dimanche 14 janvier 2018

Liberté d’importuner et capacité à débattre sereinement



Importuner ou draguer n’est pas harceler

Je pense démontrer depuis plus de dix ans un souci de la condition féminine et n’avoir jamais donner prise à la moindre critique venue de féministes. J’essaie de ne me prononcer sur un sujet qu’après y avoir assez réfléchi et je ne me soucie que du fond, sans me soucier des personnes qui défendent les idées auxquels je crois, comme je l’ai montré en défendant par exemple le mariage pour tous. Si je ne me définis pas comme un libéral, je ne me pense pas non plus anti-libéral, l’époque tendant trop souvent à mettre en place une liberté excessive pour les plus forts et de plus en plus restreinte pour les autres. Si en 2013, je m’étais opposé aux défenseurs de la liberté d’aller aux putes, cette fois-ci, je rejoins la prise de position d’Elisabeth Lévy, une des principales signatrices de la fameuse tribune.


Bref, comment oser évoquer une « apologie du viol », ou même des agressions, ou affirmer qu’elles visent à « faire taire les femmes qui dénoncent les harceleurs » ? Cela n’a aucun sens sachant que cette tribune juge légitime et souhaitable la prise de conscience des violences sexuelles exercées sur les femmes. Comme bien vu par Marianne, sans épargner les dérapages regrettables de certaines signataires, cette tribune pose des questions parfaitement légitimes, du caractère expéditif de la justice médiatique moderne, ou des excès poussés par certains, qui pourraient aboutir à refuser la moindre drague. Ce faisant, elles dénoncent un excès de puritanisme qui pourrait dessiner une frontière excessivement sévère entre harcèlement et une simple « drague maladroite qui n’est pas une agression sexuelle ».

Après tout, ce n’est pas parce que l’on se réjouit de cette libération de la parole et que l’on souhaite tout faire pour mettre fin à ces agressions que l’on ne peut pas s’interroger sur la frontière à mettre et s’inquiéter que l’on mette une frontière trop restrictive. Pourquoi un tel débat ne serait pas légitime et pourquoi faudrait-il l’accueillir d’une telle manière, en accusant les signataires de la tribune de propos qu’elles n’ont absolument pas tenus ? Encore une fois, le débat se crispe excessivement, rendant impossible de voir les nuances de gris, comme si la réalité devait forcément être noir ou blanc. Heureusement, certaines réactions à l’étranger sont beaucoup plus apaisées et positives pour cette tribune.


Malheureusement, le débat moderne se limite trop souvent à des caricatures et des clashs bien superficiels, comme le montre la réaction de Causette. Quelques jours après, je persiste à penser que cette tribune est parfaitement légitime, que son propos est beaucoup plus équilibré que ses détracteurs ne le disent et pose des questions extrêmement actuelles sur l’évolution de nos sociétés.

8 commentaires:

  1. Il est important en effet de débattre sereinement, et d'être vigilant devant le risque de dérive et d'excès de ce tous sites de dénonciation.

    Mais avec leur tribune sur la liberté d'importunité, elles s'y sont pris comme des manches. Le texte est très mal rédigé, le retour de flamme était évident. Franchement, quelle idée d'avoir laissé pensé qu'une main sur un genou c'était pas si grave que ça ! Alors que c'est précisément pour exprimer le raz-le-bol devant ce "c'est pas si grave que ça" que toutes ces voix se sont levées ...

    L'intention des signataires de la Tribune était surement bonne, mais avec ce très mauvais texte elles se sont tirées une balle dans le pied.

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    1. ... et d'ailleurs nous venons d'apprendre que Catherine Deneuve reconnait que ce texte est imparfait. Elle vient de publier une très pertinente clarification :

      http://mobile.lemonde.fr/societe/article/2018/01/14/catherine-deneuve-presente-ses-excuses-aux-victimes-d-actes-odieux-qui-ont-pu-se-sentir-agressees-par-la-tribune_5241610_3224.html

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  2. La tribune en soi ne me choque pas. Après tout si cela me choque, je peux regarder ailleurs. Non ce qui fait polémique à mon sens dans cette tribune c'est le manque de distinction très claire entre le droit de draguer lourdement et le fait de l'accepter et de savoir s'en défendre et la phase harcèlement. La frontière entre les 2 est certes ténue mais les signataires n'ont pas marqué assez leur désapprobation sur le calvaire que peuvent vivre un certain nombre de femmes quotidiennement. Biensûr dès le début de leur pétition elles affirment nettement et clairement que le viol est un crime. Mais après c'est beaucoup plus dilué, peu exprimé. Or, au quotidien les femmes peuvent être victimes de viol (hélas...et ce qui est INACCEPTABLE c'est que seulement 10% de plaintes car les femmes ont du mal à exprimer leurs souffrances) mais pas que.Bien souvent elles sont importunées voire harcelées subissant des attouchements etc...Voler un baiser à une femme amoureuse de l'homme qui lui vole le baiser c'est romantique. Coincer une femme contre un mur ou dans un ascenseur et essayer de lui fourrer sa langue dans la bouche pour soit-disant lui donner un french kiss, c'est une agression. Un mec qui se frotte dans le métro (au point de laisser des traces de son frottement dans certains cas...c'est arrivé à 3 filles de mon entourage dont une dame de 50 ans) c'est une agression. On pourrait multiplier les exemples. Tout ça pour dire que la tribune parue dans le monde ne fait pas assez le distinguo. Et donc une idée de banalisation se dégage du texte ou du moins peut être compris ainsi.
    Bonne journée
    Sylvie

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    1. Merci Sylvie pour avoir relevé cette subtilité. je pense que vous avez raison dans votre approche de la polémique sur cette tribune. Ce n'est pas de revendiquer une liberté de se faire draguer, maladroitement ou même lourdement, qui est à remettre en cause mais bien le fait que les signataires n'ont pas assez marqué la frontière entre l'approbation d'une femme de se faire lourdement draguer voire voler un baiser et celles qui sont harcelées. Et le harcèlement, l'atteinte à la vie privée, la menace ou encore l'insulte arrivent plus vite qu'on ne le pense dans ces cas-là. Je n'ai pas vécu directement mais je l'ai vu à l'oeuvre il y a plusieurs années lorsque je bossais en contrat étudiant dans une grande enseigne. Des remarques sexistes quotidiennes voire de l'insulte, des propositions grasses pour faire rire la galerie régulièrement etc...Il y a des femmes qui savent répondre à cela et d'autres qui ne savent pas ou ne veulent pas et finissent par se retrouvées piégées dans la perversion du harceleur.
      De façon globale, je ne parle pas du viol qui pour moi relève vraiment du crime pénal par excellence, mais toues ces attitudes poussives, limites agressions, ces méthodes de harcèlement posent la question de l'éducation des garçons. Alors certes l'éducation ou l'absence d'éducation ne font pas tout mais elles expliquent pas mal de choses.
      Bonne soirée
      l'Anonyme du jour
      PS: cher Laurent meilleurs voeux pour 2018, ainsi qu'à tous les habitués ou non de votre blog. Me voilà reparti pour un an de lecture de vos billets ! (Bon...je ne réagis pas tout le temps car certains sujets m'échappent ou alors je n'ai pas le temps).

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  3. bonjour de mon ile déserte , Bonne année à L H et ses blogueurs rémi de Rouen.

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  4. Lundi 15 janvier 2018 :

    Les riches, grands gagnants des premières mesures de Macron, selon l’OFCE.

    D’après l’Observatoire français des conjonctures économiques, « les 5 % de ménages les plus aisés capteraient 42 % des gains » liés aux réformes d'Emmanuel Macron.

    Jeudi 28 septembre 2017 :

    Le Secours populaire face à « un raz-de-marée de la misère ».

    « Un raz-de-marée de la misère » : le président du Secours populaire particulièrement touché par les retraités qui demandent à manger.

    En marge de la manifestation des retraités contre la hausse de la CSG, Julien Lauprêtre, président du Secours populaire, a témoigné jeudi 28 septembre sur franceinfo du « drame » des personnes âgées touchées par la pauvreté. Celui qui le touche « le plus ».

    « Le nombre de personnes âgées qui viennent demander de l’aide au Secours populaire français est en augmentation croissante, a-t-il détaillé. L’année dernière, nous avons aidé trois millions de personnes en France et il y avait parmi elles de nombreux retraités. C’est un raz-de-marée de la misère. »

    « C’est le drame qui me touche le plus, voir des retraités qui ont travaillé toute leur vie et qui viennent demander à manger au Secours populaire, c’est vraiment douloureux. »

    http://www.francetvinfo.fr/economie/retraite/un-raz-de-maree-de-la-misere-le-president-du-secours-populaire-particulierement-touche-par-les-retraites-qui-demandent-a-manger_2393236.html

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  5. @ Anonyme

    En effet, il y avait des points contestables

    @ Sylvie

    Je suis d’accord. Il ne faut pas prendre à la légère le harcèlement. Je ne pense pas que les signatrices de la tribune le font, mais du fait d’un débat penchant dans un seul sens, elles ont sans doute voulu rééquilibrer les choses, quitte à porter le flanc à cette critique, même si elle refuse le harcèlement et n’exprimant peut-être pas tout à fait assez l’importance de la chose

    @ L’anonyme du jour

    Merci pour votre commentaire et tous mes vœux à vous aussi !

    @ Rémi

    Bonne année également

    @ BA

    Merci pour cette mise en perspective

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  6. "Si en 2013, je m’étais opposé aux défenseurs de la liberté d’aller aux putes, cette fois-ci, je rejoins la prise de position d’Elisabeth Lévy, une des principales signatrices de la fameuse tribune."


    Pour mémoire, ce qu'Elisabeth Lévy écrivait dans une tribune parue dans Le Monde en novembre 2013 :

    « Les « salauds » sont des violeurs, des agresseurs, des mâles dominants qui imposent à coups de force et de fric leurs dégoûtants désirs – des hommes, quoi. »

    Autrement dit, les mâles dominants qui imposent à coups de force et de fric leurs dégoûtants désirs sont banalement ... des hommes.

    Telle est l'idée malsaine que Mademoiselle Lévy se fait des hommes. Harvey Weinstein semble être son modèle d'homme. Peut-être le genre d'homme qu'elle fréquente...

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