samedi 4 janvier 2020

Les records révélateurs des marchés financiers


Alors que de plus en plus de peuples se révoltent contre leurs dirigeants, que l’économie mondiale est en difficulté, il y a quelque chose de surnaturel à constater la croissance des marchés financiers en 2019, 26% pour le CAC 40, 27% pour le Dow Jones et 32% pour le Nasdaq. Une performance particulièrement révélatrice de tous les dysfonctionnements de notre époque.




Misère en bas, champagne en haut



Bien sûr, des analystes à courte vue trouveront toujours des raisons pour expliquer au premier degré l’évolution des marchés financiers en 2019 : retournement de la politique monétaire étasunienne, détente dans le conflit commercial entre les Etats-Unis et la Chine ou clarification du Brexit. Mais ce qui frappe dans les comptes-rendus de ces « performances », c’est le manque absolu de recul dans la présentation de cette envolée des cours de la bourse, qui va produire un nouvel enrichissement exceptionnel des milliardaires. Il ne serait pas inintéressant de souligner le contraste avec l’état chancelant de l’économie mondiale, et plus encore, la révolte des peuples devant la dégradation de leur condition.

Ce grand écart illustre on ne peut plus clairement le déséquilibre de notre système économique, qui tourne pour une toute petite minorité au détriment de tous les autres. Le constraste entre l’envolée de la valeur des entreprises et la situation sociale actuelle est révoltant. Il faut malheureusement reconnaître que cela reflète une double réalité. D’abord, une réalité structurelle : jamais les grandes entreprises n’ont réalisé autant de profits et réussi à générer autant de valeur pour leurs actionnaires, pour reprendre le jargon des affaires. Ensuite, une réalité conjoncturelle, avec des politiques publiques en leur faveur : les Etats baissent leur fiscalité dans une course au moins-disant suicidaire, tout en démantelant les droits sociaux, quand les banques centrales ajustent les politiques monétaires à leurs besoins.


En somme, cette envolée reflète une triste réalité économique, celle d’une élite qui peut s’approprier toujours plus au détriment de tous les autres, avec le soutien des Etats. Mais ce constat est à double tranchant, tant il accrédite la dénonciation des politiques inégalitaires menées depuis des décennies, et provoque une remise en question politique de plus en plus radicale, comme le montrent la primaire démocrate aux Etats-Unis ou l’évolution du discours d’un Thomas Piketty. Difficile de ne pas penser que nous approchons d’un point de rupture tant les excès actuels sont révoltants, comme l’illustre le palmarès des patrons étasuniens les mieux payés, où le dixième a empoché la bagatelle de 44 millions de dollars !



Pire, cette hausse des bourses est bien évidément une nouvelle bulle, après celles de 2001 et 2008. Certes, le CAC 40 n’est revenu qu’à ses sommets de 2007, après plus de 12 ans. En revanche, la situation outre-Atlantique est totalement extravagante avec un Dow Jones deux fois plus élevé qu’avant le krach de 2008 ! Pire, le NASDAQ, à plus de 9000 points, est plus de trois fois plus élevés qu’à son pic de 2008 et près de deux fois plus qu’en 2001. La valorisation de certaines entreprises est totalement irrationnelle, notamment Uber, malgré la chute de son cours, ou Tesla, dont les performances financières n’ont strictement aucun rapport avec la valorisation de l’entreprise, la deuxième de l’industrie automobile, derrière le groupe Volkswagen, mais devant GM, Daimler-Benz, BMW ou Renault



Cette envolée des marchés en 2019 en dit long sur tout ce qui ne va pas dans notre monde : inégalités extrêmes, puissances publiques au service des 1% et plus globalement, système économique qui ne tourne plus que pour une minorité. Pire, comme toujours, cette minorité créé une nouvelle bulle financière, qui va éclater dans les prochaines années, et fera du mal à ceux qui n’y ont rien à voir…

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