dimanche 2 novembre 2014

La tragi-comédie européenne dérisoire et révélatrice sur les budgets


Ces dernières semaines, les capitales européennes n’ont pas cessé de débattre de leur budget et de celui des pays voisins. Les nouvelles règles européennes (six pack, two pack et le TSCG) ont révolutionné la façon de préparer cet élément fondamental de notre vie commune qu’est le budget d’une nation.



Règles et relativité

Comme au début des années 2000, quand Berlin et Paris avaient délibérément ignoré les règles du Pacte de Stabilité, les règles européennes semblent être faites pour ne pas être respectées. Cela a déjà été le cas pour la plupart des pays qui ont eu recours à « l’aide » européenne pendant la crise des dettes souveraines. L’Espagne était sensée atteindre 6% du PIB de déficit en 2012, 4,5% en 2013 et 3% en 2014. Elle sera à 5,7% cette année. Idem pour la Grèce ou le Portugal. Mais depuis 2013, la contagion touche désormais les pays qui ne sont pas passés sous les fourches caudines de la redoutable troïka. Les objectifs ne cessent d’être repoussés à Paris, à Rome, à Vienne et ailleurs.

La France est un des cas les plus frappants puisque Pierre Moscovici avait annoncé un déficit à 3% du PIB en 2013 à son arrivée à Bercy. Un an plus tard, il a reconnu qu’il faudrait attendre 2015, et un an plus tard, Michel Sapin a encore repoussé l’objectif de deux ans. De manière effarante et ironique, c’est Pierre Moscovici, l’architecte de l’échec financier de la France, qui est devenu le très improbable Commissaire  Européen à l’économie. Quel meilleur signe de l’irresponsabilité et de l’inconséquence de l’UE ? Tout ceci pose un gros dilemme à l’UE : que faire face au non-respect par Paris de ses objectifs ? Cette semaine, Michel Sapin a lâché 3,6 milliards pour éviter toute sanction.

Un système fou

Le système actuel a démontré son échec, exactement comme les opposants à l’austérité, dont j’ai fait partie dès le début, l’avaient anticipé. Fin 2009, j’écrivais, sur la Grèce, que « la déflation compétitive (…) serait extrêmement brutale et aurait sans doute des conséquences sociales violentes » et en mai 2010 que le plan « ne fait que repousser les problèmes à plus tard en les aggravant ». C’est le paradoxe de cette situation où les politiques de réduction des déficits demandées par l’Europe provoquent une déprime économique qui empêche directement l’atteinte des objectifs définis par ces mêmes politiques ! C’est sans doute pour cela que les écarts finissent par être admis car ils sont généralisés.

Ce faisant, tout le monde est perdant. L’UE, parce que presque personne ne respecte ses objectifs, la faisant apparaître comme l’avocate d’une austérité sans cœur, inefficace et impossible à respecter. Mais cela lui permet aussi de gagner de nouveaux pouvoirs, même si elle rechigne parfois à les utiliser. Les pays parce qu’ils apparaissent comme des mauvais élèves et qu’ils ont cédé une partie de leur autorité. Et les peuples européens souffrent depuis 2008, ne parvenant pas à sortir d’une crise dont l’origine leur est étrangère mais qui y restent de manière bien spécifique.

Tout ceci a pour seul mérite de montrer que l’Europe politique n’a pas de sens étant donnée l’hétérogénéité des situations. Elle ne fait que créer une complexité dysfonctionnelle et déresponsabilité pour les dirigeants nationaux et européens, qui en viennent à torturer leur propre population.

13 commentaires:

  1. A lire sur le site de Descartes un billet intitulé : "A Bruxelles, mieux vaut négocier avec le FN avec un FN dans sa poche ..." ou comment l'UE prend en compte les résultats du FN, « le seul à ne pas réciter l’évangile de "l’Euro qui protège", du "SMIC européen", la "relance européenne" ...

    Demos

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. * Lire "A Bruxelles, mieux vaut négocier avec un FN dans sa poche ...." et non avec le FN.

      Supprimer
  2. "Mais cela lui permet aussi de gagner de nouveaux pouvoirs, même si elle rechigne parfois à les utiliser."

    Mais non, elle n'y rechigne pas. Elle y va petit à petit, tout simplement.

    Ceux qui ont accepté de renoncer à la souveraineté française s'en amusent, d'autant qu'ils seront bientôt en retraite.
    On coupera peu à peu toutes les dépenses publiques sauf celle-là, cela ne les gêne donc pas : après eux le déluge.

    Les autres devront bien s'y faire, mais il ne faut pas les brusquer.

    RépondreSupprimer
  3. Comme le met en évidence Jacques Sapir la parole de Mario Draghi, le patron de la BCE, a perdu une grande part de crédibilité pour les marchés financiers en raison du retour des spreads et de la désunion du marché obligataire. Tant que l'Allemagne y verra son intérêt le système perdurera.

    RépondreSupprimer
  4. Le fascisme se définit donc comme un mouvement révolutionnaire contre la démocratie, non seulement comme système institutionnel, mais comme culture et comme pratique. Son principe fondamental, commun à toutes ses variantes nationales, reste un anti-individualisme farouche.

    http://www.laviedesidees.fr/Karl-Polanyi-le-marche-et-le.html

    RépondreSupprimer
  5. Le plan secret d'Angela Merkel pour revenir au Deutsche Mark :
    Berlin pense, à se désengager de la monnaie unique avant qu'il ne soit trop tard. "Euro auf Wiedersehen" Goodbye Euro, nous avait tant aimé. A la base de ce revirement, il y aurait d'abord la décision de la France de ne pas respecter la contrainte de 3% et les difficultés à maintenir la rigueur imposée par les traités de l'UE dans la zone euro selon le désir d'Angela Merkel. l'hypothèse circulant dans les milieux politiques à Berlin liés à la chancelière chrétienne-démocrate serait bien définie : Dans le cas d'un effondrement soudain de l'euro, l’Allemagne se prépare à un retour offensif au Deutsche Mark. Traduction partielle d’un texte en italien :

    http://abceconomics.com/2014/11/01/euro-addio-il-piano-segreto-di-angela-merkel-tornare-al-marco/

    Il faut rappeler néanmoins que l’Allemagne est la grande gagnante de la zone euro. En Janvier 1999 quand elle entre dans la zone euro, elle a un chômage à 9% il est maintenant à 5% et c’est le seul pays de la zone euro qui a aujourd’hui moins de chômage qu’au moment de l’entrée dans l’euro. Il est plus élevé dans tous les autres pays de la zone euro même dans les quelques pays qui se portent bien comme l’Autriche qui a 4% de taux de chômage au moment de l’entrée dans l’euro, 5,1% aujourd’hui. L’Espagne en a 14,5% au moment de son entrée dans l’euro, 24% aujourd’hui. La Grèce qui entre dans l’euro en janvier 2001 avec 10,5% de taux de chômage en à 26,4% aujourd’hui ;

    En 1999, quand elle entre dans l’euro l’Allemagne a une balance des paiements courants déficitaires de 31 milliards d’euros, en 2014 elle sera excédentaire de 237 milliards d’euros environ. Le système de monnaie unique et de concurrence totale a amené un transfert de richesses de la partie non compétitive vers la partie compétitive, de la périphérie vers le centre. Et il est devenu très difficile de corriger les déséquilibres créés dans un système celui de l’euro dont la performance économique moyenne en termes de taux de chômage et d’évolution du PIB est inférieure à celle d’autres zones monétaires, car la zone euro n’est pas une zone monétaire optimale.

    Saul

    RépondreSupprimer
  6. Les députes ont supprimé la baisse de l'aide publique aux partis politiques qui était prevue au prochain budget.

    On voit bien que l'austerité c'est pas pour tout le monde. Surtout quand ceux qui font les regles de l'accès au pouvoir sont les mêmes que ceux qui profitent du pouvoir.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Et cela commence à se voir.
      Pour ma part, quand nos "bien-aimés dirigeants" (marque déposée) actuels et ex-dirigeants politiques n'ont que les mots de conservatisme, de peur, de corporatisme à la bouche, je ne peux m'empêcher de penser qu'ils projettent leur vécu sur nous sans forcément s'en rendre compte.
      A contrario, je n'en ai jamais entendu aucun employer le mot exemplarité ou suffrage populaire. Il y des mots tabous ou d'autres qui n'ont qu'une acception pour nos représentants si peu représentatifs.

      Demos

      Supprimer
  7. @ Pinsolle
    Je vous signale ce papier sur le Figaro
    http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2014/11/03/31001-20141103ARTFIG00350-nous-socialistes-devons-assumer-notre-multiculturalisme.php
    A noter que cette femme dont l'élection a été invalidée nous montre un exemple un pays où il y a 1% de musulmans et ou il n'y a pas d'allocs pour les immigrés. Surtout pas d'Ame pour les clandestins (enfin je crois). Quand au patriotisme des communauté voici la vidéo du Rev
    Wright ex d'Obama http://www.youtube.com/watch?v=Ix-AMYos0Js
    Vous devriez répondre avec un papier.

    RépondreSupprimer
  8. "Surtout quand ceux qui font les regles de l'accès au pouvoir sont les mêmes que ceux qui profitent du pouvoir." dixit Saul

    On touche là le coeur du problème. Je regrette que Laurent et beaucoup de visiteurs de ce blog refusent de voir la centralité du problème purement politique.

    Notre façon de désigner nos responsables politiques rend intrinsèquement ceux-ci vulnérables à l'influence des lobbies.
    L'oligarchie économique s'est infiltrée dans les ors de la République.
    C'est fou de voir aujourd'hui la connivence des cadres de l'UMPS, de nos parlementaires nationaux et européens avec les grandes firmes.

    C'est le jeu des chaises musicales et des renvois d'ascenseur en permanence.

    Il faut rompre cette complicité qui mine l'Intérêt Général au profit d'une classe de prédateurs opulents qui se prennent pour des génies.

    La Vème République est pourrie, percluse de vers. Il n'y a que les gaullistes à pleurnicher sur les conséquences mais à refuser de voir les causes.

    Il ne vous arrive jamais de penser que le Général se mordrait peut-être les doigts s'il voyait le système de filous qui a détourné la République de l'intérêt national?

    Il faut redéfinir les garanties d'indépendance de notre république vis-à-vis des lobbies, d'indépendance des médias pour assurer l'information et la transparence et de la justice pour traquer les parasites sans aucune indulgence.

    Bien à vous quand même!

    Et vive la Sixième République et la Constituante populaire!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui, le résultat, nous l'avons sous les yeux : nos bien-aimés dirigeants ne sont pas représentatifs. L'ont-ils d'ailleurs jamais été en dehors de rares périodes ?
      Ceci dit, deux conditions au moins doivent être réunies pour changer notre système politique : la première est que ceux qui détiennent le pouvoir le provoquent ou y soient contraints, la seconde est qu'une alternative solide émerge et soit choisie par le plus grand nombre. Reconnaissons que, pour le moment et sans désespérer, comme le disait sœur Anne, on ne voit rien venir.

      Demos

      Supprimer
  9. 2 articles intéressants dans le Diplo de ce mois de novembre :

    - L'Europe condamnée par l'Europe, sur les politiques d'austérité ;

    - Etats en miette dans l'Europe des région, sur le bénéfice des éclatements nationaux pour l'UE supranationale.

    Bonne lecture !
    Olivier

    RépondreSupprimer
  10. C'est un système de crapules , qui ne soucient guère de la stabilité de l'économie , mais cherche par tous les moyens à exploiter la chair humaine sous toutes ses formes, pour conforter une politique de marketing destinée à composer des dossiers et des thèmatiques d'actualités, je déplore l'absence de réactions procédurales et de négociations de certains états européens concernés par cette cacophonie internationale qui touche la population et non pas les dirigeants.
    Nous sommes loin d'un processus de paix, chacun en profite à bon escient, tant qu'on a les poches pleines et les comptes bien remplient on veut représenter une gouvernance d'une ampleur extravagante, sur le plan national , c'est encore pire, les administrations, les hopitaux, s'attribuent des devoirs auxquels elles ne sont pas habilités et osent corrompre la sécurité de la citoyenneté, pour extrapolier, conforter un système d'une politique qui est déjà répugnante, comme si on en avait pas assez fait,ils sont rigolos sur la scène politique , il ne savent que chercher pour trouver l'intrus, ils ne cherchent pas à améliorer la faim, la pauvreté, ou encore la paix dans le monde, et que fait on des consensus de paix, ils sont toujours tournés vers l'europe , j'approche l'anorexie, face à tant d'abus.

    RépondreSupprimer