Sans doute longtemps retenus par la réalité électorale, les macronistes ont évité d’incriminer directement les boomers… avant que François Bayrou fasse ses sorties la semaine dernière. Ce faisant, il reprend un discours largement présent dans l’oligarchie (The Economist). Mais ce discours n’est ni juste, ni exempt d’arrières pensées, et les premières victimes pourraient en être les jeunes générations.
Diviser pour mieux régner
Les promoteurs de la retraite par capitalisation sont également aux aguets car la réduction du montant des pensions par répartition représenterait une opportunité majeure pour développer la capitalisation, et les frais très rentables qui vont avec. Avec un bloc central et des médias qui vont dans le sens de l’oligarchie, il faut avoir à l’esprit que ce narratif sert aussi leurs intérêts en promouvant le recul de l’État et la privatisation de nos retraites… Le 27 août, François Bayrou a affirmé sur TF1 que « les premières victimes sont les plus jeunes des Français, qui devront payer la dette pendant toute leur vie (…) pour le confort des boomers, qui (…) considèrent que tout va très bien » avant de demander aux boomers de soutenir l’effort budgétaire pour ne pas laisser une dette trop élevée à leurs enfants et petits-enfants.
Premier angle mort : les dettes publiques ne baissent qu’exceptionnellement en valeur. En général, au mieux, un pays atteint l’équilibre budgétaire, et donc émet autant de dettes qu’il en rembourse, son poids se réduisant du fait de l’inflation et de la croissance, même si elles sont limitées. Si le poids de la dette par rapport au PIB peut baisser, la baisse du montant brut est exceptionnelle, et elle n’est pas nécessaire. En cela, l’image de la dette laissée aux enfants est totalement abusive dans les faits, et représente une nouvelle manipulation du débat. D’ailleurs, autre angle mort, le poids des intérêts de la dette, même s’il progresse très fortement actuellement (moins de 2% du PIB cette année), reste nettement inférieur au poids qu’il a pu atteindre (plus de 3% dans les années 90), ce qui dément les discours alarmistes.
Mais surtout, ces déficits profitent-ils tant que cela aux boomers, au détriment des jeunes ? Nouvel angle mort : ces déficits ont profité aux entreprises et aux plus riches, qui profitent aujourd’hui de plus de 100 milliards d’euros par an de baisse d’impôts et de taxes depuis 2012 (CICE, pacte de compétitivité, impôt de production, ISF, baisse de l’IS, PFU). Bref, sur les plus de 1000 milliards de dette supplémentaire de Macron, la majorité provient des mesures pour les entreprises et les plus riches. Ceux qui l’attribuent aux retraites ne sont pas honnêtes car le régime n’a que très peu généré de déficit depuis 2017, et que les retraités ont déjà été mis à contribution depuis 2012 avec 2 réformes du régime, la hausse de la CSG, et la désindexation. Ils ont perdu près de 10% de leur pouvoir d’achat !
Et s’ils paraissent relativement bien traités par rapport aux salariés, ce n’est que parce que leur revenu médian réel a baissé de 20% depuis 2000. Mais depuis 2012, les retraités sont largement mis à contribution. Et, autre angle mort, le COR montre que l’application des deux dernières réformes va réduire de 15% le niveau des pensions par rapport aux revenus des salariés. Pour couronner le tout, avec des hypothèses démographiques réalistes (le scénario central du COR ne l’est pas), le régime des retraites sera équilibré, même en 2070… Dernier angle mort particulièrement éclairant : le discours qui consiste à vouloir mettre à contribution les boomers à la retraite en réduisant leurs pensions est surtout une mise à contribution des actifs et des jeunes, qui seraient les premiers perdants d’une baisse des pensions futures.
Rien ne va dans incrimination parfois agressive des boomers. Non seulement la dénonciation artificielle de bouc émissaires est un procédé choquant, qui revient à diviser pour mieux régner. Ensuite, ce discours est profondément injuste et qui plus est, les mesures proposées finiraient par pénaliser davantage les plus jeunes, dont les pensions seraient abaisées pour toute leur retraite, par rapport aux boomers…
L' offensive de la macronie contre les boomers n'a rien d'étonnant.
RépondreSupprimerLa popularité de Macron chez les jeunes (moins de 34 ans) a chuté à seulement 16%, ce qui est dramatique car ces jeunes, à la différence des boomers, seront encore là dans 30 ou 40 ans.
Chez les seniors, (>65 ans) la situation est moins grave, et la popularité est encore à 33%
Il faut donc recruter rapidement des votes des jeunes et se donner vite une image de "parti des jeunes".
Même si l'attitude va-t-en guerre de notre président risque de déplaire aux jeunes, qui n'ont pas spécialement envie d'aller en Ukraine se battre contre les russes