jeudi 13 juin 2013

Finance, Europe, Allemagne, Japon : quand Hollande fait du Sarkozy


Nicolas Sarkozy était coutumier des impostures. Tantôt il se faisait communautariste néolibéral atlantiste, euro-béat. Tantôt, sous la plume de Henri Guaino, il se faisait républicain, pourfendeur du capitalisme dérégulé et de l’euro cher. Malheusement, son successeur met ses pas dans les siens.



Contradictions germano-japonaises

Il n’est pas courant que je sois d’accord avec Alain Duhamel. Cependant, il faut bien reconnaître que mercredi matin, une partie de la chronique de l’infatiguable journaliste de RTL visait juste. En effet, il a souligné la contradiction majeure que représentent, à quinze jours d’intervalle l’hommage appuyé fait à la politique de Gerhard Schröder lors des 150 ans du SPD et le fait d’appeler ensuite l’Europe à s’inspirer de la politique du nouveau premier ministre du Japon, Shinzo Abe.

A Leipzig, le 23 mai, devant Angela Merkel, François Hollande a ainsi vanté les « réformes courageuses pour préserver l’emploi et anticiper les mutations sociales et culturelles comme l’a montré Gerhard Schröder » affirmant que l’« on ne construit rien de solide en ignorant le réel ». Puis, en visite d’Etat au Japon le 7 juin, il a vanté « cette priorité donnée à la croissance, cette volonté de lutter contre ce qui est appelé ici déflation, cette exigence de faire en sorte que la compétitivité des entreprises soit recherchée en même temps afin qu’il puisse y avoir soutien à l’activité c’est une bonne nouvelle pour l’Europe, parce qu’en Europe aussi nous avons à donner priorité à la croissance ».

Pourtant les deux politiques sont largement contradictoires. Leur seul point commun (les vrais socialistes apprécieront…), c’est la déréglementation du marché du travail. Mais à part cela, il n’y a strictement rien à voir entre les deux. L’Allemagne mène une politique de désinflation compétitive, de rigueur budgétaire extrême (avec un déficit public de 0,3% du PIB en 2013) et refuse toute monétisation. Le Japon fait un plan de relance avec un déficit de 8,7% du PIB, veut faire plus d’inflation (pour sortir de la déflation) et fait tourner la planche à billets à très grande vitesse pour cela.

Contradictions géographiques ?

Le problème est qu’avec François Hollande, la contradiction, c’est souvent ! Nous avions déjà été sacrément servi pendant la campagne présidentielle, quand celui qui s’était alors déclaré l’ennemi de la finance avait donné quelques jours plus tard une interview au Guardian pour dire « aujourd’hui, il n’y a pas de communiste en France… La gauche a gouverné pendant 15 ans, pendant lesquels elle a libéralisé l’économie et ouvert les marchés à la finance et à la privatisation. Il n’y a pas de crainte à avoir », pensant peut-être que personne ne lirait ce qu’il disait à Londres…

Le président de la République n’est également pas à une contradiction prêt dans son discours européen. Il a le toupet de vanter le dérisoire plan de croissance ajouté au TSCG, traité austéritaire s’il en est, alors même que la croissance s’est effondrée dans la zone euro depuis. Dans la même veine, il s’est permis de répliquer sèchement aux recommandations faites par la Commission Européenne en matière budgétaire, après avoir justement ratifié un traité qui donne autorité à cette même Commission pour juger les budgets de la France ! De même, ses critiques sur la gestion de l’euro sont ridicules.

En fait, même si la forme reste très différente, sur le fond, sur beaucoup de sujets (Europe, mondialisation), François Hollande tient le même discours que Nicolas Sarkozy. Un volontarisme de façade qui n’a d’égal que la résignation de nos deux derniers présidents qui ne font que s’agiter pour donner l’impression qu’ils agissent, alors qu’en réalité, leurs seules décisions consistent justement à réduire toujours plus leur capacité d’action. Pire, ils n’hésitent pas à tellement adapter leurs discours à leurs audiences qu’ils en viennent à dire tout et son contraire à quelques jours d’intervalle.

Ce faisant, je suis heureux de ne pas avoir fait de choix au second tour de l’élection présidentielle. Certes, François Hollande se tient mieux que son prédécesseur, mais sur tellement de sujets, il met ses pas dans les siens, notamment dans cette capacité à dire tout et son contraire.

8 commentaires:

  1. Pas d'inquiétude à avoir :

    "plus personne ne contrôle les dépenses de l’Etat, et plus personne ne parvient à le diriger. L’Etat est un bateau ivre qui part à la dérive."

    http://www.eric-verhaeghe.fr/budget-de-letat-ca-sent-laugmentation-dimpot/

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  2. OLAF, vous avez bien de la chance !
    Combien de français n'ont plus les moyens de faire face ?
    Devons nous "vendre le bateau ivre" ou changer l'équipage ?
    sans nul doute, il faut changer l'équipage la gouvernance et les "marins" parlement ......
    1960 milliards de dette à la fin de l'année.

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    1. De la chance ? J'ai surtout vu le vent venir il y a 10 ans puis ai fait l'effort, car c'en est un, de mettre les voiles pour diverses raisons spécifiques à mon cas ou générales.

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  3. Félicitations d'avoir eu ce flair .....Hélas, tout le monde ne le pouvait pas, il faut bien le reconnaitre .....
    Aujourd'hui, le vrai problème c'est de vider l'équipage et les parasites qui tournent autour.
    Il faut reconnaitre que c n'est pas simple.
    Si celà était voulu ....rien ne se passerait sans douleur....
    la meilleure façon de régler le problème : blocage du paiement des charges et impots, par toutes les entreprises !!!!
    or, il y a celles qui travaillent avec l'état ? SINON, çà dure 1 mois !

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  4. @Gilco

    La dette est une arnaque, les intérêts sont une arnaque, mais il faut arrêter de se focaliser sur son montant... tous les financiers se battent pour nous prêter à moins de 2,5% sur 10 ans ; profitons-en plutôt pour investir pour le futur quitte à augmenter la dette (de toute façon quasi irremboursable !)

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  5. Hollande est un robinet, mais un robinet archaïque, qui n'est pas capable de produire de l'eau tiède d'un coup. Même ça, il ne sait pas le faire. Alors, avec le robinet Hollande, c'est tantôt l'eau froide, tantôt l'eau chaude.
    Vous me direz que le résultat est identique. Pas tout à fait, car il existe une différence de taille tout de même : la douche écossaise pour les Français.

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  6. Il me semble que Shinzo Abe n'a pas encore appliqué de reforme de dérégulations dans l'économie.
    Je précise cela parce que j'entends et je lis assez souvent que la relance japonaise actuelle serait en partie le fruit de politiques libérales ce qui m’étonne. C'est peut être une énième tentative de récupération, comme cela a été fait avec la Suède à qui on attribuait sa croissance à une réduction du nombre de fonctionnaires, (réduction en trompe l'oeil de plus...) en oubliant soigneusement de parler de la baisse de la couronne.

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  7. Mardi 18 juin 2013 :

    Affaire Cahuzac : Hollande a été informé le 15 décembre de l’enregistrement.

    Alain Zabulon, directeur de cabinet adjoint du président de la République, a affirmé mardi qu’il avait prévenu le 15 décembre François Hollande de l’existence d’une bande enregistrée provenant de Michel Gonelle sur laquelle une voix attribuée à Jérôme Cahuzac avouait détenir un compte en Suisse.

    Alain Zabulon, auditionné mardi matin par la commission d’enquête parlementaire sur l’affaire Cahuzac à l’Assemblée, a relaté son entretien avec François Hollande :

    « Le président de la République est très attentif, demande ce que j’en pense. A la fin il me dit: ’si vous avez un nouveau contact avec Michel Gonelle, dites-lui que ces informations doivent être sans délai apportées à la connaissance de la justice’ et ne me donne aucune autre instruction ».

    Alain Zabulon a parallèlement confirmé avoir reçu le samedi 15 décembre, depuis son domicile, un appel téléphonique de Michel Gonelle, ancien élu RPR ayant perdu la mairie de Villeneuve-sur-Lot au profit de Jérôme Cahuzac, qui lui dit détenir une bande enregistrée sur laquelle l’ex-ministre avoue détenir en compte en Suisse.

    « Il me dit, ’j’ai conservé cet enregistrement’ ». A la fin de la conversation, « il me demande mes conseils, mes instructions (...) Je lui dis ’je vais d’abord en référer en interne dans ma maison’ », a raconté Alain Zabulon, en précisant qu’ils avaient convenu de se rappeler.

    « Je vais voir le secrétaire général de la présidence à qui je commence à raconter (...). Pierre René-Lemas me propose d’aller dans le bureau du président de la République. Je rends compte en détail de l’entretien que je viens d’avoir, au président de la République et secrétaire général », a-t-il expliqué.

    http://www.lesechos.fr/economie-politique/politique/actu/0202836191589-affaire-cahuzac-hollande-a-ete-informe-le-15-decembre-de-l-enregistrement-576847.php

    Question :

    Si François Hollande a été informé le 15 décembre de l'enregistrement, pourquoi a-t-il attendu le 19 mars 2013 pour virer Jérôme Cahuzac ?

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