fraude fiscale représenterait entre 60 et 80 milliards d'euros de manque à gagner chaque année pour l'État. Les estimations (forcément un peu vagues) qui ont été faites de la fraude sur le RSA concluent que celle-ci serait environ 15 fois inférieure aux sommes économisées par sa non-perception (voir le rapport de 2011 du Comité national d'évaluation : http://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/1_Le_non-recours_au_rSa_et_ses_motifs.pdf).

      La brutalité apparemment très démagogique des formulations d'E. Macron, illustration de son mépris de classe (dans les deux sens du terme : le mépris du premier de la classe ; le mépris pour ceux qui ne sont pas de sa classe) ne doit donc pas dissimuler la richesse de l'arrière-plan idéologique qui les alimente. Hollande, qui l'a porté là où il se trouve, avait justifié en 2014 sa politique économique par une version vulgarisée de la prétendue loi de Say, à l'occasion, ce qui n'a rien d'un hasard, du lancement du « Pacte de responsabilité et de solidarité ». « Responsabilité », le grand mot est lâché. Nous restons ici dans le même ordre d'idées, avec la théorie du caractère prédominant du chômage volontaire. Macron applique simplement les théories économiques qui lui ont été inculquées comme des vérités d'évidence par des maîtres comme Hollande : le chômage n'est pas lié à l'insuffisance de la demande agrégée, mais aux caractéristiques de l'offre ; son caractère structurel implique que l'on contraigne les chômeurs à s'adapter en les « responsabilisant », etc. La lutte contre la fraude ne sera jamais qu'un prétexte, à mettre prudemment en avant par ailleurs, compte-tenu des risques qu'elle implique (voir le cas Fillon…).

      YPB

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  11. @ Anonyme 8h55

    Pas d’accord. Je pense que Macron est paradoxalement moins réfléchi quand il parle. Il se lâche plus que Sarkozy (mais dans un style plus lettré, qui peut sembler moins choquant). Mais sur le fond, je pense qu’il est encore plus agité, vulgaire, grossier et inefficace que Sarkozy. Il n’y avait pas de mépris de classe chez Sarkozy, que la vie politique avait probablement rendu plus proche des Français que Macron, ce qui en dit long. Macron est plus brutal.

    @ Anonyme 14h59

    Le FN n’a aucune chance d’arriver au pouvoir, comme l’a montré 2017

    @ Jacko et Sylvie

    La vidéo est calculée, bien sûr, pour couper court à toute attente sociale sérieuse. Elle n’en demeure pas moins inconsciente de ce que vivent les Français. Il pourrait se mettre dans une position minoritaire à force d’être si brutal.

    Une remise à plat ne serait sans doute pas inutile, mais rien ne montre que nous dépensons trop, au contraire :
    http://www.gaullistelibre.com/2013/09/56-du-pib-de-depenses-publiques-et-si.html

    En effet, dans les sociétés ultralibérales, l’égoïsme est sensé être la glue de la société, donc tout le monde veut prendre quelque chose aux autres, dans une course sans fin

    @ YPB

    Un grand merci pour ces réponses !

    @ Marie

    Les propos du Général sur l’économie sont absolument incroyables d’actualité. Sa critique des excès du capitalisme est criante d’actualité et s’il disait qu’il faisait le choix de l’économie de marché, il mettait souvent le communisme et le capitalisme sur le même plan pour critiquer leurs excès.

    @ Ricou

    Cela fait longtemps que la gauche n’a plus créé d’aides nouvelles (sans en supprimer d’anciennes). Même les 35 heures ont bénéficié aux cadres

    @ YPB

    Merci

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