dimanche 21 avril 2024

Moscovici, Le Maire et les déficits : ce fiasco qui se poursuit

L’avertissement de Pierre Moscovici sur le déficit et le « manque de crédibilité » des prévisions de l’exécutif est tout aussi révélateur qu’indécent. Indécent de voir cet ancien ministre du budget, dont les prévisions ont été totalement infirmées par la réalité se poser depuis en donneur de leçon, européen, puis français. Révélateur aussi de l’impasse actuelle tant la direction proposée par le président de la Cour des Comptes ressemble à celle que propose l’actuel locataire de Bercy.


 

Déguiser une impasse en volontarisme illusoire

 

La séquence budgétaire des deux derniers mois est calamiteuse pour l’exécutif. La capacité à bien gérer le pays était un des derniers bastions du bilan auquel pouvait espérer se raccrocher la macronie avec quelques acrobaties de communication. Certes, c’était une pure posture infirmée par de nombreux dossiers, des failles du plan de soutien à l’économie en 2020 à la vente, inutile, de très coûteux bons du trésor indexés sur l’inflation, mais l’indulgence coupable des grands médias permettait à ce narratif de subsister dans le dernier carré des soutiens du président. La double révision à la hausse du déficit 2023 et 2024 questionne de manière plus dure encore la compétence de l’équipe au pouvoir. Il est extravagant que le déficit 2023 soit revu si fortement et tardivement. La réalité, c’est que la macronie ne maîtrise rien, n’anticipe rien, et ne fait que subir et réagir aux évènements, se contentant de communiquer maladroitement.

 

Ce dérapage rend logiquement très peu crédibles les prévisions gouvernementales d’ici à 2027, Bruno Le Maire parvenant à promettre en même temps un rééquilibrage assez brutal des finances publiques et un rebond de croissance. Logiquement, tous les experts, même les plus conformistes et connectés au pouvoir actuel, critiquent vertement un scénario aussi irréaliste, l’effort budgétaire devant forcément peser sur la croissance. Il est sacrément piquant que Moscovici prenne le rôle de vigie, lui dont les prévisions comme ministre du budget de Hollande ont été tout aussi calamiteuse. Lui ministre, il promettait en 2012 de tenir un déficit à 3% du PIB dès 2013. Puis, il a repoussé sa promesse à 2015, avant de la repousser à nouveau à 2017… En étant indulgent, on peut a minima lui accorder un certain crédit pour repérer des trajectoires économiques irréalistes, surtout quand elles reprennent les recettes que lui avait appliqué quand il était en charge des finances publiques sous le mandat de Hollande.

 

Mais ce qui est piquant dans l’interview très indulgente du Figaro, qui omet de mentionner son lourd son passif budgétaire à Bercy, c’est quand il en vient à tenter de dessiner une solution. D’abord, il affirme qu’il faut privilégier la réduction des déficits à la croissance, en reprenant tous les éléments de langage oligarchistes, issus du duo Thatcher-Reagan, ce qui en dit long sur ce parti Prétendument Socialiste, qui produit des dirigeants à l’agenda économique aussi anti-social. Dans un en même temps tout macroniste, il refuse « je ne sais quelle cure d’austérité » et appelle à un vaporeux « changement de paradigme », qui permettrait miraculeusement de définir des « économies intelligentes », qui ne pénaliseraient pas la croissance. De manière tout aussi révélatrice, il appelle à « créer les conditions pour que notre dette se finance au moindre coût », ce qui revient à faire la politique de la France à la corbeille, alors même qu’il cite ce mot du Général. Ce qu’il défend, c’est l’austérité que prépare l’exécutif en place…

 

Son seul apport consiste à alerter sur des hypothèses de croissance irréalistes dans un tel contexte, qui, si elles sont corrigées, imposeront encore plus d’austérité, et donc encore moins de croissance, puis encore plus encore d’austérité, dans un cercle vicieux qui rappelle le précédent grec. Ce faisant, il démontre la faillite complète du modèle économique suivi par nos dirigeants depuis des décennies (Moscovici et Le Maire inclus…), inscrit dans les traités de l’UE. Seule une rupture complète avec ce cadre en échec et profondément destructeur permettrait de sortir enfin la tête de l’eau, de financer nos services publics, plutôt que de les appauvrir jusqu’à l’os avant de les transformer en rentes juteuses pour le privé, comme on le voit pour l’électricité. Le logiciel économique PS-Macron-LR, qui fait des intérêts de l’oligarchie la seule boussole de l’action publique en espérant un ruissellement est en échec.

 

La fiasco budgétaire de la macronie est bien sûr une preuve d’incompétence, tant découvrir en février 2024 les trous de 2023 et de l’année en cours en dit long sur la compétence de ceux qui nous dirigent. Mais plus largement, cela démontre l’impasse des politiques suivies, l’absence totale de ruissellement des dizaines de milliards données aux plus riches et aux entreprises.

3 commentaires:

  1. Les francais ne veulent pas travailler plus que 35 heures, veulent partir a la retraite a 60ans, reclament de l'argent qu'ils ne meritent pas du tout (gilets jaunes), refusent la mondialisation, pensent que la France est une "Grande Nation".... C'est pas surprenant que cela termine en echec total...

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  2. Merci à Laurent Herblay pour ce rappel de la situation budgétaire et économique. Nos dirigeants sont certes de lamentables pantins, mais dans un pays qui n'a pas la souveraineté monétaire et dont la monnaie est surévaluée, maîtriser les déficits jumeaux, du commerce extérieur et du budget de l'Etat, est une tâche impossible. Il faut toujours revenir à la question de l'euro.

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    1. jacques
      il faudrait peut-être apprendre des hollandais

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