lundi 23 janvier 2017

Le PS poursuit sa droitisation

Bien sûr, on peut retenir du résultat du premier tour la victoire d’un Benoît Hamon sur une ligne présentée comme marquée à gauche. Mais quand on prend un peu de recul, on peut aussi voir les plus de 40% réalisés par les tenants d’une ligne prétenduement « sociale-libérale », où l’on cherche le social. Et si ces primaires illustraient, elles aussi, la droitisation de notre vie politique ?



Valls toujours plus droitier, Hamon pas si à gauche

Il est très clair que les dits Républicains ont viré à droite. Tous les candidats avaient un programme bien plus à droite que celui de Nicolas Sarkozy, en 2007 et en 2012, entre coupes massives des dépenses publiques et baisses massives des impôts pour les entreprises. Et d’ailleurs, le candidat le plus modéré, qui était le favori des sondages, a largement été battu. A première vue, on pourrait voir dans la première place de Benoît Hamon un écho à la montée d’une gauche véritablement socialiste aux Etats-Unis, avec Sanders, ou en Grande-Bretagne, avec Corbyn. Mais beaucoup de faits infirment cette vision et semblent indiquer au contraire que le PS continue sa marche libérale-libertaire.

Déjà, comment ne pas être effaré que lors du dernier débat, les candidats se demandaient jusqu’où il fallait baisser l’impôt sur les sociétés : 28, 25 ou 20%, contre 33% aujourd’hui (et 50% quand le PS était arrivé au pouvoir la première fois). Bien sûr, le PS ne propose pas une nouvelle baisse des taxes des entreprises, au contraire des Républicains, mais il a aussi réalisé une baisse historique, de 50 milliards ! Et qu’après cela, ils veuillent la continuer démontre l’évolution effarante de ce parti qui ose encore se dire socialiste. En 2012, la ligne authentiquement eurolibérale de Manuel Valls réunissait à peine 5,6% des voix. Aujourd’hui, avec Valls, Peillon, de Rugy et Pinel, on est proche de 44%.

D’ailleurs, le discours de Benoît Hamon est-il tellement à gauche ? N’est-il pas avant tout libertaire, ce qui est une charactéristique très ambiguë, qui mène souvent à une acceptation de l’ultralibéralisme ? D’ailleurs, le revenu universel qu’il a défendu est souvent populaire dans les milieux ultralibéraux. Et son rétropédalage sur le sujet en renforce doublement le caractère électoraliste, sachant que sur les questions économiques, il reste très flou. Y aurait-il un loup ? Etonnament, Génération Libre, juge le programme de Hamon à peine moins libéral que celui de Valls (33 contre 36%). D’ailleurs, Hamon ne s’est pas ému des effarantes propositions de baisse de l’impôt sur les sociétés dans les débats.


Hamon n’étant pas plus à gauche que Aubry, et si ce à quoi nous avons assisté dimanche, c’était plutôt une forte poussée de l’aile eurolibérale, portée par un Manuel Valls passant de 5 à 31%, utilement couvert sur sa droite par de Rugy et Pinel ? Au point que l’ancien premier ministre ose faire campagne sur la défiscalisation des heures supplémentaires ou la baisse des impôts des classes moyennes…

20 commentaires:

  1. On peut voir le verre à moitié vide ou à moitié plein. Voir le score de + de 40% des sociaux-libéraux ou celui, majoritaire, de Hamon et Montebourg. On peut aussi voir la faible participation et se dire que l'électorat du PS a boudé la primaire.

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  2. "D’ailleurs, le revenu universel qu’il a défendu est souvent populaire dans les milieux ultralibéraux."

    Il y a de multiples versions du revenu universel, manifestement vous ne connaissez pas le sujet.

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    1. C'est bien parce que le revenu universel à de multiples interprétations et projets d'application qu'il plaît aussi aux ultra-libéraux.
      Manifestement vous-même avez du mal avec ce sujet :-)))

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  3. Si la synthèse hollandaise a perduré, elle le doit moins à son instigateur qu'au fait d'avoir reflété des contradictions du coeur de l'électorat socialiste: vouloir du social tout en acceptant une construction européenne antisociale. De ce point de vue, Hamon n'est pas vraiment en rupture avec l'ère Hollande: il se veut plus social que Valls tout en refusant de défier l'Europe. Qu'Edouard Martin ait argumenté sa préférence pour Hamon par rapport à Montebourg au nom du côté plus pro-européen du premier en dit long.

    Un candidat de la synthèse est bien parti pour triompher de deux lignes qui, quoi qu'on pense d'elles, avaient le mérite de la clarté: défier l'Europe (Montebourg), l'accepter et en accepter les conséquences antisociales (Valls). Il est donc faux de faire d'Hamon le Fillon du PS, l'homme au tweed ayant pour seul mérite sa cohérence. Il est également faux de faire du second tour quelque chose qui trancherait deux caps, un remake de Blair contre l'Old Labour : ce sera juste un social-libéral assumé contre un candidat de la synthèse. Et vu ce que j'ai dit plus haut des contradictions des électeurs PS il n'est pas étonnant que le second soit bien parti pour l'emporter.

    Il est enfin faux de voir dans le phénomène Macron qui capte beaucoup de déçus du PS une aspiration à la clarté: c'est au contraire la preuve que ceux qui désertent le PS se portent de nouveau sur un candidat de la synthèse. Un candidat de la synthèse jeune et tendance, qui propose du Fillon sans le sang et les larmes (contradiction digne de Hollande). Un type qui prétend resacraliser la fonction présidentielle tout en étant complice de ce qui la vide de sa substance (mondialisation, construction européenne).

    JZ

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    1. Lu dans L'Express:
      "Parti en campagne dès l'été 2016, l'ancien ministre du Redressement productif s'est une nouvelle fois posé en chantre du "Made in France", ciblant prioritairement les classes moyennes et populaires frappées de plein fouet par la mondialisation.

      A rebours de cette stratégie, Benoît Hamon a visé un électorat des grandes villes. En témoigne ses projets de revenu universel et de légalisation du cannabis, qui ont imprimé le rythme de la campagne. Le choix du second a été payant."

      Une preuve de plus de l'écart entre la supposée légitimité populaire de la primaire et le fait que les plus défavorisés la boudent. Avec au finish un probable vainqueur PS qui se sera adressé à Juppéville et Collombville et un vainqueur LR qui aura parlé à la fraction de la Droite qui rêve de Thatchérisme gaulois. Avec des débats centrés sur des sujets décalés par rapport à l'aspiration majoritaire. Sinon, il y a quand même une ironie à voir celui qui contribua à la mise en place du système des primaires en France absent du second tour. Une démonstration de plus de leur absurdité?

      JZ

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  4. J'en retiens surtout que les électeurs de gauche ont choisi d'avoir le choix entre deux titulaires d'une licence d'histoire à l'université, qui n'ont pas eu d'autre activité professionnelle que politicienne.

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    1. Qu'avez-vous contre les diplômé(e)s en histoire ? Moi je suis titulaire d'une maîtrise (on dit master 1 maintenant) dans cette noble matière. Ah ouais...comme vous le soulignez très justement ma maîtrise d'histoire m'a portée vers des cieux professionnels autres que l'activité (le noyautage, le pantouflage, le grenouillage etc...) politique.
      :-)

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  5. @ Moi

    Mais est-ce que le score de Hamon et Montebourg qualifie vraiment pour un verre à moitié plein

    @ Anonyme 11:03

    Je vous renvoie au papier en lien (et aux liens inclus) qui vous montreront que je connais un peu le sujet

    @ JZ

    Très bien vu ! Je suis bien d’accord pour dire qu’Hamon n’est pas si en rupture que cela. En effet, ces primaires ne sont guère réjouissantes

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    1. Vous ne comprenez rien au revenu de base, la preuve, vous assénez que c'est une mesure libérale, votre argument bateau chaque fois que n'avez aucun argument digne de ce nom, à part vos leçons de morale à la con.

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    2. "Mais est-ce que le score de Hamon et Montebourg qualifie vraiment pour un verre à moitié plein"

      En tout cas, par rapport à la période 2012-2017 qui se termine, on ne peut pas dire que la victoire probable de Hamon correspond à une "droitisation" du PS.

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    3. @ Anonyme 23/01 20.00:

      Juste histoire de donner un peu d'éclairage au débat. Les libéraux qui défendent le revenu universel supposent qu'il se substituerait à la totalité des aides sociales.

      Et je suis personnellement contre pour diverses raisons:
      -Symptôme d'une Gauche intellectuellement à bout de souffle sachant que c'est un peu la "suite" du RMI/RSA. Quoi qu'on pense de Montebourg, la démondialisation était au moins un concept neuf en son temps.
      -Ce n'est pas parce que la délocalisation risque un jour de concerner les jobs qualifiés et que les robots remplaceront une partie des emplois actuels qu'il faut accepter le chômage comme une fatalité.
      -C'est un véritable "droit de rémunérer trois fois rien" le salarié. Pourquoi un entrepreneur se soucierait-il de donner un salaire décent si l'Etat donne un complément de rémunération?
      -Un tel revenu peut légitimer une évolution vers les contrats de travail hyperprécaires à l'anglaise au nom du "t'as un minimum pour vivre, tu peux donc bien accepter un contrat zéro heures.".

      JZ

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  6. Il y a quand même des électeurs qui cherchaient simplement quel bulletin serait le meilleur pour faire barrage à Valls, et qui hésitaient entre Hamon et Montebourg.

    Au 2ème tour ils ne se poseront plus la question.

    Dans le département du Nord Hamon passait au 1er tour. Dans mon bureau de vote aussi, et c'est pas un quartier bobo.

    Il ne se sont pas déplacés à cause de la législation sur le chanvre indien, même si cela jouait plutôt contre Montebourg, mais pour récompenser l’œuvre de Valls comme elle le mérite.

    D'ailleurs Valls et même Montebourg ont fait mieux dans le Vieux Lille (quartier bobo) Pas d'inquiétude, là aussi Valls était éliminé, et Hamon élu au 1er tour.

    Ivan

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    1. Cette thèse du barrage se défendait dans le cas Fillon, les sondages donnant "casseroles" Sarkozy perdant au second tour face au "candidat bobo" Juppé et Fillon gagnant. Alors que les sondages ne donnaient pas cette fois Hamon plus facilement vainqueur au second tour de Valls que Montebourg. Il y a sans doute quelque chose de l'ordre de la prime à celui qui donne le tempo de la campagne (un peu comme NS avec les heures sup' détaxées et FH avec la taxe à 75%... ou Fillon avec son lavage ultralibéral plus blanc). Sauf qu'on peut quand même s'inquiéter de voir que ce tempo fut donné par un thème bobo (le chanvre) et du réchauffé rocardien (le revenu universel, mauvais remake du RSA lui-même remix du RMI). On peut aussi penser qu'au rayon candidat anti-Valls le capital sympathie a joué en faveur de Hamon, le côté arrogant de Montebourg jouant en sa défaveur (après avoir soupé de l'arrogance vallsienne justement).

      JZ

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  7. Primaire à gauche: Pour Malek Boutih, «Benoît Hamon est en résonance avec une frange islamo-gauchiste»

    http://www.20minutes.fr/politique/2001583-20170124-primaire-gauche-malek-boutih-benoit-hamon-resonance-frange-islamo-gauchiste?utm_source=dlvr.it&utm_medium=twitter#xtor=RSS-149

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  8. "Un tel revenu peut légitimer une évolution vers les contrats de travail hyperprécaires à l'anglaise au nom du "t'as un minimum pour vivre, tu peux donc bien accepter un contrat zéro heures."

    Ah non, c'est plutôt "tu me proposes un boulot de merde payé des figues, alors va chier, j'ai de quoi tenir". A ma connaissance, les anglais n'ont pas de RU et sont obligés d'accepter n'importe quel boulot de merde, même les allocations chômages sont pourries.

    "Pourquoi un entrepreneur se soucierait-il de donner un salaire décent si l'Etat donne un complément de rémunération?"

    Parce que le revenu de base permet de dire merde à l'employeur qui donne un revenu indécent.

    Par exemple, en France on me propose des revenus de merde, je travaille dans un autre pays.

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    1. Sauf qu'il ne sera possible au gars concerné de refuser que si le RU est supérieur ou égal au salaire minimum. Ce qui présenterait le danger ne pas inciter à trouver un emploi. Or le RU aura besoin d'un maximum de gens qui paient des impôts pour être financé. C'est d'ailleurs la contradiction structurelle du principe du RU: être une forme d'acceptation de la fatalité d'une raréfaction future du travail (robots, délocalisations)... tout en ayant besoin d'un maximum de gens qui travaillent pour être financièrement pérenne.

      Et parmi les effets pervers possibles du RU: il pourrait légitimer la suppression de toute aide sociale, le MEDEF pouvant dire "il n'y en a plus besoin avec le RU". Ou comment une mesure fille du rocardisme pourrait aboutir à liquider le modèle social bien plus efficacement que le Fillon de base.

      JZ

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    2. Petite parenthèse: selon Marianne, le RU rencontrerait un écho auprès de jeunes Français se retrouvant dans une situation de plus en plus proche de leurs voisins des pays du Sud. Je peux comprendre et d'ailleurs beaucoup de vingtenaires acceptent comme une fatalité l'idée que leurs contrats de travail seront précaires et leur salaire ridicule. Ils choisissent (et ça peut se comprendre) de ne pas surinvestir dans leur travail salarié. Tout au plus rêvent-ils d'être un jour startupper qui s'enrichit vite avec une idée révolutionnaire (équivalent pour leur génération du mirage Tapie). Sauf que dans ce contexte je vois le RU comme la mauvaise réponse à une bonne question. Je peux également comprendre le fatalisme de la jeunesse, son sentiment d'être incapable de changer les choses. Mais cela devrait être le rôle du politique de proposer une vraie perspective de changement et non un sparadrap sur une situation désespérée.

      JZ

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  9. @ Anonyme

    J’ai dit que c’est souvent populaire dans les milieux ultralibéraux, ce qui est un fait (la généalogie de l’idée l’a fait parfois remonté à Friedmann). Je n’ai pas dit que c’est une mesure libérale. Je vous renvoie à mes papiers, bien plus nuancés que vous (ce qui n’est pas difficile).

    @ Moi

    Pas sûr du tout qu’Hamon tienne un discours si à gauche que cela. Il m’apparaît surtout comme libertaire (cannabis, communautarisme, délinquance) bien plus que progressiste économiquement (sur ces questions, il reste très flou). Si l’aile gauche du PS, c’est le libertarisme, alors, il me semble que ce parti poursuit sa droitisation.

    @ JZ

    Merci pour cette remise en perspective

    @ Ivan

    Mais Valls est-il le pire des deux. Je commence sérieusement à penser que c’est l’inverse (cf propos rapportés par bob

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    1. "Pas sûr du tout qu’Hamon tienne un discours si à gauche que cela. Il m’apparaît surtout comme libertaire"

      Mais sur les questions économiques et sociales, il est contre le CICE, pour la hausse du smic et des minima sociaux, pour la retraite à 60 ans, etc. Il est donc plus à gauche que Hollande et Valls.

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    2. Sauf que cela ne sert à rien d'avoir ce type de positions lorsque, comme Hamon, on est un européiste. Cela revient à déplorer les effets dont on chérit les causes. Ou à défendre ce que la construction européenne ne permet pas. C'est pour cela que son positionnement n'est sur le fond pas si différent du flou hollandais.

      JZ

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