vendredi 28 août 2015

La grande convergence des gauche et droite de gouvernement en Europe

On en parle depuis longtemps, notamment depuis le début des années 1990, avec l’accord sur la politique de franc cher, puis le soutien donné aux traités européens. Mais ces dernières années semblent indiquer une accélération de ce phénomène de convergence partout en Europe, ou presque.



Convergence eurolibérale

Bien sûr, ce phénomène prend des formes différentes selon les pays. Mais les cas se multiplient. En Grèce, Syriza a eu besoin des voix de Nouvelle Démocratie pour faire voter les trois textes demandés par la toïka. En Italie, Matteo Renzi gouverne déjà avec le soutien d’une coalition réunissant des éléments de gauche et de droite, sur un agenda de libéralisation marqué. On peut également rappeler qu’en Grande-Bretagne, les conservateurs et les libéraux-démocrates ont gouverné ensemble pendant cinq années, tout comme la CDU et le SPD en Allemagne depuis plusieurs années, avec l’ironie d’une gauche qui a mis en place les lois Harz et d’une droite qui met en place un salaire minimum plus tard.

Bien sûr, pour l’instant, les symptômes sont moins marqués en Espagne, encore que l’on peut considérer que l’émergence de Podemos démontre que le PSOE ne porte pas une opposition suffisante au PP. Et en fonction des résultats des élections législatives à venir, et du score des indépendantistes, une alliance du centre-gauche et du centre-droit pourrait être le produit de la fragmentation de la vie politique espagnole. En France, la convergence vient sur les idées. D’abord sur l’Europe, avec le soutien concomitant à Maastricht (incluant quelques meetings communs), puis le TCE, le traité de Lisbonne, ou le TSCG. Mais aussi sur les questions économiques, avec la quête effarante de compétitivité, ou la libéralisation du travail le dimanche, où Hollande finit par tenir les promesses de Nicolas Sarkozy.

Une démocratie au rabais

Cette grande convergence pose naturellement un problème démocratique, criant en Grèce, où Syriza, élu pour mettre fin à l’austérité et la tutelle, finit par prendre les mêmes décisions que Nouvelle Démocratie et fait passer les textes de la troïka avec le soutien de la précédente majorité. Mais le problème est presque aussi criant en France, entre un Sarkozy qui promettait  de remplacer le TCE par un mini-traité limité aux questions institutionnelles et prenant en compte le non de 2005 et un Hollande, qui, d’ennemi de la finance et de l’austérité, s’est transformé en leur premier avocat… Pour la gauche et la droite, cela ne pose pas de problème du moment qu’ils continuent à se partager le pouvoir.

Mais ce faisant, les citoyens ont l’alternance des dirigeants (et encore, largement limitée à seulement deux partis), sans avoir une véritable alternance des politiques menées, puisque les changements de majorité se traduisent principalement par des changements de forme, et seulement des nuances sur le fond. On voit poindre une volonté de changement avec l’émergence de partis comme Syriza et Podemos, qui ont réussi à renverser les deux partis historiquement dominant. Mais la capitulation complète du premier en Grèce complique grandement la situation et il n’est pas sûr que cela amène de l’eau au moulin des vrais partis alternatifs, qui pourraient être soupçonnés de capitulation.


Nous vivons une période de transition. L’accélération de la convergence entre la droite et la gauche de gouvernement rebat les cartes politiques dans un sens qui devrait, à terme, pousser les citoyens à rejeter les partis traditionnels. A moins que l’expérience Syriza ne les disqualifie, pour le moment.

23 commentaires:

  1. L'expérience Syriza démontre surtout qu'un parti pro-européen ne voulant pas sortir de l'euro ne sera pas en mesure de changer de politique. C'est donc ce genre de parti (comme Podemos d'ailleurs) qui se trouve disqualifié mais non les partis souverainistes et eurosceptiques. On va le constater aux prochaines élections grecques ou Aube Dorée devrait faire un bon score, hélas.

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  2. Cette convergence entre la droite et la gauche de gouvernement n'est pas neuve mais date de la campagne pour la ratification du traité de Maastricht et elle n'a fait que s'accentuer depuis 1992. C'est pas un hasard si le slogan UMPS faisait un "carton" d'où la nécessité et l'habileté de Sarkozy en faisant main basse sur le beau nom de Républicain mais pour mieux le dévoyer comme tout ce qu'il touche.

    L'expérience grecque de Tsipras-Syriza démontre que cette Europe n'est pas réformable. Seul un chantage sur un défaut total de la dette grecque assorti d'une vraie menace de retour à la drachme assortie d'une dévaluation de combat eût pu, peut-être, faire bouger l'Eurogroupe et la BCE sous tutelle de l'Allemagne et de ses alliés et vassaux. Tsipras n'a pas eu cette audace, il a donc perdu ! Une des leçons à tirer c'est aussi que l'on ne négocie pas la liberté avec ses geôliers surtout quand ils se targuent de vous ignorer, compter pour nul et non avenu, écraser. C'est un rapport du faible au fort que le Général de Gaulle a subi entre 1940 et 1944 et auquel il répliquait par une intransigeance dérangeante mais qui a finit par payer.

    Dorénavant seule l'intransigeance paiera, on ne négocie plus : on envoie un ultimatum avec exigences et calendriers d'exécution précis. On crée des "Fronts de Libération Nationale" de la dictature eurocratique avec tous les pays concernés: Grèce, Italie, Espagne et Portugal.

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  3. "rapport du faible au fort que le Général de Gaulle a subi entre 1940 et 1944 et auquel il répliquait par une intransigeance dérangeante mais qui a finit par payer."

    Ah bon, je croyais que c'étaient les US, l'URSS et la GB qui étaient la cause de la défaite allemande.

    LH

    Vous oubliez de mentionner que le parti souverainiste Anel a voté oui au référendum grec, gênant non ?

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    1. Sans la Résistance et la participation des FFL à la campagne de France et d'Allemagne, la victoire des Alliés sur l'Allemagne n'aurait pas été aussi une victoire française. Elle aurait une défaite de Vichy et rien de plus. Chez les Alliés tout était disponible au moment des débarquements de Normandie et de Provence pour mettre en place une administration d'occupation de la France sous l'égide de l'AMGOT, y compris la monnaie. Il a fallu la fermeté de de Gaulle pour empêcher que la France ne soit traitée comme un pays vaincu et transformée en protectorat.

      Lors de la signature de la capitulation allemande à Berlin, le général de Lattre de Tassigny exige la présence d'un drapeau français et le droit de siéger à égalité aux côtés des Alliés (à Reims, la veille, le délégué français n'a joué qu'un rôle d'observateur). Keitel, du côté allemand s'en étonne et dit « Il ne manquait plus que cela ! ».

      Il n'aurait pas eu de Français en face de lui si la France de 1940-1945 n'avait été que celle de Vichy, confrontée à des mouvements de résistance faibles, dispersés, concurrents, sans aucune autorité fédératrice investie d'une légitimité nationale. Il n'aurait pas eu besoin de s'étonner non plus si de Gaulle n'avait pas imposé la mise en place d'une administration française dans les territoires français libérés par les Alliés à partir de l'été 1944, fait reconnaître en octobre le GPRF par les anglo-saxons, ou conclu, en décembre 1944, un traité d'alliance et d'assistance mutuelle avec l'URSS, qui rétablissait la France comme puissance internationale. C'est grâce à cette volonté têtue d'exister en tant que nation, en tant qu'entité souveraine, que la victoire de 1945 a aussi été une victoire française.

      YPB

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    2. " Keitel, du côté allemand s'en étonne et dit « Il ne manquait plus que cela ! »."

      Ah oui, vraiment, ce si gentil M. Keitel, c'est une référence. Ses opinions font foi. Ce n'est pas comme si c'était, comme tous les nazis d'ailleurs, un ennemi mortel de la France.

      Vous pouvez donc, sans aucun problème, reprendre à votre compte ce qu'il pensait de la France. En cela, vous êtes typique d'un certain état d'esprit de la France contemporaine.

      Sinon, la France n'aurait pas "été traitée en pays ennemi", parce qu'elle ne l'était pas. Vichy n'était pas en guerre contre les anglo-saxons.
      Elle aurait été traitée comme les autres pays d'Europe occidentale, avec AMGOT pour la gestion des territoires libérés par l'autorité militaire (par nécessité des combats) jusqu'à possibilité de transition à une autorité légitime. La différence de la France avec les autres pays étant que de Gaulle n'était pas élu, et Pétain plus consensuel en France (ni dans l'opinion publique US, comme l'a montré la nomination par les Américains de Darlan ; ce qui a conduit à des protestations virulentes de la presse contre le gouvernement américain, en faveur de de Gaulle ; et vraisemblablement à l'assassinat de "l'expédient provisoire").

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    3. @Anonyme de 16:19

      Vous êtes dans le contresens total quant à l'interprétation de mon post. Difficile de faire pire, mais l'erreur est humaine, après tout… Je ne reprends pas du tout à mon compte l'opinion de Keitel à propos de la France, bien au contraire : je prétends que, grâce à la Résistance et à sa fédération autour du général de Gaulle, grâce à l'intransigeance évoquée plus haut de ce dernier, la présence française à Berlin avait du sens. Keitel s'est trompé, mais il aurait pu avoir raison si plusieurs dizaines de milliers de combattants des FFL ne s'étaient sacrifiés pour participer à l'effort allié ou si de Gaulle avait cédé quant à sa prétention à représenter la France.

      Et ce que vous dites sur le fait que de Gaulle n'était pas élu et que cela le rendait suspect aux yeux des Américains n'est que la version américaine officielle présentée pour expliquer les réticences de Roosevelt, lequel se serait en fait parfaitement accommodé d'un apprenti-dictateur pour peu que celui-ci demeurât soumis aux intérêts américains et qu'il ne prétendît pas incarner Jeanne d'Arc. Vous évoquez vous-même Darlan et vous auriez pu vous souvenir de Giraud. Tous deux ont été préférés à un moment par Roosevelt à de Gaulle (Churchill ayant hésité à tomber dedans) sans avoir à aucun moment été plus élus que ce dernier.

      Pour ce qui est du caractère plus « consensuel » de la personne du maréchal Pétain en France, ce qui était vrai en 1940 et le restait encore en 1942 avec quelques réserves, commençait à vaciller sérieusement en 1943 (la mise en place du STO a été une rupture décisive) et ne l'était absolument plus au moment du Débarquement. Pour ce qui est des Alliés, Churchill, malgré la force de ses liens avec Roosevelt, était mal placé au moment du Débarquement pour contester la légitimité de l'homme qu'il avait accueilli en 1940 et soutenu nonobstant des crises régulières. Et puis les Alliés, ce sont aussi les Soviétiques : la reconnaissance par Moscou de la légitimité du général de Gaulle comme seul chef de la France Libre date de septembre 1941.

      YPB

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    4. Passionnant !

      Merci YPB

      Ivan

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    5. Non.

      Pétain "n'était plus" consensuel en France (pas "était plus consensuel" que de Gaulle). Mais une partie de l'opinion le soutenait encore.

      Le général français Sevez a signé l'armistice de Reims.

      Le débarquement allié n'est pas un échec de Vichy, qui était neutre.

      Et, si la France a joué un rôle militaire jusqu'à la fin du conflit, c'est aussi parce qu'elle avait une armée, qui était l'armée d'Afrique en grande partie, préparée par Weygand pour cet objectif, et dirigée par de Lattre, général vichyste.

      Je le précise pour les deux perruches "gaullistes" qui vous couvrent de "Merci YPB" parce qu'elles croient que je défend Pétain. Pauvres perruches...

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    6. J’ai effectivement mal interprété votre formulation relative au maréchal Pétain. Comme vous aviez mal lu ma citation des propos de Keitel. Contrairement à vous, je n’ai pas cru nécessaire pour autant de me lancer dans un procès d’intention sur vos préférences politiques ou dans des remarques méprisantes sur votre psychologie. J'aurais peut-être dû.

      Par ailleurs, les conditions de la cérémonie de Reims méritent d’être connues. On ne peut pas se contenter de dire que Sevez a signé pour la France. À Reims, Sevez a été convoqué par Eisenhower à la dernière minute, avec interdiction d’en référer au général de Gaulle ; il est arrivé in extremis dans la salle où devait être signée la capitulation allemande, juste avant les délégués allemands ; aucun drapeau français n’était présent ; Sevez a signé comme témoin, en-dessous de Smith et de Sousloparov ; la mention « Major General, French Army (Witness) » a été rajoutée plus tard à la machine à écrire sous sa signature, comme le prouve une photographie de l’acte de capitulation prise immédiatement après la cérémonie, où cette mention est absente. Seule la version anglaise du document était censée faire autorité, ce qui était encore plus insultant pour les Russes, traités comme des comparses des anglo-saxons que pour les Français. On ne peut manquer de se dire que la présence de Sevez à Reims devait tout à la courtoisie d’Eisenhower et rien à la volonté du gouvernement américain de faire sentir que les Français étaient concernés par la capitulation, sur leur territoire national, d’un ennemi qui les avait envahis à trois reprises en soixante-dix ans.

      Dire que le Débarquement allié n'est pas un échec de Vichy, qui était neutre, est une contre-vérité historique patente. Ou alors une plaisanterie cocasse. La « neutralité » de Vichy à l'époque n'était qu'un paravent juridique et chacun, dans les deux camps, avait bien compris que la réussite du plan allié marquerait la fin de ce régime. La manière dont la propagande de Vichy a présenté le Débarquement (mise en valeur de la puissance allemande, déploration d’une bataille qui « ensanglante » une fois de plus la terre de France…), est suffisamment éclairante à cet égard, outre le fait que la construction du Mur de l’Atlantique avait certainement été le sommet de la collaboration économique franco-allemande. Même sur les billets de l’AMGOT, où la mention « République française » est absente, ce n’est pas la devise de Vichy qui figure, mais bien celle de la République…

      Vous rappelez que de Lattre a été un temps maréchaliste. Oui, comme bon nombre de ceux qui n'ont pas refusé l'armistice dès 1940. Et alors ? Cela ne signifie pas que l'obsession de Vichy était de préparer la revanche. Vous auriez pu aussi noter qu'il a été le seul général commandant une région militaire sous le régime de Vichy à ne pas avoir été décoré de la Francisque et que le Service d'Ordre Légionnaire de Montpellier l'avait signalé, à tort ou à raison, comme sympathisant gaulliste. De Lattre était hésitant, comme tant d'autres, jusqu'au débarquement allié en Afrique du Nord (on a sur ce point le témoignage de Giraud), mais assurément on faisait mieux à l'époque comme général vichyste. De Lattre, par ailleurs, n’a jamais dirigé l’armée d’Afrique, contrairement à votre affirmation : il a juste commandé en Tunisie, entre septembre 1941 et février 1942, avant d’être rappelé sur demande des Allemands, qu’il avait refusé de ravitailler.

      YPB

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  4. @LH

    Oui, ils sont le naufrage !

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  5. En matière démocratique le bilan de l'UE est une catastrophe.
    -Referendums baffoués...quand ils sont organisés, et quand ils le sont les électeurs sont cocufiés
    -Offre politique réduite à peau de chagrin (pomme libérale ou poire libérale ?)
    -Participation électorale faible voire famélique selon les pays (22% en Pologne )
    Rappelons nous qu'au départ le projet européen devait généraliser le modèle démocratique et social en dehors de ses airs historiques (France , Allemagne , Belgique , GB et co )...les 2 sont détruits par l'UE...
    Qui n'a plus aucun sens ni leitmotiv au final , si ce n'est celui de sa propre expansion.

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  6. Question de philosophie politique : Syriza est devenu un parti social-démocrate à cause de l'UE ou par adhésion au projet européen ?

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  7. Quelques remises en cause du sapirisme :

    "Au total, Monsieur Sapir nous explique que le fédéralisme budgétaire impliquerait que la Grèce reçoivent annuellement (et pendant 10 ans) 14% de son PIB, essentiellement de la part du contribuable allemand. Pour justifier ce fabliau, il faut que la méthodologie emprunte elle même au merveilleux: méconnaissance de la notion de zone monétaire optimale (les transferts budgétaires doivent stabiliser la conjoncture et non pas niveler les structures économiques), simplisme causal (budgets de recherche et développement à l’allemande=productivité allemande?, phobie de l’Euro ( pourquoi démarrer les compteurs en 1999, alors que la productivité industrielle grecque a baissé bien avant l’Euro et non depuis?), conception magique de la politique budgétaire (comment imaginer que les » économies du Sud » deviennent des » économies du Nord » en deux quinquennats sapiriens?)."

    https://ecointerview.wordpress.com/2015/08/16/le-cout-de-leuro-manipulations-et-approximations-22/

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    1. Bof. Rien d'impressionnant. L'auteur de l'article n'aime pas Sapir et les souverainistes, c'est clair. Son argumentaire méconnait simplement le fait que la démonstration de Sapir sur l'impossibilité concrète d'une union de transferts ne lui est pas propre. Il suffit d'aller voir du côté des économistes allemands de tous bords… Mais on peut aussi interroger P. Artus, qui n'est pas un dangereux souverainiste : Patrick Artus, « La solidarité avec les autres pays de la zone euro est-elle incompatible avec la stratégie fondamentale de l’Allemagne : rester compétitive au niveau mondial ? La réponse est oui », NATIXIS, Flash-Économie, n°508, 17 juillet 2012. Je signale que les évaluations d'Artus sur les transferts nécessaires de l'Allemagne vers l'Europe du Sud sont encore plus pessimistes que celles de Sapir.

      Quant à postuler que des transferts stabilisant la conjoncture suffiraient à transformer l'eurozone en zone monétaire optimale (« Enclencher une participation de tous les pays à la stabilisation des dettes publiques » grâce à budget fédéral de 200 miliards d'euros, comme le préconise l'auteur), c'est juste dérisoire, au vu de l'importance des dynamiques de divergences qui caractérisent cet espace. Voir sur ce point les travaux fondamentaux de J. Bibow : “Global Imbalances, Bretton Woods II and Euroland’s Role in All This” in J. Bibow and A. Terzi (eds), Euroland and the World Economy : Global Player or Global Drag ?, 2007 ; ou The Euro Debt Crisis and Germany’s Euro Trilemma, Working Paper No. 721, Levy Economics Institute, 2012 ; ou encore Germany and the Euroland Crisis : The Making of a Vulnerable Haven, Working paper n° 767, Levy Economics Institute, 2013. S'il avait lu Bibow, ou Heiner Flassbeck, l'auteur de l'article n'aurait pas pu laisser croire que le défi principal de la zone euro se limitait à une stabilisation à peu de frais de la crise des dettes souveraines (c'est clairement ce qu'il laisse entendre en réponse à un commentaire qui critiquait son optimisme relatif à la constitution d'une zone monétaire optimale).

      C'est sûr qu'une fois caricaturée et critiquée sur la base d'un savoir économique très incomplet (notre économiste qui donne des leçons de méthodologie à Sapir découvre le néochartalisme et s'imagine qu'il aurait pu influencer Keynes, preuve qu'il ignore tout de l'un comme de l'autre…), la pensée économique de Sapir a effectivement un air caricatural… Cela a tout de l'exercice de style du récent diplômé en économie, tout imbu d'un savoir encore frais, qui s'essaie les griffes sur un vieux maître.

      Pour ce qui est du niveau de réflexion politique de l'auteur anonyme : « la ritournelle souverainiste, dont on voit le vrai visage en Russie ». Ben voyons… Avec ce type de raisonnement, Poutine étant nationaliste, alors que de Gaulle l'était aussi, De Gaulle = Poutine (je laisse Hitler de côté pour que personne ne puisse parler de point Godwin, mais ça marche aussi avec le caporal bohémien). CQFD. Pas étonnant de la part de quelqu'un qui considère l'électorat conservateur et nationaliste comme « stupide et borné ». Il faudra qu'il nous explique comment un tel mépris des électeurs est compatible avec la démocratie. De fait, il ne l'est pas. La pensée politique de l'auteur est effectivement au niveau de sa réflexion économique. On peut comprendre que la lecture du concept de souveraineté chez Jean Bodin par Sapir lui passe un peu au-dessus de la tête.

      YPB

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    2. Les approximations de Jacques Sapir sur les transferts intra-européens sont une amusante vue de l'esprit. Nulle part dans la théorie des zones monétaires optimales il est écrit que les pays qui en font partie doivent être similaires et j'ai bien peur que son plan décennal à raison de 14% du PIB par an attribués à la Grèce ne convainquent que les nationalistes pressés. Une zone monétaire optimale doit permettre de stabiliser l'emploi et l'inflation. Il est fort possible d'aménager des stabilisateurs automatiques à l'échelle fédérale. Bien sur, l'idée que des impôts puissent être reversés à des étrangers défrise les souverainistes. Il faudra leur expliquer lentement, le moment venu.
      Le document d'Artus est totalement différent de celui de Sapir. Artus calcule les transferts de profit nécessaires pour rétablir la profitabilité des firmes du Sud. L'intéret du papier d'Artus est très limité car il se borne à comparer les écarts de profitabilité entre l'Allemagne et les pays du Sud. Or il est plus pertinent d'estimer cet écart vis-à-vis de tous les partenaires européens. Artus est toutefois pertinent en cela qu'il parle de profit, tandis que les souverainistes éthérés ne causent que de productivité et de coût salarial unitaire, sans jamais rapprocher les deux, de peur d'évoquer le rendement du capital, qui est pourtant l'horizon indépassable de ces révoltés du dimanche. Quand je dis que la ritournelle souverainiste se donne à voir en Russie, j'aurais ou ajouter également en Hongrie ou en Angleterre, où le revenu disponible par habitant stagne depuis 10 ans. Le souverainisme est une sorte d'idéologie malthusienne, un délire étatiste qui n'est rien d'autre que l'envers commode de l'ordolibéralisme franco-allemand, un keynésianisme de pacotille. Plus précisément, le souverainisme et l'obsession de l'Euro relèvent d'une manie française qui consiste à confondre fins et moyens et à situer l'origine de nos maux à l'extérieur de nous mêmes. Je frémis à l'idée que ces idées d'un autre âge s'appliquent à la famille, à l'école ou aux relations professionnelles. Nous savons très bien à quels types de français et d'étrangers vous souhaitez, in fine, faire baisser la nuque, sous couvert de "souveraineté", c'est-à-dire de soumission aveugle à l'Etat.

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    3. @ecointerview

      1) "la ritournelle souverainiste se donne à voir en Russie, j'aurais ou ajouter également en Hongrie ou en Angleterre"

      Vous prenez pour seul critère de comparaison le "revenu disponible par habitant" depuis "10 ans" ?

      Et vous choisissez vos exemples "souverainistes" et ordolibéraux comment ?
      Par exemple, Suisse, Norvège, Chine, USA, vous classez ça où ?


      2) "Le souverainisme est une sorte d'idéologie malthusienne, un délire étatiste qui n'est rien d'autre que l'envers commode de l'ordolibéralisme franco-allemand, un keynésianisme de pacotille."

      D'après wikipédia,

      "Le souverainisme est une doctrine politique soutenant la préservation de la souveraineté nationale d'un pays par rapport à des instances supranationales."

      "Le malthusianisme est une politique prônant la restriction démographique" (https://fr.wikipedia.org/wiki/Malthusianisme).

      "L'étatisme est une doctrine, politique ou culturelle, selon laquelle l'État doit être le centre et la principale structure qui dirige, administre et contrôle toute ou partie de l'activité sociale ou économique."


      Je sais pas trop comment vous êtes arrivé à cette définition dont je ne comprends pas le sens mais à mon avis vous devriez retravailler le sujet. (en veillant à ne pas définir cette idée à partir des positions de certains souverainistes sur des sujets sans rapport)


      3) "Je frémis à l'idée que ces idées d'un autre âge s'appliquent à la famille, à l'école ou aux relations professionnelles."

      Je pense qu'on est d'accord pour prendre l'Allemagne en tant que meilleur exemple de l'application d'une politique ordolibérale ?

      Vous jugez donc satisfaisante l'application de cette doctrine à "la famille" au vu de la situation démographique de ce pays ?

      Si oui, c'est incohérent avec l'opposition que vous faites avec l'"idéologie malthusienne".
      Si non, pouvez-vous expliquer ce que cette idée appliquée à "la famille" a de bon ?


      ps : "Une zone monétaire optimale doit permettre de stabiliser l'emploi et l'inflation."
      Ce sera possible d'attendre un niveau de chômage inférieur et un niveau d'inflation supérieur (s'il n'y a pas de défaut sur la dette) dans beaucoup de pays avant d'être une "zone monétaire optimale" ?

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  8. Bonjour Laurent,
    Envisagez-vous un billet (ou deux) sur la "polémique Sapir" suite à son interview au Figaro et la réponse de Lordon ?


    Olivier

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  9. @ Moi

    Théoriquement, ce serait logique, mais en pratique, j’ai peur que non. Certains chroniqueurs européistes en profitent lourdement dans leur argumentation pour décrédibiliser la sortie de l’euro

    @ Anonymes

    Bien sûr que ce n’est pas nouveau. J’avais raté le fait qu’ANEL avait voté « oui » au référendum. Vous avez une source. Sur le Général, cela a payé pour la position de la France.

    Sapir a conduit un travail bien plus sérieux que les prévisions délirantes de la troïka sur les différents plans Grecs, tous infirmés par la réalité, ou tout ce que promettaient les défenseurs de l’euro ou du TCE…

    @ YPB

    Un grand merci

    @ Olivier

    Merci pour l’info sur la réponse de Lordon. A l’évidence, il faut que je le fasse

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    1. Sur un prétendu vote oui au référendum du 5 juillet par l’ANEL, je suis plus que dubitatif : l’ANEL, comme membre de la coalition gouvernementale, a appelé à voter non aux propositions de la Troïka, aux côtés de Syriza. Seuls trois députés sur treize de l’ANEL ont pris position pour le oui, l’un d’eux ayant même été exclu du groupe parlementaire pour ce motif (http://www.lemonde.fr/economie/article/2015/07/02/grece-varoufakis-entend-demissionner-en-cas-d-echec-du-non-au-referendum_4667606_3234.html). Un sondage réalisé les 29 et 30 juin, indiquait que 60 % des sympathisants de ce parti comptaient effectivement voter non, 31 % oui, tandis que 9 % ne savaient pas encore quel serait leur choix (https://fr.wikipedia.org/wiki/Référendum_grec_de_2015#Partis_grecs).

      YPB

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    2. @ LH, il ne faut pas surestimer l'influence auprès de l'opinion des "éditorialistes européistes" (pléonasme ?), si on les avait écoutés, le "oui" au TCE aurait gagné.

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  10. @ YPB

    Merci de rétablir la vérité sur ANEL. Cela me paraissait surprenant.

    @ Anonyme

    C’est vous qui avez parlé de référendum dans un premier temps. Et les insultes, je supprime, même quand elle vise quelqu’un d’autre.

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  11. ANEL a voté pour le mémorandum, racontez pas d'histoires :

    "Le vote a ainsi été donc marqué par la résistance de très nombreux députés de la Plateforme de Gauche et pas uniquement. Alexis Tsipras doit son approbation aux quelque 120 voix apportées par le bloc mémorandiste historique bien connu (Nouvelle Démocratie, PASOK, Potami) et par son allié, le parti de droite... faussement souverainiste ANEL."

    http://www.greekcrisis.fr/2015/08/Fr0457.html

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    1. Laurent a répondu à la formule suivante « Vous oubliez de mentionner que le parti souverainiste Anel a voté oui au référendum grec, gênant non ? » (post du 28/08 10:30). Ne reprochez pas aux autres de raconter des histoires alors que vous confondez mémorandum et référendum.

      YPB

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