jeudi 10 avril 2014

Jean-Pierre Jouyet, de Jospin à Hollande, en passant par Sarkozy…


La nouvelle peut paraître anecdotique, mais François Hollande a décidé de changer de secrétaire général à l’Elysée. Il vient de nommer Jean-Pierre Jouyet, ancien secrétaire d’Etat sous Nicolas Sarkozy. Impossible de mieux résumer la convergence du PS et de l’UMP, mais aussi leur faillite.


Bonnet blanc et blanc bonnet

Cet énarque, camarade de promotion de François Hollande, dont il est également un ami, illustre une bonne partie de ce qui ne va pas dans notre pays. Nicolas Sarkozy est élu en 2007 ? Il devient secrétaire d’Etat aux affaires européennes, un mercenaire de cette pseudo ouverture destinée à couper les jarrets de Bayrou. François Hollande élimine son ancien patron en 2012 ? Il revient deux ans après au poste stratégique de Secrétaire Général de l’Elysée. Le président de la République ne pouvait pas nous donner meilleur symbole d’une forme de continuité entre son action et celle de son prédécesseur.


Il est effarant que le président de la République ne se rende pas compte de l’image désastreuse que pourrait donner sa nomination, à moins que sa stratégie pour 2017 ne consiste justement à occuper le centre et pousser l’UMP trop à droite pour pouvoir la battre. Car même si Manuel Valls a essayé de donner le change lors de son discours à l’Assemblée, tant sur la forme que sur le fond (avec la baisse des charges employés pour les bas salaires), la politique économique défendue par l’équipe au pouvoir (sans même parler de sa politique européenne), ressemble comme deux gouttes d’eau à celle menée pendant cinq ans sous Nicolas Sarkozy : un cocktail peu inspiré d’austérité budgétaire et de compétitivité.

Nouvel avatar de la malédiction delorienne

Par-delà la relativisation des différences entre le PS et l’UMP, il est tout de même effarant de persister à ce point dans l’erreur. Cette politique ne marche pas, elle a fait replonger l’ensemble de l’UE dans la récession en 2013, mais François Hollande la poursuit ! Au moins, ses discours et ses choix de personnes des derniers mois ont le mérite d’afficher la couleur, même si une partie de sa majorité refusera d’admettre l’évidence. Ce faisant, le choix de Jean-Pierre Jouyet est assez logique, même s’il représente l’exact opposé de ce qu’il faudrait faire pour sortir notre pays de la crise qu’il traverse.


 Mais comment le président peut-il promouvoir ce delorien, quelques jours à peine après les déclarations de Pascal Lamy, autre ancien delorien, sur le SMIC ? Car Jouyet partage avec Hollande un jospino-delorisme de bien mauvais augure… N’expliquera-t-il pas dans quelques années lui aussi qu’avec la mondialisation, il faudrait baisser le salaire minimum ? Difficile de ne pas voir chez lui un autre produit typique de cette technocratie qui n’a de socialiste que le nom et qui défend des politiques d’inspiration néolibérale dont même les libéraux modérés et humanistes dénoncent le dogmatisme, le caractère instable et profondément antisocial. Ce n’est pas lui qui va contester la marche de l’Europe…

En un sens, merci François Hollande pour cette nomination. Elle montre clairement qu’il n’y a pas le moindre espoir à placer dans la politique qui va être menée dans les trois prochaines années. Elle montre également qu’il faudra se débarrasser du PS, mais aussi de l’UMP pour changer de cap.

12 commentaires:

  1. Il ne s'agit pas d'une faillite du PS et de l'UMP mais d'un virage anti-démocratique. Il n'est pas impossible que ce soit la voie que nous prenons définitivement.
    jard

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    1. Rien n'est jamais définitif, tout du moins jusqu'à ce que l'Astre qui nous éclaire ne s'éteigne ou jusqu'à ce qu'une catastrophe de grande ampleur ne mette fin à l'existence de l'espèce humaine.

      Demos

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  2. @Laurent Pinsolle,
    à l'image de Jacques Attali et d'Alain Minc, Jean-Pierre Jouyet incarne ce que JF Kahn avait baptisé il y a vingt ans: la pensée unique, aussi connu sous le vocable de cercle de la raison.
    Si dans l'absolu un haut-fonctionnaire doit être au service de la République, et non d'un président de la République intuitu personae, dans le cas de Jouyet, c'est plus problématique: il a pantouflé chez Barclays et a travaillé à l'AMF. C'est donc en tant que personnage politique qu'il faut le considérer et à cet égard, il laisse songeur: il y a quatre ans, il servait le café au président Sarkozy comme sous-ministre, et maintenant, il est le secrétaire général de l'Elysée, l'un des postes les plus influents sous la Vè République. Effectivement, Jouyet prouve pour ce qui en doutaient encore que nous sommes bien sous le règne d'un parti unique, l'UE, et d'une idéologie totalitaire et foncièrement anti-démocratique, l'idéologie européenne.


    CVT

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  3. Le PS tient à l'UE car c'est la planque, le pôle emploi, pour ses cancres :

    Mosco commissaire, H. Désir secrétaire d'Etat aux Affaires européennes...

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    1. Ca doit être une des raisons de l'attachement à l'U.E des classes politiques dans l'Europe. Nigel Farage avait parlé de l'adhesion de la Croatie et de l'avalanche d'avantages et de postes offertes aux politiciens locaux avant même l'adhesion. Difficile pour eux de mordre la main qui les nourrit. L’élargissement de l'UE se ferait en partie par corruption.

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  4. @ Jard

    Pas d’accord. Il n’est pas anti-démocratique de choisir Jouyet. Il ne faut exagérer non plus. Ce n’est quand même pas la première fois que ce genre de chose arrive.

    @ CVT

    D’accord sur la pensée unique. Bons rappels sur le passé de Jouyet, qui n’est pas sans poser des problèmes.

    @ Anonyme

    http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2014/04/10/31001-20140410ARTFIG00114-desir-moscovici-mam-morano-l-europe-voie-de-garage-pour-loosers-politiques.php

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  5. Le jury du prix du PPRF* 2014 vient de faire paraître le communiqué
    suivant : "les membres du jury, dont l'impartialité est aussi assurée que celle du conseil constitutionnel, vous informent que Monsieur François Hollande est à ce jour, et de loin, le pire des Présidents de la République française. Le Président cumule des résultats catastrophiques, une absence de vision reconnue alliée à une impopularité jamais vue".
    J'ajoute que le fait de s'affubler de l'étiquette socialiste, ce qui est une insulte à la mémoire de Jaurès, n'exempte pas Hollozy et ses amis
    "sociaux-libéraux" de leur seule responsabilité dans la casse sociale actuelle. Ce ne sont que des salauds cyniques.

    *Pire Président de la République française

    Demos

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  6. Nous venons d'apprendre, par une indiscrétion, que l'Académie française s'inquiétait de l'usage fait par le pouvoir politique social libéral du mot "resserré" dans l'expression "gouvernement resserré". La noble Académie, qui veut éviter toute dérive littéraire, à défaut de pouvoir limiter les dérives politiques, pose la question de savoir ce que serait un gouvernement élargi si un gouvernement comprenant trente personnes (seize ministres et quatorze secrétaires d'Etat ndlr) est dit resserré. L'Elysée n'a fait aucune déclaration sur le sujet et notre Président est resté silencieux. Comme à son habitude. Il serait, nous dit-on, en train de peaufiner son programme pour la présidentielle de 2017.

    Demos

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  7. Tout à fait d'accord avec cette analyse : il n'y a rien à attendre du PS; ça tout le monde le sait mais aussi de l'UMP qui jette aux orties ce qu'il restait de gaullisme au sein de ce parti en présentant comme tête de liste aux européennes, l'euro-fédéraliste Alain Lamassoure. Mais pour ce débarrasser du PS , sans retomber dans l'impasse UMP, il faut que DLR passe un compromis historique avec le FN et réciproquement

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  8. @ Rinocero

    Le FN est le moyen pour le PS et l'UMP de se maintenir, comme nous le voyons bien depuis 30 ans. Un parti suffisamment différent pour recueillir les voix de ceux qui veulent le changement mais suffisamment repoussant pour ne jamais pouvoir recueillir une majorité des voix. Ce n'est pas pour rien que le PS le pousse...

    Le FN est le verrou qui maintient le système UMP-PS.

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    1. @Laurent Pinsolle,
      je serais presque d'accord avec vous sur le verrouillage de la vie politique opéré par le FN, à ceci près que c'est plutôt le PS qui est avantagé par l'existence du FN: rappelez-vous, c'est sa créature! Mitterrand l'avait créé à la fois pour diviser la droite, mais surtout, pour éliminer le PCF, qui restait encore important dans les couches populaires il y a trente ans. J'en parle d'autant mieux que j'ai grandi dans la ceinture rouge de la banlieue parisienne...
      Je suis un homme de gauche (pas celle du PS, NPA ou FG mais jacobine, soit Jaurès-Chevènement, avec un certain respect pour l'oeuvre du PCF), et je persiste à dire que les Français ont toujours un tropisme de droite!
      Si on considère les régimes depuis le début du XXè siècle, la droite a majoritairement gouverné le pays.Avant le FN, le PS n'était qu'épisodiquement au pouvoir: par exemple, sous la Vè République, il a attendu 23 ans dans l'opposition. Depuis l'existence du FN, le PS est bien plus fréquemment au pouvoir: une fois toutes les dix ans en moyenne, ce qui est bien mieux!
      Alors évidemment, la cuisine politicienne mitterrando-attalienne (c'était bien lui, le cerveau en matière tactique: le poison FN et l'anti-poison SOS Racisme) n'est pas une science exacte: elle a déjà pété à la figure des socialistes le 21 avril 2002, mais elle a permis l'élection de Hollande en 2012, et si on ne prend garde, sa réélection en 2017!

      CVT

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    2. Merci pour ces intéressants rappels.

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